La période « chrysalide » du nouveau quinquennat
s’est terminée en trois jours à son cinquième mois : réponse populaire à
l’absence de changement et de décision vis-à-vis de la crise essentielle, celle
de l’emploi, donc la manifestation parisienne organisée par la « gauche de
la gauche », Front de gauche et Parti communiste notamment, le dimanche 30
septembre … notification par Arcelor-Mittal de la décision prise de fermer les
deux hauts-fourneaux de Florange à ses salariés, et au gouvernement du délai
que lui impartit la multinationale étrangère, le lundi 1er octobre…
le gouvernement soumet au vote de sa majorité un traité européen qui n’a pas
été re-négocié, contrairement aux engagements et promesses très développées du
candidat socialiste, et qui ne sera pas soumis au referendum ; il compte
sur le vote de l’opposition pour s’assurer d’assez de voix en autorisation de
ratification et surtout en adoption de
la loi organique, mardi 2 octobre…
Socialement calme, enregistrant même des négociations en
bonne ambiance aussi bien à propos de P.S.A. que des honoraires médicaux, le
sixième mois n’a cependant inversé ni la courbe ascensionnelle du chômage, ni
celle dégressive de la popularité du président de la République et de son Premier ministre.
1° la sanction pas seulement des
sondages
Selon C.S.A.,
41% seulement d’opinions favorables au président régnant et selon BVA-Orange
46% [1], le
17 Septembre. En quatre mois de mandat, l’élu du 6 Mai 2012 a perdu plus qu’en neuf
mois, l’élu du 6 Mai 2007. Pour résorber le chômage, seulement 34%, le 1er
Octobre lui font confiance, alors qu’à la même époque, en 2007, son
prédécesseur restait crédible à 56%.
Nicolas
Sarkozy fut vite « désaimé » parce qu’il agaçait personnellement
: excès de présence, de gesticulation, de vie privée, d’abus des institutions
et de la communication publique bien davantage que fut jamais censurée sa
politique économique et sociale, « désaimé » pour son image, ce qu’il
comprenait périodiquement puisqu’il prétendait en changer… c’était subjectif, d’ordre
psychotique de sa part et de celle des Français, ses propres électeurs compris.
Au contraire, c’est objectivement que François Hollande est jugé sur les faits
qu’il ne change pas, plus encore que sur une politique et une manière qui
donnent – pour le moment – raison rétrospectivement à son prédécesseur. Mais
cette absence d’alternative ne fait pas pour autant regretter le retrait de
Nicolas Sarkozy [2].
Ce n’est donc
pas de manière qu’il s’agit, mais de fond : contre ce que décida ou
développa le précédent quinquennat. Or, François Hollande jusqu’à présent –
restant personnellement sympathique aux Français – conforte cet héritage, y
compris dans la pratique institutionnelle. La moitié des effectifs français
restera en Afghanistan à la fin de cette année et le traité d’amitié avec ce
pays, négocié et signé par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, a été ratifié
par François Hollande. Celui-ci avait censuré notre réintégration de l’O.T.A.N.
il lui faut l’expertise d’Hubert Védrine sur les avantages et les inconvénients
que nous en avons retirés pour éventuellement décider de nous reprendre à
nouveau. Le traité de discipline budgétaire, négocié et signé par Nicolas
Sarkozy, est imposé par François Hollande à son parti et à sa majorité
parlementaire, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault en faisant
(paradoxalement) une question de confiance et de participation au gouvernement
pour les Verts. Le risque d’un referendum négatif à propos du traité de
Lisbonne n’avait pas été pris par Nicolas Sarkozy, il ne l’est pas davantage
par François Hollande à propos du nouveau texte européen.
64% des sondés
estiment que le quinquennat est déjà joué et le juge négativement. La surprise ne peut plus venir que d’un
changement total de cap. Cela de la part du gouvernement, Président et
Premier ministre considérés ensemble et tels qu’ils témoignent à l’envie de
leur unisson. Elle peut également venir du
peuple se manifestant comme il ne l’a plus fait depuis le « mouvement
de Novembre-Décembre 1995 », appellation significatif si elle est
rapportée à celle des « événements de Mai » 1968, dont de Gaulle
voulait d’ailleurs qu’elle s’étendit à Juin. En ce sens, le nouveau quinquennat
produit – malgré le flegme de ses deux principaux acteurs – un vrai suspense.
Qui est aujourd’hui la norme européenne sauf en Allemagne : les
gouvernements tiendront-ils en imposant aux peuples des contraintes
douloureuses dont ceux-ci savent surtout qu’elles ne sont pas efficaces mais au
contraire les punissent de fautes qu’ils n’ont pas commises et dont bénéficient
des entités et des personnes toujours pas mises au pas dans l’intérêt commun.
L’interrogation plus générale porte sur l’avenir européen, dont celui de
l’euro. n’est qu’un des « marqueurs ». Les Européens continueront-ils
d’être les victimes de la mûe mondiale politiquement initiée par la chute du
mur de Berlin et économiquement organisée par la déréglementation des activités
commerciales et financières, et surtout par le démantèlement des puissances
publiques, seules à être électives.
Verdict des sondages : François Hollande, six mois
après son élection ne la remporterait plus [3]
pas tant par une mauvaise image personnelle, mais du fait de la politique qu’il
incarne, jugée inefficace et injuste. Est-ce pour autant l’échec ? et quel
échec : de qui ? de quoi ?
