Observation & réflexions
017
Les éphémérides
nationaux ? manifestations de rue, voies de fait en entreprises et en
universités, licenciements et fermetures avec en regard un agenda présidentiel
(un discours thématique par semaine, un ou deux voyages à l’étranger par
semaine) et le jeu des chaises musiciennes pour le personnel du pouvoir
(remaniement ministériel depuis des mois, rang d’éligibles sur les listes
européennes et régionales avec grâce et disgrâces, débauchages aussi). Les
absences qui empêchent les vrais fonctionnements : la Commission
européenne, déjà si pâle en cours de mandat, le Premier ministre affectant le
profil bas dans la vie politique et parlementaire française pour quel
avenir ? l’évidente difficulté pour la nouvelle administration américaine
(celle de Barack Obama) d’évaluer les situations au moins internationales
(stratégie est-ouest et nord-sud, bourbier en constante extension au
Moyen-Orient, finances et monnaie, relance, constructions institutionnelles
mondiales) et donc de faire délibérer de nouvelles analyses pour des décisions
fondatrices.
A
Observation
Le fascisme n’est pas si improbable,
il est même, je crois, plus près de nous
que le totalitarisme communiste.
Georges Pompidou . Le nœud gordien –
écrit avant le 27 Avril 1969
(paru
posthume Mai 1974 Plon . 205 pages)
Quelques faits.
Claude Lanzmann, Les temps modernes bien sûr,
le succès d’estime littéraire et le succès médiatique que rencontrent ses
mémoires Le lièvre de Patagonie [1]. J’ouvre
au hasard, le héros est en Corée du nord, scène de drague merveilleusement
dite, rendez-vous le chemin de halage le ong du Taedong-gang. Du meilleur Roger
Vailland et le ton de Simone de Beauvoir. Un début comme ceux d’Isorni et de
Pisani, intervenir pour sauver de l’exécution un condamné, il s’agit d’un
F.L.N., le Castor est là, ils téléphonent à François Mauriac. Faire réveiller
de Gaulle… 1959… 2009, maintenant. Décoration à l’Elysée, parterre de gauche,
accolade qui dure, l’impétrant sollicite quelque chose. Le président de la
République acquiesce. Contrairement à l’usage, Claude Lanzmann a le droit de
parler après le Président. C’est pour dire. J’ai été décoré, tel grade, par
Jacques Chirac, vous me décorez, tel grade, aujourd’hui, je calcule que je
serai décoré au grade supérieur en telle année. Je souhaite que ce soit par
vous. Restez, restez, Monsieur le Président (Nicolas Sarkozy et la
gauche : l’existentialisme). Bombances
et carillons, aurait dit Clappique, se serait écrié de la plume André
Malraux. Jean-Paul Sartre visita Valéry Giscard d’Estaing mais ne lui demanda
pas de gagner en 1981 [2].
Claude Lanzmann sait pourtant ce qu’est une contradiction : Sartre, se
saoûlant pour échapper à celle qu’il vit entre « la séduction
arabique » et « une sorte de statue du Commandeur », l’auteur de
Shoah
qui le ramène titubant à son hôtel [3].
Dialogue avec un ancien ministre du général de Gaulle, et
pas des moindres. 23 Octobre 2008. La présidence semestrielle de l’Union
européenne…
Vous n’avez pas écouté
Sarkozy ?
J’ai écouté les résumés.
Ah, oui ! moi, j’ai écouté en
grande partie sur LCI, pendant le déjeuner. Je dois dire que… son discours
était excellent. Cet homme se révèle. Moi, j’étais contre, il m’avait fait peur
au moment, très peu même, au moment de la campagne électorale. Il m’a encore
déplu ensuite par ses attitudes, son goût du faste, pas çà seulement… mais
cette façon de s’impliquer dans les moindres petites histoires en faisant des
promesses à tout le monde… tout çà, il m’a déplu. Mais… d’abord sur le plan
international, je trouve que… le hasard faisant qu’il soit président…
… parce que n’importe qui aurait fait la même chose, les mêmes voyages,
les mêmes sommets.
Ah, non ! ce n’est pas évident
du tout. Non, non ! rappelez-vous quand Hitler a envahi la rive gauche du
Rhin, le gouvernement français a démissionné et il s’est borné à dire qu’on n’acceptera jamais que les canons…
et c’est tout. Il n’a rien fait. Ah non ! il y a beaucoup de cas où les
hommes politiques ne font rien. Ils font des paroles, ils ne font rien. Alors,
je trouve que dans la crise géorgienne, il a bien manœuvré, il a tout de même
arrêté le feu : alors, qu’est-ce que cela deviendra, on n’en sait rien.
Personnage
depuis longtemps, mais de plus en plus notoire et estimé, de l’historiographie
de la France contemporaine. Gaulliste et ayant approché durablement Mitterrand.
6 Mai 2009, l’anniversaire tout juste du mandat présidentiel en cours. Sarkozy,
a voté pour lui, les discours de campagne étaient remarquables, mais la
tentation pour Bayrou. Au dernier moment, les prospectus que l’on reçoit à
domicile : pas possible, vide, incohérent, et on ne peut voter Ségolène Royal.
Evocation d’un autre historien, normale-sup. ENA, patron de télévision, mort
subitement, très proche, lui dit : jamais dans cette génération, je n’ai
rencontré quelqu’un ayant autant que lui (Sarkozy) l’étoffe de l’homme d’Etat. Vient
le récit de la décoration de Lanzmann par le président de la République.
Sarkozyste alors ? n’est pas pour la réintégration dans l’OTAN, nous
avions plus de poids dehors. L’Europe, le discours de Nîmes, l’avez-vous écoûté ?
la réponse m’est faite : très bon.
Le président
de la République en conférence de presse à Niamey, un couple d’heures pour
assurer Areva et Anne Lauvergeon, un
des personnages du règne, elle aussi censément de gauche, elle a été la
dernière secrétaire générae adjointe à l’Elysée pour François Mitterrand et sa
« sherpette ». Accessoirement, la Françafrique. La Mauritanie et ses
putschistes chroniques. J’ai téléphoné au président tombé, moi je l’ai fait,
mais des parlementaires, des manifestants qui lui étaient ou lui soient
favorables ? personne. Le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi me
téléphone. Avez-vous écouté ? décidément, je n’écoute pas, mais – suivant
les affaires et les personnes de Mauritanie depuis que j’y ai fait mon service
national en 1965-1966, faisant la rencontre pour moi à jamais structurante du
père-fondateur de cet Etat, alors fort jeune, Moktar Ould Daddah – je sais
qu’il y a, une première dans le pays et peut-être dans l’Afrique subsaharienne,
une prise de conscience civique et une résistance depuis les premières heures
et qui continue, j’en connais les protagonistes, j’en ai les photos, les
textes. Je courielle à l’Elysée, le directeur du cabinet me connaît depuis des
rencontres en ambassade quand j’y étais le conseiller commercial et économique,
et que lui dirigeait les stages en second puis en titre à l’E.N.A. Je courielle
à Nicolas Sarkozy qu’il a menti ou qu’il est mal informé, et si c’est le cas,
je sais par qui. Dans les vingt-quatre heures, ma messagerie se voit vidée de
quatre ans de réception : coincidence ? Je demande, toujours par
courriel à un relation à la Commission de Bruxelles, si une telle manipulation
est à la portée de la junte mauritanienne. Le lendemain matin, mon fichier
Mauritanie-envoi m’est subtilisé. En même temps que je souhaite l’informer plus
contradictoirement qu’il ne l’est sur la Mauritanie, je demande au secrétaire
général régnant à l’Elysée de me recevoir : le viol de ma messagerie,
cette fois signé. Si l’on était resté dans la généralité, voire la
totalité du disque dur. Réponse sous quelques jours : l’ordinateur de ma
femme à l’ouverture de son ordinateur constate que tout en a disparu,
messagerie vierge, disque dur sauf un ou deux dossiers mal classés
originellement, tout a disparu, il ne reste que le logiciel, pas même les
antivirus.
Je ne lis que
maintenant Catherine Nay, Un pouvoir nommé désir [4]. Inventorier ce
qui était su du futur élu avant qu’il n’obtienne le pouvoir.
L’éditorialiste et journaliste, si reconnues depuis
Décisivement, dans une présence à la tête de la République
et de son Etat, il y a la relation au peuple. Lisant et regardant (plus
rarement) Nicolas Sarkozy [5],
je ne ressens pas cette relation : hantise des sifflets, souci des urnes,
intuition jusqu’ici justifié que le peuple n’existe pas politiquement puisque
la rue, censément son révélateur, ne bouge que pour la montre. Symptômes
désagréables pour lui comme pour les Français : les déploiements policiers
à Strasbourg pour le sommet atlantique, à Nancy pour le discours présidentiel
sur la réforme hospitalière, après qu’ait été limogé le préfet de la Manche
pour n’avoir pas empêché le chahut. Chacun de ses prédécesseurs a su dire et
vivre autrement [6].
Et accessoirement, mais souvent lourdement, l’importance de
la communication. Ni la quantité, ni la longueur des interventions, l’excès
annulant tout, une spontanéité révélatrice faisant ou défaisant tout. Le
« casse-toi, pauv’con »… la roleix commentée par Séguéla, alors qu’elle
est sans doute au poignet de Nicolas Sarkozy depuis plus de sept ans (ou qu’il
en avait déjà une avant Janvier 2003) [7].
Trois exemples a contrario. De Gaulle, ses communiqués et sa conférence de
presse en Mai 1958 qui le portent au pouvoir, l’effondrement du pustch d’Alger
qualifié le 22 Avril 1961 de « pronunciamento militaire… par un quarteron
de généraux en retraite », les retournement du 30 Mai puis du 24
Novembre1968 . Valéry Giscard d’Estaing en face-à-face pour le second tour
avec François Mitterrand : « Mais, M. Mitterrand, vous n’avez pas le
monopole du cœur ! » [8].
Enfin, l’entretien radiotélévisé de ce dernier disant « tout » sur
ses relations avec Bousquet, avec Vichy et sur sa santé, tandis que la série,
devenant annuelle, des dénégations de Jacques Chirac sur les affaires le
concernant et notamment sur « la cassette Méry » ne convainquirent
pas. La sincérité a tout de même besoin de l’habileté pour se présenter, mais
l’habileté, en revanche, ne fait jamais une sincérité à partager. La communication
présidentielle depuis deux ans a campé une personnalité, pas plus et pas moins.
