jeudi 30 septembre 2010

Inquiétude & Certitudes - jeudi 30 septembre 2010


Jeudi 30 Septembre 2010

Notre fille taille hier soir ses crayons de couleurs, sciure de la taille, elle en fait une œuvre. Prier en toutes circonstances ? sans doute mais alors qu’est-ce que prier ? tandis que prier par toutes circonstances, répondre ainsi aux offres de Dieu, du paysage mental (tristesse ou joie, sans cause immédiatement perceptibles) à tant de faits, de rencontres, de lectures, alors le travail est circonstance, l’endormissement aussi, et ainsi de suite. Analogie qui me poursuit entre les dires de peintres, d’artistes, de créateurs sur ce qu’ils « font », ou plutôt, car leur œuvre leur échappe d’un bout à l’autre de leur travail, sur la manière dont ils s’y prennent ou sont pris. Notre prière est création, en elle-même. [1]Avec mon corps, je me tiendrai debout, et de mes yeux de chair, je verrai Dieu. Moi-même, je le verrai, et quand mes yeux le regarderont, il ne se détournera pas. La résurrection, paroxysme du relationnel. Urgence de l’annonce. Le règne de Dieu est proche, message que doivent propager les disciples archi-novices et peu instruits en « dogme » ; la suite va montrer autant leur enthousiasme en retour de mission que leur incompréhension totale du destin de leur maître. Destin qui est révélation. Fatigué par ceux qui lui faisaient des reproches, implorant pitié : ne serez-vous jamais rassasiés de me mordre ? en tentation de révolte contre Dieu ou en culpabilisation selon une analyse du mal et du malheur qui reste bien nôtre, Job résume sa foi : je voudrais qu’on écrive ce que je vais dire, que mes paroles soient gravées sur le bronze avec le ciseau de fer etr le poinçon, qu’elles soient sculptées dans le roc pour toujours : je sais, moi, que mon libérateur est vivant et qu’à la fin il se dressera sur la poussière des morts… Moi-même, je le verrai… Quelle ouverture pour une messe de funérailles, la mienne… s’il plaît à Dieu. Puisse-t-elle devenir celle de tous, même rétrospectivement : Mon cœur m'a redit ta parole : ‘Cherchez ma face’. C’est ta face, Seigneur, que je cherche…. J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. La nôtre, futurement et déjà terre des ressuscités.

matin

Pas d’échos médiatiques sur la manifestation prévue pour samedi. Celle de Vannes démarre à 10 heures à l’endroit habituel. J’annuelle un déjeuner avec mon clergé (âgé il n’y serait pas allé, mais l’homélie sur les Roms. et une autre sur Lazare et le riche valent toute participation).

Le Point fait un dossier sur l’immigration : quel courage ! Il apparaît que la Commission et nos dirigeants s’entendent au moins pour que la communication sur nos violations du droit communautaire en matière de circulation, d’établissement et de droits de l’homme, soit discrète. L’A.F.P. encore indépendante, est seule à titrer : ultimatum à la France.

Comble pour un tout sécuritaire. Les miradors supprimés autour des prisons. Le commissariat promis à Clichy-Montfermeil après les échauffourées et émeutes de Novembre 2005, n’est opérationnel qu’aujourd’hui. Entre les deux dates, le territoire était quadrillé d’ailleurs, sans présence permanente de la police et avec instructions verbales d’éviter tout affrontement et de ne traiter que les plaintes. Autrement dit, les promesses et autres plans pour de l’organisation pratique ne sont pas tenus ou sont abandonnés, on ne fait que de la communication. Imprudence double : monter les gens les uns contre les autres, ne rien résoudre. Responsabilité indûe du commissaire de police en charge de ces cent cinquante hommes, dont il est qu’ils sont tous volontaires tant la chose est difficile. J’aimerai entendre le député, ou que soit étendu là une initiative poitevine d’étudiants logés à peu de frais, en habitat sensible, et planchant sur la manière de renouer les contacts et relations entre tous.

Le triple vainqueur du Tour de France, soupçonné de dopage en Juillet dernier : à son insu mais de plein gré. Idem, pour le sextuple : Lance Armstrong. Ma femme opine que ce sont de pauvres laborieux exploités et pressurés à tous égards par un monde de soigneurs, « coaches » et autres impresarios. Idem pour Johnny Halliday, en ruines physiques, contraint de ne pas débricoler, devant se défaire de son agent de plus de trente ans et de continuer jusqu’à la mort plus pour ses parasites, son endettement (celui de Michaël Jackson à la veille de sa mort) que pour son ego.

A Toulon, des diplômes vendus à des Chinois. Naguère, c’eût été l’affaire des époux Rosenberg.

[1] - Job XIX 21 à 27 ; psaume XXVII ; évangile selon saint Luc X 1 à 12

mercredi 29 septembre 2010

lundi 1er Mai 1972 - Jean-Marcel Jeanneney me reçoit pour la première fois . notes prises le lendemain

premier entretien avec Jean-Marcel Jeanneney :
lundi 1er Mai 1972



une semaine après le referendum du 23 Avril 1972 – convoqué par Georges Pompidou, et portant sur l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun
un mois après le début de ma publication par le journal Le Monde : du oui au non

dix-sept (17) pages manuscrites de mon journal – alors tenu en cahier d’écolier Clairefontaine 21 x 29,7 – les notes ont été prises le lendemain après-midi

j’ai juste vingt-neuf ans et il n’est âgé que de soixante-et-un ans

les notes en bas de page sont rédigées à la saisie – soit après le 23 Septembre 2010. Cet entretien, notamment, redouble mon regret de n’avoir pas exécuté le projet que j’avais depuis deux ans de tout mettre au net pour le soumettre à mon éminent ami, et donc le faire réagir autant par rapport à lui-même avec le recul du temps que pour compléter ou préciser certains points


Mardi 2 Mai 1972

17 heures

J’ai été reçu par hier, à son domicile du 102 rue d’Assas, de 14 heures 45 à 18 heures 15, par Jeanneney, d’une manière amicale et chaleureuse à laquelle je ne m’attendais pas tant. Entrevu sa fille Laurence à qui j’avais pensé pendant que j’étais assistant à Sciences-Po., en 1960, et qui est maintenant mère de deux enfants. Je lui en ai parlé bien simplement et il m’a refait le curriculum vitae universitaire de Laurence qui vit maintenant à Bruxelles, son mari étant avec Barre, et venant de faire une thèse sur un polémiste russe.

Notre entretien – dans son bureau – a commencé par des remarques sur mon article sur les ministres d’Etat [1] qu’il avait auparavant lu. Remarque de détail, mais fondée sur ce qu’il était directeur du cabinet de son père Jules Jeanneney, ce qui a permis de recréer un peu l’ambiance de l’époque
– Catroux, sûrement pas ministre d’Etat jusqu’en Novembre 1945, car a été nommé ambassadeur à Moscou. Peut-être nommé en Septembre 1944, comme je l’indique, mais ensuite a dû cesser de faire partie du gouvernement
– sur le titre. Dans la pensée du Général – il l’a dit clairement à Malraux en conseil des ministres, en Janvier 1959, la qualité de ministre d’Etat ne pouvait donner barre sur une administration avec direction du personnel et budget autonome. Ce n’était donc pas un ministère. Ainsi, Jeanneney aux Affaires sociales en 1966, n’est que ministre. Il s’agissait bien de constituer un ministère : de les « fondre », disait le Général en recevant Jeanneney, et en mimant cette fusion de ses deux mains liées. Ainsi, Jeanneney refuse à Pompidou (à prendre ou à lAisser) que lui soit alors adjoint un secrétaire d’Etat. Mais ensuite, lassitude du Général, qui à partir de 1967-1968, reste en pleine maîtrise de lui-même, intellectuellement et physiquement, mais ne se soucie plus de combattre ceux qui l’entourent : ainsi, Schumann garde son titre de ministre d’Etat, en devenant ministre des Affaires sociales. De même que recevant Jeanneney – quand Capitant, pour raison de santé, veut donner sa démission en Novembre 1968 – de Gaulle lui propose de prendre les Sceaux, en gardant : « si vous voulez » le titre de ministre d’Etat. Réaction symptomatique d’un certain abandon de doctrine par lassitude. En fait, Jeanneney répond : l’intéril, tant que vous voudrez, mais pas les Sceaux, je ne suis pas juriste (et puis pas l’impression qu’on puisse faire grand-chose dans ce domaine). Ce qui soulage de Gaulle qui a beaucoup d’amitié pour Capitant.

Je reconstitue ensuite l’entretien – peut-être pas dans un ordre rigoureux – mais dans ses thèmes.

Se déclare d’accord avec l’ensemble de mes papiers – dont le style le frappe.
Mais « tique » sur la participation des communistes au gouvernement. Je lui explique que, pour moi, il s’agit d’une récupération de forces stérilisées jusqu’à présent, et dont le rassemblement est nécessaire pour faire face aux échéances du monde de l’an 2000, pour parler d’une manière générale. Sous cet angle – qui implique encore une longue durée, il se montre d’accord. Ajoute que son père lui avait dit, avant de mourir en 1957 – qu’il faudrait réintégrer les communistes. Mais le problème est que le PC est une église (avec dogme, discipline, etc… et l’on n’abandonne pas à l’âge mûr ce qui a fait le combat et l’enthousiasme de sa jeunesse et d’une partie de son âge mûr) – qui n’a pas encore fait sa mutation comme l’Eglise l’a faite depuis les années 1960 (surtout la France, grâce à la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et au mouvement œcuménique), et à un accident ou à une personnalité exceptionnelle, un vieillard qui n’a peut-être pas pressenti tout ce qu’il enclanchait : Jean XXIII (parenthèse sur l’agnosticisme de Jeanneney, depuis quatre générations, mais à la manière dont Malraux le définit samedi soir). Donc communistes, une église, dirigée de Moscou, et une église qui doit nourrir des gens. Le système communiste marche effectivement en URSS, montée incontestable du niveau de vie, spoutnik, etc… Mais système n’est pas possible sans contrainte. Il est incompatible avec la liberté.
Lui parlant franchement de mon entretien avec Andrieu [2](il est le seul à qui je le dise), je lui dis que – points d’accord avec le communiste : motivation contre le pouvoir de l’argent, générosité, etc… admiration pour de Gaulle et respect pour Couve de Murville – points de désaccord : ne croit pas à la troisième voie, conception manichéenne.
Jeanneney répond : évolution possible sur vingt-cinq ans, pas sur quinze ans (mais lui fixant les délais). De même, évolution dans un simple cadrew français paraît pour l’instant difficile. D’ailleurs, on joué contre de Gaulle, constamment.
J’ajoute : ne croit qu’à la négociation entre appareils. Et souvenir de leur alliance avec SFIO. Je répète l’analyse d’Andrieu : les socialistes avec les communistes font de bonnes choses, 36 et Libération (sans référence au Général pour cette dernière période), quand séparation, c’est Suez et l’Algérie.
Cette partie de l’entretien se termine sur l’accord de Jeanneney pour que des personnes comme moi (ou Alain Duhamel dont il fait l’éloge, et spécifie qu’il est très introduit, et a de bonnes relations personnelles avec plusieurs communistes en qui il a confiance, sans bien faire du renseignement – j’apprends ensuite qu’il prépare avec lui, un livre dans la collection Mitterrand, Edgar Faure, etc… que la bande magnétique a été faite l’été dernier, ce qui explique peut-être la sympathie de Jeanneney pour Alain Duhamel) disant se documenter et s’informer partout, mais mise en garde car peuvent servir de caution (vg. Lebrun, secrétaire général de la CGT).

Sur la troisième voie, Jeanneney en était toujours convaincu. La question est de savoir comment.
Mutation intellectuelle du général, ou prise de conscience aigüe et nouvelle (qui montre sa jeunesse d’esprit en 1968). A propos de mon papier (Le prix de l’habileté), Mai 1968 est à la fois qu’un accident : en ce que les choses ne seraient pas devenues ce qu’elles furent, si l’on n’avait pas commis des erreurs, notamment la réouverture de la Sorbonne (restée fermée, il ne se serait rien passé) et à la fois quelque chose de profond, puisque cela a montré l’ampleur du désarroi devant l’évolution économique, sociale et technique qui demande une novation des structures politiques (et, bien sûr, pas de distinction entre pouvoirs publics au niveau national et au niveau local. Jeanneney fait alors allusion à un livre de Victor de Broglie, aux pages admirables sur l’administration locale – je lui dis alors avoir lu ce livre, et être d’accord avec ce qu’il en dit).
Mais prise de conscience du Général date d’auparavant. En témoignent beaucoup de ses entretiens au printemps de 1968, et discours de Lyon sur la régionalisation. Mais prise de conscience ne donne pas forcément les moyens. Peut-être séduit par Loichot. En tout cas, croyait (au contraire de Jeanneney, à qui il avait fait ajouter à son discours à l’Assemblée nationale : « y contribue par la loi ») que participation pouvait être instituée. Pour Jeanneney, sans doute, on peut éliminer les obstacles juridiques. Mais participation est un état d’esprit. En tout cas, aujourd’hui fasciné par la tentative de Rocard ou la tentative de recherches sur l’auto-gestion. Quand ou si on arrive à mettre en France au poinbt un système d’auto-gestion, alors il est bien certain que l’on débauchera beaucoup de communistes, et que leur participatxion au gouvernement sera possible. (Au fond, dans ma rédaction, Jeanneney voudrait qu’on y inclut l’adjectif : anciens, participation au gouvernement d’anciens communistes). Désaccord avec Rocard sur le point de la violence, dont Jeanneney pense qu’on peut l’éviter, ou qu’en tout cas, il faut œuvrer pour l’éviter. Après Rocard (avec qui Jeanneney avait parlé à la suite d‘un débat triangulaire à Europe 1, sur les institutions, avec Habib-Deloncle, Rocard et lui, se trouvant d’ailleurs plus souvent d’accord avec Rocard qu’avec Habib-Deloncle), et ensuite dîner à deux, cnez lui, Jeanneney, un autre jour, à quoi Rocard (dont la campagne éllectorale avait été la plus gaullienne dans ses thèmes : croit à l’indépendance nationale, etc…), à quoi Rocard répond que ce n’est pas possible, mais ne déchiffrer Quand Jeanneney explique à Rocard qui est de Gaulle, il est difficile effectivement de répondre à Rocard qui demande – si de Gaulle est vraiment ce que vous dites, comment expkiquez-vous qu’il ait choisi Pompidou et Giscard ?

