lundi 30 septembre 2013

Inquiétude & Certitudes - lundi 30 septembre 2013


 

Lundi 30 Septembre 2013

Hier

14 heures + Mes deux aimées parties il y a un quart d’heure, foire bio. à Muzillac, où ils emmènent Arlette. La messe de onze heures dites des familles, dans notre paroisse. Marguerite dans une très jolie tenue rose et blanche, que je ne lui connaissais pas, puisqu’elle doit lire la première lecture. J’arrive à l’église, épuisé d’âme, nos astreintes et quinze ans de combat, la pauvreté relative, le dédain s’accumulant puisqu’à vue humaine et selon les critères de notoriété reçus, je n’ai reçu aucune marque de considération ni aucune proposition de rétablissement, en temps. Le silence de MC dont j’avais déduit avec inquiétude pour lui et sa carrière qu’il n’était plus à son poste, puisque son adresse professionnelle, rejetait. Par la dépêche qui lui était consacrée hier à l’occasion de sa nomination, fonction encore plus délicate, de confiance et prestigieuse que la précédente, marche peut-être vers encore davantage… reconstitution d’une carrière encore plus éclectique que je ne pensais. De son bureau à Matignon à sa table dans les meubles et entre les peintures Louis XV, avec ses conseils et son soutien mental très amicaux dans ma tentative de compiler les listes de parrains possibles pour une candidature présidentielle, je suis passé – depuis son silence puis son retour à la lumière – au bord de route. Du moins, plus que d’autres, a-t-il une valeur, et surtout un don d’apaisement pour le social, sans compter l’observation critique des plus grands.  J’aurai aimé un travail ensemble, j’eus associé mon ancien attaché de défense et autour du prince régnant, je crois qu’à trois nous aurions été excellents, discrets et surtout perspicaces. La Cinquième République, sans doute ses présidents qui depuis vingt ans l’abîment chacun à sa manière et selon une psychologie peu riche et peu équilibrée, faite de brisures sentimentales et d’apprentissage de la haine, de la dureté et de l’ego pour tenir lieu de personnalité et de réel effacement devant la fonction et l’écoute qu’elle implique… mais aussi cette sorte d’hérédité et de cousinage, ces cabinets ministériels, à commencer par celui de Matignon qui engendrent des ascensions à vie, vg. Valls et Lemaire, Schrameck maintenant au C.S.A. et ainsi de suite.

Hier soir, je me demandais, comme souvent des années-ci où mon bonheur est souterrain, où j’ai le plus souvent deux états d’âme en même temps, et dans le même battement du cœur (dolent), le bonheur de fond, la stabilité de tout mon être puisque ma femme… puisque notre fille… mais aussi si ma carrière avait continué, quelle expérience n’aurais-je pas accumulé puisque j’en ai déjà une importante pas tant par les fonctions restées secondaires que j’ai « occupées » que par la manière dont j’ai observé, recueilli, mémorisé, rapproché personnes, faits, cultures, pays, événements ! Mais aurai-je incubé autant cette foi qui jaillit maintenant, graine de mon enfance, de ma conception, épreuve laminante mais qui ne fut stérile que dans ses moments : l’interrogation sur une vocation, un état de vie (cette dernière expression bien trop statique s’il doit s’agit du spirituel et d’une propagation, d’une participation à une immense et mystérieuse dynamique… arrière continuée, je me serai marié autrement, aurai couru au désastre, aux séparations et à immensément de souffrances. Donc, ces limites que je vis douloureusement, souvent avec humiliation depuis 1995, ont été et demeurent la coupe débordante d’une vie soclée sur notre amour conjugal et familial, et de passion pour notre pays, de devoirs simples pour l’aise de mes aimées. Je me suis fait ces réflexions de crépuscule précisément à la tobéd du jour, hier en allant aux poubelles, Vanille avec moi, et peu avant la benne d’accueil, s’est fait remarquer un peuplier à gui dont je n’avais pas encore réalisé qu’il est mort, gui compris. Cela donnait un dessin extraordinairement subit, inventif, présent, à la plume encre de Chine sur lavis blanc, sans lumière ni ombre, net. Cette mort-là seulement pour une silhouette passée, non, ce n’est pas la vie, pas ma vie. Mais cependant, c’est dans des sentiments analogues, qui se continuaient, que je suis ce matin entré dans l’église : cette conviction de raison et cette souffrance. Il y  aussi cette assemblée, pour une fois nombreuse : en vingt ans, je n’ai pu me faire connaître et « apprécié » de mes concitoyens d’adoption. Méconnaissance et trahisons, dont je n’ai pu discuter avec personne, ni intimité ou relations personnelles avec ceux qui devraient être mes correspondants nimima, le recteur, le maire. Souffrance qui ne trouve plus ses mots, mais familiarité de l’église, de son chœur quoique je n’y ai vécu ici que l’expérience dominicale banale avec son écume de l’observation mutuelle des paroissiens et pratiquants.