Or, l’époque autant que l’hyperprésence médiatique de Nicolas Sarkozy
produisent bien d’autres éléments de son image – pour le public et pour le
citoyen – que ses seuls discours radiotélévisés.
Contre-emploi ? rapporté au passé, mais
caractéristique d’une nouvelle époque pour la prestation politique, autant que
d’un arrivisme triomphant. Parfaite émule avec aussi peu de cartes à la
naissance – sauf l’atout-femme, handicap quand manquent le culot et
l’insoumission au sort, joker à tout servir quand on se sert de tout. Rachida
Dati dont l’histoire complète peut se clore le 7 Juin par une élection à un
Parlement où elle ne siègera pas et dont elle n’avait aucune envie. Le pied à
l’étrier par Albin Chalandon, parrainée par Marceau Long et par Simone Veil, admise
chez les diirgeants d’entreprises formant le CAC 40 de notre bourse, commensale
du Siècle et de Bérard-Quélin, avant même de s’attacher à Nicolas Sarkozy et
après avoir essayé de la filière socialiste, elle sidère par un jeu comparable
à celui du chat botté, sauf qu’elle ne joue pas pour le marquis de Carabas,
mais pour elle seule [9].
Elle donne son style et son argumentaire au Figaro
pendant la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy dont elle a reçu la
direction : ne parler que de l’adversaire, le plaindre surtout, s’étonner
qu’il ne soit pas aussi bon qu’on l’avait espéré. Elle excelle dans le rôle
masculin quand elle en découd avec une autre femme, Ségolène Royal en
2006-2007, maintenant avec Elisabeth Guigou sur le bilan de chacune à la sortie
de la Chancellerie, place Vendôme. Elle introduit l’alcôve dans l’histoire
politique du quinquennat, fait comptabiliser ceux qui doivent leur place à
Cécilia et leur disgrâce à Carla (dont elle est peut-être) et la naissance
adultérine fait supposer un père président de la République, si ce n’est l’un
des frères de celui-ci, ou un ancien chef du gouvernement espagnol. Chronique
de ses colères, du genre de celles de Nicolas Sarkozy sans qu’elle ait la
fidélité de ce dernier à ses collaborateurs (exception, David Martinon
soulignant la substitution d’influence d’un lit à l’autre). Mais Rachida Dati
incarne surtout le défaut majeur du pouvoir actuellement en place : chargée
d’une réforme très voyante, celle de la carte judiciaire, et d’une population à
risque, celle des prisonniers et de leurs gardiens, sans compter l’aveu des
législations répressives, elle est le seul ministre qui ait, pour les Français,
une personnalité distincte de celle du président de la République. Les autres
domaines de la réforme gouvernementale ne sont gérés que par des prête-noms,
souvent pâles : Hervé Morin à la Défense, ou bien aptes : Roselyne
Bachelot pour les hôpitaux, ou dociles aux désaveux et injonctions :
Xavuer Darcos et Valérie Pécresse. Elle aura beaucoup bousculé, son œuvre, si
elle dure, sera discutée, en revanche elle marque par le succès inédit d’un
arrivisme totalement avoué et assumé. Comme celui du président de la
République. La France, ces années-ci, a vêcu deux formes achevées du culot. Une
femme fascinant les hommes et quelques femmes par son arrivisme. Un homme
fascinant par sa volonté d’exercer le pouvoir. Au point qu’on les a cru en
couple de rechange quand s’est défait l’union de Nicolas Sarkozy avec Cécilia.
Les présidences précédentes avaient été simples, de Gaulle
sans garde rapprochée, aux multiples viviers de l’Etat à la France libre,
Georges Pompidou imité en cela par Valéry Giscard d’Estaing gardant auprès
d’eux les équipes rodés dans l’exercice de leurs fonctions antérieures,
François Mitterrand n’essayant de nouveaux ministres qu’en début de chacun de
ses deux quinquennats de véritable exercice du pouvoir et Jacques Chirac
successivement prisonnier de sa révérence pour Alain Juppé, de l’isolement dans
lequel le réduisit Dominique de Villepin pour terminer dans une fascination
impuissante pour un Nicolas Sarkozy qu’il eut longtemps tous les moyens
d’empêcher d’arriver.
La France souffre actuellement de l’exiguité de ses deux
milieux dirigeants : le politique, l’économique, qui n’ont qu’un point
commun, le président régnant, lequel a comme secret, celui de sa relation avec
un secrétaire général dont on ne sait s’il est dominant ou exécutant. Le milieu
politique tend à s’enfermer selon les réformes ou les consécrations d’usage que
multiplie Nicolas Sarkozy pour mieux le dominer : cumul des mandats,
retour des ministres à leur siège électif sans revenir devant les électeurs
quand ils ont quitté le gouvernement, extension par équivalence de dépendance
vis-à-vis de l’Elysée et aussi de rémunération des différentes places
auxquelles le président nomme discrétionnairement (rang éligible sur les listes
européennes et régionales, investitures à la députation, entrée au gouvernement,
multiples présidences d’agences, d’observatoires, d’autorités et bien entendu
de tout le secteur public – cynisme que ces nominations soient
constitutionnellement soumises au Parlement, puisque la pâle commission
consultative de déontologie elle-même n’est pas entendue quand elle ose
seulement se dire embarrassée). Le milieu économique est géré autrement, en
réseau et en amitié, tout en se faisant pénétrer en partie par le système
présidentiel : le second groupe bancaire français et d’ici peu
France-Télécoms. sont tenus à peine indirectement par le président régnant. A
la charnière de ces deux mondes communiant dans la même libido. L’exercice
fermé du pouvoir, une habileté consommée : Anne Lauvergeon, à grande école
quoique d’un mourant, décline le portefeuille de l’Industrie en début de
quinquennat, pour – renouvelée à la présidence d’Areva – inspirer aussi bien la
politique étrangère que la politique industrielle et énergétique de Nicolas
Sarkozy, lui-même. Le nucléaire fait nos alliances et nos tolérances. L’ensemble
– autant du fait de la crise mondiale que de la violence déjà avérée
ponctuellement et plus encore à venir du fait des licenciements, des
délocalisations, des priorités données aux actionnaires sur la masse salariale
– ressemble à une société peu nombreuse mais en état de siège, omnipotente mais
cernée. Ni les assiégés ni les assaillants ne le savent encore. En tout cas, ne
le vivent déjà.
Si François Bayrou a tort [10],
si les observations qui précèdent sont forcés, il faut que soit bien mauvaise
la communication présidentielle et gouvernementale. Je serai heureux de lire,
entendre ou rencontrer un sarkozyste donnant une vue d’ensemble et cohérente –
dans une langue qui ne soit pas de bois et qui traite autre chose que de la
sottise ou du sectarisme de ceux qui sont catalogués opposants. Une défense et
illustration – positives – du sarkozysme par exemple du genre de l’appel des 22
au vu de la politique extérieure du général de Gaulle en 1966 ou des éditoriaux
d’Emmanuel d’Astier de La Vigerie… Il doit bien exister en
« sarkozie » ce que furent René Capitant et Louis Vallon pour bien
des gouvernants abrités par l’homme du 18-Juin. Ne s’agit-il pas d’ »un
programme politique qui ose s’appeler de droite. Une droite devenue enfin
moderne parce qu’elle aura su abandonner ses frilosités pour devenir
imaginative, généreuse, et ouverte » assurait en 2006 celui qui a été élu
en 2007 ? (quatrième de couverture de Libre, op. cit.). « Je vous dis une chose. Si on n’avait pas
l’Identité nationale, on serait derrière Ségolène. On est sur le premier tour
mes amis. On est sur le premier tour. Si je suis à 30%, c’est qu’on a les
électeurs de Le Pen. Si les électeurs de Le Pen me quittent, on plonge. »[11]
Et l’ « on » avait aussi Simone Veil, présidente du comité de soutien
[12].
Propos de la
B
Réflexion
Ma tête est un bouclier, mais çà
m’va !
Ariane Mofath (? orthographe)
Deux ans de monocratie, jeu à quatre (Nicolas Sarkozy,
Ségolène Royal, François Bayrou, Olivier Besancenot), suffrage universel éludé,
tolérance des élites de tous côtés en politique et en religion, indignation selon
les métiers, les âges ou l’état de vie. Une souffrance générale, un mal-être
mais qui ne cristallisent toujours ni en haine ni en une analyse dialectique
sur les causes et les remèdes. « La crise » accentue la tolérance,
secrète des excuses et frappe presque tous d’une interdiction de penser,
notamment à l’avenir si la matrice de demain est le moule, le carcan
d’aujourd’hui…Deux ans : déjà ! ou seulement ? donc
encore trois… Le Figaro fête
l’anniversaire . Le Monde assume le
risque d’être totalement négatif.
Distinguons 1°
le superficiel, 2° le fond de notre crise nationale laquelle n’est pas nouvelle,
3° les dénouements possibles. Je dis tout de suite deux convictions.
Ma première est que le pouvoir actuel –
psychopathe selon l’acteur unique et selon aussi la complaisance ou la
tolérance de la plupart de ceux qui pouvaient et qui pourraient empêcher la
monocratie, est une exception, qu’elle est illégitime au regard de toutes nos
valeurs, de tous nos intérêts, de tous nos engagements d’honneur envers nos
descendants, envers nos partenaires, envers tous ceux qui nous regardent, ont
besoin du repère que nous fûmes et pouvons être. Qu’en conséquence, les
habituelles grilles d’analyse, les nuances dans le bilan, la co-responsablité
qu’engendre la vie en démocratie ne sont pas – vis-à-vis du système Sarkozy –
de mise sauf à considérer, mais c’était déjà le cas pendant la campagne
électorale, que pour être entendu, il faut ne pas paraître trop de parti pris.
Les « anti » ont cependant l’excuse, depuis le soir de l’élection (le
Fouquet’s), qu’il ne s’agit plus d’un
procès d’intention. En revanche, ce procès ils le subissent désormais :
les provocateurs ne sont pas les tenants actuels du pouvoir, et plus
précisément l’omni-président ou l’hyper-président, ce sont ses opposants !