Le referendum.
S’il avait été fait à l’automne, il était gagné. Techniquement, pas possible dans la quinzaine qui suivait le 25 Novembre [3]. Mais Jeanneney proposait, dès Septembre, que la consultation eut lieu à l’automne. Ce qui fait que le hasard ( ?) l’aurait fait intervenir au moment de la crise monétaire. Certes, pas prêt à fournir à ce moment un texte sur la participation. Mais prêt sur la régionalisation, moyennant travail supplémentaire, avait d’ailleurs fait tenir une note à de Gaulle sur la régionalisation dès 1963. Le recours à la procédure référenaire : l’a justifié au Sénat d’une manière plus convaincante que Pompidou en 1962 devant l’Assemblée nationale, qui n’était guère convaincant. La question est que l’article 11 était à la fois trop précis et pas situé dans le titre sur la révision, ce qui donnait place à la critique [4]. Faute de Debré qui a mal rédigé le texte, ce que reconnaissait de Gaulle en 1962 quand Jeanneney, alors ambassadeur à Alger – période au cours de laquelle il le vit le plus souvent. A la suite des audiences sur l’Algérie, on parlait d’autre chose et Jeanneney avait alors dit que : certes d’accord pour le referendum, mais que vu la rédaction de Debré, l’opposition ne manquait pas d’arguments. De Gaulle répondait : oui, il n’a pas mis les choses à leur place.

Pour l’après-referendum, quand je parle de la succession et de Couve, Jeanneney réservé. On ne sait pas ce qui se serait passé. Lui avait le vent en poupe, au point que Poujade en Janvier lui avait dit : vous serez peut-être Premier ministre et je ne vous envie pas avec les troubles prévisibles en Mai-Juin 1969. A quoi Jeanneney répondait qu’il obiérait, mais que ce ne serait pas drôle.

Etre Premier ministre, sous Pompidou, c’est impossible. Ce que Chaban-Delmas supporte [5]. N’a aucun pouvoir. Sous de Gaulle, certes on souffrait. Mais c’était de Gaulle. Si le oui au referendum l’avait emporté à 51%, ce n’eût pas été une solution. Si les communistes avaient voté oui comme en 1962, alors 70% et il ne se serait rien passé. Mais de Gaulle avait contre lui tous les partis, tous les syndicats, les notables, les cadres et les grandes affaires. N’avait pour lui que le braves gens, et encore n’était-ce pas suffisant, car ces gens étaient ceux qui avaient regardé Mai de leur balcon, pas de ceux qui font les révolutions et descendent dans la rue. Les cadres et l’intelligentsia, c’est cela qui est le plus surprenant, leur hostilité à de Gaulle.

Pompidou. Effectivement, les deux fois où il a été maître de la marche en 1967 et en 1972, échec. D’ailleurs, l’élection de 1965, le premieer tour, est son œuvre. Jusqu’à la dernière minute, s’est maintenu sur la réserve, espérant être président de la République, et élection n’a été gagnée que quand de Gaulle a décidé de se battre, au lieu de ne pas se battre au 1er tour. Testament politique du Général : les entretiens avec Droit en Juin 1968 et en Avril 1969.

Pompidou ne croit pas à son étoile. D’où ses déclarations de Rome et de Genève. Mais optimiste, au sens épicurien et gourmet du terme et croyant à son habileté, à son astuce. L’avenir ? Il passe par la défaite de la majorité. Car, en 1976, si Pompidou dit : je me représente, tout le monde s’inclinera. Que la majorité manque de vingt sièges la majorité à l’Assemblée nationale, et alors Pompidou sera obligé de composer. Régime présidentiel alors ? Il faudrait une révision de la Constitution, et après le referendum du 23 Avril [6], il est douteux qu’il l’obtienne. Alors, le coup d’Etat ? il est trop maquignin pour s’y risquer. Mais (Jeanneney rêveur), on ne sait jamais après tout.

Debré, irrécupérable. Tient au pouvoir. Sa conc eption uniquement étatique, et sa conception de la nation, est complètement périmée. Ne peut saisir l’aspiration d’aujourd’hui. Qau fond, son système ne pourrait fonctionner que dans le fascisme. Jeanneney passant pour l’homme de Debré. En fait, après 1969, ne l’attaquant pas, et entrant dans le relire mais Debré n’a pas manqué une occasion de lui répondre publiquement. Quand entre au gouvernement : connaissait Debré, Burin des Roziers, etc… On lui a proposé le Commerce et l’Industrie. Jeanneney a alors dit à Debré : oui, mais je suis pour l’indépendance de l’Algérie. Debré a répondu que cela n’avait pas d’importance, pour participer au gouvernement.

Sur les ministres d’Etat. Soustelle, ministre délégué avec une petite annexe territoriale et ethnologique : le Sahara, a présidé (d’ailleurs fort bien) des comités interministériels en 1959, mais comme représentant du Premier ministre. Vieille amitié Debré-Jeanneney, fêlée quand Debré aux Finances, a constamment bloqué ce que cherchait à faire Jeanneney aux Affaires sociales. Ne le traitait peut-être pas comme quantité négligeable, mais bloquait, et faisiat étudier par ses services au lieu de le faire lui-même.
Période la plus structe en doctrine institutionnelle : du temps de Debré. Ensuite, lassitude du Général, pour combattre les siens, lassitude commence du temps de Pompidou (ce qui recoupe Les chênes qu’on abat… [7]). Nommé pour faire l’ouverture la plus large possible. N’y est pas arrivé. En 1959 et en 1958, très grande ouverture. En 1966, de Gaulle a jugé qu’entre lui et les centristes, les communistes et les socialistes, c’était la lutte à mort, et il avait raison. Mais en 1968-1969 n’a pas eu le battant qu’il eut en 1944 ou en 1958, pour prendre les contacts nécessaires.

Le succès de Chaban et du nouveau gouvernement, c’est en somme les relations de Delors. Mais attitude de Delors, engagé contre de Gaulle en 1968, à ce qu’on a rapporté à Jeanneney. Au fond, la gestion n’est pas lauvaise. Mais cela ne suffit pas, pour répondre aux perspectives d’aujourd’hui. Aucun des grands problèmes n’est pris à bras-le-corps. Peut-être que les Français se fichent de l’effacement international, mais problèmes de l’entreprise.

Problème de la moralité des hommes publics. Peut-être, Edgar Faure pourrait être candidat en 1976, mais manque de colonne vertébrale, et surtout question financière. Histoire de l’avoir fiscal et l’examen de la vie privée des hommes publics. Jeanneney explique à un dîner à une femme de banquier que son mari se renseigne sûrement sur la vie privée de celui qu’il va nommer fondé de pouvoirs. Tout à fait normal donc, que l’on se soit interrogé sur la fortune de Chaban-Delmas. Comme disait Jules Jeanneney : celui qui veut monter au mât de cocagne, doit avoir le derrière propre.

Barre, appelé comme directeur du cabinet de Jeanneney, ce qui surprit au ministère, d’autant que conception du cabinet de Jeanneney, était que les directeurs en faisaient partie, pas besoin qu’ils délèguent un des leurs à l’intérieur du cabinet. Prend quatre ou cinq personnes seulement, de façon à les voir quotidiennement. A savoir ce qu’ils font. Du temps de Debré, c’était la règle, et de Gaulle, à chaque changement de gouvernement, répétait à ses ministres : cabinet pour informer le ministre et faire connaître son esprit. Dès Pompidou en 1962, cekla a changé. Cabinet pléthorique, style Edgar Faure, ou aujourd’hui Debré. Comme aujourd’hui au Travail ou à la Population : il y a plus d’ENA au cabinet qu’il n’y en a dans le reste du ministère. Oncle de Jeanneney avait la direction de l’administration départementale et locale au temps de Clemenceau en 1909, qui était président du Conseil et ministre de l’Intérieur. Il entrait en poussant la porte pour savoir si le patron était libre. Au lieu de demande d’audience, du coup le voyait deux fois par semaine.

Sur le referendum du 23, les maires de Haute-Saône viennent le voir, disant qu’ils attendaient pour se décider ce que pensait Jeanneney, qui s’en explique, et les maires répondent : sûr, c’est bien ce que je pensais. D’où article pour le oui. Mais engageant Pompidou. Vous voulez le pouvoir de faire quelque chose ? eh bien, faites-le ! D’ailleurs, était sûr d’avoir à prendre position hostile ensuite sur la région.

Se présenter dans la Haute-Saône, sans étiquette. A de bonnes chances contre un giscardien sortant. Car position personnelle. A abandonné charge de président du Conseil général à cause du mémorial du général de Gaulle. Le préfet, ayant envoyé une circulaire aux maires, sans consultation du comité, il demandait vote sur le budget municipal. Ce qui est singulier, risque de faire débats défavorables au Général et continuelle assimilation. Avant pour faire débat national relire sur ce sujet, ne l’a pas fait. Mais pour faire bonne mesure – du coup démissionne de l’UDR – ne s’était inscrit d’ailleurs que depuis 1968.

Partage mon point de vue sur le fait de ne pas adhérer à un groupe ou à un homme, et quand je dis que seul de Gaulle pouvait susciter ce sentiment que dans l’avenir on resterait d’accord avec lui. Il répond : presque toujours (ce qui n’est pas rectificatif, mais indique bien le contact d’homme à homme). Mais politique se fait en équipe. Il faudra que vous ayez à un moment donné, le soutien d’un groupe. M’interroge sur les chances de Couve dans le VIIIème. Lui explique la nécessité qu’il ait une bataille triangulaire.

Couve mysogine ? A roulé dans la farine les trois femmes qui ont posé des questions, à sa conférence. Pour ma question, elle est en effet essentielle. Goguel lui a alors dit que c’était moi. N’a pas vraiment répondu.

Mutation de la notion de Nation. Tout aujourd’hui doit être explicité. Auparavant, on faisait la politique avec les résignés. 90% étaient résignés. On ne peut pas faire autrement, il vaut donc mieux se résigner que se révolter. Aujourd’hui, on ne peut plus gouverner là-dessus. La vie locale permet de donner à chacun sa responsabilité, de soi et des autres, et d’influer directement sur son cadre de vie. L’occasion m’en sera peut-être donnée, la saisir. Nous nous accordons sur la nation, contrainte relire volontariste, donc plus solidarité contre, comme elle a été jusqu’aujourd’hui.

De Gaulle en 1968 et 1969, surtout quand Jeaanneney l’a vu à Colombey. Intelligence et jeunesse d’esprit étonnante, car considère d’une extraordinaire expression de trente ans. relire

___


De cet entretien de trois heures au terme duquel Jeanneney – me conseille le pamphlet plutôt que le livre « technique » car j’écris bien et il faut faire court
– accepte de m’aider pour action institutionnelle du général de Gaulle relire
je retiens :
– accord d’âme sur les conditions de la vie politique en France, et sur la nature du combat que l’on peut y mener et du type que l’on doit être
– témoignage sur la mutation du Général, qui croyait jusqu’en 1966-1967 que l’autorité étatique était tout, et qui comprend qu’il faut autre chose. Témoignage aussi sur un gouvernement, de laisser faire, de Gaulle ne se battant plus que pour les grandes questions et vis-à-vis du peuple, non des siens.

_____


Pompidou reçoit Jeanneney en Juin 1969 et s’excusant de ne pas l’avoir pris au gouvernement, et Jeanneney répliquant : ne vous inquiétez pas, j’aurais refusé. Je ne veux pas siéger aux côtés de traîtres.

Retour sur mon entretien avec Fouchet (dont Jeanneney rappelle le goût du panache). Debré physiquement malade de quitter Matignon. La politique est question d’homme et de personne..

Retour sur la conversation avec Jeanneney.
Mendès, c’est un homme triste, pessimiste. La seule fois qu’il le voit joyeux et hilare, c’est au palais-Bourbon, après les accords de Grenelle. Ce qui a décidé Jeanneney à se présenter contre lui à Grenoble en 1968, alors que l’avait refusé à Pompidou, par estime pour lui, en 1967. Mendès : son maintien au gouvernement, en Janvier 1956, aux côtés de Guy Mollet, ayant été président du Conseil, n’avait pu être désigné en 1956, aurait donc dû refuser de faire partir sans singularité particulière, du gouvernement Mollet.
Idem, questions monétaires en 1945. Jules Jeanneney lui propose – pendant que de Gaulle est à Moscou – de faire un exposé au gouvernement sur la question. Finalement, PMF le voit un quart d’heure avant le conseil des ministres, et ne parle que du bureau que lui a déplacé Pleven aux Finances (ce qui est bien sûr inadmissible, mais pas le problème à ce moment-là). Sur le fond, PMF étant ministre de l’Economie et des Finances à Alger, n’a pas préparé la mesure qu’il préconise en Avril 1945, et obstcale pratique écrasant, qu’il eût pu surmonter et qu’il n’a pas préparé : n’a pas commandé les billets, alors que Belgique et autres pays, sont arrivés avec les billets. Au surplus, pas d’essence pour mettre en place les billets en province. Quant à lui, Jeanneney professait en 1941-1942 le nécessaire échange des billets et étudiait l’exemple des pays de l’ancienne Autriche-Hongrie.

