samedi 1 mars 2014

situation d'Eric Cokini, notre compatriote en danger d'extradition de Moscou à Tachkent - présentation par Pierre de Gruson pour Médiapart


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Samedi 1er Mars 2014

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Le pays des droits de l'homme...

|  Par pierredegruson
Le contexte
Il s'agit d'un homme français d'une cinquantaine d'années, marié et père de trois enfants, un homme d'un rare dynamisme, d'un enthousiasme contagieux, un homme capable de déplacer des montagnes pour les gens qu'il aime, pour son pays natal, pour son pays d'adoption et pour bien d'autres choses.
Au début des années 1990, il part explorer l’Asie Centrale où il aide les PME françaises à s’implanter. Il y réussi si bien que certains le qualifie de  « VRP du made in France », « d’exportateurs aux pieds nus » ou encore de « l’homme des PME françaises ». Il finit par faire son trou en Ouzbékistan, y rencontre la femme de sa vie, y développe un réseau de parfumeries et participe à la création de l’école française à Tachkent. Il devient la référence pour les PME françaises qui veulent s'implanter dans ce pays. Le 3 Décembre 2009, la France nomme celui qui a si bien servi ses intérêts pendant plus de 15 ans Chevalier dans l'Ordre National du Mérite (« grâce à votre parfaite connaissance de la situation économique et financière de l'Ouzbékistan, vous aidez utilement les entreprises françaises désireuses de s'implanter dans ce pays»).
En 2011,  Eric Cokini ressent un durcissement de la situation politique et économique en Ouzbékistan.  Son fils ainé étant traité pour une leucémie en France, ne pouvant plus supporter les incessants voyages entre Nice et Tachkent, il décide de retourner vivre et travailler en France.
Le 14 Janvier dernier, il se rend à Moscou sur l’invitation de Vladimir Mau, économiste russe de renom et est arrêté dès son arrivée à l’aéroport de Moscou par les autorités russes sur demande de l’Ouzbékistan pour de prétendus « crimes économiques ». Comme l’explique le nouvel obs (voir ici) et intelligence online (ici), Eric Cokini est la victime collatérale d’un jeu de pouvoir ouzbèk.
Les droits de l’homme
Les autorités russes doivent se prononcer sur l’extradition d’Eric Cokini vers l’Ouzbékistan avant le 14 Juillet 2014. Comme le souligne Amnesty International, l’Ouzbékistan est un pays où les droits de l’homme ne sont pas respectés. La torture y est une pratique courante.
Sollicité à plusieurs reprises par la famille d’Eric Cokini et son comité de soutien, le gouvernement français n'agit pas.
Le 14 février dernier, le quai d’Orsay, par la voix de son porte-parole, Romain Nadal, fait savoir que la France s’assurera du respect des droits d’Eric Cokini mais ne s’ingérera pas dans les affaires d’un autre pays. On est en droit de se poser la question de savoir comment la France pourra s’assurer du respect des droits de son concitoyen si celui-ci est finalement extradé vers l’Ouzbékistan.
Mais, est-il exact que la France ne s’ingère pas dans les affaires des autres pays ?
On peut prendre l’exemple d’Abdellatif Hammouchi, chef de la DGST marocaine, suspecté d'avoir utilisé la torture. De passage à Paris le Jeudi 20 Février 2014, M. Hammouchi se voit remettre une convocation á une audition par un juge français à la suite de la plainte d'une ONG. Le Maroc n'apprécie pas et réagit vivement. Du coup, Francois Hollande téléphone à Mohamed VI « pour dissiper tout malentendu et réaffirmer l’amitié très proche entre le Maroc et la France ».  Le quai d'Orsay, quant à lui, publie un communiqué exigeant que la lumière soit faite sur cette affaire. Plus de détails sur le site de Mediapart ici.
On voit donc que, dans ce cas, le quai d’Orsay accepte de faire pression sur la justice française pour prendre la défense d’un homme qui aurait porté atteinte aux droits de l’homme et le fait au nom de l’amitié franco-marocaine. De plus, la France accepte qu’un pays étranger se mêle de ses propres affaires judicaires.
On peut citer d’autres affaires internationales où la France est intervenue :
  • Le cas de Michel Atangana, Français d’origine Camerounaise : En mai 2013, François Hollande déclare que sa durée de détention est « inadmissible » ce qui aboutit à sa récente libération.
  • France-Diplomatie.com: Engagement de la France comme Défenseur des Droits de l’Homme pour la libération de Mme Tadjibaeva en Juin 2008.
  • Libération de Florence Cassez au Mexique
  • Cécilia Sarkozy  et les infirmières bulgares en Lybie
Pourquoi le quai d’Orsay n'intervient-il pas par la voie diplomatique dans le cas d’Éric Cokini qui risque de se voir privé de ses droits les plus élémentaires ?  De même, pourquoi le Président de la République n'intervient-il pas comme il l’a déjà fait tant de fois dans le passé ? Pourquoi la France laisserait-elle Eric Cokini être extradé en Ouzbékistan sachant parfaitement ce qui l’y attend sans autre but de satisfaire les exigences de ceux qui luttent pour la prise du pouvoir en ce moment même ? Est-ce au nom du respect d’une vision procédurière et bureaucratique des relations diplomatiques ? Son affaire n’est-elle pas suffisamment médiatique ? N’a-t’il pas d’appuis suffisamment puissants ? L’Ouzbékistan est-elle un partenaire que la France ne peut se permettre de froisser ?
Le pays des droits de l’homme va-t-il laisser notre compatriote être torturé ? Le pays des droits de l’homme va-t-il laisser son fidèle serviteur être assassiné ? Même s’il était coupable de « crimes économiques », ce qui n’est pas le cas, la France se doit de faire respecter les droits de l’homme.
«Toutes les explications du monde ne justifieront pas que l’on ait pu livrer aux chiens l’honneur d’un homme et finalement sa vie, au prix d’un double manquement de ses accusateurs aux lois fondamentales de notre République, celles qui protègent la dignité et la liberté de chacun d’entre nous». (Francois Mitterrand, 1993)
Sources


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