S’opposer au président régnant [13],
même avec de bonnes raisons, très factuelles, serait manquer à l’art de penser,
et surtout ne pas voir des aspects positifs, ne pas soutenir des projets ou des
réformes bénéfiques. A quoi je réponds qu’au niveau du président de la
République, l’exercice du pouvoir et chacune des décisions, chacune des
interventions forment un tout, et que le tout ne peut s’apprécier que selon
deux critères : 1° l’efficacité soit pour le bien commun, soit – règle de
cohérence – selon ce qui était attendu par l’auteur ; 2° la relation avec
la morale publique, avec l’âme du pays. Les projets présidentiels, même
soutenus par sa majorité parlementaire, pour la plupart n’aboutissent pas, ou
sont retardés ou bien, finalement, leur vote intervient selon des textes très
différents. La révision constitutionnelle n’est pas la seule illustration de ce
constat, les réformes scolaire, hospitalière, pénitentiaire sont rééchelonnées
non pour être mieux concertées mais sous la contrainte. Quant à l’âme du pays,
elle est au mieux confrontée à une proposition simple : les
pleins-pouvoirs donnés à un homme qui n’avait, avant de les recevoir, rien fait
de notoire ; aucune perspective globale, aucun objectif ne lui sont
données. Nicolas Sarkozy n’a pas le talent de la prospective, de la fresque, il
n’a de science – vraiment consommée – que l’intimidation. Soit par accumulation
dans son agenda faisant au moins crier à la prouesse sportive, soit par
exploitation cynique de ce que nos mœurs et une déviation de nos institutions
lui donnent en matière de nominations discrétionnaires.
Je crois que
« l’antisarkozysme » est constructif, ppour au moins deux raisons. La
première parce que – que notre critique de Nicolas Sarkozy et de son régime
soit ou non fondée – l’opposition, en expression et en organisation, est une
redécouverte de la démocratie. Pas encore l’invention de tous ses mécanismes
pour l’époque contemporaine, mais déjà la prise de conscience que la tolérance,
la docilité, le goût pour le muscle du chef ne sont constructifs en aucun
domaine. L’autre raison est que cette attitude critique nous engage au doute.
Avons-nous raison de nous opposer, voyons-nous déjà l’ensemble – méfaits et
bienfaits – de ce « règne » ? Ne s’est-on pas trompé dans le
passé ? Ainsi les critiques – au nom de la démocratie – que firent du
général de Gaulle, avec sincérité et brio, Pierre Mendès France [14] et
François Mitterrand [15]… et
quand je reprends les mémoires de Valéry Giscard d’Estaing, écoute quelques
grands témoins de sa présidence (ainsi Marceau Long, secrétaire général du
gouvernement de 1974 à 1982, concluant que nous avons eu alors une succession
exceptionnelle de quatre grands présidents, du Général à Mitterrand), je
perçois que ma critique alors passionnée (la publication parfois hebdomadaire
de mes propositions d’articles dans Le
Monde, sous la direction de Jacques Fauvet) a été unilatérale et obstinée.
Seconde conviction :
nous ne nous en sortirons qu’avec un regard et des comportements – plus de
pensée et d’analyse que « d’action », de financements et de
législation – vraiment neufs. Notre libération d’une quantité de dogmes et
d’habitudes ne portera pas sur cet engrenage, proprement infernal, de
« réformes » et de consentements que sans doute l’alternance 1981-1986 a provoqué dans notre
psychologie nationale, et dans notre substance : essentiellement la
désindustrialisation du pays, la délocalisation des centres de décision, la
dénaturation de nos idées politiques et économiques, la trahison spirituelle
d’une partie des élites de la haute fonction publique accaparant la direction
des entreprises, bref la perte de notre patrimoine matériel, technologique et
humain. Cette libération nous fera sans doute ré-inventer la participation et
nous aurons assez de foi en nous-mêmes pour être – comme naguère –
l’imagination d’une Europe égarée, folle d’impuissance et d’un monde mûr pour
une « gouvernance » planétaire des ressources et des flux.
Notre expérience
nationale assure que nous avons la capacité de totaux et souverains
retournements en quelques mois.
I
Le superficiel ne doit pas
nous aveugler
1° la
psycho-rigidité du pouvoir en place
Cette rigidité n’a pas que des effets
négatifs sur la prise que doit avoir tout gouvernement sur les matières à
traiter. Elle en a tout autant sur les oppositions. Ce fut l’art du général de
Gaulle – sauf en Mai 1968, dont il fut la victime, alors qu’il n’en était
nullement la cible initiale – que de constamment, pendant onze ans, amener le
débat public, les thèmes électoraux et donc toute consultation populaire, de
quelque type que ce soit (referendum, élection présidentielle, renouvellement
de l’Assemblée nationale) vers des questions simples et de dimensions nationales.
Nos institutions, la décolonisation, le cadre de l’économie et des négociations
sociales. D’une certaine manière, le débat provoqué n’eut lieu qu’après son
départ et il fut largement approbatif jusqu’il y a vingt ans. En effet, plus
personne ne remit en cause soit les orientations dont il nous avait fait
prendre l’habitude en matière européenne ou atlantique, soit le modèle social
qu’il avait conforté (le tripartisme, la planification) après les avoir fondé
selon le programme de la Résistance en 1944-1945 et par un comportement
personnel vis-à-vis des puissances d’argent et des intérêts privés. La rupture
de 2007 à 2009 s’est opérée dans le fond et dans la forme.
Or, le débat que nourrit Nicolas Sarkozy
n’est pas celui qu’il prétend mener : les réformes ponctuelles, pour deux
raisons, parce qu’il ne sait pas les inscrire dans un ensemble que l’ensemble
des Français pourrait comprendre au lieu que ce soit chaque métier, séparément
des autres, qui examine le sujet le concernant, et parce que cette lacune qui
n’est pas que de présentation de la politique gouvernementale, amène les
Français à juger davantage le
comportement du président de la République, sa manière de trancher ou de
résoudre les questions, que le fond de celles-ci. Ce qui nous empêche de
réfélchir sur nous-mêmes ou de considérer le monde tel qu’il devient et va
être.
Les propositions cristallisent les énergies,
celles du gouvernement pour passer « en force », celles des usagers
ou des professionnels concernés pour réclamer concertation, réflexion et
délais, celles de l’opposition pour dénoncer les abus. Il ne reste plus aucun
ressort collectif ou corporatif pour proposer ou discuter les vraies urgences
et pallier les vrais empêchements. On traite mal ce que l’on veut traiter, on
ne traite pas ce qu’il faudrait traiter.
La démocratie se perd, puisque tout est à la
décision et à la nomination du président de la République dans le système
gouvernemental et dans l’Etat – les témoignages sur la manière dont de Gaulle
animait ses gouvernements montrent que le système de la Cinquième République à
sa fondation était tout autre, et que l’Elysée ne faisait qu’arbitrer ou
alerter, que les nominations étaient des résultantes de carrières ou d’un
consensus des administrations et des institutions traitant du sujet qui
appelait un nouveau responsable. Et bien évidemment, le pouvoir en place
reporte la critique et la mise en cause à la prochaine élection présidentielle.
L’ignorance des corps intermédiaires est signifiée par la dénégation de toute
signification à quelque scrutin que ce soit en cours du mandat quinquennal.
Dans ces conditions, l’opposition, notamment
à gauche, qui est niée dans sa légitimité, ne peut présenter qu’une image
subordonnée au rythme présidentiel, et qu’une dénonciation peu positive si les
Français ne perçoivent pas qu’ils ne sont plus en démocratie. La perception est
différente, le pouvoir n’a plus de prise que sur la machine à légiférer et sur
les nominations. Le pays est à la dérive, déstructurée tandis que le système
est rigide : imposer ou reculer. En réalité, il est moins gouverné que
jamais. Et la seule dogmatique qui pourrait rendre compte de la plupart des
réformes engagées de force quels que soient les rapports, commissions et
comités traitant de la Constitution, de l’organisation territoriale, des moyens
de relancer l’économie, de réformer l’hôpital, de repenser et déployer mieux
nos systèmes de défense, etc… : les contraintes budgétaires et notre
désendettement, n’est guère motivante quand le traitement de la crise économique
se fait par le renflouement des grandes entreprises de production ou de service
et pas du tout par une augmentation du pouvoir d’achat. Le thème de
l’indépendance – celle du pays vis-à-vis des autres dans le monde actuel, en
alliance avec nos semblables qui sont les Etats membres de l’Union européenne,
et celle de l’Etat national vis-à-vis des idéologies et des intérêts – ne peut
évidemment plus être le dénominateur commun des Français et leur aiguillon. Le
président de la République s’est trop affiché en sympathie et en mimétisme avec
les uns et semble trop réprimer ou mépriser les autres, ceux du bas de
l’échelle ou du but de table. La dialectique française dans l’Union européenne
n’est pas une culture d’alliance et de mise en commun, et dans l’entrelacis des
stratégies mondiales notre réintégration de l’organisation intégrée de
l’Alliance atlantique – même si la présidence de Barack Obama est à son
inauguration plus populaire que la précédente à son dénouement – n’est pas une
manifestation d’indépendance. Elle l’est seulement, ce que l’on savait, de
celle du président de la République vis-à-vis d’un passé qu’il n’a pas connu et
d’expériences qu’il n’a pas faites.
2° l’apparence
des implications européenne et atlantique
Le rapetassage des institutions européennes
par le traité de Lisbonne, le point toujours en suspens des ratifications
nationales de ce texte et donc de son entrée en vigueur sont des questions
superficielles. Rien ne changera tant
que le fonctionnement de l’Union européenne ne s’appuiera pas sur un sentiment
populaire globalement favorable, et permettant de situer l’une ou l’autre
des gestions moins bien acceptées dans une dialectique de compromis entre des
situations diverses et de bien commun. Autant le fait que la France ne sache plus
proposer des arrangements ou des innovations vraiment décisifs : la
déclaration Schuman en 1950 ou le compromis intervenu à Luxembourg grâce à
Couve de Murville en 1966, est devenu un problème de fond, parce que
l’expérience prouve qu’en Europe, la France seule avait la crédibilité et le
poids intrinsèque – ni trop grand ni trop faible – pour proposer ce qui
désembourbe, autant sont dérisoires les menées de Nicolas Sarkozy pour se
perpétuer par la présidence de l’eurogroupe à la tête de l’Union ou pour faire
revoter les Irlandais jusqu’à ce qu’ils se déavouent eux-mêmes (et pourquoi
leur Parlement ne réviserait-il pas à huis clos la Constitution pour en effacer
la clause référendaire !). Je tiens de plus en plus à une élection au suffrage direct du président de l’Union par tous les
citoyens européens conviés à ce scrutin en circonscription unique, un président
ayant la capacité de faire juge ces mêmes citoyens par referendum sur les
matières dont les traités confèrent la compétence à l’Union. Tant que cela
ne sera pas envisagé, débattu puis mis en œuvre nous en resterons à une
incompréhension croissante entre des gouvernements nationaux apeurés et des
opinions au mieux sceptiques sur les bienfaits intrinsèques de l’Union. La
crise économique et financière actuelle a ceci de positf qu’elle montre le
découplage entre Etats-Unis et pays européens, puisque Washington est un
système fédéral et que la stratégie est une relance par la consommation, tandis
que le nôtre est un système confédéral qui ne cache plus un fonctionnement par
addition de politiques disparates sans volonté commune que celle des dirigeants
de figurer en photo. de groupe.