. Barre, gaulliste fervent depuis l’âge de dix-huit ans, engagé dans les FFI.
. Deniau avait reçu des instructions pour l’entrée de l’Angleterre dans le Marché commun
. Europe : retrait du Marché commun maintenant impossible, même avant le referendum, secousse et crise terrible en France. On ne peut qu’aller de l’avant, mais à condition de faire quelque chose d’utile.

Sur l’ambiance du referendum de 1969. En pluss, au ministère des gens en train de trahir : Ortoli, Marcellin, Chirac, etc… qui étaient les hommes de Pompidou. Chirac, prêt à trahir bien sûr si Pompidou faiblissait.

Jeanneney contacté par divers « jeunes » (je fais allusion à l’Internationale et à Ravennes). Refus de créer quoi que ce soit. Pas de moyens financiers. Pas personnalité politique de premier plan, et surtout refus des petites chapelles, de créer une secte gaulliste de plus : vg. Union travailliste, qui n’aboutit qu’à la querelle Grandval Debu-Bridel.

Encore Jeanneney sur PMF : en 1954, il fallait en finir avec l’Indochine, mais pour l’avenir n’a pas su choisir, ni pour ni contre la CED.
Schumann, une extraordinaire fatuité.






.
[1] - publié dans la Revue française de science politique, sa rédaction m’a été suggérée par le doyen Georges Vedel dont je suis la conférence préparatoire au concours d’agrégation de droit public, auquel je me présente en Juin 1972
[2] - à l’époque, René Andrieu est rédacteur en chef de l’Humanité
[3] - une des dernières victoires du Général, celle remportée sur la spéculation et sur une partie de ses soutiens politiques – et cela dans le domaine le plus difficile : la monnaie et la technique budgétaire. J’ai gardé le numéro de France-Soir que j’affichai à la lunette arrière de ma voiture : quel coup de théâtre ! de Gaulle dit non à la dévaluation. Il avait été argumenté par Raymond Barre qui s’était ouvert au gendre de Jean-Marcel Jeanneney puis à ce dernier, des évaluations faites à Bruxelles et au club de Berne. Pour ma part, je faisais un stage – édifiant – au Crédit industriel d’Alsace et de Lorraine, au siège, à Strasbourg

[4] - au contraire, l’article 11 doit se lire comme une prérogative essentielle du président de la République, encore plus décisive pour le fonctionnement responsable de nos institutions que le droit discrétionnaire de dissolution de l’Assemblée nationale : article 12

[5] - il sera contraint de démissionner , le 5 Juillet 1972, et Pierre Messmer lui succèdera
[6] - au referendum du 23 Avril 1972 sur l’entrée de l’Angleterre dans le Marché commun, il y a 39,64% d’abstentions (au lieu d’une moyenne de 22% auparavant – à Paris, l’abstention est de 43%) et 7,10% de bulletins blancs ou nuls : le oui l’emporte avec 67,70% des suffrages exprimés mais seulement 36,11% des inscrits
[7] - d’André Malraux (Gallimard . 4 Mars 1971 . 236 pages) – récit de la visite rendue à de Gaulle, le 11 Décembre 1969, à Colombey-les-Deux-Eglises

Inquiétude & Certitudes - mercredi 29 septembre 2010

Mercredi 29 Septembre 2010


Lu en m’endormant un livre
[1] du premier trimrestre 1950, sujet un suicide aux armées d’un juif russe marié avec une française à la campagne, débat sur l’amour et aussi sur un certain ostracisme, roman contemporain des plus grands à la même librairie Gallimard [2] Pauvrement écrit mais d’ « intrigue » originale, il fait ressentir que toutes nos maladies, aujourd’hui, dans les pays « riches » matériellement comme le nôtre sont des maladies mentales. Les nécessités vitales de l’après-guerre dans un contexte de totalitarismes successifs terribles ne sont plus nôtres, nos maladies sont celles du manque d’âme et de but, même si près de 13% des Français vivent au-dessous du « seuil de pauvreté » et que l’impunité des égoïstes et des riches matériellement par accaparement ou abus de position dominante, est éclatante. Manque de repères, manque d’autorité morale, manque de courage et de simple dignité personnelle de ceux qui sont en situation de rompre cet enchantement de notre distraction vis-à-vis de l’essentiel. Cela vaut dans tous les grandes et petits domaines. Nous avons perdu le sens de la nécessité – autrui, la société – et de la dignité – notre rapport à nous-mêmes et à Dieu. Nous sommes tous irresponsables. On dit – au plan budgétaire – que les pays « riches » vivent au-dessus de leurs moyens, les Etats, les pays , les personnes. Nous vivons surtout au-dessus de nos moyens spirituels et d’âme, totalement ankylosés, moteurs puissants putativement mais route à la lanterne, et encore. Prier donc… notant le livre, des pages s’ouvrent encore, je n’avais pas retenu que l’auteur est une femme, elle semble n’avoir fait aucun chemin dans la notoriété ensuite. Dernières lignes, l’ultime : Barny ne devait jamais acquérir la preuve nécessaire à une certitude. Et un peu au-dessus : L’amour n’est qu’une approximation. Aucun être n’a été conçu spécialement à l’intention d’un autre. On ne lit bien que plusieurs fois. (Car) presque tous les écrits sont polyvalents et nous en choisissons le sens, le plus actif n’est pas l’écrivain mais son lecteur, point commun, hors du livre, ils sont chacun inspirés. C’est un moine de Solesmes, qui à mes vingt ans, m’apprit à tenir des fiches de lecture. Il me donna aussi le concept cardinal de bien commun. Je lui donnai Brasillach et aussi le Narcisse et Goldmund d’Hermann Hesse. Peut-être vais-je entreprendre, en simple secrétaire, de noter propos et excursi d’une autoobiographie et d’une formation monastique et philosophique en trente ans du prestigieux monastère et trente ans de désert au Sahel. Ma propre vie n’aura valu que par des rencontres, et en prime inattendue et indicible, par l’amour conjugal et paternel (donc filial en retour) dont je suis honoré-gratifié-comblé.

Prier en action de grâces chantante. [3] Ce qui est notre devoir et notre œuvre et non la spécialité des anges et archanges. Mystère que cet enseignement et que cette réalité qui peut nous apparenter – dans notre propre mental – aux tenants des croyances « primitives », les esprits et autres, avec ces « démons » de l’évangile et de l’époque gréco-romaine ou des structures psychologiques de peuples qui ne nous sont pas familiers…[4] Réponse toujours actuelle, celle du Christ à Nathanaël : tu verras des choses plus grandes encore. Leçon simple, une part infime du réel, à tous les égards et dans tous les domaines, nos catégories humaines pour distribuer sciences et disciplines, mais fort peu l’inconnaissable… une part infime du réel, seulement, nous est aujourd’hui perceptible. L’éternité et la vie dont nous attendons encore tout, nous donneront seules la totalité à voir, comprendre, embrasser, aimer. Comment me connais-tu ? et tout commence par notre relation à Dieu, lequel a eu l’initiative aimante et cognitive. Chemin exigeant (terrible pour certains, mais accompagnés de Dieu) : Dépassant l’amour d’eux-mêmes, ils sont allés jusqu’à la mort. Central, chemin, moyen, horizon, compagnon : le sang de l’Agneau … à qui il fut donné domination, gloire et royauté ; tous les peuples, toutes les nations et toutes les langues le serviront. Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite. Combat des anges, plus efficace que le nôtre, cortège des anges, plus beau et splendide que nos plus intenses visions. Nous glisser parmi eux… l’action de grâces, seul mouvement de notre vie qui ne soit pas tâtonnant et dispersé. Surtout si elle reconnaît n’avoir presqu’aucun motif que l’appel divin à l’entreprendre, à s’y rendre et donner. . Introduction aussi - imagée par nos textes - à ce débat spirituel : l'accusateur de nos frères... celui qui égarait le monde entier... L'Adversaire au début du livre de Job, dialoguant avec Dieu... ou ici, le grand Dragon, celui qu'on nomme Démon et Satan, celui qui égarait le monde entier. Il fut jeté sur la terre et ses anges avec lui... Car l'accusateur de nos frères a été rejeté, lui qui les accusait jour et nuit deant notre Dieu. L'image contraire qui triomphe, voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ... les cieux ouverts, avec les anges de Dieu qui montent et descendent au-dessus du Fils de l'homme. Entrer dans l'icône, les icônes et leur vérité quand le débat intérieur nous est terrible.

matin

Sans encore « prendre les nouvelles » ni lire une dépêche… certitude, au singulier et à l’exceptionnel, ces trente mois de Nicolas Sarkozy nous révèle. Il y a – chez les « Français de souche » – chez nous donc, un fond affreux de racisme, dravarice, d’égoïsme et de simplisme. Dans les commentaires aux dépêches d’AFP sur un récent arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, ou sur les déclarations initiales de Viviane Reding, ou sur les trains de mesures dictées par le président régnant, nonobstant toutes séparations des « pouvoirs » et surtout des fonctions (celle du Premier ministre qui a l’initiative des lois et le pouvoir réglementaire à l’exclusion du Président de la République) ou démarquées du discours de Grenoble, véritable déclaration d’identité du régime, je lis jour après jour des choses effarantes, effrayantes. On comprend comment une ambiance – celle de la collaboration, non celle du Maréchal – a pu prendre tellement dans tant d’esprits. C’est la même prise aujourd’hui. Les Afrikaners ou les Juifs d’Israël avaient quelque excuse, leur peur d’être submergés, mais nous… paradoxalement, les Français équilibrés sont ces beurs et ces émigrés de la première génération. D’ailleurs, ce sont eux qui inventent du vocabulaire et nous apportent un énième accent, proche du portugais chanté au Brésil. Notre fille un jour sur deux, pas six ans, poétise et improvise sur des airs de rap.

Inquiétude… comment et quand sera-t-il mis fin à une telle infidélité, une telle injure à nous-mêmes. Une simple élection présidentielle ? une succession « normale » ? J’entends déjà les cris de haine des perdants, en comparaison desquels ceux de 1981 ou ceux de 1984 (les tenants de l’école dite libre) n’étaient rien. Quant à la timidité de la gauche, l’expérience a été faite en 1997, on voyait littéralement comme dans les bandes dessinées, les goutelettes d’une sueur peureuse au front du Premier ministre arrivant sur les plateaux de télévision, pour notamment exposer la question des retraites … – Lionel Jospin qui avait depuis longtemps rêvé de l’être, qui en avait assurément la capacité et plus encore l’honnêteté pas seulement intellectuelle, mais n’en revenait pas de l’être. Il faut à nouveau le Premier consul. Nous l’eûmes en Novembre 1917, en Juin 1954 et, pour un décisif décennat, en Juin 1958… mais il faut surtout, nous : des démocrates et des vertueux. La chevalerie n’était pas une idiotie, elle a perdu à Crécy mais elle a redressé la France – intellectuellement en 1871-187…, à tous égards et d’abord moralement en 1940-1944 et ces grands fonctionnaires, remarquablement cultivés et experts, et plus encore désintéressés en carrière et en pécule, que la Résistance et la Quatrième produisit pour la re-fondation française aux débuts de la Cinquième République. Quel chemin prenons-nous ? chaque loi qui est votée depuis trente mois l’indique-t-il ? A quel moment un pouvoir légal devient-il illégitime ? à quel moment, un abus de prérogatives et d’emprise devient-il pathologique chez celui qui le commet et chez ceux qui le tolèrent ?

après-midi

Bruxelles et nous… Ambiguité de communication mais non de fond. Ce qui a été présenté en milieu de journée comme un recul de la Commission dans la mise en infraction de la France à propos du traitement que nous infligeons aux Roms semble un couple de décisions. Première décision : infraction caractérisée pour non-transcription d’une directive, directement applicable à ce cas de discrimination, la procédure est donc engagée avec d’éventuelles sanctions. Deuxième : toujours pas de sanction pour les expulsions de Roms et les discriminations, mais demandes d’informations supplémentaires, à savoir les dossiers des expulsés.

Budget de l’Etat, déficit de plus de 8%, tour de vis divers supplémentaires, pas d’évocation du chiffre de l’an dernier qui devait être à peine supérieur, engagement ou perspective, c’est flou, de 6% l’an prochain. Ce ne sera évidemment pas tenu.