Beaucoup d’enfants, les deux premiers rangs devant nous. A mon étonnement, Brigitte demande à notre fille de faire partie du cortège qui devra apporter les objets d’autel à l’offertoire. Chants, début de la messe, moment venu de la lecture. Marguerite sort du rang, mais à l’ambon un garçon l’a précédé, que nous n’avons d’ailleurs jamais vu à la messe, elle reste pelotonnée en vue au bas des marches, squizzée… Thérèse vient s’excuser, Marguerite n’avait pas été marquée sur sa feuille malgré l’ordre de mission reçu de sa maîtresse de classe. J’ai eu le mouvement intérieur de sortir. Des pertes de foi pour un jeune (cf. le récit d’Edgard Pisani à ses treize ans) ou le scandale d’un adulte. Marguerite, revenue vers nous, silence en première étape de son effondrement et de son chagrin, a le même mouvement. J’en suis sauvé par le sourire angélique et confiant du garçonnet devant nous, identifié au moment des remises de croix, un des thèmes de cette messe de rentrée, comme le fils des pharmaciens, charmant et bien élevé, qui me demande à quel point nous sommes de la liturgie… J’étais déjà tous ces jours-ci en péril affectif, j’avais demandé à ma chère femme de prier pour moi, ce moment-ci. Nous sommes tous les trois, à souffrir. J’ai décidé d’en écrire au recteur et de donner copie à la maîtresse. L’un des drames de l’Eglise, si souvent, est tout bêtement le manque d’organisation, la foule des importants qui passent et repassent au chœur ou en vue dans la nef mais ne sont coordonnés en rien, le plus simple, le plus « sociétal » est souvent raté, ainsi l’annonce, en fin de messe d’un exercice du mouvement « Alpha » que nous avions pratiqué tous les trois (même si censément ce n’est pas de l’âge de notre fille, laissez venir à moi… ). Nous avons déjeuné de fête, Marguerite partageant en ce moment son ordinateur bénéficie de l’imprimante. Je lui demande ce qui fait notre force à tous trois. Elle répond (bien sûr ?) : l’amour. Avant le repas, elle s’était installée dans le coin-poupée de notre grande chambre à l’étage, un berceau pour les monsterhighs s’encastrant parfaitement dans l’embrasure et le rehaussement de la lucarne… elle affectionne ce resserrement et la pente du plafond, au-dessus d’elle nos peintures érotiques chinoises sur soie… je lui ai dit que nous prierons ce soir tous trois ensemble pour les négligents de ce matin, ce qui compte c’est sa relation, notre relation à Jésus. Leçon de choses que « les gens » nous prodiguent, dont nous sommes parfois acteurs aussi. Pendant la suite de la messe, son soin de la petite Maeva, sœur de son amie Emma. Edith touchée de ces prédilections de notre fille pour les très jeunes enfants, les filles surtout… et puis…

Ce matin

05 heures 53 + Route aller-retour pour déposer notre « note en délibéré » au tribunal administratif de Rennes. Les nouvelles sur France-Infos. Le plus souvent atterrantes. Dix ans d’occupation américaine en Irak pour un faux motif, pas de jour ou nuit sans quelques dizaines de morts violentes en attentats divers. L’horreur au Nigeria oriental pour l’affreux motif d’une soi-disant pureté religieuse. La sortie de messe la semaine dernier au Pakistan. Le probable refus d’arbitrer du président en titre, chez nous, entre le ministre de l’Intérieur, frère d’esprit d’Hortefeux et de Guéant, et la porte-bannière d’une écologie que j’ai toujours plus approuvée pour sa hantise des droits de l’homme que pour ses défenses trop humano-centrées de l’environnement, et pas assez soucieuse aussi du « règne » animal.

06 heures 38 + Ma chère femme partie depuis un quatre d’heure, à la nuit noire. Le ciel sans étoile et sous doute pluvieux. Commentaire de Vatican II pour les textes de ce jour : L'Église réprouve donc, en tant que contraire à l'esprit du Christ, toute discrimination ou vexation opérée envers des hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur condition économique ou de leur religion. C’est la réponse à Valls et aux dix-neuf personnalités « socialistes » (dont le maire de Lyon et le ministre de l’Intérieur de Lionel Jospin) et à François Fillon à propos des Roms.  Depuis 2010, je milite quant à moi pour une citoyenneté de l’Union européenne éventuellement indépendante de toute nationalité et donc de tout rattachement à un des Etats membres, cette citoyenneté serait notamment celle de communautés transnationales et transétatiques, pouvant donc s’organiser en tant que telles et participer à la vie de l’Union, à ses législations et institutions propres aussi, à charge pour chacune de se discipliner et de répondre d’elle-même à tous égards. Evidence, même s’il faut réviser les traités. J’ai déjà correspondu avec Viviane Reding là-dessus. Mais notre époque choisit entre les évidences, et généralement les plus vilaines qui ne sont que de l’ordre du ressenti.