Notre
réintégration dans l’O.T.A.N. est une
décision superficielle. Elle n’apporte rien ni à l’Alliance, ni à nous-mêmes, ni
à nos alliés, elle est un manque à gagner. Elle
est la sanction que nous nous infligeons à nous-mêmes, puisque nous n’avons pas
su tirer parti de l’élan et de l’image (y compris commerciale) que nous
avait conférés la décision de l’homme du 18-Juin – celui de l’Union
franco-britannique à la vie à la mort – de nous faire quitter un système mais
pas une alliance. Depuis 1969, nous n’avons fait qu’arranger des modes
ponctuels et occultes de nos maintiens dans ce système. Nous n’avons en cela
servi personne et la réintégration n’est qu’une manifestation de plus d’une
emprise personnelle du président de la République sur l’origine de ses troupes.
Cette décision n’est approfondie ni au regard
de celle prise par de Gaulle de quitter l’O.T.A.N. ni de la pétition toute
pratique et en rien dogmatique d’un partage de la réflexion et des décisions au
sein de l’Alliance.
Rappel… lors de la crise du franc en Novembre
1968, Lyndon Johnson est le premier à accorder les concours soutenant le refus
de dévaluer articulé, à la surprise générale, par de Gaulle, refus qui inversa
la tendance… quatre mois après, Richard Nixon est à Paris. La déclassification
d’une partie des archives de la CIA a été exploitée et en donne le récit. De
Gaulle dit au président des Etats-Unis : « L’O.T.A.N., c’est
l’absence d’une défense nationale et c’est le seul pouvoir des Etats-Unis. Or
la France peut pas subsister telle qu’elle est et qu’elle a toujours été sans
une politique et une défense nationales ; sans celles-ci, elle tombe à
rien, elle se disperse entre une multitude de partis politique, elle ne peut
pas avoir de gouverement, elle s’affaiblit, elle n’est pas debout (…) Le
meilleur service qu’elle puisse rendre à l’Alliance, c’est d’être elle-même,
avec ses propres forces et sa politique. Car, dans une guerre, une France dotée
de sa substance et de sa réalité serait plus utile qu’une France sans âme
nationale. » A quoi répond Nixon : « Je crois que je vous
comprends bien. J’ai des vues différentes de celles que certains avaient
exprimées auparavant. Je crois, en effet, qu’il est bon que les Etats-Unis
aient à à leurs côtés une autre puissance comme la France, qui détienne une
capacité nucléaire. Et il nest pas bon pour les pays non communistes que les
Etats-Unis soient le seul pays à détenir des armes stratégiques. Pour l’avenir,
si la coopération européenne se développait, il serait utile qu’elle fût fondée
sur la position française. Plus important encore, j’espère que nous pourrons
aboutir avec la France, conformément à sa position d’indépendance, à étendre et
à approfondir notre coopération militaire dans des conditions plus étroites que
celles qui existent aujourd’hui. » [16]
Le comble est que la décision du seul
président de la République – proprio motu ou intoxiqué par ces officiers qui, de
génération en génération, craignent la responsabilité professionnelle d’une
indépendance militaire – n’était pas dans le sentiment de son mentor habituel,
Edouard Balladur [17],
ni de son Premier ministre, François Fillon [18].
En revanche, la réflexion, trop personnalisée, de Nicolas Sarkozy aurait eu
plus de fondement si elle avait traité de l’organisation de l’Alliance et
invoqué la procédure de révision du traité (article 12) : c’était déjà
l’objet du memorandum adressé le 17 Septembre 1958 par le général de Gaulle aux
gouvernements américain et britannique [19].
Quant à l’extension territoriale et matérielle du champ de l’Alliance, en tant
que telle, souvent critiquée depuis que le terrorisme en est le prétexte ou le
cœur, elle peut correspondre à l’analyse du général de Gaulle. Mais je ne donne
pas pour autant raison à ceux des fidèles à de Gaulle, qui soutiennent cette
décision du président régnant [20].
3° nous
n’avons plus de politique économique
Le débat sur la relance est superficiel car
il ne tient qu’à l’alternative entre la subvention (de la trésorerie des
banques ou de l’investissement des entreprises) et l’incitation. Incitation à
consommer si les salaires et les retraites étaient augmentés. Subvention à
l’erreur stratégique qu’ont commise des personnes physiques à la tête de nos
banques et de nos entreprises, confortées et jamais contrôlées par des cabinets
d’audit, des commissaires aux comptes et des gourous divers. Curieusement
d’ailleurs, nos gouvernants ont opté pour la solution non seulement la plus
coûteuse, mais la plus visiblement coûteuse : les remboursements avec
intérêts, de la part des banques quand elles seront renflouées, sont évidemment
illusoires. Tandis que les augmentations de salaires relançant une dépense qui
n’est pas budgétaire ni publique produisent aussitôt des commandes : Ford,
en 1929, faisait acheter par ses ouvriers les voitures que ceux-ci
fabriquaient… Tant que nous n’aurons pas critiqué – autrement que cas par cas –
le mode de recrutement de nos dirigeants économiques et financiers,
généralement venus des cabinets ministériels et jamais du rang ou du guichet
des entreprises et banques qu’ils dirigent d’en haut sans en connaître vraiment
ni les métiers ni l’histoire, nous perdrons chez nous nos batailles pour
l’emploi et l’innovation, et nous n’aurons plus l’influence que nous eûmes dans
les instances internationales, à commencer par celles de l’Union européenne.
De la Libération à 1974, la politique
économique revenait à construire de l’industrie et à encourager la production,
y compris l’agricole. Devenus riches et équilibrés, nous devenions
progressivement plus subtils mais moins concrets : les taux divers étaient
à la discrétion du ministre des Finances, plan de stabilisation, plan de
refroidissement, lutte contre l’inflation. Michel Debré, ministre de
l’Economie, se trompait en macro-économie mais pas en politique industrielle
(la BNP et Elf sont de lui). Censément son opposé, Georges Pompidou, président
de la République compensait ce que Valéry Giscard d’Estaing, ministre, puis son
successeur gaspillait d’un élan. Mais par la succession vite spéculative des
nationalisations et des privatisations – les places de dirigeants autant que
les croissances fusion-absorption – nous nous sommes adonnés à ce que –
cyniquement – les décideurs, tous publics, appelaient du
« monopoly ». La politique économique, quelque temps comparable à la
conduite d’un véhicule accélération-frein ou plein gaz ou encore point mort,
devint une réflexion d’organigramme. C’est alors qu’on commença de ne plus
fonder l’économie nationale sur la concertation de tous les acteurs. La
politique économique était devenue statique, le dessaisissement des compétences
monétaires régaliennes pour une sage mise en commun européenne fut le prétexte
pour supprimer la dernière institution qui combinait la négociation sociale
avec la prévision et les stratégies des investissements et du commerce
extérieur. Gauche et droite se sont accordées sur cette modernisation. Nicolas
Sarkozy et Christine Lagarde ne connaissent ni notre histoire économique ni le
besoin qu’a tout entrepreneur de repères et de cadres. La dérégulation ou la
déréglementation n’est souhaitée par les partenaires dites sociaux que si elle
désarme l’autre – patronat, salariat selon sa situation – mais maintient
la garde pour soi. Une refondation est possible, concept que le patronat
formula sous un gouvernement de gauche alors que l’organisation du cadre de
l’activité économique est ataviquement le fort de ce genre de gouvernement. Pas
du tout la refondation du du capitalisme qui n’a besoin d’aucun acte de
naissance ou de décès puisqu’il y aura toujours besoin de capital, de travail,
d’épargne et de dépense. Mais la refondation des outils nationaux – étendus à
l’ensemble des acteurs et du territoire européens – les outils de la
planification. Dans ce mouvement – aujourd’hui et sans doute pour un
quinquennat, à cheval sur deux mandats présidentiels et deux législatures, une
nationalisation temporaire du crédit se comprendrait et la coincidence des
mandats parlementaires et présidentiels selon un rythme quinquennal se
justifierait : ce serait celui du plan. Alors, une politique économique
volontariste et concertée aurait son cercle et ses outils. Tout cela n’est pas
même refusé, c’est complètement ignoré, avec le comble que le « conseiller
spécial » du président de la République fut le dernier de nos commissaires
au Plan…
La politique économique d’un Etat ne peut
consister en un réseau de dirigeants, faiseurs du roi puis soutenus par le roi.
Pas davantage elle ne peut être la collection des discours thématiques du
président de la République ou le seul aménagement des fiscalités. Celles-ci
devraient, depuis belle lurette pour éviter détournements et dumpings, être de
compétence européenne. La négociation de Lisbonne a décidé le contraire ;
c’est un des rares domaines de décision unanime ! La politique économique,
c’est d’entreprendre à partir de soi et de conquérir ailleurs que chez soi.
*
* *
I I
Problèmes et questions de
fond
1° établir
leur liste et leurs liens
A sa prise de fonctions, Nicolas Sarkozy était confronté à
deux problèmes. L’un qu’il était censé le plus à même de traiter : la
violence, l’autre que le calendrier lui imposer : le fonctionnement de
l’Union européenne.