[1] - BVA
Orange 17 Septembre 2012
1) Chute de la popularité de l'exécutif pendant l'été. Hollande devient
impopulaire pour la première fois
Hollande devient impopulaire en tant que Président pour la première fois depuis son élection. Avec 46% de bonnes opinions contre 53% de mauvaises. En tout, durant toute la période estivale (depuis fin juin - début juillet) il a chuté de 15 points. La cote d'alerte est dépassée auprès des plus de 65 ans (60% de mauvaises opinions), mais aussi des quadras (55% auprès des 35-49 ans). Outre les inactifs et les travailleurs indépendants, les deux extrémités du monde du salariat sont aujourd'hui majoritairement hostiles : 52% de mauvaises opinions auprès des cadres et 54% auprès des ouvriers. Les professions intermédiaires et les employés tout comme les salariés du secteur public (auquel ces professions appartiennent souvent) restent majoritairement des catégories acquises à Hollande : respectivement 52%, 55% et 58% de bonnes opinions. Si la comparaison avec la popularité de Nicolas Sarkozy en début de quinquennat est cruelle (57% de bonnes opinions), elle est un peu consolatrice avec François Mitterrand en septembre1981 et Jacques Chirac en 1995 (respectivement 49% et 44% de bonnes opinions). Ayrault, lui, subit une chute encore plus nette (-20 points) mais reste à l'équilibre avec 49% de bonnes comme de mauvaises opinions. On constate chez le Premier ministre les mêmes zones de force et de fragilité que chez le Président.
Hollande devient impopulaire en tant que Président pour la première fois depuis son élection. Avec 46% de bonnes opinions contre 53% de mauvaises. En tout, durant toute la période estivale (depuis fin juin - début juillet) il a chuté de 15 points. La cote d'alerte est dépassée auprès des plus de 65 ans (60% de mauvaises opinions), mais aussi des quadras (55% auprès des 35-49 ans). Outre les inactifs et les travailleurs indépendants, les deux extrémités du monde du salariat sont aujourd'hui majoritairement hostiles : 52% de mauvaises opinions auprès des cadres et 54% auprès des ouvriers. Les professions intermédiaires et les employés tout comme les salariés du secteur public (auquel ces professions appartiennent souvent) restent majoritairement des catégories acquises à Hollande : respectivement 52%, 55% et 58% de bonnes opinions. Si la comparaison avec la popularité de Nicolas Sarkozy en début de quinquennat est cruelle (57% de bonnes opinions), elle est un peu consolatrice avec François Mitterrand en septembre1981 et Jacques Chirac en 1995 (respectivement 49% et 44% de bonnes opinions). Ayrault, lui, subit une chute encore plus nette (-20 points) mais reste à l'équilibre avec 49% de bonnes comme de mauvaises opinions. On constate chez le Premier ministre les mêmes zones de force et de fragilité que chez le Président.
2) La politique menée est perçue comme étant à la fois pas efficace et
injuste ... et les Français ne croient pas au cap de redressement du pays en
deux ans.
La sanction est encore plus
lourde sur notre nouvelle double question barométrique mensuelle portant sur
l'efficacité et le caractère « juste » (critère présenté comme clé par Hollande
lui-même) de la politique menée.
Non seulement, plus des deux-tiers des Français (67%) jugent que la politique menée n'est pas efficace ... Mais en plus, une nette majorité (53% contre 45%) ne la juge même plus « juste ». Sarkozy aussi a longtemps pâti du même reproche ... mais uniquement après un an d'exercice du pouvoir.
Non seulement, plus des deux-tiers des Français (67%) jugent que la politique menée n'est pas efficace ... Mais en plus, une nette majorité (53% contre 45%) ne la juge même plus « juste ». Sarkozy aussi a longtemps pâti du même reproche ... mais uniquement après un an d'exercice du pouvoir.
[2] - CSA-RTL des 2.3 Octobre - publié
le 5 Octobre 2012
A la
question "vous personnellement regrettez-vous Nicolas Sarkozy comme
président de
2° les erreurs du nouveau pouvoir
Chacune paraît
indépendante des autres, parce qu’elle s’inscrit dans un registre différent.
Mais elles semblent toutes venir du même
fond.
1° à la
formation du gouvernement, version initiale, comme version refondue à la suite
des législatives, n’avoir pas pris dans l’équipe les trois perdants apparents
que sont au printemps de 2012 : François Bayrou, Jean-Luc Mélenchon et
Ségolène Royal. Leur point commun est la liberté de pensée, de parole et d’action.
Non que la majorité de gauche manque intrinsèquement de souplesse, mais elle
manque de voix dont la diversité ou l’écart soit légitimé par un parcours
antérieur, indiscuté en notoriété et en influence sur le débat français.