Prier… (Zacharie VIII 1 à 8 ; psaume CII ; évangile selon saint Luc IX 46 à 50) l’habituel racisme, plus encore au spirituel, les guerres de religion (les nôtres aux XVIème et XVIIème siècles, la haine entre sunnites et chiites en islam…) et celles de chapelles en tant de paroisses, la reproduction dans les associations et dans les partis. Quand ce n’est pas la querelle pour la chefferie, c’est celle pour la soi-disant pureté ou pour la tradition ou pour l’imagination, tandis que meurt et s’oublie l’essentiel. Demain soir, dernière messe peut-être au Carmel de vannes, déjà issu de plusieurs regroupements entre communautés bretonnes, alors que naguère le livre des fondationsIl n’est pas avec nous pour te suivre. Réplique du Christ, qui n’est pas qu’argument ou ingéniosité pour quelque comptabilisation d’une famille d’esprit ou des voix lors d’un scrutin : ne l’empêchez pas, celui qui n’est pas contre vous est pour vous. Jésus d’ailleurs ne dit pas : moi, mais : vous. C’était la suite de la présentation décisive du modèle d’âme et de la présence divine en ce monde : une humanité commençante et disponible, et non pas ratiocinée par les luttes et comparaisons. Celui qui accueille en mon nom cet enfant, c’est moi qu’il accueille. Et celui qui m’accueille accueille aussi celui qui m’a envoyé. Et celui d’entre vous qui est le plus petit, c’est celui-là qui est grand. Mes deux expériences d’hier : le sourire du jeune Quentin et ses questions pour suivre la messe, cette messe où il reçoit, avec une dizaine d’autres enfants de son âge, la croix des débutants, des partants, des libres de tout passif encore. Et notre fille, finalement heureuse de faire sur mes genoux son exercice d’écriture-déchiffrement des chiffres romains, et elle m’en « récompense » en m’emportant, merveilleusement enveloppée, une minuscule flûte de Pan, à accrocher en broche. Elle me voit l’y mettre quand j’irai en Mauritanie. Je lui ai dit que nous irons ensemble. La minuscule flûte maintenant entre cuisse et main au repos de l’une des statues de mon cher Faltermeier, à côté d’un petit cœur en papier. Au bas de la sculpture, cette photo. De notre trésor, presqu’au sein nu de sa mère. – Nouvelle naissance dans notre fratrie. Le plu petit, c’est celui-à qui est grand. Pourquoi ? comment ? le Christ ne le dit pas, convaincu – en frère et en créateur de l’homme, de l’être humain – que ce doit nous être évident, nativement évident. Les vieux et les vieilles reviendront s’asseoir sur les places de Jérusalem, le bâton à la main, à cause de leur grand âge ; les places de la ville seront pleines de petits garçons et de petites filles qui viendront y jouer…Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu, dans la fidélité et dans la justice. Ceux de nous qui sommes devenus de pas bien beaux vieillards, avons été antan de ces frais visages et de ces joyeuses silhouettes : pourquoi ne le lisons-nous pas vraiment dans le regard que nous nous portons les uns sur les autres ? ou que nous détournons. Les fils de tes serviteurs trouveront un séjour, et devant toi se maintiendra leur descendance.

A la lecture publique hier de l’évangile, le riche et le pauvre, ce que je n’avais pas entendu en privé pour ne pas l’avoir prononcé (Augustin et son lire avec les lèvres) : le pauvre mourut et les anges l‘emportèrent (assomption)… le riche mourut aussi, et on l’enterra. Vie plus longue, très favorisée, issue : la fosse.

07 heures 20 + Ma chère femme arrivée au lycée, travail informatique. Notre amour, silence des chiens ici, notre fille sommeillant encore une demi-heure. Nacht und Nebel, mais pour l’amour et le bonheur. Le combat est là : changer le monde par la racine.

L’affrontement Dufflot/Valls n’est qu’un de plus. Chaque fois, le thème est différent, aucun ne grandit ls protagonistes, tous mettent en cause l’autorité présidentielle sur le système et l‘ambiance du gouvernement. Cela dans un contexte où le gouvernement ne maîtrise pas la machine parlementaire et où le président n’est plus en prise avec l’opinion publique. Seuls, les médias endogamiques comme soit devenus en France avec le pouvoir politique (liaisons et vie privée, formes de la notorité, pauvreté de la vie sociale dans une certaine « classe ». il y a donc eu Montebourg/Ayrault à propos de Florange et Montebourg s’est écrasé (aujourd’hui, il dit qu’Heuliez, auquel Ségolène Royal tient tant à juste titre, n’a pas d’avenir, qu’en sait-il ? quelle autorité personnelle a-t-il en économie industrielle, et quelle autorité politique a-t-il encore puisque l’intitulé de son portefeuille ministériel ne compte en rien de ce qu’il fait depuis dix-huit mois. Il y a eu Valls/Taubira. Maintenant, ce ne serait pas Valls qui « sauterait » mais Dufflot, puisque les propos à la Sarkozy, à la Hortefeux et à la Guéant de l’actuel ministre de l’Intérieur sont soutenus par 77% des Français. A chaque époque ou génération, son racisme… Communication désastreuse de l’Elysée : sans citer de source que l’entourage ou des conseillers… il est « susurré » que le président, son art de la négociation, son talent de…