La
violence n’est pas un problème, elle est le signe d’un problème, en fait d’une
souffrance. Souffrance des personnes,
souffrance d’une société. La violence est un cri : appel des uns, alarme
de tous. Elle n’est pas le fait des « voyous », des délinquants
présumés ou récidivistes, elle n’est pas subie par certaines catégories de
notre population, elle n’est pas circonscrite géographiquement. Elle a été
hâtivement identifiée aux questions du chômage, de l’urbanisme, voire de
l’aménagement du territoire à la périphérie des grandes agglomérations. Ces
simplismes des dernières années se cumulent avec ceux qui ont fait la fortune
électorale du Front national puis du ministre de l’Intérieur, candidat à la
présidence de la République : les restrictions à l’immigration,
l’aggravation des sanctions, ou le peu de respect des libertés publiques et de
la dignité humaine d’une part avec une bonne dose de racisme, que ne sauraient
compenser les diverses instances de veille contre les discriminations ou les
panacées que seraient la discrimination positive ou les diverses parités entre
communautés, classes d’âge, sexes. La violence est un simplisme et les
rigidités y poussent. Elle a ses conséquences : le système pénitentiaire,
les innovations en matière de détention et de rétention ne correspondent à
l’image que longtemps s’était faite de nous une partie du monde. Les plans
successifs concernant les banlieues, la jeunesse, la grande précarité, le
mal-logement ont désordonné les budgets publics, nourri les annonces
disproportionnées et les promesses intenables ou non tenues, ils ont fait du
vrac, mais peu de remèdes.
Le
fonctionnement de l’Union européenne avait
ses diagnostics. Le désaveu populaire quand il y a consultation référendaire.
L’inadéquation à une expression politique extérieure quand manifestement le
monde et les stratégies pour y garder quelque place et quelque sécurité
changent très vite : doute de l’Amérique et sur l’Amérique, émergence de
la Chine et de l’Inde plus seulement par poids démographique mais selon de
nouvelles envergures financières, industrielles et technologiques, renaissance
de la cohérence et de l’ambition russes. Une incapacité à faire de la
mondialisation un mode d’équilibre économique et social pour un ensemble dont
chacune des parties avait été longtemps exportatrice en biens et services,
exportatrice d’hommes et d’idées. En fait, l’Union européenne n’était plus une
espérance et une expansion, même sur le plan territorial puisque les opposants
à l’adhésion turque ou les circonstances de l’adhésion ukrainienne empêchent de
nouveaux élargissements. L’Union se replie conceptuellement et
institutionnellement : elle n’évolue plus, elle ne répond plus à des
aspirations, elle ne pallie pas des peurs. La preuve en est donnée par la
pâleur extrêmes des campagnes nationales pour le renouvellement du Parlement
européen, et par la prévision d’abstentions encore plus nombreuses – très
largement majoritaires – au scrutin du 7 Juin.
La prise de conscience d’une crise économique et financière – du seul fait de la probabilité
de krachs bancaires dans l’ensemble euro-américain, très imprudemment intégré
depuis vingt ans – a imposé à la fin de 2008 un nouveau problème à l’élu de
2007. Celui-ci l’a traité en termes médiatiques et par la transposition dans
l’exercice de la présidence semestrielle de l’Union qui revenait à la France,
de sa propre pratique du pouvoir chez nous, ou sur nous… Tout a été dit et
commenté sur cette pratique : agenda surchargé, communication boursoufflée
masquant des reports de réunions, de décisions et l’exiguité des champs
labourés. Neuf mois après la déconfiture de Lehman
brothers, qu’on peut considérer – comme le fut la faillite de la Kreditanstalt en 1929 – comme la date
faisant symbole, on n’a guère établi qu’une liste des paradis fiscaux et que la
nécessité de doter davantage les marchés financiers d’autorité de contrôle
censément supranationales, le tout assorti de dotations exceptionnelles pour le
Fonds monétaire et pour la Banque mondiale.
La stagnation économique et le chômage
paraissaient contenus en 2007, ils ne le sont plus au second anniversaire.
2° la
manière de les traiter
L’économie
et la société sont aujourd’hui traités en termes de maintien de l’ordre, physique et idéologique. L’absence de négociations dans
les entreprises, la mauvaise image des dirigeants qui sont soit les
représentations d’un pouvoir de décision délocalisé à l’étranger, en Europe ou
ailleurs, soit les fondateurs de nouveaux empires n’ayant pas plus de respect
pour les moins dotés que n’en montre le président de la République lui-même en
s’affichant avec ces grands dynastes, ont multiplié les conflits
physiques : séquestration en réplique aux déménagements de l’outil
industriel ou aux transferts de production hors de France. La patience des
grandes centrales syndicales – qu’aucune imagination législative ne dote des
moyens d’intéresser les salariés à s’affilier – a jusqu’à présent servi la
manière présidentielle de donner des rendez-vous « au sommet » dont
la caricature est d’ailleurs faite par la représentante du patronat. Cette
absence de mécanisme ne défend pas le patrimoine français – ou ce qu’il en
reste après vingt-trois ans de privatisation et de croissance externe ayant
fait passer à l’étranger nos fleurons et nos inventions. Il amène – par un
inattendu instinct de conservation – à la défausse du président de la
République s’en prenant aux dirigeants de l’économie et à leurs abus.
Commentaire qui n’a pas été fait. Paralélisme entre la mise – par force et
cynisme – de François Pérol à la tête du groupe bancaire qu’il concoctait
depuis dix ans de Bercy à l’Elysée via Rothschild, et la démission – tout aussi
forcée – de Daniel Bouton, tête de turc désignée par Nicolas Sarkozy à toute
l’opinion publique. Les élections entérinent des nominations à des places et
pour des émoluments, les reconstructions du système financier ne sont que des
resserrements de réseaux. Ce n’est pas la restauration d’un organisme essouflé
– notre économie, notre démocratie – c’est de l’appropriation et du dépeçage.
La
machine à légiférer est trop contrainte. La matière première n’est pas assez
préparée, les projets sont devenus presque
tous suspects de partialité, censés bénéficier à certains intérêts, ou
répondent à des urgences ou à des promotions d’affichage. Tout devient question
de force et de subordination, du travail dominical à la répression du piratage
informatique. La tendance répressive semble le lien de la plupart des textes.
Or l’évolution des techniques, la complexisation d’une société à cause des
politiques de quotas, de discrimination positive, de parités, la place évidente
du jugement éthique dans la solution de nombreux problèmes pas seulement
médicaux ou pénitentiaires imposeraient de grandes précautions et des
maturations : les désignations de comités ou de rapporteurs n’en tiennent
pas lieu, surtout quand les conclusions figurent dans l’ordre de mission.
Le
paradoxe d’un pouvoir qui se faisait élire pour son pragmatisme est de ne plus
disposer comme outil que de cette machine à légiférer et que de sa compétence à
nommer ou à peser sur les nominations. Ce
n’est pas efficace, cela ne met pas la puissance publique et ses ressources au
fait de ce qui serait opérationnel. Poincaré
Notre politique extérieure, censée concrète
et sans tabou, est la moins imaginative, donc réaliste, que nous ayons eue
depuis longtemps. Deux exemples. Sa dépendance de nos structures industrielles
ou plutôt de l’établissement qui répond de notre industrie et de nos grands
groupes. Son souci communautariste. La relation politique avec de grandes
puissances est désormais dominée ou ruinée par des calculs d’entreprise :
Chine et Russie le démontrent. Longtemps prophétique puis au moins protectrice
dans la question – si difficile, parce qu’artificielle – du Proche-Orient
israëlo-arabe, l’approche conceptuelle et la posture diplomatique françaises
sont aujourd’hui figées. Elles montrent incidemment que l’image d’un président
très mobile couvre la réalité d’un néophyte aux réflexes conservateurs.
3° l’incapacité nationale à débattre
Les enceintes constitutionnelles de notre
démocratie, bien que très réglées et accueillant des personnalités rompues aux
réunions publiques, aux discussions médiatisées ou locales, ne témoignent pas
de notre aptitude à débattre. La contrainte majoritaire à l’Assemblée nationale
est doublée par un instinct grégaire. Au Sénat, les débats semblent plus
fluides et c’est d’ailleurs à la Haute Assemblée où le vote individuel a ses
lettres de noblesse, que le gouverenement – de droite aujourd’hui comme et auxa
*
* *
I I I
Un seul dénouement
1°
une fin psychotique
La majorité présidentielle au Parlement est
précaire. De plus en plus de votes doivent être rattrapés au prix d’entorses
aux règles parlementaires qui sont la franchise dans les jeux de rôle,
l’importance des lectures successives sans retour possible. La première année
du quinquennat a vu le président de la République diriger directement les
ministres et traiter le Premier ministre en collaborateur. La seconde qui se
prolonge, voit intervenir l’élu de la nation dans le champ des représentants de
celle-ci, donner l’exposé des motifs des lois, contraindre l’ordre du jour, ordonner
un vote alors qu’un gouvernement pose seulement la question de confiance. Tout
devient victoire ou défaite, recul ou
contrainte au lieu que ce soit collaboration et concours d’idées et
d’amélioration. Le débauchage de personnalités socialistes ou des soutiens
initiaux de François Bayrou revenus au « Nouveau Centre », déplace
moins de voix que des projets – surtout quand ils semblent attentatoires aux
droits de l’homme et aux libertés publiques – n’en font perdre au gouvernement
dans les votes législatifs. C’est un indice.
L’exercice de la présidence de l’Union
européenne dont se sont tant targués le président régnant et le parti dominant,
devait logiquement faire inaugurer par Nicolas Sarkozy – à la tribune de
Versailles – la harangue présidentielle, faite en personnel devant les
parlementaires selon la faculté nouvelle qu’il avait tant souhaité voir adopter
par le Congrès de révision constitutionnelle. Paradoxalement, il n’en est rien.
Ce qui a importé à l’élu de 2007, c’est d’imposer sa volonté : la révision
pour la révision car de fait la pratique importe bien plus, le régime
présidentialiste donnant tout au président, à l’africaine, sans la contrepartie
d’un contrôle parlementaire vrai, est devenu celui de notre VIème…
République ? Il en a été de même pour la réintégration de l’O.T.A.N., ce
qui a importé c’est la scène intérieure, l’emporter contre tous, les anciens
gaullistes et les socialistes qui avaient voté la censure en 1966 parce que
nous sortions de l’O.T.A.N. et qui l’ont voté en 2009 parce que nous y
rentrons. Nicolas Sarkozy a pu en rire.
Hors les hurleurs qui gagnent leur
demi-maroquin en ayant propagandé le président et sa conduite des crises – la
promotion Châtel et Jégo, cuvée mouvements sociaux de Novembre 2007 – et ceux
qui font trop de bons mots sur Ségolène Royal et François Bayrou, parce que ce
sont ceux-là qu’on rencontrera en 2012, y a-t-il en conscience tant de soutiens
dans le système majoritaire ? le Premier ministre, sur le fond, est
probablement plus extrême que le président de la République parce qu’il est
moins démagogue et plus stable, mais il réprouve certainement la forme. Pas
l’emploi de la force publique, il vient d’inciter les présidents d’université à
la confrontation pour débloquer l’enseignement supérieur. Mais la hâblerie et
le flux du discours.
