Observation & réflexions
012
Mardi 13 Novembre 2007
Ce soir, à vingt
heures, début de la grève reconductible des transports publics. Le secrétaure
général CGT des cheminots met en garde la coordination étudiante contre des
blocages de gares : risques de dérapage. L’UNEF, sans que Bruno JULLIARD
soit en avant, comme pour le CPE, est sur cette ligne là aussi. Les Jeunesses
communistes de même, laisser les travailleurs fixer leur tactique. De Berlin,
Nicolas Sarkozy répète que les réformes sont nécessaires et seront donc faites.
Sondage pour Libération : le président perd sept points mais reste
populaire à 54%, le Premier ministre perd quatre points. Un autre sondage
montre que les Français jugent la politique économique inefficace. Voilà
l’entrée en lice.
Ségolène Royal
maintient le style d’une part de sa campagne : titre de son livreèbilan de
celle-ci, Ma plus belle histoire, c’est
vous.
Au loin, la
Birmanie est imitée par le Pakistan, une femme populaire et courageuse défie
des militaires mettant le pays dans l’impasse pour des générations ?
Erreurs propres au gouvernement
et voulues par Nicolas Sarkozy,
vulnérabilités françaises
Tous les
éléments sont réunis pour un face-à-face entre le président de la République et
les Français (note n° 11 des 5-6 Novembre derniers), mais l’affrontement est
voulu – comme un pari – par le pouvoir que ces derniers ont élu le 6 Mai 2007
et qui reste populaire. Sciemment, nous allons vers l’inconnu.
Le président,
le Premier ministre et le secrétaire général de l’U.M.P. rivalisent
d’ « affichage », la fermeté. Le ministre du Travail n’a pas
accepté les demanbdes de la CGT d’une réunion tripartite sur les régimes
spéciaux de retraite. La cause du conflit peut paraître minuscule. Pas 500.000 salariés concernés et
tant d’aménagements consentis la semaine dernière que le gain de la réforme
paraît lui aussi minime. Tout se passe comme si – ayant épuisé les annonces en
politique intérieure : ouverture de la composition gouvernementale,
ouverture des chantiers de réforme, et en politique extérieure : coups en
Libye et au tchad, « mini-traité » européen, ayant accompli ce qui
pouvait l’être sans délai ni attente d’une réponse par les évé,ements ou par
les agents économiques : votes de loi en matière de fiscalité,
d’immigration, d’organisation universitaire – le gouvernement, le président
personnellement n’admettant que des échos et des relais, souhaitait que soit
administrée la preuve que la majorité des Français suit plus que jamais. Ayant
mis la consultation référendaire hors la panoplie institutionnelles, assurant
que les élections municipales ne seront
pas un enjeu national quoique la plupart des ministres soient candidats, qu’ils
soient de carrière élective jusqu’à présent ou pas, le pouvoir souhaite être
confirmé sur le terrain choisi par le candidat de ces dernières années :
la rupture. Mettre au tapis l’adversaire… arbitrage et instrument à la fois,
l’opinion publique. Pari : le motif des grévistes étant corporatiste, le
projet de l’exécutif étant de rétablir l’équité, les Français départageront.
Deux risques.
Le premier est
qu’une jonction s’est opérée entre divers mécontentements. Les étudiants,
quoique la « loi Pécresse » soit de lecture multivalente, épousent le
calendrier des protestataires du secteur public. Les magistrats et les avocats
peuvent aisément faire confondre par les justiciables leur enjeu de gagne-pain
et de commodité personnel avec la pétition populaire d’une justice de
proximité. Les cheminots n’ont pas persévéré – malheureusement – dans l’idée
d’une grève de la gratuité qui eût été immensément populaire (et que la Cour
européenne des droits de l’homme a avalisé dans l’espèce turque), mais ils font
prendre conscience du décalage entre le fixisme verbal du pouvoir et des
concessions déjà obtenues par entreprise ; la nécessité des changements
n’est plus contestée, mais la méthode gouvernementale, dont ils ne sont que le
banc d’essai, puisqu’il est acquis que des quarante années de cotisation, on
projette d’aller à quarante-et-un, voire quarante-deux ans… La reconductibilité
de la grève est propice à tous les heurts. La cause n’est plus aussi focalisée
et circonscrite que l’impose – tactiquement – le pari gouvernemental. Le
pouvoir ne peut l’emporter que si la confrontation n’est que sectorielle.