[1] - Béatrix BECK, Une mort irrégulière (Gallimard . Août 1950 . 167 pages)

[2] - ABELLIO, Les yeux d’Ezéchiel étaient ouverts – Jean GIONO, Les âmes fortes – Marguerite DURAS, Un barrage contre le Pacifique – Joseph KESSEL, La fontaine Médicis – Pierre MAC ORLAN, Le bal du pont du Nord – Roger NIMIER, Perfide – Jules SUPERVIELLE, Premiers pas de l’univers

[3] - Apocalypse de Jean XII 7 à 12 ; Daniel VII 9 à 14 passim ; psaume CXXXVIII ; évangile selon saint Jean I 47 à 51

[4] - un ami allemand a ingénieusement fait revivre par écrit à ses enfants et petits-enfants, son adolescence et son expérience de la guerre en se donnant pour compagnon et protecteur… un ange. Et cela se « tient » très bien. Hypothèse vérifiée.

mardi 28 septembre 2010

Inquiétude & Certitudes - mardi 28 septembre 2010

Mardi 28 Septembre 2010

L’horreur (ou l’honneur) de vieillir, de savoir et ressentir le délabrement du corps, de craindre – par analogie ? ou par logique biologique – que suivent les facultés mentales, même si une compréhension plus « scientifique » du fonctionnement de la mémoire rassure un peu sur les difficultés de mobilisation ou sur l’oubli total de tels noms, faits ou dates. Remède à tout, l’amour, l’amour des nôtres, l’amour de tous, l’amour jamais obligé, pas forcément en attente de signes ou de réciprocité, l’amour qui fait se blottir en nous l’autre tel que nous le portons de pensée, de regard, de réflexion, de compassion, d’élan… Deux droits fondamentaux : celui de crier quand on souffre… celui d’être indigné et de le faire savoir… cela soulage, certes, mais la société, l’autre ont besoin de notre témoignage. Est-ce un des éléments de l’amour, l’appel à écho ? non, mais cela peut le susciter. L’amour est entre personnes (j’y comprends naturellement les animaux et tout le vivant, réaction d’un arbre que l’on taille). Pourquoi ne suis-je pas mort dès le ventre maternel, n’ai-je pas péri aussitôt après ma naissance ? Pourquoi s’est-il trouvé deux genoux pour me recevoir, deux seins pour m’allaiter ? Maintenant, je serai étendu dans le calme. Tous les signes de la dépression, le goût de la mort, la préférence pour la mort. Job, infiniment mieux et plus court que les athées d’aujourd’hui, que Jean-Paul Sartre il y a peu, résume l’interrogation sur la vie, et la transmission de la vie – comme si souvent dans cette lecture (préalable à la prière de toute une journée), mes sentiments ou mon paysage intérieurs sont rencontrés, comme allant l’un au devant de l’autre, par les textes. Le cafard… Job : Pourquoi donner la vie à l’homme qui ne trouve plus aucune issue, et que Dieu enferme de toutes parts ? Le psalmiste n’est pas en reste : Ma place est parmi les morts… ceux dont on n’a plus souvenir, qui sont exclus, et loin de ta main. Tant que Job soliloque, il ne peut, effectivement, « s’en sortir ». Le psalmiste, par antiphrase, donne l’issue. Loin de ta main… le poids de ta colère m’écrase, tu déverses tes flots contre moi. Il y a dialogue, cri et appel du mortel, traitement personnalisé par Dieu, même si c’est cruel et difficile. Jésus lui-même prit avec courage la route de Jérusalem. Car le plus incompréhensible nous arrive bien moins qu’au Fils de Dieu. Fils et Dieu, le voici supplicié, et qui le sait d’avance. Abraham reçoit l’ordre d’épargner son fils, à la dernière seconde. Jésus n’est pas épargné. Nos solutions sont pauvres, si nos interrogations, angoisses et cafard sont justifiés… ‘veux-tu que nous ordonnions que le feu tombe du ciel’. Mais Jésus se retourna et les interpella vivement. Tout le psaume LXXXVIII, chrétien, j’ai à qui m’adresser. Sans doute est-il bon – je suis comme un homme fini – de réexpérimenter le besoin d’être sauvé, tiré du fond… car mon âme est rassasiée de malheur, ma vie est au bord de l’abîme, on me voit déjà descendre à la fosse.
[1]

matin

Je courielle aux députés mon papier d’humeur – L’honneur du chef – daté de Juillet 2007.
----- Original Message -----
From:
Bertrand Fessard de Foucault
To:
"Undisclosed-Recipient:;"@orange.fr
Sent: Tuesday, September 28, 2010 10:51 AM
Subject: irresponsabilité

Henri Emmanuelli et Alain Juppé ont payé - très cher... carrière brisée ou au moins interrompue.
Jacques Chirac a le don d'inspirer les anniversaires : la reprise de nos essais nucléaires pour le cinquantenaire d'Hiroshima, une amnistie payée à la date du referendum fondant la Cinquième République.
Arrangement pour les emplois fictifs, arrangement pour la primaire socialiste, démocratie irréprochable. "Je prends mes responsabilités" c'est-à-dire que je revendique l'exclusivité de la décision mais que je ne cours aucun risque personnel de sanction.
Cf. pièce jointe pour notre dégénérescence.
Quant au discernement, la grâce par reconnaissance au grand homme d'Etat ?
Politique extérieure ? il inaugure le système de compassion sans réflexion politique ni stratégique au lendemain du 11 Septembre 2001, d'où l'Afghanistan et l'axe du mal - cautionnés par nous. L'Irak qu'il nous aurait évité ? sans le rapport si courageux des inspecteurs de l'A.I.E.A., il y avait résolution du Conseil de sécurité et carte blanche aux Etats-Unis. Dans l'heure qui précédait l'entrée des inspecteurs au Conseil de sécurité, l'Elysée publia que la France n'opposerait pas de veto. Le fleuron du bilan est un coup de chance, les circonstances ont évité d'avoir à confirmer le courage. Et s'il y avait eu mandat des Nations Unies comme pour l'Afghanistan, nous y serions allés.
Politique intérieure ? les appartements dès l'avènement et une sucession de montages juridiques ad hoc (de la jurisprudence en cassation à une appréciation du Conseil constitutionnel puis à la révision constitutionnelle de 2008) dont la République depuis 1870 n'avait jamais eu besoin, parce qu'elle était République. Dans toute autre démocratie, le suspect aurait démissionnné après la diffusion - grand public - de la cassette Méry. Jacques Chirac inaugure le cynisme de l'impunité dont aujourd'hui nous voyons les répliques.
Enfin, décisivement, Jacques Chirac est responsable du quinquennat, donc d'une déviance présidentialiste de notre régime : il pouvait s'y opposer efficacement, il ne le fit pas, calculant qu'il serait plus facilement réélu pour cinq ans que pour sept ans. Il devait démissionner le soir du referendum négatif sur l'Europe. Il aurait eu - par raccroc - l'assimilation à de Gaulle le démocrate et aux martyrs de la cause européenne. Il n'a même pas pressenti ce qu'est la grandeur. Enfin, son inaction a motivé l'activisme dont nous pâtissons depuis trois ans et quelques mois.
Bien antérieurement, il a fondé la politique sur la haine. La haine dont il a été l'instrument contre Jacques Chaban-Delmas en 1974, la haine contre Valéry Giscard d'Estaing à partir de 1975 et évidemment contre François Mitterrand. La haine de la droite pour la gauche et pour tous ceux qui ne sont pas elle, ce qui a enfanté tous les simplismes, puis les démagogies et maintenant l'extrêmisme - alors que de Gaulle à Frey et à Peyrefitte le priant de les laisser déballer contre le compétiteur du second tour en 1965, leur répondit qu'il ne ferait pas la politique des boules puantes et qu'il ne fallait pas s'en prendre ainsi à qui pourrait bien un jour être président de la République. Car si - au moins - Jacques Chirac avait été visionnaire... il ne le fut en piste, que dans son discours sur Villiers-le-Bel, mais toute autorité déjà perdue sur son successeur assuré jusqu'à l'insolence. C'est cette analyse valant testament pour la question sociale et ses aspects sécuritaires, qui vaudrait peut-être - aurait valu - reconnaissance, mais quel tenant du karcher s'en souvient aujourd'hui ?
Je sais rencontrer votre pensée, à défaut de vos dires.

Débat (« Duel du jour » sur France-Infos.) quelqu’un du site Rue89 et un de la rédaction en chef du Figaro. Sujet : l’assertion de Bartolone, dimanche, les primaires socialistes seront une confirmation grâce à l’entente Aubry-DSK. Question de fond : cette entente exist-elle déjà ? les commentaires verbeux montrent qu’ils ne sont que commentaires de ce que le « grand public » a pu entendre, mais en rien une information. Dans l’assimilation de DSK au président sortant, le bling-bling et les palaces, autant qu’il n’y a pas analyse du fond des politiques ou programmes. Pas non plus la mémoire historique, pour moi décisive, que DSK doit sa place actuelle à Sarkozy.

après-midi

La politique du pouvoir actuel dépasse l’extrême-droite. Projet de loi dénoncé par la psychiatrie publique tendant à soumettre à l’autorité préfectorale la sortie d’hôpital et au maintien des patients réputés dangereux pour l’ordre public. Comme l’avis du médecin ne fera plus foi pour la sortie, qui décidera de la « dangerosité » d’un patient ? pas de médecin, pas d’enquête de magistrat, pas de procès ? présomption ? Ce devient effarant, cela s’accélère et c’est glorieux.

L’opposition de gauche récuse publiquement – exposé de Bruno Leroux, porte-parole des socialistes au Palais-Bourbon – Bernard Accoyer et lui demande de démissionner : le débat sur les retraites a confirmé et amplifié la servilité du présuident de l’Assemblée nationale, qui n’est plus que le représentant de la majorité parlementaire. Récusation et accusation sans précédent sous la République. Et comme pour tout le reste, dans le fond et dans la forme, il sera passé outre. La réforme de 2008 devait « accroître les droits du Parlement » ! Rien de la lettre de cette réforme n’est appliqué, et cette lettre n’était là que pour faire passer la tentative qui avorta, de nous amener en régime présidentiel. Ou plutôt avait pour objet de consacrer la pratique naissante en 2008, ouverte en 2010.

Budgets : les dépenses de santé augmentent de 40%, et les remboursements de 20%. Nous lisons nos factures d’E.D.F. pour 100 euros, seulement 32 de consommation de courant, tout l’effort de ne consommer qu’en heures creuses ne rapporte pas 10% de ces 30%.Le procès Clearstream – dont il crève les yeux qu’à l’instar de celui d’Eric Woerth qu’on met si lentement en état d’^tre ouvert, il est par nature du ressort de la Cour de justice de la République – une fois encore reporté, et il aurait lieu devant une instance ordinaire. C’est le seul avantage de la témérité et de l’inconscience de Dominique de Villepin, il ne se rend pas compte qu’il peut sortir inéligible du procès.

Alain Juppé, quoiqu’on ne lui ait rien proposé (encore), ne refuserait pas d’entrer au gouvernement si ce doit être un gouvernement etc… mais un gouvernement pour vraiment changer le cours des choses, ne peut fonctionner que si Sarkozy abdique. Dans l’énumération banale de l’ancien Premier ministre, une fois admise la pétition de n’être que parmi ses pairs ( "Si l'intérêt général veut que le président de la République souhaite constituer un gouvernement différent, avec ce qu'on appelle des poids lourds, et une feuille de route précise --croissance, emploi, compétitivité de l'économie française--, je suis prêt à y réfléchir " ), ne figure pas le mot : réformes, par lequel François Fillon se définit dans le sillage de Nicolas Sarkozy.

fin d’après-midi

Je n’ai pas suivi la fin du débat à l’Assemblée nationale sur la réforme des retraites. Il paraîtrait qu’Accoyer, sur instruction de l’Elysée, aurait fait couper court pour que le vote intervienne avant les manifestations, ne soit donc pas influencé par celles-ci et qu’il puisse ensuite être dit qu’au contraire ce vote et ce débat avaient éclairé l’opinion au point que la pression de la rue avait décru ce jeudi 23 septembre… à preuve, ce que j’ai entendu vers les treize heures, le cortège à peine formé du côté de la Bastille, à Paris : un communiqué de l’Elysée donnant déjà l’évaluation de décrue du fait de la pédagogie gouvernementale à l’Assemblée nationale. – J’apprends, toujours par la radio, qu’Accoyer pourrait céder sa place à l’hôtel de Lassay à Fillon, quittant Matignon, et récolterait un maroquin, mais que sa mise en cause par l’opposition le rend maintenant indéboulonnable, ce qui complique le placemen-remplacement du Premier ministre.

Tout cela montre où nous en sommes arrivés. La dictature pure et simple que nous tolérons. On dit alors que l’abaissement du Parlement est le fait de notre régime et ne date donc pas de Sarkozy. Je dis non : les votes actuels sont sous la contrainte morale, les élections sont formelles pour la plupart d’entre elles, l’investsiture d’un parti est décisive. Pour un virage capital de notre politique extérieure et de notre stratégie de dissuasion, il fallut trois votes de confiance – le 49-3 – dans les débats d’adoption des crédits de « la force de frappe » en 1960. Régime fort mais démocratique que celui du général de Gaulle. Oubli ou amalgame aujourd’hui pour l’analyse des précédents et de notre histoire contemporaine.

Le procureur général près la Cour de cassation, dont je ne savais pas qu’il n’a aucune autorité hiérarchique sur l’ensemble du parquet et chacun de ses membres, mais qui est considéré comme une autorité toujours suivie, ne le sera pas par le juge Courroye. La hiérarchie à Versailles ne demande pas à ce dernier de passer la main à un juge indépendant, et Alliot-Marie joue les respectueuses de l’indépendance de la justice, et demandera donc rien à Courroye. Le tour est joué de côté-ci, et les choses ne peuvent basculer que par la saisine en bonne et dûe forme de la Cour de justice de la République.