Accessoirement, autant Président, Premier ministre, et appareil socialiste ont
tout fait pour repêcher Ségolène Royal à La Rochelle, autant il est incompréhensible que les
mêmes n’aient pas imposé le retrait du candidat PS à Pau et contre Marine Le
Pen. Le précédent de 1981 est donc confirmé : alors des députés de
fidélité à de Gaulle qui avaient appelé à voter Mitterrand au second tour ont
eu à s’incliner, notamment dans Paris, devant des nouveaux venus socialistes
dans leur propre circonscription ;
2° à la
formation du gouvernement, avoir perpétué la fonction d’affichage des intitulés de multiples ministères au lieu
d’instituer – enfin – la fonction collégiale d’exercice du pouvoir exécutif par
une équipe restreinte de l’ordre de la quinzaine au plus, faute de quoi le
conseil des ministres n’est pas délibératif dans sa pratique ;
3° avoir
improvisé, et l’avoir laissé savoir, des nominations à des postes
importants : aux Affaires Etrangères, Laurent Fabius n’a pas le
rayonnement personnel ni la culture nécessaires, il eût été davantage opérant
aux Finances ; rue de Bercy, Pierre Moscovici n’a pas la notoriété
nationale et internationale d’un Antoine Pinay, d’un Valéry Giscard d’Estaing,
d’un Pierre Bérégovoy pour la reprise d’un cours alors que 2012 doit
s’apparenter pour nos comptes publics et notre relance économique à 1958, 1969,
1988 ; à la Défense,
Le Drian ne tranche pas sur ses multiples prédécesseurs, sa communication le
démontre aussitôt (pas de zones d’exclusion en Syrie, pas de livraison d’armes,
ce qui est signer l’abstention et l’impuissance) ; Michel Sapin aurait été
meilleur aux Finances et Arnaud Montebourg semble dans le rôle de négociation
sociale, cas par cas, plutôt que dans l’imagination de ce que nous pouvons
entreprendre ;
4° avoir
repris, en quelques semaines, pour le nouveau président de la République le rythme
des déplacements, des discours et des communications-rumeurs qui avait été
celui (décrié et lassant) de Nicolas Sarkozy. Ainsi se superposent de 2007 à
2012 un discours de géostratégie (le Darfour, la Syrie), une conférence
sociale, une conférence environnementale, la mise en place d’une commission de
réflexion sur les institutions et la vie politique, chacune présidée par un
ancien Premier ministre (Edouard Balladur, Lionel Jospin)
5° avoir
repris, au niveau de l’Elysée, les arbitrages fiscaux, le choix du futur
Premier secrétaire du Parti socialiste, les sanctions ou pas d’un vote
dissident des Verts sur le traité européen de discipline budgétaire, donc une
communication aussi fréquente et d’affectation multiple que celle du
prédécesseur ;
6° éviter la procédure référendaire pour un
traité européen, présenté cependant comme décisif : le nouveau traité
absorbant tous les autres signé à Lisbonne en 2007, le pacte de discipline
budgétaire en 2012 ;
7° revendiquer
par avance la durée intégrale du quinquennat pour agir et être jugé, et avoir pris des vacances estivales, à peine
entré en fonctions ;
8° s’appuyer
sur des rapports et travaux de commission pour appliquer des promesses de
campagne ou être fidèle à des propos plus anciens : rapport demandé à
Hubert Védrine sur les avantages reçus de notre réintégration de l’OTAN,
rapport commandé par la
Commission européenne sur la distinction des banques de
dépôts et de spéculation, rapport Sicard pour l’euthanasie et la bioéthique,
commission pour le renouveau de la vie politique selon une présidence confiée à
Lionel Jospin ;
9° reculer
sans cesse la mise au débat de mesures très discutées : vote des
non-citoyens européens aux élections locales, interdiction des cumuls de
mandats nationaux avec des fonctions exécutives locales ;
10° constituer
la banque publique d’investissements selon le conseil d’une banque d’affaires
privée et sans rien créer qu’un assemblage d’insstitutions existantes aux
vocations particulières mal analysées dans leur spécificité ;
11° alors que
la plupart des grands travaux projetés par les prédécesseurs, mais il est vrai
non financés, sont annulés, l’appel d’offres dont on a bénéficié Bouygues pour
la construction d’un « Pentagone à la française » n’est pas
réexaminé ;
12° maintenir
le permis Shell en prospections et exploitations pétrolières dans notre domaine
maritime de Guyane mais ne pas aller à l’inventaire de nos possibilités en
métropole pour le gaz de schistes, nouvel atout énergétique pour la Grande-Bretagne et
énième pour les Etats-Unis ;
13° avec bien
moins d’efficacité que le pouvoir précédent, exiger de la majorité
parlementaire des votes de discipline, et non de conscience individuelle ou de
sensibilité à l’opinion publique, quitte à être mis en minorité au Sénat qu’on
s’était targué l’automne précédent d’avoir enfin fait passer à gauche ;
14°
contrevenir progressivement à la pratique initiale qui mettait très
nouvellement en valeur la fonction et l’équation du Premier ministre en tant
que tel ;
15° de la
façon la plus voyante et provoquant les mêmes protestations au niveau européen,
mais (malheureusement) pas de l’Eglise de France, traiter les Roms à la façon
dont Brice Hortefeux et Claude Guéant avaient procédé : trois mille expulsions
pendant l’été, avec objectif de renvoyer les deux tiers de cette ppulation. Ce
qui a provoqué la venue exprès à Paris de la commissaire européenne, Viviane
Reding qui avait déjà comparé la politique de Nicolas Sarkozy à celle des
déportations nazies ;
16° en vertu
d’un mandat d’arrêt européen pour participation à des manifestations d’un parti
interdit en Espagne, extrader Aurore Martin, de nationalité française, dont les
appartenances politique et militante sont légales en France ;
16° continuer d’exploiter l’émotion suscitée par
les tueries de Mohamed Mera et en l’orientant désormais contre
l’antisémitisme ;
17° avoir remplacé à la tête du Parti socialiste
Martine Aubry par une personnalité à la notoriété négative, d’envergure
nationale beaucoup moindre et nulle internationalement
. . . la liste
n’est pas limitative concernant le premier semestre d’exercice du nouveau
pouvoir. Va-t-elle s’enrichir encore ?