L’inconnu était initialement la durée, il est devenu l’extension.
Le second
risque est que la réforme en question ne soit pas efficace. L’évidence est que
les précédentes, celeles opérées sous Jean-Pierre Raffarin ont été des
demi-mesures. La mûe des finances sociales, pas plus que celles des finances
publiques, n’est encore opérée en France.
Le pouvoir a
plus à perdre que les grévistes. Il joue la crédibilité du mandat présidentiel,
à peine commencé. Crédibilité dans l’efficacité et la méthode. Crédibilité dans
le soutien populaire.
Conduire la
vie politique du pays en jouant sur les instincts : attirer les candidats
aux responsabilités gouvernementales (sans leur en donner les moyens, quel
ministre de Bernard Kouchner à Fadela a la possibilité de son travail ? Michèle
Alliot-Marie ridiculisée par les objurgations qu’elle reçoit à propos des
incidents canins), en assénant des réformes d’entrée de jeu et sans
concertation que puissent reconnaître les ensembles concernés (carte
judiciaire, université), en choisissant le pari pour réduire la résistance
sociale… les Français le savaient, vont-ils persévérer à le vouloir ?
S’ils changent d’avis et censurent dans la rue et par une popularité qu’ils
accorderaient au mouvement social et non plus au seul président, contraignant
l’un et l’autre à se rencontrer et négocier vraiment – ce que je crois le
probable dénouement – ils imposeront au quinquennat de Nicolas Sarkozy un cours
peu prévu, mais salutaire.
Car les
indices d’adéquation du système pratiqué depuis le 16-Mai (entreée en fonctions
présidentielles de Nicolas Sarkozy) ne sont pas probants.
La conjoncture
économique ne peut se retourner ni pour la France ni pour l’Europe dans les
mois qui viennent. Tout indique au contraire que nous sommes entrés dans une
crise économique mondiale durable, d’une ampleur et de rebondissements qui
pourraient n’avoir d’analogie que la crise de 1929. L’euro. et le pétrole a des
cours de dérèglement général, sans qu’aucune institution y puisse grand-chose,
sauf à supposer que les Etats-Unis acceptent de revaloriser leur monnaie et
donc de se faire souffrir. La crise chez eux de la subprime est déjà assez
ravageuse. Si c’est la Chine – comme certaines déclarations le font déjà
attendre – qui lâche le système empirique qui fonctionne encore, et cesse donc
d’absorber la monnaie de singe qu’est le financement des déficits américains,
les équilibres mondiaux seront rompus brutalement et non par une remise en
ordre et un nouveau partage des responsabilités économiques, monétaires et
commerciales dans le monde. L’Europe en tant que telle ne manifeste ni souhait
ni lucidité. Comme ses bourses de valeur, elle suit…
Les relations
internationales sont périlleuses. La présence diplomatique française nouvelle
est décalée par rapport à ces mutations et également à des enchainements
ponctuels. Nicolas Sarkozy raisonne sur les institutions, en fonction de leur
dérèglement sous Jacques Chirac refusant la sanction des urnes en 1997 et en
2005 ; il raisonne sur une base aussi fausse en acceptant la rédaction de
ses discours de Dakar et de Tanger pour les relations franco- ou euro-africains
ou pour une Union de la Méditerranée. Qu’il indispose est secondaire. Il
manifeste surtout qu’il est sans vision du monde en train de se faire. Coller
aux Etats-Unis à propos de l’Iran et amener l’Allemagne à vouloir, elle aussi
des sanctions économiques plus rudes, peut paraître positif : les
velléités de guerre d’agression à l’irakienne s’éloignent, mais pas de son
fait. Moscou reparu en force depuis que la Russie a été défiée frontalement par
les Etats-Unis dans l’affaire du « bouclier anti-missile) reprend
l’histoiere est-ouest où elle en était restée, c’est-à-dire à la première
guerre du Golfe, celle de 1990, coiincidant avec l’implosion soviétique et donc
l’impuissance au Kremlin.