Mouvement en profondeur, la réaction à la pression fiscale. Pas une rencontre de hasard ou de relation qui ne chiffre ces jours-ci le surplus à payer, avec des dialogues surréalistes de l‘administration avec les contribuables : vous vous étonnez ? mais vous ne lisez donc pas les journaux, vous n’aviez pas compris que ? Tandis que Bercy fait savoir que l’endettement va encore augmenter (on est à 2.000 milliards d’euros) mais ensuite va régresser.

Inaperçus ? le « mur » budgétaire maintenant annuel aux Etats-Unis, l’une des chambres au Congrès fait de l’obstruction, celle des Représentants. Sans soluton à minuit, 800.000 fonctionnaires des diverses agences publiques sont au chômage technique… il n’y aurait plus de troupes américaines en Irak. Toujours le comique de répétition, Nennatanyaou à l’.O.N.U sur le danger que représente le nucléaire iranien. Jamais il n’est question des responsbilités d’Israël depuis 1967 dans l’instabilité des Etats et des esprits, des vies de chacun pour tout le Proche-Orient.

dimanche 29 septembre 2013

Inquiétude & Certitudes - dimanche 29 septembre 2013


Dimanche 29 Septembre 2013

08 heures 17 + Soit mon manque d’habitude, soit la « complexisation » du nouveau logiciel (notamment le manque de maintien en appel de chacun des documents ou messages en cours de traitement, mais les préparations de mes envois ou un traitement de plusieurs textes à la fois sont laborieux et je n’ai pas encore trouvé comment faire la note en bas de page. Hier, chez mon informaticien, le commentaire éloquent de l’option pour les anciens logiciels maintenue et rappelée, gratuite, en même temps que le nouveau équipant un nouveau matériel. Parabole des outres et des vêtements, elles ne sont analogues qu’en apparence.

Pluie pleuviotante sans netteté, du gris humide, du silence sans présence, du silence d’immobilité.

Proposition de « sponsoriser » un jeune Mauritanien. J’ai « déjà » deux amis et que je ne peux soutenir, alors qu’ils ont eux-mêmes charge d’âme. Je transmettrai dès que je retrouverai ma propre messagerie. Pas encore d’appel aux nouvelles de la part de mes destinataires du matin. Ma pensée vers eux, et aussi vers tous les Michel dont c’est la fête. Fin aussi des délais pour quitter une terre qu’on cultivait, en droit français.