Le mimétisme avec les mises en scène de
Nicolas Sarkozy, en début de son mandat, s’est d’ailleurs remarqué à propos
des maladresses de présence et des interventions de Valérie Trierweiler. En
pire puisque si l’histoire des premiers mois du quinquennat précédent peut
s’écrire – sur suggestion explicite du président de l’époque – selon ses difficultés
de couple avec Cécilia ; celle du mandat commençant se nourrirait d’un
ménage à trois et de querelles où les femmes l’emportent sur un homme dont la
fonction pour les Français n’est pas quelconque. François Hollande, plus encore
que son prédécesseur, refuse de résider vraiment à l’Elysée et prétend
distinguer une vie privée de sa vie publique. Dispersion de lieux et gaspillage
d’énergie mentale autant que des dépenses supplémentaires pour les
communications et la sécurité présidentielles.
Ces erreurs ne
sont évidemment pas présentées comme telles. Ce ne sont d’ailleurs pas celles
que dénonce l’opposition. Mais l’ambiance positive des débuts du mandat –
entièrement fondée sur les personnes du nouveau président de la République et du
nouveau Premier ministre – a été entamée très négativement par des
comportements publics hésitants, dispersés et une communication qui en a
accentué l’effet dans l’opinion. L’ensemble des comportements est visible et
immédiatement critiquable, tandis que – même s’il est atteint – l’objectif du
nouveau mandat sera plus discutable et son évaluation se fera dans de tout
autres circonstances, en comparaison probablement avec des alternatives et non
plus avec les engagements de l’élu. Le dialogue sera redevenu de classique opposition
entre les partis principaux, alors qu’il devrait être entre les mandants et
leur mandataire. La priorité gouvernementale à la réduction des dépenses
publiques peut donner son fruit – quoique les précédents en Europe ou dans
l’histoire contemporaine engagent au scepticisme et montrent au contraire que
c’est accentuer la récession et à terme le ralentissement des rendements
fiscaux. Le succès est lointain et sa
lecture plus malaisée que celle des aveux d’impuissance
gouvernementale : la liste présentée par Bernard Thibault des plans
sociaux pour environ 75.000 emplois à supprimer, non seulement se vérifie mais
signale, cas par cas, une compassion certes, mais pas une capacité de l’Etat.
Ce qui avait déjà été vécu à partir de 2007, malgré des discours de l’époque ou
de la récente campagne électorale.
I I – Une politique de droite
Aucune des
échéances économiques, nationales et européennes n’a a été traitée jusqu’à
présent différemment des jurisprudences et des projets de Nicolas Sarkozy et de
son gouvernement. Les hausses d’impôts et les économies budgétaires : 34
milliards d’euros sont du même ordre que celles attendues du vaincu s’il avait
gagné : 36 milliards. Si le bouclier fiscal est aboli et le projet de
T.V.A. sociale rapporté, la suppression des dégrèvements fiscaux pour les aides
à la personne et l’abandon de substantiels grands travaux d’infrastructure
contribuent peut-être à un moindre dééficit budgétaire mais nullement au
bien-être social et au maintien de la consommation des ménages.
1° une seule gestion, le budget
Les circonstances dans lesquelles
s’ouvre le quinquennat de François Hollande s’apparentent – ce qui est un gage
a priori de fidélité à un parcours, à des engagements, à un parti d’origine –
avec celles de 1981 pour François Mitterrand. Jacques Chirac, président de la République en 1995,
s’est trouvé dans la situation qu’il avait déjà connue en 1986 quoique la
distribution des rôles ait été apparemment différente. Il n’a pas pu ni su
assumer seul le pouvoir : Edouard Balladur et le président régnant pour le
limiter en 1986 à Matignon, Alain Juppé puis la cohabitation avec Lionel Jospin
pour le confiner à l’Elysée, dont il n’est pas non plus sorti entre 2002 et
2007, se trompant sur le choix du Premier ministre et laissant sa succession se
déterminer par antithèse. François Hollande arrive avec un programme et la
perspective d’une singularité française en Europe, s’il renégocie le traité de
discipline budgétaire et enraye le chômage par une politique de relance et une
résistance efficace aux licenciements. François Mitterrand, pendant les deux
premières années de son mandat, assume pleinement cette configuration mais
décidant de nous maintenir dans le système monétaire européen d’alors et de ne
pas aller directement au referendum pour en découvre avec le R.P.R. sur
l’école, mais en fait sur l’espace des libertés publiques et l’ultime
prérogative présidentielle d’en appeler au peuple, il engage un nouveau
cours : son équation personnelle se révèlera telle qu’il dépassera pour l’opinion
et pour l’histoire le clivage partisan, sera réélu sur une base consensuelle et
engagera avec autorité ce qui n’a finalement pas été tout le progrès attendu
dans les fonctionnements et dans l’identité de l’Union européenne.