La hantise des sifflets a déjà réservé aux
seuls journalistes des visites d’usine ou de chantiers, les personnels tenus à
l’écart ; elle a fait limoger un préfet ; elle complique les annonces
d’une présence effective dans les stades…
Le système tient parce qu’il n’y a qu’une
échéance et qui est encore lointaine. Dans une crise du maintien de l’ordre –
genre Mai 1968, ou plus simplement Novembre-Décembre 1995 – Nicolas Sarkozy est
imprévisible. Lâcher tout pour demeurer en scène ? Résister et tenir, mais
précisément ces deux crises avaient dépassé le seuil de résistance. D’ailleurs,
celle qui s’amasse et se grossit d’orages sera pluripolaire et sans doute pas
parisienne. Incidents plus violents dans la reprise en mains d’une
université ? Débordements de nouvelles manifestations de rue, pourtant
très encadrées par les organisateurs et par la police ? Contagion effective
des revendications outre-mer ? Chacun de ces scenarii est certainement
envisagé par le pouvoir actuel. La mise de la gendarmerie aux ordres du
ministre de l’Intérieur, l’amalgame du renseignement intérieur et de
l’information extérieure pour la sécurité nationale, l’ensemble à la main
présidentielle, à l’Elysée-même sont des ruptures de la tradition républicaine.
La chose – dégénérescence ou explosion – ne sera pas politique, mais sociale.
Sans doute, comme en 1968 et 1995, dépassera-t-elle syndicats et partis, mais
en fait elle n’aura pas de précédent, parce que toutes les rééditions actuelles
d’une part sont fort sages du côté des manifestants et contestataires, d’autre
part n’entame en rien les certitudes présidentielles et gouvernementales. Ce
sera une révolte et elle ne sera donc pas justiciable d’un seul discours ou
d’une seule posture du gouvernement et du président. Un pouvoir politique
imprévisible en cas de crise sociale, et un système qui n’a pas d’élasticité
que celle du tête-à-queue comme le changement de ton depuis « la
crise » l’a montré. Le marais, le tiers-parti, la majorité ne seront pas
ébranlés par le défaut – déjà perceptible – de résultats probants en économie
et en maintien de l’ordre ; ils commencent lentement à l’être parce que l’immoralité
de tout le système apparaît : réseaux, Françafrique, nominations
controversées, débauchages avilissant ceux qui y consentent et perdent toute
autorité en étant ainsi recrutés, achat des consciences, hontes de nos régimes
répressifs, flagrants dénis de justice (Coupat, Colonna) et image produite par
les tendances dynastiques et les recompositions familiales que l’élu de 2007 le
veuille ou non. Soutenir, subir, lâcher. Ce n’est pas le dilemme des arrivistes
– la comédie des investitures en vue des élections européennes et des élections
régionales fait tomber les masques aussi bien des nommés que des nommeurs – ce
devient celui de milieux censément dirigeants.
Dans ce scenario de lâchage, François Fillon
– si la pièce se jouait maintenant – serait le candidat de la majorité des élus
U.M.P. nonobstant une fidélité affichée de Xavier Bertrand et les ambitions
concurrentes et déclarées de Jean-François Copé. Débats de personnes, stratégie
de survie électorale et de maintien des acquis en 2007, mais certainement pas
la prolongation ni des chantiers de Nicolas Sarkozy, ni de sa manière. La
succession se décidera à huis-clos dans l’intérieur de la machine.
2° une
fin violente
La majorité présidentielle au Parlement est
précaire. De plus en plus de votes doivent être rattrapés au prix d’entorse aux
règles parlementaires qui sont la franc
3° de
toute manière, une fin sans succession et par interruption
Que ce soit un effondrement personnel, par
excès d’activité – dopage ? – ou par traumatisme sentimental, une nouvelle
fois, ou que ce soit la casse brutale d’un système de gouvernement dans
laquelle Nicolas Sarkozy n’aurait d’issue qu’en se donnant un Premier ministre
le contestant assez compétitif pour que cette contestation calme les
impatiences nées de l’échec ou du calendrier, la fin du règne ne permettra pas
de conclusion. L’œuvre entreprise a pour ciment le goût d’exercer le pouvoir et
d’accaparer la décision. Les thèmes traités ne sont pas un véritable bâti, les
projections de rétablissement de nos équilibres ou d’un grand Paris à plusieurs
décennies devant nous sont la prétention d’avoir la vue longue, rien n’est mis
en place qui soit le début de l’œuvre.
Nous vivons un règne stérile. Les partisans
du président de la République plaideront l’excuse absolutoire de la crise
mondiale. Les détracteurs le dénoncent coup par coup, mais ne sèment encore
rien. La France ne gagne, en ce moment, qu’un début d’appétit pour une forme
différente de gouvernement et qu’une réflexion, non plus sur l’entreprise,
comme au temps de François Mitterrand qui se flattait de réconcilier les
Français avec celle-ci, mais sur l’économie, sa substance, sur la société et la
nation, leurs composantes. Charles Maurras – l’un de nos nombreux pestiférés de
la pensée – a titré un des tomes du recueil de ses articles pendant la Grande
Guerre : la France se sauve
elle-même [21].
René Hostache présente à de Gaulle sa thèse
sur « un gouvernement clandestin, le Conseil National de la
Résistance » et évoque le projet de l’américain Nicholas Wahl, selon
lequel le gaullisme est un non-conformisme. Correction du Général :
« Un non-conformisme qui a le sens de la grandeur » [22].
Expliquant son vote négatif au projet de quinquennat proposé par Georges
Pompidou en Octobre 1973, Maurice Couve de Murville avait commencé par
dire : « Je suis un anti-conformiste impénitent ». Il me semble que
Nicolas Sarkozy est un conformiste dissimulé par son sans-gêne et par ses
lacunes d’autodidacte.
*
* *
C
Propositions
« Construire ensemble » . quatrième de
couverture de
Témoignage éd. XO Juillet 2006 . 281 pages . Nicolas Sarkozy
crise économique et financière & deuxième anniversaire du
pouvoir de Nicolas Sarkozy
=
gouvernement d’union nationale
(par exemple Michel Sapin rue de Bercy et Hubert Védrine au Quai
d’Orsay,
mais certainement pas Claude
Allègre qui a su mettre dans la rue presque tous les lycéens et s’aliéner la
communauté des chercheurs : l’affaire de l’accélérateur du CERN à
délovcaliser de Grenoble en Grande-Bretagne, et qui, face aux écologistes,
assure que le dérèglement climatique n’a rien à voir avec les pollutions de ces
cinquante dernières années)
programme
loi électorale à soumettre au referendum :
représentation proportionnelle pour l’élection de l’Assemblée nationale
règlement intérieur organisant vote personnel et de conscience
plate-forme commune pour
l’élection du Parlement européen
compétences d’une assemblée constituante européenne
instituant notamment l’élection au suffrage universel direct du
président de l’Union
doté du pouvoir de convoquer le referendum européen dans les matières
européennes
collectif budgétaire ajustant la loi de finances à une récession de
3% au moins
annulation du bouclier fiscal
Sans malice et avec la certitude que si
j’étais – avec bien d’autres Français – exaucé par le président régnant, je
ferai du quinquennat en cours une véritable fondation, ayant très peu de
précédent en République, sinon les premiers mois du pouvoir du général de
Gaulle, et il ne tint pas à lui, mais à des personnalités comme Guy Mollet, que
cela durât davantage.
L’union nationale pour un gouvernement de
compétences et de rayonnements de ses membres, ne serait pas une abdication de
Nicolas Sarkozy, ce serait le réapprentissage de la plupart des rôles dans
notre vie publique : de la représentation au contrôle, de la présidence de
la République au gouvernement. Pas un de ces rôles qui ne soit actuellement – y
compris celui auquel on pourvoit par la votation de tous les Français – dévoyé
par la pratique de nos institutions depuis Mai 2007.
BFF . 6 . 15 Mai
2009
disponibles par courriel sur demande :
1°
16 notes sur la campagne et l’élection présidentielles,
rédigées du 12 Novembre 2006 au 8 Mai 2007
2°
journal réfléchi
I – 14 notes rédigées du 14 Mai au 16 Décembre
2007
II – en cours
27.28 Février 2008
Arrêt sur image
I - Les difficiles épousailles entre les
Français et le nouveau pouvoir
le fondement du quinquennat en cours
trop de signes et pas assez de fond
la folle gouvernance
les attitudes en réponse
II - Les gestions
la communication défectueuse
la question des institutions
la question d’Europe
16 & 23-27 Février
& 3-5 Mars 2009
I - La France était déjà en crise profonde
avant que ne frappe l’évidence d’une crise mondiale.
une discussion de notre mode de gouvernement
une économie déstructurée
un début de mandat hors sujet
II - Face à la crise, les moyens mis en
œuvre ne le sont, partout dans le monde, qu’au niveau national et sont donc insuffisants. En France, ils sont
inadéquats.
absence de plan commun
l’hésitation à choisir un nouveau cours
la France est sur la mauvaise voie
III - Le nouvel handicap français : la
démocratie de façade
un régime de fait
une extraordinaire tolérance
une nouvelle culture : le sans-gêne
IV - La monocratie désorganisatrice de l’Union
européenne et de la France
l’Europe manquée sciemment
l’option atlantiste indiscutée
rigidité et contradiction : la perversion
des réformes
Conclusions
simples propositions d’action
politique & orientation
l’énigme imposée : Nicolas Sarkozy en
tant que président de la République
notre révélateur ?
monocratie et méfiance : pollution
mutuelle
courriels et circulaires : combat pour la
Constitution
et selon la pratique de nos institutions par
le général de Gaulle
in memoriam (méditation personnelle à la
« nouvelle » de leur mort)
Maurice Couve de Murville + 24 Décembre 1999
Michel Jobert + 26 Mai 2002
Jacques Fauvet + 2 Juin 2002
Moktar
Ould Daddah + 15 Octobre 2003
Raymond
Barre + 25 Août 2007
Pierre Messmer + 29 Août 2007
blog : http://bff-voirentendre.blogspot.com France &
relations internationales - évaluation politique quotidienne - journal de 1968-1970 -
écrits & lectures d'autrefois ou de maintenant -
collaborations de presse
contenu Journal d’inquiétude et vie de certitudes
I – Décembre 2008 à Août 2008
II – Septembre à Décembre 2008
III – Janvier 2009 à Avril 2008
[1] - (Gallimard . Février 2009 . 558 pages) pp. 298-299 qui se prolonge, très Temps modernes jusqu’à p. 311
avec le coup de théâtre des seins soudains exhibés, mais pour montrer leur
entre-deux, brûlés au napalm, mot universel
[2] -
avec élégance, Valéry Giscard d’Estaing écrit, pour ce 6 Juin 1979 où
entrent le visiter à l’Elysée Jean-Paul Sartre, Raymond Aron et André Gluksman
: « Je suis heureux de les sentir présents dans ce bureau, eux qui réunissent
une grande part de l’intelligence française et dont je sais pourtant qu’ils
détestent le pouvoir » - c’était sur demande de rendez-vous pour le comité
« Un bateau pour le Vietnam » - Le
pouvoir et la vie ** L’affrontement
(Cie 12 . Mai 1991 . 486 pages) pp. 233 et
ss.