[1] - Job III 1 à 23 ; psaume LXXXVIII ; évangile selon saint Luc IX 51 à 56

lundi 27 septembre 2010

l'honneur du chef - pensées écrites d'époque



L’honneur du chef


Pour le nouveau Président, respectueux par fonction de la séparation des pouvoirs, les actions en justice à propos des emplois fictifs financés par le contribuable parisien ou des marchés publics d des HLM de la ville de Paris de 1977 à 1995, ou pour éclairicir l’ « affaire Clearstream », ou maintenant pour en finir avec le décès suspect en service commandé à Djibouti d’un de nos magistrats, il n’y a que des coincidences : chacune de ces affaires ramènent à son prédécesseur pour lequel écopent deux de ses anciens Premiers ministres – dont les carrières sont brisées ou au moins handicapées – et maintenant son proche collaborateur pour les affaires africaines.

Pour Jacques Chirac, la question est simple. Déjà, il a inauguré la jurisprudence d’un président qui se défausse devant le peuple, une dissolution qui ne lui donne pas la majorité parlementaire sollicitée, un referendum négatif : il élude et se maintient. Pour quoi faire d’ailleurs ? Nicolas Sarkozy n’en paraît que plus actif et entreprenant, par facile contraste.

Va-t-il continuer maintenant qu’il n’y a plus aucun prétexte juridique – celui de sauvegarder la grandeur d’une fonction … que par ailleurs il a tant desservie - pour ne pas comparaître, ou au moins parler ? Le 8 Avril 2001, Valéry Giscard d’Estaing a rappelé, qu’étant lui-même Président de la République, il avait été amené à témoigner à deux reprises. Minimum … le long et pénible entretien radio-télévisé, le 23 Septembre 2000, en réponse aux révélations posthumes de Jean-Claude Méry [1], qualifiées d’ « abracadabrantesques », ne figure pas dans le recueil des discours présidentiels de Jacques Chirac [2].

Faut-il prononcer le mot de lâcheté ?

Le Maréchal, accueilli en Suisse comme chef d’Etat et où il aurait vêcu paisiblement ses dernires années, au lieu de l’horreur du fort de l’île d’Yeu – il suffit d’y aller pour se rendre compte… – rentra en France explicitement pour répondre de tout au nom des siens et de ceux qui lui avaient fait confiance, et à quel point ! L’affaire était immense, le chef avait été grand et le fut encore. Ce qui est reproché à celui que tant de gaullistes ont aidé à monter sur le pavois par haine (finalement bien mal placée) de Valéry Giscard d’Estaing, n’est – au total – que minable. Alors, à petites affaires, peu d’honneur et petit chef ? La France, qui le tolère, n’en grandit pas, et le nouveau Président de la République non plus, car « l’affaire Clearstream » mise à charge unique de Dominique de Villepin pourrait bien être le péché d’origine du régime qu’on prétend instaurer à présent.

BFF . vendredi 13 Juillet 2007



[1] - première de la série, la convocation pour le 4 Avril 2001 par le juge Eric Halphen jusqu’à la plus récente pour le 18 Juin ( !) 2007 – cf. Année politique 1996, pp. 108 & 118.119, 1997, p. 127, 2000, pp. 117 & ss, 2001, pp. 70.71

[2] - Jacques Chirac, Mon combat pour la France (Odile Jacob . Mars 2007 . 644 pages) . Dans quelle rubrique d’ailleurs, eût-il pu figurer ? utilisation des fonds spéciaux, commentée le 14 Juillet 2001, ou encore les emplois fictifs, dans le même genre d’exercice annuel

Inquiétude & Certitudes - lundi 27 septembre 2010


Lundi 27 Septembre 2010

avant-hier après-midi

Un moment, en milieu d’après-midi, à Kerguehennec pour l’exposition Janos Ber, repérée par Edith. .
Dès les premières toiles, une réponse m’apparaît sans que je me sois au préalable posé la question. Le critère d’une novation tient-il de la création ? c’est si simple, si copiable que c’est évident, logique, mlême nécessaire. Immanquablement, ce devit être exprimé, dit, créé, fait. Et pourtant – avant, ce n’était pas, pas même imaginable par autre que l’artiste, et sans doute même par l’artiste. Avant ? avant quoi ? où ?
Textes de l'artiste, d'origine hongroise, vivant en France.
Des associations d’idées viennent et tournent court, débordées par l’évidente présence de ces dessins réfractaires à l’interprétation. Une idée d’association semble fonctionner dans ce lieu. [1]
Résoudre la contradiction entre couleur et ligne. Il y avait des choses entamées et il fallait conclure, c’est-à-dire faire franchir un pas à cet ensemble. C’était en moi et je ne le savais pas. La simplification qui est apparue dans l’acte-même était une grande ouverture pour moi.
Un acte de coupure suivi d’une remise ensemble, selon un ordre différent. Je rejoue cette séquence au cours de mon travail, au point exact où la peinture bascule et devient image.
Coupe et assemblage maintenant comme depuis des années. Mais insensiblement, leur nature et ma compréhension quant à leur sens, ont subi une transformation.
La fable de cette peinture noire de 1959 dit seulement que pour devenir capable de création, nous avons besoin de faire alliance avec les forces très contradictoires qui nous tiraillent. J’ai travaillé avec elles.
Je veux réagir – tant je le ressens – et tenter de dire l’analogie qui me saisit entre la démarche spirituelle, le discernement d’une orientation de vie, une vocation et cette introspection du peintre, analysant la gestation de son œuvre quand elle n’est encore que travail.

hier, dimanche après-midi

Exposition Olivier Debré à la Cohue de Vannes. Sur les murs de pierres décapées, les grandes toiles ressortent assez bien, le fond est beige, moins neutre que celui du musée des Beaux-Arts à Orléans. On n’a plus ce lisse miroir, à peine mouvant, plus transparent qu’à premier regard qui rappelle tant la Loire, on a autre chose, encore un glissement d’eau pour une toile, mais d’autres telles que Sans titre en 1990, à dominante rouge, sont énigmatiques. Point commun de toutes celles exposées, bien évidemment l’accidenté des nuances et variations dans l’application et dans les tonalités de la couleur dominante, mais toujours un élément discursif, polychrome, volontairement très incisif, choquant, introduisant une histoire dans l’immensité monochromique de la toile.
Textes d'Olivier Debré :
Je me défends d’être un paysagiste. Je traduis l’émotion qui est en moi devant le paysage… ce n’est pas ma volonté qui intervient mais l’émotion qui me domine. Je ne suis sincère que dans le choc, l’élan.
J’indique ma source d’inspiration, mais elle ne compte pas. Le peintre a une certaine conscience, un point de départ : que le spectateur y voit autre chose n’est pas grave, c’est l’intensité qui m’importe et non pas l’histoire. Ce que les autres ressentent est la vraie réalité.

Prier… [2] clé de tout rapport avec autrui, notamment dans les dialogues d’idées et de foi, la communion suppose la tolérance mais plus encore de situer la différence dans le registre de l’accessoire. Celui qui n’est pas contre vous est pour vous. Les dialogues entre le Christ et ses disciples, sans doute la restitution par écrit y est-elle pour quelque chose, mais pas en tout ni complètement d’autant que nous ne sommes attentifs au texte que parce qu’il est inspiré (divinement). Une discussion s’éleva entre les disciples pour savoir qui était le plus grand parmi eux. Réponse, non pas l’enfant-modèle mais l’accueil de l’enfant. Thème et figure de l’enfant dans le Nouveau Testament, magnifique sujet et sans doute bien plus sérieux que charmant, déjà l’Enfant-Jésus introuvable pour ses parents au retour du pèlerinage. L’enfance est sérieuse, spiritualité thérésienne. Les disciples ont-ils entendu, compris ? nouvelle question et prise à témoin du Seigneur par le plus fin et mystique d’entre eux, le comble de la cécité, Jean cafarde donc, j’en vois un qui… il n’est pas avec nous pour te suivre. Le nombre d’occurrences où les disciples font écran, les ouvriers de la première heure, leur rétrubution, leur priorité, nous qui avons la foi : notre avoir et notre place. Au contraire, Job éprouvé se jeta à terre et se prosterna… il n’eut pas la folie de faire des reproches à Dieu. Il ne se reconnaît pourtant en rien coupable : J’ai gardé le chemin prescrit, j’ai tenu mes pas sur tes traces, jamais mon pied n’a trébuché. Montre les merveilles de ta grâce, toi qui libères de l’agresseur… le livre portant son nom peut d’ailleurs être lu comme un psychothérapie, le patient ne pouvant progresser et retrouver ses repères qu’à la condition de fond de ne pas se culpabiliser à raison de ce qu’il lui arrive et qu’il vit, et à la condition de forme qu’un tiers, le praticien, les bonnes âmes de ses soi-disant amis, le fassent rebondir, valident ou contredisent son propos – la thérapie, l’action de grâce, la foi sont dialogue et non monologue comme si, important, seul le dialogue est inspiré, donc efficace. Le mal, le malheur trouvent là leur sens : ils éprouvent mais ils n’enferment pas, au contraire. Tu sondes mon cœur, tu me visites la nuit, tu m’éprouves, sans rien trouver ; mes pensées n’ont pas franchi mes lèvres. Livre et psaume magnifiques, exemple des disciples nous montrant qui nous sommes à côté de l’intense spirituel qu’est Job. A noter d’ailleurs que Job comme Abraham sont des gens richissimes, et pourtant de plain-pied avec Dieu : Abraham dialogue face à face et discute, Job est le champion de Yahvé face à l’Adversaire. L’argent trompeur, ils le domptent, ce qui compte c’est leur relation à Dieu, leur foi. Les disciples désertant dès que commence la Passion sont le contraire spirituel de leurs grands ancêtres, c’est pourtant avec eux et avec nous que chemine Jésus sur nos routes de la rédemption. Avec simplicité – la simplicité seule est créatrice – le Christ prend tout le monde avec Lui. Ne l’empêchez pas de me suivre : celui qui n’est pas contre vous est avec vous.

matin

Le livre de Martin Hirsch sur les conflits d’intérêt. Couriellant à Jean-François Copé le dispositif de mon message sur notre impasse saharienne, je commente l’ancien haut-commissaire.
Les comptes-rendus du livre de Martin Hirsch que je ne me suis pas encore procuré : pour beaucoup de livres politiques (je les achetais aussitôt à mes vingt ans ne retenant de l'homme du 18 Juin que l'indépendance et nullement la prise de carte au parti), j'attends la dégriffe à deux euros, mais... ce qui est choquant, c'est évidemment que vous ayez deux métiers et plusieurs sources de revenus, même si vous avez garde de "plaider" dans des domaines où vous avez le label gouvernemental, mais c'est surtout que sans qualification vous ayez pu prêter serment et alors que vous étiez déjà parlementaire. En fait, la présentation par le cabinet Gide a suffi. Même analyse pour la prestation de serment de Dominique de Villepin. Vous et lui êtes des agents d'influence, mais pas de dossiers, et vous le savez. C'est cela à mon sens - le passe-droit et le type d'activités attendues de vous par votre employeur. Evidemment, un démenti sur ces deux points me sera agréable.
Je le dis d'autant plus tranquillement qu'ayant - au titre du commerce extérieur (l'ancienne DREE) - fait du contentieux d'entreprises à l'étranger pendant vingt ans, et étant par ailleurs agrégatif de droit public, et ayant "gratté" pour moi, pour ma femme et pour des relations dans mon village breton, X recours et mémoires en judiciaire et en administratif et jusqu'en Cour européenne des droits de l'homme, épaulant nos avocats en Cassation, et relu par un ancien garde des Sceaux et un ancien président du Conseil constitutionnel, je n'ai pu malgré mes demandes aux cellules du barreau parisien compétente être admis : pas de titres, ni d'expérience, nécessité pratique d'être présenté par un cabinet. J'ai fait les plus grands il y a une quinzaine d'années - instructif. On n'est pris que si l'on apaporte des affaires... ou de l'ouverture de portes.
Votre stratégie présidentielle est évidemment calquée - contestation du prince régnant - sur celle de Nicolas Sarkozy. Elle ne peut être utile au pays que selon un programme et un comportement.
Quant à Martin Hirsch, il sera ministre avec rang et prérogative dans le gouvernement prochain de la gauche, comme gage de l'ouverture à droite... je vous laisse la propriété du mot, si vous en voulez un en contre-attaque.

Quant à Gérard Longuet, je sus – étant ambassadeur au Kazakhstan – sa liaison avec Alex Moskovitch, réfugié ukrainien dans la Résistance française, puis élu RPF au conseil municipal de Paris (où il était chargé des questions de mœurs et de police…) et reparti en Union soviétique en même temps que Vinogradov, pour devenir « conseiller spécial » de Nazarbaev, au pourcentage sur les échanges franco-kazakhs… Nazarbaev acquit sous un faux nom la villa jouxtant du côté de Saint-Tropez celle de Gérard Longuet. De là, tout peut se supposer. La Lorraine en Provence… est-ce le genre ? Ce dernier, portant beau et accompagnant en couple François Mitterrand quand celui-ci vint – intuitu personae – sur mes terres d’affectation, avait été chaleureux avec moi, et son cabinet efficace pour les avancées que je voulais faire sur place dans le domaine de sa compétence, mais communication… qualifier de sympathique la somme de quinze mille euros venant des timbres qu’offre au ministre, autorité de tutelle, La Poste, c’est ne pas se rendre compte que c’est plusieurs fois la ressource annuelle de ceux qui sont au RMI et autres RSA… Le problème est que nos poltiiques tout simplement ne se rendent pas compte et de la réalité vêcue par la majorité d’entre nous et de ce qu’ils disent d’eux-mêmes.