L’élection de
François Hollande n’est pas un avènement
et les décisions prises par son gouvernement – dont aucune n’est spectaculaire
ni encore moins de portée internationale : il le veut manifestement,
quoiqu’il n’en fasse pas un système – n‘ont rien d’un nouveau cours. Au
contraire, sans que cela soit formalisé, il s’agit d’un choix bien arrêté de
rester dans l’épure : la priorité au redressement des comptes publics, et
sans cesse rappelé par le nouveau président de la République. Mais
les paramètres qui ont rendu les efforts fiscaux moins efficaces puisqu’il
s’agit toujours de rembourser des banques, de satisfaire ou « rassurer les
marchés » ne sont pas mis en cause. Les principaux outils de la rupture,
solidaires d’ailleurs entre eux, parce que tous procédant du ressort
démocratique, ne sont pas mobilisés. De principe, à propos des hauts-fournaux
de Florange que ferme Arcelor-Mittal, le nouveau pouvoir, encore moins que le
précédent, refuse d’envisager pas la nationalisation d’entreprises mal dirigées
ou faisant passer leurs actionnaires avant les salariés et le maintien d’une
production française ou licenciant alors que les bénéfices sont constatés dans
l’immédiat et prévisibles pour la suite. Pas de nationalisation, pas de recours
au peuple sur la question d’Europe, pas d’imagination d’un appel à l’emprunt
façon d’autrefois, en guichets de banque ou de bureaux de tabac ou de la
poste : les bons du Trésor. Le cap n’est pas mauvais, mais il ne fait pas
partie d’un ensemble et tend à devenir un but discriminant tous les autres, alors
même que les avis et les expertises et les expériences étrangères ont tendance
à mettre en évidence les effets négatifs sur la conjoncture économique et donc
les perspectives fiscales d’une politique de réduction de la dépense publique.
Mais ni le
président de la République,
ni l’un quelconque des ministres, ni les commentateurs, ni le peuple – sauf
quelques syndicats, notamment Force Ouvrière – n’en concluent que si l’Etat n’a
pas les moyens d’opposer l’intérêt général, et notamment celui des salariés,
aux stratégies d’un patronat souvent supranational, il doit s’en donner et au
besoin les inventer. Comme depuis l’automne de 2008, la reprise d’une
croissance même faible est attendue sans qu’aucun moyen ne soit pris, au
contraire puisque la dépense publique est diminuée et que la consommation ne
peut augmenter du fait des mises au chômage et de l’effort fiscal demandé aux
retraités. Ni en conjoncture ni en structure, les moyens de changer de cours ne
sont donc choisis.
2° la vérité des contraintes
Les contraintes ne sont qu’apparemment
macro-économiques. Sans doute le pays est-il en stagnation, sinon en
récession depuis cinq trimestres : les 0,3% de « croissance »
nécessaires pour atteindre l’objectif de réduction du déficit à 4,6% du produit
intérieur brut en 2012 ne se vérifient pas, et les hypothèses gouvernementales
de 0,8% en 2013 sont problématiques. Mais les Français continuent d’épargner
nettement plus que la moyenne européenne : les encours des livrets
d’épargne ont augmenté de 4,5% au premier semestre alors que le revenu
disponible des ménages a diminué de 0,2%, ce qui fait penser que leur
solvabilité fiscale et leur capacité à consommer ne sont pas encore vraiment
entamées. La récession cependant a sa traduction sociale et industrielle :
67.000 emplois supprimés au second semestre, alors que les plans de
licenciements les plus importants – annoncés – n’ont pas encore été mis en
œuvre. Le chômage de plus de 10% de la population active a des précédents
nombreux à l’époque récente. Déjà en 1999, nous étions à ce taux. Les dégâts et
les conséquences ne sont pas économiques, pas même sociaux pour la généralité
de la population française. Ils sont en revanche décisifs et nullement en voie
d’être palliés, en termes de solidarité et de vitalité des régions. Ils sont
belligènes et mortifères dans certaines villes et périphéries comme vient de le
rappeler le drame d’Echirolles.
Les contraintes ne sont pas davantage
européennes. La gestion de la zone euro. et la défaillance de plusieurs
Etats-membres engagent au contraire les gouvernants à des réformes
minima : le rapport présenté au Conseil européen du 29 Juin par Herman
Romppy, Joao Manuel Barroso, Mario Draghi et Jean-Claude Juncker ; le
discours du président de la
Commission européenne devant le Parlement de Strasbourg le 17
Septembre ; de même date pour sa publication le rapport de onze ministres
des Affaires Etrangères sur la « gouvernance de l’euro-groupe ». Sans
doute aucun saut qualitatif n’est-il proposé ni envisagé, mais cela donne toute
latitude au nouveau Président français pour des initiatives soit de forme soit
de fond : manière de réécrire le traité institutionnel ou écriture-même
d’un projet. Malgré sa ratification, le pacte budgétaire européen ne sera
respecté par aucun Etat, quelle que soient les sanctions qu’il prévoit. Malgré
les réticences et le discours public de l’Allemagne [1], la Banque centrale européenne
a commencé de racheter, donc de financer des dettes souveraines. Les équilibres
sont si tangents que pour tenir la décision d’une zone euro intangible au
moins dans sa composition actuelle et appelée à s’élargir dans les prochains
mois, Angela Merkel soutient ostensiblement son homologue grec et
paradoxalement à proportion de la contestation du peuple de celui-ci. Quoique
le sujet n’ait jamais été traité en tant que tel en Conseil européen,
l’émancipation logistique de l’Union, en matière de défense, vis-à-vis des
Etats-Unis progresse selon des initiatives industrielles : les discussions et
projets de fusion entre britanniques et européens, entre BAE et EADS sans doute
ont provisoirement avorté, mais se réimposeront si la fibre nationaliste se
détend.