L’Allemagne et
la France ont eu, ces derniers temps, exactement les mêmes itinéraires
diplomatiques : Moscou, Washington, Angela Merkel, dans un appareil plus
simple, y est allée à la suite de Nicolas Sarkozy. Les conversations du
président de la République sont multiples dans l’agenda, sont-elles de
fond ?
La
méthode ? Aller à Guilvinec, faire avouer en aparte au Premier ministre
qu’il n’est pas souhaité « sur le terrain » par l’Elysée jouant
l’exclusivité et improviser des solutions, des promesses sans avoir prévu
Bruxelles : scenario des zones franches en Corse qu’avait vêcu Alain
Juppé, pareillement désavoué selon des mécanismes que nous devons connaître et
pratiquer, d’autant que nous y participons depuis 1951… les traités ne sont pas
des drapeaux, même si la sensation d’une prise de parole un 11-Novembre – ce
qu’aucun prédécesseur sous aucune République – n’avait jugé séant de faire,
permet une rapide assimilation entre beaucoup de sujets, beaucoup d’histoire et
des engagements d’Etat. – Quant à des propos à l’emporte-pièce (codicille
édifiant au discours de Dakar) comme ceux tenus par le président de la
République dans l’affaire de Zoé au Tchad, ils ne facilitent rien. – La visite
d’un Khadafi que la menace d’un sort analogue à celui de Sadam Hussein, a
assagi du fait américain, pas du nôtre, elle est paradoxale et n’aurait de sens
que si elle contribuait à une meilleure conjonction opérationnelle entre
l’Union européenne et l’Union africaine. est-ce la conjecture de Nicolas Sarkozy ?
Comment le gouvernement et les diplomates peuvent-ils travailler sur une
mappemonde et sur une société nationale en mutation tandis que le président de
la République est lui-même un des facteurs de l’imprévisibilité ? Même les
traditions, comme celle de la relation franco-allemande, deviennent douteuses
pour des raisons de tempéraments personnels. Chaque rencontre avec Angela
Merkel doit être réécrite, ensuite.
Le mouvement
social de cet automne – fruit d’une génération nouvelle tant du côté du pouvoir
que de celui des syndicats, et surtout des étudiants – détermine une prise de
conscience : nous devons apprendre, d’urgence, à débattre. Ce qui n’est ni
perte de temps ni dispersion. Testament que je recueillais par la rencontre
improviste de Paul Ricoeur à quelques semaines de sa mort tandis que
Jean-Pierre Raffarin entrait à Matignon.
Justement la
politique traditionnelle est en retrait, ce qui n’est pas forcément une lacune.
Depuis l’élection présidentielle, mezzo voce, l’ancien Premier ministre et
futur président du Sénat est probablement le seul dans la majorité à faire les
signaux utiles : les tests ADN discutrabes selon lui, le Premier ministre
dans son tort en n’honorant pas avant-hier par sa présence le conseil national
de l’U.M.P. Le parti socialiste peut faire ricaner. Il fait sa purge des
rivalités de personne, ne sort pas de sa tradition d’observer le mouvement
social plutôt que de l’épouser ou de prétendre le conduire, il respecte
l’horreur du monde du ttravail que soient mélangés les genres. Ségolène Royal
continuera de voyager, progressivement elle s s’assimile à Bachellet, Krichner
et pourquoi pas à la prix Nobel birmane ou à la pasionaria pakistanaise.
« People » ? Nicolas Sarkozy, en couple, en vacances, au
Fouquet’s n’avait pas dédaigné cette pose pas plus que les suffrages décisifs
des électeurs « frontistes ». Il se peut que l’opposante devienne
« historique » par cela : elle a été la seule à dénoncer
fortement les franchises médicales et à stigmatiser la non-intervention du
pouvoir dans les changements de main qui révolutionnent la propriété de la
presse écrite, et singulièrement économique.