[3] - ibid. p. 401
[4] - Grasset . Janvier 2007 . 476 pages
[5] -
sauf en trois occasions, toutes trois du même ordre, les obsèques de Raymond
Barre au Val-de-Grâce, de Pierre Messmer aux Invalides et le cinquantenaire de
la Constitution de 1958 marqué par des discours sous la Coupole, quai Conti.
Chaque fois, le passage aller et retour d’un homme pressé, penché en avant,
semblant chercher de côté et d’autre, sans fixer personne, quelque complice à
qui dire : je les ai bien eus, j’y suis. Sensation de ladrerie et de
solitude. La pose sur le pupitre de lecture est connue, mais la contempler
physiquement pendant une demi heure ou plus, agrémentée de prise à témoin tutoyée
de quelque notoriété au parterre, de jeux de mains et de bras au-dessus de la
tête, est irrésistible. Rien de solennel, au mieux du débraillé. Ce qui ne
produit la proximité, mais accentue le décalage entre la personne et la
fonction. Le sacré n’existe plus en politique française depuis deux ans. Or,
quel que soit la forme de notre régime, il datait de nos fondations. En ce
sens, Nicolas Sarkozy opère une rupture absolue par rapport à tous ses
prédécesseurs….
[6] - Cette identité de nature de tous ceux qui se
rangeaient sous la Croix de Lorraine allait être, par la suite, une sorte de
donnée permanente de l’entreprise. Où que ce fût et quoi qu’il arrivât, ;
on pourrait désormais prévoir, pour ainsi dire à coup sûr, ce que penseraient
et comment se conduiraient les « gaullistes ». par exemple :
l’émotion enthousiaste que je venais de rencontrer, je la retrouverais
toujours, en toutes circonstances, dès lors que la foule serait là. Je dois
dire qu’il allait en résulter pour moi-même une perpétuelle sujétion. Le fait
d’incarner, pour mes compagnons le destin de notre cause, pour la multitude
française le symbole de son espérance, pour les étrangers la figure d’une
France indomptable au milieu des épreuves, allait commander mon comportement,
et imposer à mon personnage une attitude que je ne pourrais plus changer. Ce
fut pour moi, sans relâche, une forte tutelle intérieure en même temps qu’un
joug bien lourd.
Charles de Gaulle, Mémoires de guerre * (éd. tricolore Plon
1954 . 680 pages) p. 111
Pouvez-vous imaginer
l’intensité, la chaleur de la sensation que l’on éprouve lorsqu’on se trouve
serrant la main de persones inconnues, pressées autour de vous, et qui vous
souhaitent bonne chance ?
Valéry Giscard
d’Estaing, Le pouvoir et la vie * (Cie
12 . Février 1988 . 399 pages) p. :
[7] - couverture, portrait en chemise bleu-vert clair de Nicolas Sarkozy, Libre (1er dépôt légal Janvier 2003 par Robert
Laffont . pocket . 1ère éd. Janvier 2003 – Août 2006 . 414 pages)
[8] - Je crois que j’ai été élu président de la
République, grâce à une phrase de dix mots : « Mais, monsieur
Mitterrand, vous n’avez pas le monopole du cœur ! ». Cette phrase
était une improvisation. François Mitterrand, assis en face de moi pour un
débat télévisé, énumérait toutes les catégories sociales vers lesquelles
allaient sa sollicitude. Implicitement, son attitude signifiait qu’il avait une
vocation naturelle à défendre ces catégories et à agir pour améliorer leur
sort, tandis que moi, le représentant des nantis , je n’avais pas à
pénétrer dans cette chasse gardée. Mon irritation a grandi. Je n’ai pas pu la
contenir. La moutarde m’est montée au nez. Et j’ai explosé : « Vous
n’avez pas le monopole du cœur ». Les études faites par les politologues
sur la campagne de 1974 ont abouti à la conclusion que la phrase que j’ai
prononcée ce soir-là m’a fait gagner aux alentours de 500.000 voix. J’ai
conservé ces voix par la suite, et ce sont elles qui ont assuré ma victoire
finale. En même temps, et sans le savoir, j’étais entré dans le monde de la
communication moderne où, selon le spécialistes, le message doit être courtt,
indéformable, accessible davantage à la sensibilité qu’au raisonnement, et
surtout intensément vêcu. Il était intensément vêcu !
Valéry Giscard
d’Estaing, Le pouvoir et la vie * (Cie
12 . Février 1988 . 399 pages) pp. 330-331
[9] - Jacqueline REMY – Du rimmel et des larmes (Seuil . Avril 2009 . 222 pages).
M’ont
particulièrement retenu les pages 64 : échec avec Dominique Perben, démarrage
avec Simone Veil sous l’égide de François Mitterrand, moindre accueil par
Jean-Luc Lagardère, début avec Marceau Long – 97 « Rachida supporte mal la
solitude. Alors elle fusionne avec ses amies ». – 110 : Cécilia,
Gérard Worms, le CAC 40 et l’Automobile club – 137 : l’affabulation. « C’est
bien l’énigme que pose Rachida Dati »
[10] - Il s’agit de s’attacher les noyaux durs de
la droite française et, s’il le faut, de constituer des noyaux durs, là où ils
n’existaient pas, ou n’esistaient plus. Et le plus sûr moyen de les constituer,
c’est de susciter des polémiques. Pour opposer les Français les uns aux autres
sur tous les sujets potentiellement explosifs. Ils disent guerre aux
tabous ! Fin de l’hypocrisie ! Et pourquoi j’en parlerais
pas ! … Ce qu’ils cherchent, c’est
l’affrontement, parce que l’affrontement seul est source de passion, et que la
passion fournit des bataillons d’électeurs. Si la logique est logique de
guerre, un groupe contre l’autre, alors c’est la détestation qui prend le
dessus et la détestation se vit épidermiquement, les yeux fermés. Et apporte
beaucoup de voix… Le régressif est plus payant. Plus primaire. Je crois que
leur stratégie est de constituer ou de conforter des noyaux durs.
François Bayrou . Abus de pouvoir ( Plon . Avril 2009 . 261 pages) p. 169
[11] - Yasmina Reza, op. cit.
p. 130
[12] - celle-ci que
j’interroge, en même temps que Valéry Giscard d’Estaing, sur le point de savoir
pourquoi elle ne soutient pas le candidat de l’U.D.F., me répond ( 2007)
longuement sur François Bayrou, puis conclut : Simone
Veil
[13] - Maurice
Leroy, Le Figaro du 4 Mai : « L’antisarkozysme ne peut tenir
lieu de projet de société » - Jack
Lang, AFP du 11 Mai :
« L'antisarkozysme systématique peut faire perdre le bon sens » et, AFP du 15 Mai, il « n'accepte pas
un système dans lequel on tire à tout moment contre le président de la
République »
[14] - Puisse l’Histoire dire un jour que de Gaulle a éliminé
le péril fasciste, qu’il a maintenu et restauré les libertés, qu’il a rétabli
la discipline dans l’administration et dans l’armée, qu’il a extirpé la torture
qui déshonore l’Etat, en un mot qu’il a consolidé et assaini la République. Alors,
mais alors seulement, le général de Gaulle représentera la légitimité. Je ne
parle pas de la légitimité formelle des votes et des procédures, je parle de la
légitimité profonde, celle qu’il invoquait justement en 1940. Elle tenait alors
à l’honneur du combat pour la libération du sol. Elle tient aujourd’hui, par
delà les constitutions qui se modifient, à des principes qui datent de 1789,
mais qui devaient avoir mûri très profondément dans les souffrances du peuple
et dans l’effort des penseurs de l’ancienne France, pour avoir pu être
formulés, dans le tumulte d’une seule séance, en une langue si belle ; à
ces principes qui dominent nos lois, qui ont fait à la France une grandeur singulière,
incommensurable, à ses forces matérielles, et qui survit à ses revers . Pierre
Mendès France (son refus de la
confiance à de Gaulle – Assemblée nationale 1er Juin 1958 JO DP p. 2578) – En fait, ce que P.M.F. mettait l’homme du 18-Juin au
défi d’être et de faire, de Gaulle l’a réalisé à la lettre…
[15] - Sur le plan politique, parlons clair. Le
gaullisme s’est servi de la sédition militaire pour saisir le pouvoir. Il s’y
est maintenu en usant de tous les procédés qui font les tyrannies. Lorsque le général
de Gaulle a craint d’être battu en 1965, de récentes confidences nous ont
appris qu’il avait envisagé d’empêcher à tout prix l’accession à la présidence
de la République de son concurrent direct. En mai 1968, il a pensé mater
l’émeute par l’intervention de l’armée. La faction qui, dans la foulée du
général de Gaulle, a investi l’Etat, il y a onze ans, et qui s’étale maintenant
dans les ministères et dans les conseils d’administration, partout où l’on
bâtit fortune politique et fortune financière, et de préférence les deux à la
fois, vient, avec le referendum du 27 avril 1969, de subir le désaveu du
suffrage universel. Services secrets, sevices d’action civique, comités de
défense de la République, et ces personnages de série noire, gorilles et barbouzes,
n’zattendent qu’un signal ppur employer à nouveau, à l’usage des gêneurs, leur
dialectique favorite qui est celle de la matraque et de la provocation . François Mitterrand . Ma part de vérité (Fayard . Juin 1969 . 206 pages) p. 73 – C’est tout le contraire… En fait, en
1965, comme en 1968, de Gaulle a pensé partir et à ceux qui lui présentaient
les moyens de nuire à son adversaire, il a répondu : Vous ne m’apprenez rien. Mitterrand et Bousquet, ce sont les fantômes
qui reviennent : le fantôme de l’anti-gaullisme issu du plus profond de la
collaboration. Que Mitterrand soit un arriviste et un impudent, je ne vous ai
pas attendu pour le penser. Mitterrand est une arsouille (…) non, je ne feraio
pas la politique des boules puantes. (...) Non, n’insistez pas ! Il ne
faut pas pas porter atteinte à la fonction, pour le cas où il viendrait à
l’occuper. (Alain Peyrefitte . C’était
de Gaulle ** pp. 601. 602 Bernard
de Fallois & Fayard . Septembre 1997 .