Enfin, les contraintes ne sont pas politiques
et le nouveau président de la
République est bien moins entravé par les partis, les
oppositions, les expressions et représentations d’intérêt que ses prédécesseurs
depuis 1988. François Mitterrand, réélu au centre mais pas à gauche, Jacques
Chirac élu sur l’énergie mais sans projet par une majorité idéologiquement
disparate, encore un peu sociale mais déjà simpliste, Nicolas Sarkozy hanté par
le monolithisme d’une droite sans peur d’appellation ni d’identité étaient
chacun prisonnier d’une vue personnelle. Le choix du Premier ministre n’a été
courageux – prendre le risque d’un compéétiteur – que de la part de Jacques
Chirac mettant en selle Alain Juppé, il n’a pas récidivé en 2002 ni en 2007,
avouant une faiblesse jusques là dissimulée. François Mitterrand pensait plutôt
détruire Michel Rocard en le nommant pour Matignon et Nicolas Sarkozy a tout fait,
y compris par l’ambivalence de ses adieux du 6 Mai au soir, pour n’avoir aucun
compétiteur dans son camp ni dans l’ensemble de la droite. François Hollande
s’est donné un compagnon de travail, de route … et la contestation du Front de
gauche et du Parti communiste en parole publique autant qu’en vote
parlementaire lui sera bénéfique soit qu’elle fasse valoir vis-à-vis de la
droite sa propre indépendance « idéologique », soit que – vis-à-vis
de l’ensemble des Français – elle le convainque de répondre aux grands maux par
de grands remèdes. En attendant, la majorité parlementaire est suffisante dans
les deux chambres et les prochains scrutins ne sont qu’en 2014. Toutes les
possibilités et même temps sont encore à la main du nouveau Président, s’il le
veut, pour faire exécuter ce qu’il dit actuellement être le bon projet et la
bonne solution, et pour, à l’épreuve du probable échec de ces insuffisances de
médication, changer de cap, resserrer l’équipe. Jean-Marc Ayrault peut et doit
instrumenter successivement aussi bien la tentative que la novation. Il a ceci
de commun – je crois – avec François Hollande de savoir jouer vent debout et en
contre-attaque.
L’ancienne
majorité présidentielle n’aura pas de chef jusqu’à la prochaine élection. Que
François Fillon – comme il est probable – l’emporte sur Jean-François Copé qui
s’est, lui, engagé à ne pas être candidat en 2017 si Nicolas Sarkozy veut
prendre sa revanche, ne changera pas l’orientation fondamentale de l’U.M.P. et
le tropisme de ses adhérents vers le Front national et les thèmes extrêmes.
L’ancien Premier ministre protestera certainement de ses adscendances
gaullistes et donc de sa fibre sociale – pour ne pas ostraciser le Parti
socialiste, il a invoqué l’appartenance à celui-ci de Pierre Mendès France, lequel
fait consensus à peu de frais depuis 1981, mais c’est à tort, l’ancien
président du Conseil, quand il avait une étiquette était radical et son
élection en 1967 ainsi que son échec de justesse en 1968, chaque fois à
Grenoble, l’ont seulement apparenté à la Fédération de la gauche pour l’époque… Composite
idéologiquement, l’U.M.P. recèle trop de candidats potentiels à l’Elysée, à
commencer par le prédécesseur de François Hollande, pour se laisser vraiment
diriger par un unique champion, au contraire des socialistes d’antan et de
l’ensemble de la gauche qui se reconnurent durablement en François Mitterrand.
La réplique au pouvoir en place ne sera donc donnée que pour argumenter les
rumeurs et les dénis ; ce sera efficace, destructeur même, mais ne dégagera
pas une alternative. Quant à la candidature, à nouveau, de Nicolas Sarkozy,
elle sera difficile à présenter autrement qu’en façon de retour.
La première
vraie contrainte pesant sur le nouveau cours et sur François Hollande en
particulier est la pratique institutionnelle,
le jeu de rôles de plus en plus éloigné du dessein et de la pratique originels,
ceux du général de Gaulle. Non seulement, le recours au referendum – soit à
l’initiative du président de la
République, soit à celle du Parti socialiste selon la réforme
de 2008 – n’est pas prévisible pendant le nouveau quinquennat, mais la
recherche du consensus n’est pas non plus une préoccupation alors même que
celui-ci se réalise, notamment pour la ratification du traité budgétaire. Les
débats montrent au contraire la persistance des deux camps se daubant
mutuellement alors que la continuité du texte et des ambitions est évidente.