Vulnérabilités
françaises.
Notre manière
de confronter les points de vue. La centralisation de l’imagerie politique. La
source de l’information (si l’A.F.P. devenait partiale, servante ?). La
mise en bourse de nos entreprises et notre incapacité à édifier des fonds de
pension, des fonds de réserve à notre taille pour un autre financement de nos
actifs que par l’étranger. Le système de cooptation dans la direction des très
grandes entreprises. Les financements occultes. Le dédain pour les appels aux
valeurs : les positions de l’Eglise catholique en France sur l’immigration
ne sont pas prises en compte ni par le pouvoir ni par la majorité
parlementaire.
Le poids dans
les postures gouvernementales de ce que l’on croit être l’opinion publique –
alors que celle est mal connue. Tchad, mouvement social. Des retournements en
quelques heures, de la condamnation à des gestes contraires.
La
méconnaissance de nous-mêmes. L’INSEE et sa nouvelle évaluation du chômage.
L’enquête sur les violences à personne./.
disponibles par courriel sur demande :
1°
15 notes sur la campagne et l’élection présidentielles,
rédigées du 12 Novembre 2006 au 8 Mai 2007
2°
journal réfléchi
14 . 20 Mai 2007
Le point de départ
Les commencements
Les contradictions inévitables
Les lacunes institutionnelles
25 Mai 2007
Quelques « grilles de lecture »
Le pouvoir personnel ou « l’homme d’une nation » ?
La sécurité (du pouvoir)
Le concret, le terrain, les urgences : qu’est-ce à dire et à
faire ?
31 Mai . 5 Juin 2007
Nouvelle génération et antécédents consensuels
Une périlleuse prétention
La probation diplomatique
La quadrature du cercle ?
15 . 16 Juin 2007
La manière du candidat ne peut être celle du président de la République
La démocratie de gouvernement
Les débuts de « l’action »
17 . 24 Juin 2007
Déblais…
Une claire distribution des rôles et des stratégies, au pouvoir et dans
l’opposition
La fausse obligation de hâte
Le mode de scrutin pour désigner les députés l’Assemblée Nationale est-il adapté ?
6 . 10 Juillet & 12 Septembre 2007
Notre pays, notre temps, notre monde – banalités ?
Notre pays, notre temps, notre monde – ce qui change
Les paradoxes qui demeurent
Les précédents ne valent que pris dans la période Cinquième République
Concept et pratique de la carrière politique - Logique républicaine et
accélération des dévoiements
Difficulté de l’émergence d’une nouvelle éthique des grands patrons
français
19 Septembre 2007
Des bons points
Des mauvais points
Des indices
Des sujets d’inquiétude
4 Octobre 2007
I – Politique intérieure
tout se répète
la nouveauté : l’organisation du pouvoir
l’ouverture
le risque de saturation
la pierre de touche
la lacune
l’isolement
II – Politique extérieure
le changement vis-à-vis des Etats-Unis
l’abandon de la priorité européenne
15.19 Octobre 2007
Les pièces du puzzle ? ou « les silences du
scenario »
. consacrer quelques premiers mois d’un
exercice du pouvoir par une modification de la Constitution ?
. un fonctionnement à risques quotidiens de l’ensemble du mécanisme élu
ce printemps
. elle aussi sans précédent, la mise en scène en responsabilité
partagée d’une vie de couple
. vis-à-vis de nos partenaires en Europe et de l’entreprise d’Union,
une attitude toute nouvelle et sans précédent depuis les fondations des
Communautés européennes et de la Cinquième République
. c… par-dessus tête en économie et en social
. les contre-pouvoirs qui s’établiront sans octroi du pouvoir en place
23.25 Octobre 2007
. . . le temps où nous sommes, pourquoi ne savez-vous pas
le juger ?
le régime se qualifie lui-même
l’Europe à défaire ?
le mouvement social et l’opposition parlementaire
l’économie seconde
5.6 Novembre 2007
La gestion des crises
La gestion du fond
Desseins et tempêtes
La contradiction
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