Rachida Dati, soumise dans sa circonscription à la convoitise du Premier ministre qui la vise pour son ancrage en vue de la mairie de Paris, en réussit une belle : fellation pour inflation. Elle s’était déjà « marrée » pour ses lapsi dans les exposés européens que la campagne pour le Parlement de Strasbourg et Bruxelles l’obligeait à faire…

[1] - exposition peinture Janos Ber – Faire face . 1959 à 2009 . Gavrinis 1965

[2] - Job I 6 à 22 ; psaume XVII ; évangile selon saint Luc IX 46 à 50

vendredi 24 septembre 2010

Inquiétude & Certitudes - vendredi 24 septembre 2010


Vendredi 24 Septembre 2010

Prier…
[1] Jésus leur défendit vivement de le révéler à personne. La profession de foi de Pierre, au nom des disciples, et fondatrice de l’Eglise, de notre foi, n’est pas de soi le moteur de l’histoire ni celui de notre salut. Ce n’est pas nous qui propageons et sauvons, mais le Christ. Il faut que le Fils de l’homme… Pourquoi ? limites de ce que nous sommes ? Dieu a mis toute la durée du temps dans l’esprit de l’homme, et pourtant celui-ci est incapable d’embrasser l’œuvre que Dieu a faite, du début jusqu’à la fin. Plus que notre finitude, que mes limites, il y a un moment pour tout, et un temps pour chaque chose sous le ciel : un temps pour engendrer, et un temps pour mourir. Moment, temps et nous-mêmes sont à Dieu. Qu’est-ce que l’homme pour que tu le connaisses, Seigneur, le fils d’un homme pour que tu comptes avec lui ? Peut-être vais-je commencer de comprendre cette expression qui a toujours été pour moi énigmatique : le Fils de Dieu fait homme ne s’appelle lui-même que le Fils de l’homme, tout en « validant » l’identité que lui reconnaît Pierre. Jésus est fils de tout l’homme par son incarnation. Incarnation qui a permis le procès, la passion et la résurrection, le salut autant qu’une existence de quelques décennies avec les rencontres et l’historicité qui vont avec. Chance qu’est pour nous la mort. En sus de la mienne, j’ai la grâce de vivre entre deux : mon éminent ami, mort, est plus extraordinaire que vivant, car il était si simple de vie et d’abord, de dialogue, le voici maintenant tout puissant dans nos cœurs et notre mémoire, foin de carrière et entièrement d’âme, foin d’intelligence et entièrement de lumière, d’accueil et de transmission. Et voici aussi que celui – moine – qui me toucha tant et m’apprit tant (la formule d’Henri Massis qu’il me rappelle pour la seconde fois, hier après Toujounine en 2001 : l’amitié entre les hommes ou entre hommes, est amitié d’idées, ce qui rehausse plus les idées que les hommes), ce moine sait avouer qu’il ne conçoit pas sa propre mort et pense même que c’est la situation mentale et d’âme de chacun. Ce n’est pas la mienne : avez-vous vu quelqu’un mourir, j’ai dit la mort d’un autre moine, me donnant son dernier regard alors qu’il était dans le coma depuis des heuees, mais il avait attendu que j’ai fini de lire ses propres lettres, à haute voix, pour ne pas aller jusqu’à l’inspiration suivante. Dom M. a vu sa mère mourir, mais il ne le dialogue pas. Ces morts et retrouvailles enjambent quarante… cinquante ans de ma vie. Jésus, cheminant entre ses ennemis et ses amis, enjambait l’éternité et tout le temps. J’arrête et prie. Quelle chance que Dieu soit souverain et non nous. Il est le bouclier qui m'abrite.

matin

Les syndicats plus que satisfaits : trois millions de manifestants, davantage que le 7… le gouvernement conforté, « sensible décélération » du mouvement (reprise du diagnostic d’Eric Woerth sur Europe 1 hier soir, voix d’adolescent ou chef scout pour des choses si graves, et auxquelles tant de gens attachent du sérieux, leur dignité personnelle quand ils manifestent une opinion, leur sort à la retraite car de l’argent dépend tout du niveau de vie à la relation de couple ou parents-enfants-petits-enfants, les désinvoltes et ceux qui souffrent). Côté police, moins d’un million de manifestants. Je crois que la vérité n’est pas entre deux, mais qu’il y a bien eu, peut-être moins de grévistes pour des raisons de fin de mois, mais davantage de manifestants que le 7. Simplement, le gouvernement est en campagne présidentielle, la réforme doit passer absolument pour faire bilan constructif et manière de gouverner en programme de la réélection de Sarkozy. Le triomphe au Parlement, qui aurait donc donné le ton à l’opinion – démocratie d’aujourd’hui « irréprochable »… - sera fêté par le remaniement.

Je suis de plus en plus curieux de voir comment cela va finir. Au quart de point pour le second tour de l’élection en 2012 ? je ne le crois pas, le pays va être labouré de propagande gouvernementale, Sarkozy en est le chef (son commentaire publié à la mi-journée d’hier sur la moindre participation au mouvement social), et en réponse, vont venir en avalanche les affaires, tous ceux qui savent quelque chose professionnellement mais sont tellement écoeurés que le devoir de dire va passer au-dessus du devoir de réserve, vont déballer, comme jamais vu en France. Sans compter que nos politiques en Afrique et pro-Israël vont continuer de faire prétexte à attentats et enlèvements, autant de banderilles essoufflant le taureau et empêchant une communication univoque et « sereine ». La pièce est jouée mais le texte et l’heure du baisser de rideau ne me sont pas connus.

midi

Je suis autant que je peux l’affaire de l’enlèvement des cinq Français et des deux Africain et Malgache au Niger. En situation de contrainte, le régime évolue… Sarkozy consulte, agit en collège, quatre réunions déjà du conseil de Défense. Fillon consent à informer l’opposition et les chefs des élus de celle-ci en tant que telle. On n’est plus bannière au vent, la volonté de négocier est affichée, en fait on est dominé.

soir

Autonomie des deux fronts. Martine Aubry avait tout à fait raison hier en début de manifestation de la Bastille à la République, de dire que le PS et les oppositions de gauche sont « derrière les syndicats et les Français ». C’est un fait… 62% des Français ne croient pas que le PS reviendra sur les 62 ans, nouvel âge légal de la retraite, ce qui signifie bien qu’ils n’attendent pas en 2012 une rupture avec le sarkozysme si les socialistes l’emportent : expérience de 1997, il est vrai ouverte dans l’imprévu alors que 1981 avait été le fruit d’une longue attente que s’ouvre l‘alternative. Et puis la question des primaires : si elles sont transparentes, elles seront désordonnées et de dénouement peut-être inattendu, mais une entente par avance DSK-Aubry comme a déjà été actée l’entente Royal-Aubry déplaît. Enfin, quelle ligne ? Hamon la dit commune avec Besancenot et se fait taper sur les doigts. La politique n’est pas déterminée, tandis que le social : si. Les affirmations gouvernementales depuis hier midi sur la décélération des manifestations et des grèves ne sont nullement conclusives, elles ont provoqué aujourd’hui le scandale et c’est vêcu à la tête des syndicats comme du mépris plus que comme du mensonge. Défi relevé habilement : manifestation un jour de congé, le samedi 2 et un jour ouvré, le mardi 12. Villepin et Bayrou s’agitent mais confirment que le politique, dans l’affaire, est artificiel : on revient aux sources de la politique qui n’est pas le débat entre partis sur quelque scène que ce soit, plus ou moins arrangée, mais entre gouvernants et gouvernés : comment s’opposer à une loi qui déplaît ou qui est injuste, comment participer à la décision ? grèves, manifestations et sans doute leur exaspération qui une fois commencée échappera à tout le monde, syndicalistes compris.

Je suis heureux de cette possible radicalisation que remettrait les choses dans le concret : conflit de forces et d’intérêts, incapacité du gouvernement à faire consensus et à écrire quelque chose d’équitable et désintéressé tant en termes de clientèle du moment que de brigue d’un nouveau mandat.

[1] - Ecclésiaste III 1 à 11 ; psaume CXLIV ; évangile selon saint Luc IX 18 à 22

jeudi 23 septembre 2010

Inquiétude & Certitudes - jeudi 23 septembre 2010


Jeudi 23 Septembre 2010


Hier, à Rioz - 16 heures 30 + Tandis qu’on pellete le gravier pour en recouvrir les deux dalles de parpaing qu’on n’a pas cimenté, j’ai lu, sur la tranche de la pierre tombale : Jean- 1910 et déplaçant un peu une autre plante : Monod 2008.
Et je suis revenu, heureux d’être seul, bruit de la pelle, dégoulinade du gravier qu’on répand et étale, soleil très brillant.
Le sourire, son sourire, un tel sourire ne peut être celui d’un homme qui ne… la vie, lui-même, l’amour pour sa femme, l’ayant précédé de moins de trois ans : fini ? aboli ? disparu ? A-t-il pu le réfléchir et le penser ainsi ? Je l’entends même s’il ne l’a jamais dit (peut-être), ne me l’a jamais dit en tout cas. On ne sourit pas au présent, on sourit à l’autre.
Il croyait donc, mais quoi ? (il s’agit ici de maintenant, de la mort, de sa mort, de notre mort, de la vie donc, de toute vie, de …). Il croyait… certainement non à des idées, ni à un enseignement, lui-même avait tellement dépassé ses maître et il transmettait des méthodes, des vertus, sa propre mémoire, mais le résultat, le bout du chemin, et au fond l’objectif, il ne les disait pas, ne les imposait pas. Il aurait su qu’il ne les aurait pas prêché. Libre, il laissait libre. Humblement – j’en suis sûr – il n’excluait rien, l’expérience vaudraut tout, il ne s’en inquiétait pas.
Cette tranquillité d’âme donne une leçon aux croyants, pas seulement parce qu’ils ne témoignent que peu ou pas du tout – lacunes ou parole si banale, si peu surnaturelle – alors que lui en avait à revendre et le donnait gratuitement.
Tranquillité d’âme qui me paraît l’absolu de la foi parce qu’il ne l’élucidait pas, ne la définissait pas, ne pouvait l’imaginer l’avoir, aucun prétention, mais un tel optimisme, un tel calme, un tel dépouillement du regard sur l’autre, sur lui-même, un tel amour pour sa femme.
Il avait aimé, transmis, vêcu, servi sans servilité, affirmé sans forfanterie. Quelle tranquillité reçue de lui qu’avoir été à l’écouter ! j’y ai été admis, probablement un des rares à n’avoir aucun titre de sang, de collaboration, de mission, de notoriété, j’ai été tout fait du rang mais traité comme si je devais bébéficier d’une préférence. Délicatesse extrême d’un tel accueil, le témoignage d’âme est là, l’originalité extrême d’une intelligence à l’expression si simple et à l’universalité si évidente est là. Intelligence maintenant d’une foi non spéculative, non démonstrative, non dogmatique, non désespérée ou désespérante (celle de tant de chrétiens ou de professionnels de la foi.
La mort si simple, la vie si grande. Jeudi dernier et presque cent ans, l’addition s’impose, est-il bon de se la dire. Sa marche d’esprit était certaine, s’arrêtant une fois, il m’avait dit, ce qui est une attitude vraie et avouée et au fond celle de tout vivant : on ne sait pas. Marche, attitude, dire, je crois – assis ici devant sa tombe, celle des siens – que c’est la foi.
Sur la tranche de la pierre tombale :
Marie-Laure née Monod Jean-Marcel
1913-2008 1910-2010

et la tombe voisine, à la perpendiculaire de la sienne, est la seule du cimetière ainsi orientée, surmontée d’une croix de fer façon 1860-1880. Elle semble pour deux, fait-elle seulement fond et décor, plus loin la colline doit descendre et de l’autre côté, après le creux de la grand-rue, sans doute celle nommée Charles de Gaulle, le clocher comtois et les vallonnements et collinnements qui sont une forêt – point commun avec le Général – paysages verts, moutonnants, cachant qu’il peut y avoir des limites, l’horizon qu’on ne voit pas quand il n’est que forêts. Ernest Prosjean + Mars 1865 … Marguerite veuve Prosjean + Octobre 1878.
La tombe est couverte de fleurs, on distingue le bronze d’une palme : la guerre, sur son à-plat. Le gravier est impeccable. Aujourd’hui a passé, est là, ici. Puis…