Les démonstrations nombreuses d’une continuité forcée ne sont pas saluées par
les ex-soutiens de Nicolas Sarkozy et ne sont présentées par la nouvelle
majorité parlementaire, ni par le Président lui-même comme le résultat
d’inventaires apaisés du legs des cinq dernières années. Le débat est donc
l’affichage des oppositions mutuelles, il n’est pas la prospective de la France. Le legs de Nicolas
Sarkozy est handicapant parce qu’il a habitué les Français à la
sur-communication et au constant rappel de la prééminence, de la responsabilité
présidentielle, pratiquées en réponse par de la présence solitaire au premier
rang à tout va.
La seconde
contrainte est l’évanescence du concept
et de la pratique aujourd’hui de ce que sont la puissance publique, l’Etat, le
bien commun. Il ne s’agit pas de débattre sur le dogme libéral suivant
lequel moins il y a d’Etat, plus les automatismes économiques ajustent
l’ensemble des paramètres pour le bien commun : le contraire est montré
par la crise actuelle dont les acteurs libéraux doivent leur survie au concours
des Etats et donc des contribuables. Sans doute, le traité de Lisbonne
évoque-t-il le service public, mais le concept – apparemment trop français –
d’entreprise publique à caractère industriel et commercial n’a rien de
contraire à l’esprit de concurrence et d’égalité de chacun des grands acteurs
sur le marché intérieur unique. L’Allemagne, par exemple, a su mettre en
surveillance publique les produits toxiques et donc le dénouement de bien des
engagements fautufs de son système bancaire selon une banque publique de
consolidation et de recouvrement des dettes. L’absorption de
Il faut un
commissariat général au plan, il faut les commissions et les mises en commun
d’antan, il faut le partage des informations de toutes sources :
patronales, syndicales, toutes agences, tous offices, toutes expertises
d’économétriques et analytiques, confondues. L’aménagement du territoire, la solidarité
des entreprises françaises entre elles, les choix budgétaires de l’Etat et des
collectivités publiques sont un seul ensemble, un seul enjeu ; ainsi
seulement se retrouvera et s’opèrera la solidarité entre classes sociales,
entre les personnes. Il n’y a rien d’automatique en économie, et surtout le
souci du bien commun – sauf dans les enseignements de faculté et les réunions
patronales quand elles sont médiatisées – et la lutte des classes pour arracher
ce qui n’est pas considéré assez ni rétribué en conséquence n’est pas
inéluctable, l’histoire sociale française depuis près de cinquante ans le
montre, nonobstant les enseignements du marxisme. Ceux-ci n’ont l’apparence de
la préemption que par l’effondrement de leur travesti soviétique : le ressort
d’humanité et de solidarité reste vrai et ce discernement doit refaire le
pendant en société à ce qu’est le profit pour le capitalisme. Un affrontement
entre deux logiques peut produire autre chose que l’écrasement de l’un par
l’autre comme aujourd’hui.
Depuis le
déclin de la planification amorcé par Valéry Giscard d’Estaing et sanctionné
par Lionel Jospin, il y a seulement une série de courses individuelles :
grandes entreprises, budgets publics, I.N.S.E.E. et O.F.C.E. ne communiquent
plus, chacun pour soi court dans son domaine, ignorant que ce n’est qu’un
segment de l’emprise nationale sur les circonstances et sur les initiatives. La
France des choix
économiques et financiers fonctionne à court terme, selon des entourages
emprisonnant les grands décideurs à l’Elysée, au gouvernement, dans les sièges
sociaux. Les mises en commun sont médiatisées dans le drame des plans de
licenciements et ne sont plus opératoires faute d’outils, faute de cadre. Notre
pays, excellant depuis son émergence millénaire dans la sécrétion des
organigrammes et des réseaux, est aujourd’hui un désert institutionnel. Tout y
a disparu et il ne reste que des ruines figées. Ne possédant plus ses propres
lieux, la France
a perdu la maîtrise du temps. C’est pourquoi elle est expropriée de l’époque
actuelle, ne sait ni se définir ni même se laisser absorber.
L’ensemble de
ces contraintes est donc bien davantage mental qu’économique, financier et
social. La France
est, en ce moment, plus souple et ductile que depuis longtemps, mais dans le
vide. Malgré les apparences produites par les discours publics et par des
éphémérides fréquents et dramatiques. Or, chacune de ces contraintes,
sereinement identifiée et analysée, suggère les moyens de notre reviviscence.
I I I – La superficialité des politiques
Toutes les
faiblesses françaises et le découplage entre gouvernants et gouvernés sont
aujourd’hui dûes à la faiblesse technique et spirituelle de la classe
politique. Celle-ci – en principe par mandat électif, en pratique par effet de
carrières – ne sait plus répondre de la démocratie et en appeler constamment à
un exercice que les moyens de communication permettent d’approfondir sans
cesse, et surtout elle ne sait plus penser ni organiser le pays. Encore moins
sait-elle rebâtir ou mettre à jour nos grandes expressions vis-à-vis de
nous-mêmes et du monde environnant. Notre politique étrangère n’a plus été
pensée depuis nos réactions – hâtives, fragmentaires et surtout solitaires –
quand tomba le « rideau de fer » : nous ne faisons plus aucun
événement dans le monde actuel parce que nous ne savons plus prendre la moindre
initiative. Cet objet d’une réflexion – sous un autre format que la présente
note – est analogue à celui d’une mise à jour chez nous : nos
institutions, nos fonctionnements, nos formations, nos jeux-mêmes n’ont plus
été pensés librement, sans enjeux électoraux, sans pantomimes partisans.