652 pages)
[16] - memorandum de
conversation du 1er Mars 1969 : Vincent Nouzille . Des secrets si bien gardés . Les dossiers de la
Maison-Blanche et de la CIA sur la France et ses présidents 1958-1981 (Fayard . Mars 2009 . 494 pages) pp. 236 &
237
[17] - Pour une union occidentale entre
l’Europe et les Etats-Unis (Fayard .
Novembre 2007 . 120 pages) : Comment
une fédération serait-elle possible entre des Etats que séparent de profondes
divergences sur le principe-même d’une ‘Europe-puissance’ lequel n’est pas
accepté par ceux qui redoutent qu’il ne conduise à une rupture avec les
Américains –, sur le comportement à adopter envers les Etats-Unis, sur
l’attitude à observer vis-à-vis de la Russie ? (…) Qui, en Europe, parmi
les grands Etats, est disposé à se voir imposer une politique étrangère ou
militaire dont il ne voudrait pas, à faire la guerre en Irak, en Afghanistan,
au Dargfour, ou à ne pas la faire, selon la majorité de ses partenaires ?
Personne. La cause est entendue. pp. 70 & 71 et de proposer au
contraire cette Union nouvelle entre l’Europe et les Etats-Unis (où) chacun
s’obligerait à ne pas prendre d’initiative importante sans s’être concerté avec
son partenaire, ce qui éviterait par exemple les polémiques et les malentendus
auxquels a donné lieu l’intention des Américains d’installer un bouclier
antimissile à l’est de l’Europe . p. 92 . La concertation organisée et améliorée entre Européens et Américains ne
suffira pas, l’approfondissement de l’Alliance militaire non plus. p. 100 .
L’Europe n’aura de véritable existence
que le jour où elle assurera elle-même sa sécurité et sera protégée contre le
risque nucléaire non seulement par les Etats-Unis, mais aussi par ses moyens
propres. Seule la France peut lui offrir cette garantie puisque, par rapport
aux Etats-Unis, la force anglaise n’a
pas l’autonomie suffisante. p. 97
[18] - La Fance peut supporter la vérité
(Albin Michel . Octobre 2006 . 268 pages)
pp. 252-253 : Les tentatives françaises pour européaniser l’OTAN se sont toutes
soldées par d’humiliantes fins de non-recevoir de l’administration américaine.
On se souvient de la requête raisonnable de Jacques Chirac : il demandait
que le commandement sud de l’Alliance atlantique soit confié à un Européen. La
réponse américaine fut sans ambiguïté : « Ce commandement ne saurait
être exércé que par un officier amérixcain en raison des intérêts de Washington
en Méditerranée et de l’importance des forces américaines qui y sont
stationnées. » En clair, les Etats-Unis n’accepteront jamais qu’une partie
significative de leurs forces soit placée sous un commandement allié !
Dont acte. Plutôt que nier la réalité et de poursuivre l’édification d’une
politique de sécurité et de défense européenne qui s’effondrera à la première
difficulté avec nos alliés américains, mieux vaut en prendre acte et chercher à
constituer un ôle plus solide avec ceux qui partagent notre souci
d’indépendance. Cette stratégie est d’autant plus nécessaire que la puissance
américane n’est pas éternelle, qu’elle est fragile et qu’elle repose sur une
économie en déséquilibre.
[19] - Mémorandum du 17 Septembre 1958
Les
événements récents au Moyen-Orient et dans le détroit de Formose ont contribué
à montrer que l’organisation actuelle de l’ alliance occidentale ne répond plus
aux conditions nécessaires de la sécurité, pour ce qui concerne l’ensemble du
monde libre. A la solidarité dans les risques encourus, ne correspond pas la
coopération indispensable quant aux décisions prises et aux responsabilités. Le
gouvernement français est amené à en tirer les conclusions.
1 .
L’Alliance atlantique a été conçue et sa mise en œuvre est préparée en vue
d’une zone d’action éventuelle qui ne répond plus aux réalités politiques et
stratégiques. Le monde étant ce qu’il est, on ne peut considérer comme adaptée
à son objet une organisation telle que l’OTAN, qui se limite à la sécurité de
l’Atlantique Nord, comme si ce qui se passe, par exemple, au Moyen-orient ou en
Afrique, n’intéressait pas immédiatement ou directement l’Europe, et comme si
les responsabilités indivisibles de la France ne s’étendaient pas à l’Afrique,
à l’océan Indien et au Pacifique. D’autre part, le rayon d’action des bavies et
des avions et la portée des engins rendent militairement périmé un système
aussi étroit. Il est vrai qu’on avait d’abord admis que l’armement atomique,
évidemment capital, resterait pour longtemps le monopole des Etats-Unis, ce qui
pouvait paraître jusifier qu’à l’échelle mondiale des décisions concernant la
défense fussent pratiquement déléguées au gouvernement de Washington. Mais, sur
ce point également, on doit reconnaître qu’un pareil fait admis au préalable ne
vaut plus désormais dans la réalité.
2 .
La France ne saurait donc considérer que l’OTAN, sous sa forme actuelle,
satisfasse aux conditions de la sécurité du monde libre et, notamment, de la
sienne propre. Il lui paraît nécessaire qu’à l’échelon politique et stratégique
mondial soit instituée une organisation dont elle fasse directement partie.
Cette organisation aurait, d’une part, à prendre les décisions communes dans
les questions politiques touchant la à la sécurité mondiale, d’autre part à
établir et, le cas échéant, à mettre en application les plans d’action
stratégique, notamment en ce qui concerne l’emploi des armes nucléaires. Il
serait alors possible de prévoir et d’organiser des théâtres éventuels
d’opérations subordonnés à l’organisation générale : a) Arctique, b)
Atlantique (Europe, Afrique du notd, Moyen-Orient, Amérique orientale), c)
Pacifique, d) Océan Indien (Inde, Madagascar, Afrique centrale et méridionale).
3 .
Le gouvernement français considère comme indispensable une telle organisation
de la sécurité. Il y subordonne dès à présent tout développement de sa
participation actuelle à l’OTAN, et se propose, si cela paraît nécessaire pour
aboutir, d’invoquer la procédure de révision du traité de l’Atlantique Nord,
conformément à l’article 12.
4 .
Le gouvernement français suggère que les questions soulevées dans cette note
fasse le plus tôt possible l’objet de consultations entre les Etats-Unis, la
Grande-Bretagne et la France. Il propose que ces consultations aient lieu à
Washington et, pour commencer, par la voie des ambassades et du Groupe
permanent./.
[20] - réuni sous la présidence de Jean Charbonnel, ancien ministre du général de Gaulle, le bureau de
la Convention des gaullistes sociaux pour la Vè République a déclaré :
« Nous prenons acte de la
décision du président de la République et du gouvernement de conduire la France
à un retour complet dans le commandement militaire intégré de l’OTAN.
Nous rappelons que cette
décision avait déjà été préparée et largement mise en œuvre par les présidents
Mitterrand et Chirac, ce qui ôte toute crédibilité aux protestations actuelles
de ceux qui avaient alors soutenu leur politique, et qui n’ont donc aujourd’hui
aucune leçon de gaullisme à donner à quiconque.
Nous constatons que l’existence
et l’autonomie de notre force de dissuasion, garante de l’indépendance
nationale, n’est pas remise en cause, ce qui demeure fondamental pour nous.
Nous concevons que les
circonstances internationales se sont profondément modifiées depuis 1966 et
qu’il importe désormais de renforcer le combat qu’impose le développement du
terrorisme international.
Nous nous interrogeons toutefois sur
l’opportunité qu’il y a, pour mener efficacement ce combat, à constituer autour
des Etats-Unis un bloc des nations occidentales isolé du reste du monde, au
risque de faire de l’OTAN le simple bras armé des volontés américaines.
Nous souhaitons donc que le
gouvernement français puisse contribuer à faire évoluer cette situation, en
particulier en développant une défense européenne qui n’est encore que
virtuelle. Au cas où il n’y parviendrait pas, nous souhaitons qu’il fasse le
bilan devant l’opinion publique de l’opération dans laquelle il s’engage, et en
tire la conséquence logique en sortant d’une OTAN devenue inutile, et en
contribuant à renforcer les moyens de l’ONU, seule organisation capable
d’imposer, dans la justice, la paix dans le monde. » - communiqué 3
Avril 2009
[21] - (Nouvelle librairie nationale . 1916 . 464 pages)
– en allant chercher les références du livre que j’évoque de mémoire, je tombe
– p. 401 – sur ceci, daté du 7 Novembre
1914 ! Il y a environ un
an – ce fait est connu dans les milieux financiers français – l’empereur
allemand convoqué le président de la Reichsbank et lui posa cette question :
- Dans le cas où demain un grave événement de politique internationale
surgirait, les banques allemandes seraoent-elles en situation de rembourser
leurs dépôts. – Sire, ce serait la faillite. – Eh bien, monsieur, faites en
sorte que si bientôt je vous pose la même question, vous me fassiez une autre
réponse. Et de fait, M. Havenstein, président de la Reichsbank, a, depuis ce
moment, insisté beaucoup auprès des banques allemandes pour qu’elles
surveillassent de très près la liquidité de leurs actifs.
La crainte d’une
défaillance générale des banques a concentré toute l’attention des
gouvernements sur le seul aspect d’une crise de liquidité, alors que la
dégénérescence de l’économie mondiale a bien d’autres causes.
[22] - in Espoir . revue de l’Institut Charles de Gaulle, puis de la Fondation Charles de Gaulle . n° 24 – p.
59 . entretien du 17 Octobre 1956
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