Ce matin, 08 heures 10 + Prier… lui, nous, tous, notre grandeur par la mort, notre grandeur par nos vies, pas plus humain, pas plus vivant que de transmettre. Tu fais retourner l’homme à la poussière, tu as dit : ‘Retournez, fils d’Adam !’. A tes yeux, mille ans sont comme hier, c’est un jour qui s’en va, une heure dans la nuit. Mais le psaume, l’expérience et la foi humaines ne s’arrête à la prise de conscience tout humaine et salubre de notre infinie petitesse et de notre finitude : Reviens, Seigneur, pourquoi tarder ? Ravise-toi par égard pour tes serviteurs. Nous avons un rôle à jouer, des actes à poser : la foi n’est pas une affirmation, ni une certitude, elle est une demande et Dieu fait qu’elle est notre réponse. La sienne avait tout précédé et créa tout. Rassasie-nous de ton amour au matin, que nous passions nos jours dans la joie et les chants. Que vienne sur nous la douceur du Seigneur, notre Dieu ! Et décisive bénédiction, réponse à la demande du Notre Père pour le pain quotidien et ce que, donc, nous en faisons : consolide pour nous l’ouvrage de nos mains.
[1] L’Ancien Testament, quand il tâtonne et n’a qu’expérience ou désir, ses livres « sapientiaux »… ce qui a existé, c’est cela qui existera ; ce qui s’est fait, c’est cela qui se fera ; il n’y a rien de nouveau sous le soleil (j’eus cela en composition de philosophie, sans qu’il soit indiqué que c’est une citation biblique, je ne me souviens plus de ce que je dissertais, mais j’ai tendance à croire que je pris le contre-pied). Y a-t-il une seule chose dont on dise : ‘Voilà enfin du nouveau !’. Non, cela existait déjà dans les siècles passés. Seulement, il ne reste pas de souvenir d’autrefois ; de même, les événements futurs ne laisseront pas de souvenir après eux. C’est le vanitas vanitatum commençant un discours (oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre ?) de Bossuet devant le Roi-Soleil… certains disaient que Jean le Baptiste était ressuscité d’entre les morts. D’autres disaient : ‘C’est le prophète Elie qui est apparu’. D’autres encore : ‘C’est un prophète d’autrefois qui est ressuscité’. Quant à Hérode, il disait : ‘Jean, je l’ai fait décapiter, mais qui est cet homme dont j’entends tellement parler ?’. Et il cherchait à le voir. La mort, la vie, la foi, c’est un fait, c’est un homme, c’est Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme. Tout le reste, et nous donc, manque de solidité. – Hier, quarante ans d’amitié et d’écoûte, de leçon, de mémoire, d’échange. Tout à l’heure, le moine qui à mes vingt ans m’introduisit à l’anxiété autant qu’à la certitude – non de la foi ou d’une foi que la naissance m’a donnée et que la vie ne m’a jamais retirée – mais d’un dialogue avec Dieu, sans cesse compagnon de nos existences qu’elles cherchent ou qu’elles aient trouvé leur orientation, Lui. Moine indiquant l’idéal et la radicalité monastiques, alors, moine montrant beaucoup plus tard l’infirmité toujours possible de la vie quand l’humus de l’ego couvre les vœux, ce qui est la leçon silencieuse et demanderesse du grand secours divin. De l’admiration au scandale, et de là une amitié enfin fraternelle. Moine qui au possible a le don de l’humour parce que l’essentiel de son dire il y a longtemps et ce soir sans doute à nouveau, est bien que la vie est tragique mais que nous pouvons en faire quelque chose. Et de rire. Si certains dires de la vérité paraissent surannés, le rire qui conclut la discrétion de l’émotion. – D’une vie à une autre, de mes aimées à mes aimées, la France aller-retour dont les paysages sont d’homme, d’histoire et de vert, l’automne prépare le printemps. Banal, vie.


Route normande en bissectrice des grands itinéraires de Paris à Rouen et Caen, et de Paris à Orléans-Tours-Poitiers ou Nantes : la route de Dreux, l’Aigle, Argentan par les haras du Pin. Les nouvelles sur plusieurs postes. dont Radio-Orient que je découvre ainsi qu’Africa One.

La manifestation principale de la journée, celle de la Bastille à la Nation pour Paris, commence à peine que l’Elysée communique son évaluation de la mobilisation populaire : elle est nettement en baisse par rapport au 7 Septembre, ce qui signifie que la pédagogie paye, que le vote de l’Assemblée nationale en première lecture a été compris et est approuvé, qu’en conséquence le gouvernement est conforté dans son texte et dans sa fermeté. C’est le cynisme absolu. La présidence de la République communique sur les manifestations qui lui sont opposées – tactique de Rachida Dati en campagne présidentielle, rien sur soi et une immense commisération dont on gratifie constamment l’adversaire – et elle communique à mi-parcours. La note est donné à tout l’U.M.P. et au gouvernement comme dans ma chère Mauritanie, lors de la première élection présidentielle organisée par les militaires – celle de 1992 – le gouvernement dictait par radio aux chefs de circonscription les chiffres à inscrire sur les PVs de dépouillement… les estimations varient du simple au décuple à Marseille, elles sont en début de soirée de près de 3 millions de manifestants selon les syndicats mais de 990.000 selon la police et le gouvernement. Eric Woerth constate donc une nette décélération et assure que la loi sera votée et appliquée : réponse à l’évocation du CPE voté mais non promulgué.

Excellent résumé des mises en place dans le domaine financier et monétaire par Jacques de La Rozière, mais en regard l’absence de vraie reprise aux Etats-Unis et en Europe. Avance réelle, par les décisions européennes sur rapport d’une commission dont je ne savais pas l’existence et qu’il semble avoir présidée : une autorité de régulation européenne pour les banques, une pour les assurances et une enfin pour les marchés, alors que la fragmentation continue de régner aux Etats-Unis et donc de bien moins régir. L’avancée la plus décisive est de faire passer de 2 à 7% (ce qui équivaut pratiquement à 10%) l’obligation de fonds propres rapportée aux engagements des banques. Il fait observer que chaque point vaut 500 milliards d’euros (ou de dollars ?).


[1] - Ecclésiaste I 2 à 11 ; psaume XC ; évangile selon saint Luc IX 7 à 9

mercredi 22 septembre 2010

Inquiétude & Certitudes - mercredi 22 septembre 2010

Mercredi 22 Septembre 2010

Prier…
[1] et si les gens refusent de vous accueillir… l’éventualité et pour bien moins que le grand message de notre destinée commune au bonheur et à l’accomplissement. Que faire ? sinon être ? ce sera pour eux un témoignage. … N’emportez rien pour la route. Et ce n’est pas le dénuement – obligé et naturel de la mort, qui, probablement, nous ravit quand un soupir, le nôtre, s’avère pour autrui nous entourant ou pas le dernier puisqu’il n’est pas suivi d’une reprise d’inspiration. C’est le dénuement qui devrait nous structurer à longueur de vie. Accorde-moi seulement de quoi subsister. Car, dans l'abondance, je pourrais te renier en disant : ‘Le Seigneur n’existe pas ‘. Et, dans la misère, je pourrais devenir un voleur, et profaner ainsi le nom de Dieu. Ce qui m’effare chez les gens de position et plus encore de culture, c’est que tous leurs arguments d’indifférence, d’incroyance ou de dédain, toute la non-foi sont décrits, vêcus et tranquillement réduits à peu dans les Ecritures, qu’ils n’ouvrent pas. J’y inclus naturellement le Coran que les mêmes caricaturent en autodidactes, c’est-à-dire en idées reçues. Ne me donne ni la pauvreté ni la richesse. Me taire car il est écrit : n’ajoute rien à sa parole, et me souvenir ce que j’ai déjà expérimenté à longueur de ma vie : toute parole de Dieu est garantie ; c’est un bouclier pour ceux qui cherchent en lui leur refuge.

La matinée et la fin de l’après-midi, écoute de la radio en voiture. Aller-retour Paris-Rioz (Haute-Saône) pour les obsèques de Jean-Marcel Jeanneney. Je reviens sur celles-ci plus bas, mais le contraste est saisissant entre l’histoire de la France pendant le siècle, à deux mois près, d’un homme à la lucidité exceptionnelle – qui le 13 Juillet 1919 eut la confidence de Clemenceau prenant sa main d’enfant pour aller sous l’Arc de Triomphe, Jean-Marcel était le fils du sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil du « père la Victoire », c’est-à-dire le ministre de confiance, et qui, il y a quelques semaines encore, opinait en détail sur la crise mondiale et française actuelle et sur nos dirigeants – entre l’histoire de la France et l’actualité dérisoire d’une campagne de réélection présidentielle tournant à une bande dessinée ou à une histoire de gangster.

Les derniers kilomètres d’autoroute, puis le contact encore, une fois arrivé à mon gîte d’étape… Le Parisien aujourd’hui, sans doute en vente parce que Marie-Odile Amaury, héritière du groupe, du journal, dit qu’elle veut se « recentrer » sur le sport : société du Tour de France et l’Equipe (déjà juge et partie avec la machine à sous et les tolérances aux tricheurs, qui vont forcément avec), en fait Lagardère, propriétaire d’une minorité de son groupe veut le quitter et elle doit financer le rachat de ses parts. Autant la recapitalisation du Monde s’était faite « à ciel ouvert », autant le changement de propriétaire au Parisien semble opaque, pas de commentaires. Mais selon les journalistes qui en discutent, l’Elysée aurait demandé à Serge Dassault de « regarder le dossier ». Ils font alors des additions : le journal qui a perdu six millions l’an dernier reste une bonne affaire comparé à tous les autres quotidiens, il serait devenu la référence des commentateurs dans l’audio-visuel, de populiste, il est devenu populaire. On ne dit pas, qu’en cela, il a donc remplacé France-Soir, celui des années soixante. Le commentaire est surtout l’addition en vue de la campagne présidentielle : Libération + Le Monde + L’Humanité ne dépassent guère 450.000 exemplaires au mieux (j’ai connu Le Monde vendant à lui seul plus de 500.000 exemplaires et durablement) contre Le Figaro + Les Echos + Le Parisien + France-Soir dépassant ensemble le million (presque deux fois moins que le seul France-Soir de Lazareff dans les années 1960). Dassault rachetant ne serait cependant pas en contravention avec les textes sur la concurrence (ne dépassant pas 30% des tirages totaux de la presse quotidienne écrite). Citation de Frédéric Mitterrand : affaire de presse est affaire économique et pas politique, les rédactions restent libres, etc… Je trouve effrayant que l’Elysée se mêle des rachats de journaux, mais… il est vrai que le Général à la Libération s’en mêla aussi puisqu’il « donna » à Beuve-Méry Le Temps… il est vrai que c’était pour qu’existât un modèle de presse indépendante, en même temps que se créait l’A.F.P. Aucun des journalistes ne fait le rapprochement avec la nouvelle « tombée » un quart d’heure plus haut : l’annulation par le Conseil d’Etat du scrutin municipal à Corbeil-Essonne pour la seconde fois en dix-huit mois permet à Serge Dassault de se faire réélire : celui-ci annoncera son éventuelle décision la semaine prochaine…

Même agitation et même opacité. Les otages enlevés à Arlit et la menace terroriste en France.

Le directeur de la police, toujours le même ayant à son actif – révélations d’une seule semaine – la recherche des sources du Monde et l’intervention en faveur de son fils, affaire de scooter comme celle de Jean Sarkozy, mais dans un cas : ivresse et outrage à agent, dans l’autre : délit de fuite, ce policier se répand dans les radios pour dire ses certitudes et pronostics d’éclatement de bombes. Passage au rouge renforcé de vigipirate, mais l’enquête montre que dans les gares notamment, rien de changé. On a l’imprudence aussi de dire le nombre de militaires impliqués : pas six cent, dont les deux tiers en région parisienne. Personne n’évoque le carton que feraient des kamikazes dans les cortèges de manifestants, demain. Ce serait d’un affreux, horrible cynisme, mais pour semer la terreur et pour désorganiser le pays : pas plus efficace.

Débat sur le compte non tenu par Areva des avertissements – 1er Avril – de la préfecture d’Arlit. Evocation qui ne passe qu’une fois, d’une base d’écoute américaine, près de Tamanrasset, forte de quatre cent expatriés et sur laquelle s’appuierait la recherche française, qui ne dispose donc d’aucun outil de cette sorte. Prenant par hasard Radio-Vatican, indication que l’ambassadeur américain en Mauritanie, une femme, plaide au Capitole pour un renforcement très important de la coopération avec le régime mauritanien pour la lutte anti-terroriste. Ce n’est pas repris par les médias français, qui ne disent qu’une seule fois la coopération franco-américaine dès avant le dernier enlèvement. Coincidence : deux Français enlevés par des pirates – aussitôt qualifiés tels par Hervé Morin et par les experts (universitaires en stratégie, terrorisme et zones géographiques – dans le delta du Niger. Qui se souvient de la guerre du Biafra et mentionne aujourd’hui l’indépendantisme qui serait la meilleure lutte possible contre le banditisme ? L’Elysée affirme que « tous les moyens de l’Etat sont à pied d’œuvre pour retrouver les otages ». D’autre source : pas d’usage de la force militaire, mais chiffres variant depuis hier de dizaines aux centaines d’hommes positionnés là-bas. Avec variations de site : Niamey, puis Ouagadougou. Je prévois quant à moi une succession d’enlèvements à ne plus savoir que communiquer ni où donner de l’avion ou du coup de main.

Supputation pour demain. Les syndicats divisés sur la reconductibilité des grèves. En fait, eux et l’opinion, sont fascinés par le gouvernement dont la crédibilité est totale : les manifestations ne changeront rien, même si l’étiage des 2,7 millions (évaluations des organisateurs) ou du 1,1 million (évaluation de la police) se maintient du 7 au 23 … Imprudence certaine du Parti socialiste : si nous revenons au pouvoir, abolition de la réforme et retour aux soixante ans. Imprudence parce que tout dirigeant, pas seulement d’entreprise, sera heureux de trouver la réforme faite en ce sens, injuste ou pas, efficace ou pas, et qu’en conséquence la promesse ne sera pas tenue, ce qui sera un démarrage déplorable et rééditera la déception Jospin (qu’on n’entend d’ailleurs pas sur le sujet). Imprudence parce qu’ainsi les manifestations sont inutiles et que seul le bulletin de vote – mais dans près de deux ans encore – sera utile. Grève et manifestation deviendraient donc inutiles. Les commentaires les traitent comme des outils, alors que celles qui changèrent la société et d’abord les lois étaient des révoltes, même des révolutions. On voit combien nos dirigeants seraient totalement débordés et aphones si vraiment il y avait un mouvement social Cynisme et condescendance d’Eric Woerth, inquiétude et manifestation parfaitement compréhensibles, mais le gouvernement ne changera en rien le texte. Voire. Avec finesse, Chérèque répète que le gouvernement doute et a déjà reculé, même si ce sont des détails. On voit d’ailleurs un point sur lequel il va immanquablement bouger. La question des femmes ayant au moins trois enfants et que la réforme pénalise – sans compter que c’est un évident déni de politique familiale et nataliste – la Halde (il est vrai que la nouvelle présidente doit faire oublier ses prétentions de cumuler plusieurs rémunérations) et le président du Sénat veulent et donnent des amendements.