Prier… (Amos que lira tout à l’heure, à la messe des familles, notre trésor… VI 1 à 7 passim ; psaume CXLVI ; 1ère lettre de Paul à Timothée VI 11 à 16 ; évangile selon saint Luc XVI 19 à 31) La richesse, dans son aspect le plus caricatural : il y avait un homme riche, qui portait des vêtements de luxe et faisait chaque jour des festins somptueux… Couchés sur des lits d’ivoire, vautrés sur leurs divans, ils mangent les meilleurs agneaux du troupeau… ils boivent le vin à même les amphores, ils se frottent avec des parfums de luxe… Vérifier si la résurrection de Lazare, le frère de Marthe et de Marie, figure dans l’évangile de Luc et pas seulement dans celui de Jean, et si, donc, l’homonymie est voulue : le pauvre en compagnie d’Abraham, le ressuscité… La séparation entre nantis et dépourvus dans l’au-delà comme ici-bas. Et elle s’impose à tous… un grand abîme a été mis entre vous et nous, pour ceux qui voudraient aller vers vous ne le puissent pas, et que de là-bas non plus, on ne vienne pas vers nous. Abraham, la foi des patriarches. Ni le pauvre ni le riche n’ont été présentés en termes de foi. Le Magnificat (Luc) et Amos : ils seront les premiers des déportés et la bande des vautrés n’existera plus.  L’icône montrée par Paul à son fils d’adoption spirituelle est aussi lumineuse et immatérielle que sont concrets les plaisirs et tortures des riches selon les deux versants de leur vie. Le Souverain unique et bienheureux, le Roi des rois, le Seigneurs des seigneurs, le seul qui possède l’immortalité, qui habite la lumière inaccessible, lui que personne n’a jamais vu et que personne ne peut voir comment se fait-il que notre humanité, surtout dans notre contexte de préoccupations climatiques, d’échéances financières, d’endettement à faire supporter toujours de plus en plus lourd par nos descendants, ne se préoccupe pas de la suite, de la mort, de l’au-delà de celle-ci et de notre condition terrestre. Sans doute, la surexcitation des intégristes en toutes religions, surtout monothéistes – laquelle n’est en fait que l’habituelle tentation d’Action directe, si logique et totalisante, la suite des précédents qu’ont été les baptêmes collectifs de force au haut Moyen-Age ou les croisades – les absolutismes du moi et d’une manière de comprendre ou concevoir ou vouloir le monde, mais en réalité un athéisme ambiant, par brièveté de vues et absence de pensée personnelle, une machinalité dans la vie, le fatalisme des séparations selon le niveau de vie, l’incommunication malgré la prolifération des techniques.  Dieu qui donne vie à toutes choses…à qui, selon toutes apparences, est-Il présent ? Tout à l’heure, allant tous trois à la messe, nous croiserons s’éloignant de l’église-bâtiment des gens et des enfants venus chercher le pain. Pourtant le riche et Abraham dans leur dialogue hypothétique, ont des relations de père à fils et réciproquement : Abraham, mon père, prends pitié de moi… Mon enfant, rappelle-toi… Bien davantage mais pas autrement que pour les vivants et les morts, prier pour les riches et les pauvres, car tous nous sommes opprimés, et à sauver. Il fait justice aux opprimés, aux affamés, il donne le pain… le Seigneur délie les enchaînés, le Seigneur ouvre les yeux des aveugles, le Seigneur redresse les accablés… le Seigneur protège l’étranger, il soutient la veuve et l’orphelin. Le mystère n’est pas la compassion divine – qui a raison de l’abîme séparant riches et pauvres ici-bas et au-delà – mais le comportement humain.

Aller-retour en début de nuit à Rennes (note en délibéré pour le tribunal administratif). France-Infos… Compte-rendu d’un film et d’une bande dessinée : L’âme en sang et les revenants. Les retours d’Irak, une ambiance désormais indélébile pour ceux qui ont fait le boulot, le job, disait-on avec fierté en 2003 (la guerre zéro mort côté assaillant, le Kosovo inaugurant les nouveaux vocabulaires, les dommages collatéraux aussi). Relents du Vietnam. Dissuasion évidente qui favorise Bachar en Syrie. Les soldats fous de souvenirs, de cauchemars, et en sus l’inutile puisqu’on s’entretue sous le règne américain bien davantage en Irak que sous Sadam. Avec à la clé, la guerre civile et le retour à la confrontation avec l’Irak dès le départ des dernières troupes américaines.

Etranger, si cela existe aujourd’hui encore car tout nous concerne et est au moins parabole. Berlusconi et son sabotage de l’Italie, la défection forcée par lui de cinq des ministres de son parti pour lui éviter la prison ferme et la déchéance de son mandat (avec les immunités qui vont avec… pas tant les affaires de mœurs que la fraude fiscale), Napolitano, second mandat depuis le printemps, 88 ans, en politique depuis 1953… les commentaires n’évoque pas le grand précédent que fut Sandro Pertini, l’antifasciste francophile, réfugié chez nous, à Nice… bonne réplique du président du conseil : un vote de confiance mercredi prochain, les partisans de Berlusconi auront clairement le choix entre leur chef et leur pays. Je crois et souhaite que le chef du gouvernement de coalition l’emporte. Autriche, la grande coalition avec 27% des voix pour le SPÖ, 24% pour l’ÖVP l’emporte « de justesse » dit-on car le FPÖ si c’est encore lui ou la coalition extrêmiste qui lui aurait succédé obtient 22%, son record. Nigera, l’horreur, des élèves assassinés en collectif par les « islamistes » dans leur dortoir. La condamnation par les autorités morales et établies de l’Islam est certaine mais n’est pas entendue en Europe.

Y a-t-il un Etat encore en France ? Décision de justice intedisant à peine d’astreinte de plus de 170.000 euros par jour l’ouverture dominicale de Castorama et Leroy-Merlin. Benoît Hamon met en garde les deux « enseignes », celles-ci ont passé outre, les enquêtes et sondages de satisfaction des clients mais aucun employé n’est interrogé : volontaire ? forcé ? 35% du chiffre d’affaires généré par ce jour illégalement ouvré. Réunion à Matignon demain : réglementation mille-feuilles, concertation, etc… bref, l’Etat bafoué dans son institution judiciaire et par le gouvernement !