Pourtant, par
lui-même, le pays apprend à débattre
en politique économique et financièrre à force de ressentir l’inefficacité,
l’iniquité et l’improvisation des grands choix sur des bases si incertaines. Il
apprend à se rencontrer lui-même, hors medias et hors assemblées électives, sur
des sujets jusques-là intimes comme la législation ou l’émergence des modes à
propos du mariage, de la fin de vie, de la procréation. Les mises à l’ordre du
jour ne correspondent pas forcément aux urgences et aux nécessités mais elles
interrogent et une habitude va cesser : celle de déléguer aux politiques
l’animation de la pensée collective et l’expression de la volonté générale. Ce
progrès n’est pas accompagné par une novation qualitative et institutionnelle
du comportement des élus et des personnages politiques.
Faute
d’autorités morales – de quelle que soit la source dont elle provient :
lettres, églises, valeur militaire, initiative caritative, du type de nos
géants de la littérature ou de la création plastique au XXème siècle, du type
de l’Abbé Pierre ou maintenant de Stéphane Hessel avec les égotismes et les
vulnérabilités, les limites que toute incarnation recèle – les Français
pratique une conscience collective moins discontinue que le font croire les
sondages post-électorauxn, toujours désastreux pour le vainqueur de la veille.
C’est sur cette maturité que le pouvoir actuel devrait construire sa
prospective et sa communication. Il en est, actuellement, aux antipodes.
1°
la nature de la crise nationale
Depuis que
Nicolas Sakozy a dominé – personnellement et thématiquement la politique
française – deux médications sont appliquées d’autorité au pays sans que soit
analysé, au moins au niveau du pouvoir, ce dont nous souffrons. Elles sont
obsessives et masquent une erreur dogmatique : la mondialisation et le
fonctionnement des institutions européennes seraient depuis la chute du mur de
Berlin et la libération des pays de l’Est une chance pour la France. Sans doute, mais tout
autrement et à condition d’y réfléchir et de réinventer.
Premier
remède administré de force : la
culture du bouc émissaire véhiculée par les éclats sécuritaires et les
tentatives d’élucider l’identité nationale. Nicolas Sarkozy qui avait programmé
en campagne présidentielle un ministère pour cette identité et qui fonda toute
sa stratégie politique quinquennale sur une addition, à son profit, des voix du
Front national à celles de l’U.M.P., échoua pourtant et les ministres de
l’Intérieur : Brice Hortefeux et Claude Guéant, qui en furent les
zélateurs très médiatisés, contribuèrent décisivement à son impopularité. Cet
indice de lucidité nationale – argumentée par la contre-performance sécuritaire
et les contestations par les forces de l’ordre des politiques ainsi menées –
n’a pas été considéré par le nouveau pouvoir. Mais paradoxalement, une posture
identique de Manuel Valls place celui-ci en tête des sondages sans que sa
circulaire pour une facilitation de l’accès à notre nationalité lui soit
reprochée. Le traitement des Roms n’a pas changé. Aucune aménité, et surtout
aucune prospective ni recherche futuriste. Le débat ne porte que sur des
locutions : assimilation ? intégration ? expulsion ? rétention ?
Ce qui est d’abord du domaine de l’esprrit et de la convivialité est traité en
propagande et contre-propagande, rarement en écoute. Une partie de la vie
politique emprunte de plus en plus, en expression, en thèmes et surtout en
psychologie collective à ces fins de dominance que vécurent les Blancs en
Afrique australe : se sentir minoritaire chez soi et menacé dans une
pureté mal définie, culturelle ? ethnique ? et des intégrités
matérielles qu’il serait amoindrissant de partager. Un pays qui savait faire du
nouveau sang pour que continue de circuler l’ancien, à chaque vague de
l’histoire et de ses accueils, notamment après la Grande Guerre, est aujourd’hui
dressé – à des fins électorales et non pour sa bonne organisation économique et
sociale – contre lui-même. On a failli remettre en œuvre les dispositifs
totalitaires de la déchéance de nationalité. Ce que d’aucuns prêchent comme
voie exclusive de notre redressement civique et national sape l’invention
spontanée des actuelles immigrations. La France devenant un contre-sens ?
Seconde
maladresse triomphante, présentée comme une médication : la soi-disant généralité de la crise et
l’exemplarité de l’étranger réduit l’expérience et la personnalité
nationales françaises aux dilmensions d’un handicap dont nous devons nous
défaire. Des discours et des débats, à obsession identitaire, débouchent sur
des exhortations à nous adapter et à imiter. Notre fonds propre est ignoré et
méprisé. La modernité, c’est l’autre et pas nous. Cela induit une pédagogie paternaliste« martelée » par un président de la République,
le second plus jeune à avoir accédé à la fonction
suprême et le premier à être autant dénué de mémoire historique et de culture
autre que celle du moment. François Hollande n’est pas encore tombé dans ce
travers mais l’explication des timidités et des atermoiements par la pression
d’un héritage accablant commence d’y ressembler
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