Obsèques à Rioz (Haute-Saône) de Jean-Marcel Jeannenney, ministre du général de Gaulle de 1959 à 1962 et de 1966 à 1969 : il ouvrit notre ambassade en Algérie indépendante, il avait dirigé le cabinet de son père à Matignon, à la Libération, pendant laquelle le dernier président du Sénat de la Troisième République, fut ministre d’Etat de l’homme du 18-Juin. – Je le visitais régulièrement depuis 1972…

. . . à Rioz – Haute Saône, 13 heures 45 et ensuite + Changé en forêt le long de la route allant, très passante et bien tracée vers Vesoul. Trois quarts d’heure de décompression après la route. – Je ne me souvenais plus du tout de l’arrivée à Rioz, le giatoire, la grand-rue, barrage, je demande le cimetière. Facile à trouver, en hauteur, personne qu’un petit détachement de police en chemise clair avec armes et trois ou quatre personnes, trois drapeaux et leur homme chacun. Quelque chose ailleurs ? avant ? j’attends. Un homme plutôt jeune, barbe italienne. Le directeur du cabinet du préfet, coopération pour les Nations Unies à partir du Tchad pour tout le Sahel, aventure d’une frontière franchie sans le savoir entre Mali et Mauritanie en voiture, intercepté, des heures d’attente, il aurait pu disparaître et demeurer à jamais introuvable. Je ne me suis présenté que sommairement. – La tombe auparavant, ouverte, un cercueil bien visible, les gerbes, une petite estrade à micro, quelques rangs de sièges dans l’allée, en faisant face on a la tombe, deux ou trois autres, le micro, puis les sièges.

Le cortège arrive, fourgon et petite foule, famille et autres par une montée qui a fait tournant. Je suppose qu’il y avait réunion dans la maison ancestrale. J’ai pris le parti de la totale discrétion et de la simple prière, de l’écoute et du regard.

La série de discours – on a commencé vers deux heures vingt – est longue, je filme mais ma bobine était presque finie. Je regrette, France 3 a filmé, mais pas tout. J’apprends énormément et d’abord de Jean-Noël Jeanneney qui « préside » et passe la parole. Ainsi, de même que lui-même fut emmené par son père à Colombey, sans doute sans que le Général et Madame de Gaulle en soient prévenus ? il y a même la photo. prise par Madame Jeanneney pour que les deux hommes, la dynastie, y figurent bien, de même le petit Jean-Marcel est à l’Arc-de-Triomphe le 13 Juillet 1919, avec son père et donc aux côtés de Clemenceau qui lui prend la main pour marcher – seul avec lui – jusqu’à l’emplacement futur de la Flamme ou en était-ce déjà l’inauguration ? Récits intéressants-témoignages de Jean-Claude Casanova sur la formation et le fonctionnement du cabinet rue de Grenelle à l’Industrie de 1959 à 1962, que cinq et lui-même comme Barre, également occupés à autre chose, JMJ et le thé d’après-midi, les explications de décision et le récit de la journée, puis Jean-Paul Fitoussi moins factuel, pleurant d’émotion en péroraison mais donnant l’importance intellectuelle, déjà soulignée par JCC (l’institut de la rue Michelet, les livres, thèses et recherches inspirés par JMJ). L’OFCE autant grâce à Raymond Barre qu’à François Goguel pour avoir raison de la Fondation des Sciences-Po. auquel l’Office sera rattaché. Projet du centenaire, acclamé par le personnel là-bas. Ambitions de l’équipe : le Nobel d’économie. Le passage de l’économie littéraire à l’économie quantitative, l’amour des graphiques, fond du langage commun et donc d’une discussion éclairée, fructuteuse, aboutissant. Bonne observation sur le cadre de tout débat et ce que nous en oublions ces temps-ci.

Confirmation – mais avec éclat, redondance et émotion – de ce que fut le couple, un amour qui frappait d’exemple surtout les enfants et petits-enfants. Mais que de choses j’apprends. De l’ordre intime. Forcément de la distance avec les enfants et plus encore avec les petits-enfants et arrière-petits-enfants, intimidés, mais des « anecdotes » de proximité et d’aveu sobre d’amour et d’intérêt. Marie-Laure en fait chargée, déléguée de ces éducations et pour l’affectivité et l’aveu, il faut la mort de celle-ci pour que Jean-Marcel prenne complètement le relais. J’apprends… les fleurs, les arbres, la veille des plantations, leur taille, la mise à contribution de toute la ressource humaine (les siens, ses enfants et leurs enfants – quelques mots avec un quidam, en attendant le cortège : le préposé aux arbres, et uniquement aux arbres, pas jardinier, recevant les ordres de JMJ lui-même, un peu fatigué, pas le même ce dernier été mais ayant prévu le bois, les coupes, et tout pour l’hiver. Inquiétude du bonhomme, sans doute pas quarante ans mais assez massif, tant d’enfants et ayant-droits, qui dirigera, que va devenir la propriété ? Laurence, présente à Rioz comme adjointe, a acheté, ou fait construire, à côté). Particulièrement, les chênes rouges d’Amérique, la taille des buis malgré la pratique de faire des cabanes à l’intérieur de leurs massifs, l’arrosage enfin des anémones.

Les colères soudaines, mais brèves, le mouchoir tendu ensuite, ce n’est pas la peine de pleurer. Colères vers les petits-enfants. Echo et confirmation de cette semi-colère qui m’avait surprise en réponse à mon acharnement pour que Marguerite pose afin que nous ayons de photo. de lui avec notre fille : impossible ou raté. Vous êtes complètement irresponsable, mais il lui avait préparé une petite chaise d’enfant qu’elle occupa peu, allant assez vite dormir sur le canapé de la partie bureau. – La mise à l’informatique a manifestement sidéré tout le monde dans sa famille et chez tout visiteur, avec ce que j’ai vêcu moi-même, une certaine gaucherie en traitement de texte, combien l’ont tuyauté… Importance de l’écriture-composition de sa mémoire familiale (des deux « côtés ») dont il s’ouvrait à chacun des siens le visitant. Les récits de table, l’ennui des tout-petits mais la contagion vite dès que les années donnaient l’âge de raison. Témoignages donc et prise de paroles d’enfants, petits-enfants et arrière petits-enfants. Conscience de tous du grand homme. Son sourire, son optimisme (si le ciel noircissait : cela va s’éclaircir), place considérable dans sa vie et dans son équilibre donc, de ce « territoire » qu’il continuait de veiller (rythme des visites et entretiens avec ses successeurs) et de cette propriété. Rioz dont semblent originaires la plupart des dirigeants élus du département, à la suite de Jules Jeanneney, et qui, par JMJ, inaugure une possible série de monographies situant les débats et scrutins municipaux dans l’histoire nationale : manifestement, les élus qui ont pris la parole y ont été sensibles. Confirmation Le préfet, presque adolescent, le visage semi-masqué par la casquette portée trop bas, a manqué son discours : il eût dû improviser, ce qu’apprend un jeune haut fonctionnaire, aujourd’hui et dans la perte de repères et du sens de l’Etat aujourd’hui, ce qu’il apprend en méditant JMJ. L’avait-il rencontré ? il y eût fait allusion.

La gouvernante (chilienne, qu’il avait sauvé à sa demande d’asile politique) était-elle là ? son thésard aux deux volumes sur Le patricien et le général, état-il là ? Pas de message du gouvernement ni de l’Elysée, pas le préfet de région. Allusion à la foi chrétienne de certains des enfants et petits-enfants mais ouverture des hommages par le rappel à l’identique des dispositions souhaitées par Jules Jeanneney : obsèques civiles.

16 heures 30 + Tandis qu’on pellete le gravier pour en recouvrir les deux dalles de parpaing qu’on n’a pas cimenté, j’ai lu, sur la tranche de la pierre tombale : Jean- 1910 et déplaçant un peu une autre plante : Monod 2008.
Et je suis revenu, heureux d’être seul, bruit de la pelle, dégoulinade du gravier qu’on répand et étale, soliel très brillant.
Le sourire, son sourire, un tel sourire ne peut être celui d’un homme qui ne… la vie, lui-même, l’amour pour sa femme, l’ayant précédé de moins de trois ans : fini ? aboli ? disparu ? A-t-il pu le réfléchir et le penser ainsi ? Je l’entends même s’il ne l’a jamais dit (peut-être), ne me l’a jamais dit en tout cas. On ne sourit pas au présent, on sourit à l’autre.

Il croyait donc, mais quoi ? (il s’agit ici de maintenant, de la mort, de sa mort, de notre mort, de la vie donc, de toute vie, de …). Il croyait… certainement non à des idées, ni à un enseignement, lui-même avait tellement dépassé ses maître et il transmettait des méthodes, des vertus, sa propre mémoire, mais le résultat, le bout du chemin, et au fond l’objectif, il ne les disait pas, ne les imposait pas. Il aurait su qu’il ne les aurait pas prêché. Libre, il laissait libre. Humblement – j’en suis sûr – il n’excluait rien, l’expérience vaudraut tout, il ne s’en inquiétait pas.

Cette tranquillité d’âme donne une leçon aux croyants, pas seulement parce qu’ils ne témoignent que peu ou pas du tout – lacunes ou parole si banale, si peu surnaturelle – alors que lui en avait à revendre et le donnait gratuitement.

Tranquillité d’âme qui me paraît l’absolu de la foi parce qu’il ne l’élucidait pas, ne la définissait pas, ne pouvait l’imaginer l’avoir, aucun prétention, mais un tel optimisme, un tel calme, un tel dépouillement du regard sur l’autre, sur lui-même, un tel amour pour sa femme.

Il avait aimé, transmis, vêcu, servi sans servilité, affirmé sans forfanterie. Quelle tranquillité reçue de lui qu’avoir été à l’écouter ! j’y ai été admis, probablement un des rares à n’avoir aucun titre de sang, de collaboration, de mission, de notoriété, j’ai été tout fait du rang mais traité comme si je devais bébéficier d’une préférence. Délicatesse extrême d’un tel accueil, le témoignage d’âme est là, l’originalité extrême d’une intelligence à l’expression si simple et à l’universalité si évidente est là. Intelligence maintenant d’une foi non spéculative, non démonstrative, non dogmatique, non désespérée ou désespérante (celle de tant de chrétiens ou de professionnels de la foi.
La mort si simple, la vie si grande. Jeudi dernier et presque cent ans, l’addition s’impose, est-il bon de se la dire. Sa marche d’esprit était certaine, s’arrêtant une fois, il m’avait dit, ce qui est une attitude vraie et avouée et au fond celle de tout vivant : on ne sait pas. Marche, attitude, dire, je crois – assis ici devant sa tombe, celle des siens – que c’est la foi.
Sur la tranche de la pierre tombale :
Marie-Laure née Monod Jean-Marcel
1913-2008 1910-2010

et la tombe voisine, à la perpendiculaire de la sienne, est la seule du cimetière ainsi orientée, surmontée d’une croix de fer façon 1860-1880. Elle semble pour deux, fait-elle seulement fond et décor, plus loin la colline doit descendre et de l’autre côté, après le creux de la grand-rue, sans doute celle nommée Charles de Gaulle, le clocher comtois et les vallonnements et collinnements qui sont une forêt – point commun avec le Général – paysages verts, moutonnants, cachant qu’il peut y avoir des limites, l’horizon qu’on ne voit pas quand il n’est que forêts. Ernest Prosjean + Mars 1865 …. Marguerite veuve Prosjean + Octobre 1878.

La tombe est couverte de fleurs, on distingue le bronze d’une palme : la guerre, sur son à-plat. Le gravier est impeccable. Aujourd’hui a passé, est là, ici. Puis…

Je ne suis donc pas allé à la salle polyvalente où la mairie organisait quelque chose, j’ai pu embrasser Laurence si changée par rapport à 1960 mais depuis déjà longtemps, bien remettre Nathalie dont le mari a de l’allure plus que Jean-Claude Paye déjà ancêtre et embrasser aussi Jean-Noël. J’ai préféré être seul et avoir ce moment, témoin de hasard de la fermeture de la tombe. D’une « gerbe », détaché une marguerite. La plus belle, sans façons, évidemment la cueillette de fleurs qu’il aimait, celles du jardin de ses propres parents. – Je vais rouler, je songe puis renonce à une soirée sans préavis chez Alain R. à Pontarlier, le Haut-Doubs auquel je me suis tant donné, ineffaçablement pour moi. A Arc-et-Senans, un récital ? tandis que je tentais de faire campagne, l’été de 1980, arrivée des officiels avec le préfet, les élus, JMJ alors régnant. J’étais loin, mais c’est de Pontarlier qu’ensuite, sans doute en 1987, je suis allé le visiter dans son village, journée entière, il m’a tout montré, qui était souvent nouveau et son œuvre. Sauf le cimetière et la tombe de son père.

[1] - Proverbes XXX 5 à 9 ; psaume CXVIII ; évangile selon saint Luc IX 1 à 6