Y a-t-il encore une gauche française ? Valls, soutenu par seize députés socialistes dont le maire de Lyon et l’ancien ministre de l’Intérieur de Lionel Jospin (Gérard Colomb et Daniel Vaillant) juge insupportables les propos de sa collègue Duflot qui l’a accusé de mettre en péril le pacte républicain : ses dires qu’il maintient sur la non-vocation des Roms à demeurer en France. François Fillon le soutient, lui aussi. La réalité est qu’il y a une mûe du « paysage politique » français. L’U.M.P. a les idées du Front national, le parti socialiste se pousse au centre droit (sa gestion budgétaire et sa politique sécuritaire) sans en prendre la tradition europhile, et le centre qui aurait pu exister avec un François Bayrou persévérant dans son indépendance et ses penchants vers la gauche, ne va plus exister puisque celui-ci faute que Sarkozy, et maintenant Hollande aient favorisé son élection à Pau, se rallie à l’U.D.I. de Borloo (dont je garde le souvenir qu’il se prêtait à Lionel Jospin avant le premier tour de 2002… A son « université d’été », François Bayrou pour qui j’ai eu de l’estime et de la sympathie à raison précisément de son indépendance, expose qu’il en a fait l’expérience ainsi que de la solitude et que cela a fait son temps, de même que Borloo aurait fait celle de l’appartenance à la majorité (dont il n’est pas dit qu’elle était de fait d’extrême-droite). Beaucoup de ruines, peu de talents et des personnalités qui se modèlent sur Le Pen…

Ces expressions pour décrire des institutions ou une législation (aussi méprisantes et caricaturales que les ballets diplomatiques) : mille-feuilles administratif, usine à gaz… si elles n’étaient qu’accidentellement données, mais elles sont ressassées depuis des années. Nos façons de rendre compte : avions cloués au sol, collimateur de la justice, épinglé par la Cour des comptes, marteler (pour dire ou déclarer), réaliser l’exploit (foot avec le portier, la lucarne, la cage).

samedi 28 septembre 2013

ouvrir une ambassade dans l'ancienne Union soviétique - journal au Kazakhstan . Septembre 1993

je suis en train de parvenir à la "re-disponibilité" de mes fichiers de cette époque

Inquiétude & Certitudes - samedi 28 septembre 2013


 

Samedi 28 Septembre 2013

Eveillé depuis une grande heure, rumeur d’orage, flashes of lightning (chaque langue a ses spécialités, l’alsacien pour les petites choses de la cuisine, de la botanique, des ambiances familiales, l’anglais pour le ciel et ses colères, the gathering storm, en quoi Churchill ne pouvait être qu’Anglais et en guerre, we shall never surrender – il est vrai qu’Hitler disait la même chose mais avec moins de diction). Temps présent : l’Iran en passe de devenir, tout simplement le principal facteur de stabilité (pour « l’Occident ») au Proche et au Moyen-Orient : depuis le séjour que j’y fis à l’automne de 1970, j’y appris la mort du général de Gaulle et fis alors l’aller-retour Colombey, je sais deux choses sur ce pays. Ce sont des démocrates très intelligents qui s’accomodent de leur régime permanent, la dictature, malgré les changements minimes d’apparences du shah aux ayatollah. Et deuxièmement, c’est une des meilleures diplomaties du monde. Et comme la nôtre en parti en particulier est à son plus bas niveau depuis… je ne sais quand, car en général elle est bonne… ce va être du « gâteau » pour le vieux routier qu’est le nouveau venu de Téhéran. Car principalement, le nationalisme iranien n’est celui de la Russie à choisir entre l’endogamie mentale et la liberté qui est toujours ouverture aux quatre vents, c’est un nationalisme de la grandeur, de la mémoire et de la considération des faits. De la fierté, jamais frustrée historiquement. C’est un pays qui n’a été ni vaincu ni occupé, ni même en guerre civile. Lequel des grands pays contemporains peut en dire autant. Et chez nous, un ancien président aussi impopulaire que l’actuel et ayant creusé depuis 2002 chacune des tombes vers lesquelles des circonstances que ne comprennent pas du tout nos dirigeants de quelque spécialité professionnelle (médias, entreprises, voire une partie de notre clergé, politique évidemment pour ceux qui se font voir, les bons restant silencieux et au travail), un ancien président tout bonnement crache dans la soupe que son parti lui a offert à hauteur de onze millions, compris les timbres-postes et les amendes personnelles, et veut faire imaginer que sa candidature en 2017 sera non seulement victorieuse mais créatrice d’un nouveau parti, voire d’une toute nouvelle scène politique. O tempora, o mores. Jonas bougonnait ainsi sous son ricin.

Je vais mesurer Jérusalem pour voir quelle est sa largeur et quelle est sa longueur. (Zacharie II 5 à 15 passim ; cantique de Jérémie XXXI 10 à 13 ; évangile selon saint Luc IX 43 à 45). Le crible du Jugement dernier ? non, la capacité (de toute créature, de toute personne) à être universelle d’accueil et de sens, l’Eglise… Jérusalem doit rester une ville ouverte, à cause de la quantité d’hommes et de bétail qui la peupleront. Comment et pourquoi ? parce que Dieu y habite et qu’Il attire l’humanité entière, qu’il aimante Sa création totale, qu’on accourt à Lui quand enfin les yeux se dessillent et s’affinent de joie. Chante et réjouis-toi, fille de Sion ; voici que je viens, j’habiterai au milieu de toi (et c’est aussi l’Annonciation, le fruit de vos entrailles est béni… et Il a habité parmi nous), déclare le Seigneur. En ce jour-là, des nations nombreuses s’attacheront au Seigneur, elles seront pour moi un peuple, et j’habiterai au milieu de toi. Le Christ Jésus excelle à ces tête-à-queue auxquels les disciples sont rebelles : propos incompréhensibles et décourageants au possible, instants et décalés. Mettez-vous bien dans la tête ce que je vous dis là : le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes. La cécité par peur, par manque de foi, peut-être, surtout selon l’époque et l’itinéraire, la Pentecôte est loin encore pour les disciples, les miracles, la Transfiguration édifient tout autre chose qui « colle » assez bien avec l’espérance messianique : les disciples ne comprenaient pas ces paroles, elles restaient voilées pour eux, si bien qu’ils n’en saisissaient pas le sens, et ils avaient peur de l’interroger sur ces paroles. Tout ce qui n’est pas « mon » interprétation ou « mon » habitude dans les textes saints, dans la liturgie, dans l’histoire, ai-je l’esprit et le courage, est-ce que je prends le risque d’interroger le Christ, mon Dieu et notre Dieu, le risque d’avoir tort dans mes vues et d’avoir à tout reprendre de ma lecture. La science se perd e se trompe, mais la prière jamais, ni perdue, ni mal adressée. Elle n’est jamais de la joie au deuil, elle est toujours espérance. Ils affluent vers la bonté du Seigneur.

Prier pour les miens, mes aimées, ceux de ma route, de toute route. Nous entre’atteindre tels que nous sommes et dans nos langues respectives. Marguerite, pas habituée de naissance, c’est sa pétition, à ce que sa mère, reprenant un emploi quoique tout autre que son atavisme et son expérience, réclame présence, soin, et intérêt. Télévision, valoriser ce qu’elle affectionne en le regardant avec elle, à son appel d’ailleurs et en y passant un moment merveilleux, ainsi la version américaine et Montagnes rocheuses du Crin blanc de mon enfance. Celui qui disperse Israël le rassemble, il le garde, comme un berger son troupeau.

matin

« Geste de paix historique », le téléphone direct entre Obama et le nouveau président iranien, premier contact depuis 1979. La suite va aller vite : le nucléaire civil accepté, le militaire se fera un peu plus tard selon que Téhéran sera ou non indispensable pour régler l’affaire syrienne. L’obstacle aux normalisations dans toute la région est évidemment Israël qui ne croit ni à la paix ni à la protection des tiers pour bien davantage que sa sécurité (norme habituelle de tout Etat), mais pour sa survie. La poignée de main « historique » d’Hollande avec l’Iranien, celui-ci digne, naturel et posé, regardant son interlocuteur, donc présentant un profil ou un trois-quart, et le nôtre de face comme une maquette, ne posant que pour son opinion, exhibé comme un enfant sur scène pour la représentation de kermesse sans égard pour sa propre main tenant celle du religieux-président… c'est bien moins présenté comme historique alors que le téléphone ne s'est évidemment prêté à aucune image de couple.

Résolution en Conseil de sécurité, totalement blanche puisque la Syrie a onze mois pour détruire elle-même, son arsenal d’armements chimiques sous la menace certes d’un recours à la force, mais l’usage de la force sera soumis à un nouveau vote du Conseil de sécurité : Chine et Russie ont donc, sans paraître sourire, voté ce texte. Probable enorgueillisement du proposant français de ces trois semaines-un mois…
Honte : 77% des Français approuvent les propos de Manuel Valls sur les Roms qui n’ont pas vocation à rester en France. Les dires et scenarii de Sarkozy et de Guéant se répètent depuis un an à un rythme accéléré. La mithridatisation de la France, terre d’accueil, s’approfondit, commencée par Jacques Chirac et les odeurs de palier à Orléans et maintenant consacrée par le ministre socialiste de l’Intérieur. La Commission européenne réitère évidemment ses mises en garde. Politique budgétaire, politique d’immigration, communication présidentielle incessante et quotidienne… rien n’a changé. Comme si la France ne pouvait plus échapper à ce que l’on a fait des Français depuis une vingtaine d’années.   Il y a un mois, 74% des Français pour un vote au Parlement préalablement à toute intervention en Syrie. Il existe bien au-delà des partis et sans que ceux-ci aient une prise sur l’opinion, une sorte de cohérence de l’opinion : elle est redoutable, elle est celle des réflexes et de la peur.

soir

Leroy-Merlin et Castorama refusent d’exécuter une décision de justice interdisant le travail le dimanche. Paradoxe : Balkany et l’U.M.P. sont pour et la gauche : contre, les socialises anti-chrétiens selon les différentes expressions de la droite intégriste.

vendredi 27 septembre 2013

mardi 24 septembre 2013

Inquiétude & Certitudes - mardi 24 septembre 2013




Mardi 24 Septembre 2013

Prier… [1] ma mère et mes frères, ce sont ceux qui entendent la parole de Dieu et qui la mette en pratique. L’attitude et la réponse du Christ averti que les siens tentent de l’approcher tandis qu’Il prêche a frappé les évangélistes, les versions concordent sur le dire de Jésus, une parole adressée à l’humanité entière, l’humanité d’adoption par le Fils et création du Père, inspirée et promise à la résurrection de la chair par l’Esprit Saint. Elle n’est certainement pas rebuffade d’un fils pour sa mère. Thérèse de Lisieux dit juste : la Vierge Marie, comme nous, a vécu de foi. Son fils, le fruit de ses entrailles… béni, ne lui apparaît pas plus qu’à nous dans sa divinité. C’est sa nature humaine qu’elle connaît et chérit, elle a confiance en lui, comme une mère inquiète, attentive et pourtant rayonnante d’amour et d‘une conscience de grandes perspectives – d’une certaine manière, cette inquiétude de toute mère, de la mienne, particulièrement et fréquemment exprimée de visage, des lèvres et de plume aussi. Er Jésus nous ramène tous, elle comprise, non à Sa propre nature divine, Il ne nous éclabousse pas de Sa gloire, sauf à ce moment au Thabor, réservé et donné à trois de ses disciples seulement, mais à ce corps mystique, à l’Eglise que nous formons, à cette fratrie allant du péché, de la distraction à l’éternité, cette fratrie humaine qui est la fratrie du Fils de Dieu fait homme. Et qu’historiquement, par des étapes très imagées, l’humanité construit, détruit, reconstruit : le Temple aux temps de Cyrus, de Darius et d’Esdras. Selon le texte : les dépenses de ces gens leur seront remboursées, exactement et sans délai, sur les fonds royaux, c’est-à-dire sur l’impôt de la province…. Ils doivent le rebâtir sur son site primitif. Quel est ce site ? le Christ des évangiles, le fils du charpentier, le fruit des entrailles d’une vierge appelée Marie.


matin


L’horreur à nouveau évoquée : une des pussy riots de Moscou en grève de la faim, va sans doute mourir de mauvais traitements dans un « camp de travail » : deux ans de condamnation seize heures par jour. Il faut qu’en France et chez nos analogues d’ « Occident » nous ayons le courage de notre identité. Boycott des relations politiques et culturelles avec les totalitarismes et les dictatures et les tricheries, la Russie et la Chine, chacune à un titre différent. Rien contre les peuples au contraire, mais y soutenir et y aviver les démocrates. Grandeur de l’homme, la confiance mutuelle dont les conséquences sont notamment des régimes en Etat de droit et en participation délibérative au gouvernement des gens et des choses. L’économie et le commerce, à nos entreprises de se dém… et régime de réciprocité avec les entreprises et produits de ce pays. Aux invasions par produits fabriqués en régime esclavagiste, nous répondons par le protectionnisme et réapprendrons à faire de l’électronique et des haricots verts, des ampoules pour l’automobile ou pour l’éclairage domestique.



Hollande supplétif de Obama, on va à Moscou, on discutera avec les Iraniens, selon… mouche du coche., sauf démonstration du contraire.



Suicides dans les prisons françaises. Il paraît que Fleury-Mérogis est la pkus grande d’Europe.



J’ai passé le cap de la honte après celui de la nostalgie. C’est maintenant la souffrance chronique. Dans un monde tel que le nôtre, dans un pays gaspillé, trompé dont discerne à peine la résistance à être infantilisé, on meurt de mort, je mourrai de mort.



Nairobi… la tendance à rencontrer parmi les « terroristes » des Européens et des Américains – redite des engagements absolus des années 1980 en France, en Allemagne et en Italie – se confirme. Je le reçois comme une protestation contre ce monde invivable. Est-ce au nom du Coran ? peut-être. Quand des chrétiens, entendant le pape ces jours-ci à propos de l’argent, iront-ils aux extrêmes, au nom des évangiles ? Or, nous frayons avec les faiseurs de ce monde abominable : les totalitaires, déjà cités, et les systèmes financiers pour le moins, et enfin les prétextes sécuritaires nous enfermant dans un cercle vicieux dont échappent les vrais bandits et dont sont victimes autant les croisés du terrorisme, forcément abattus, que leurs pauvres otages, leurs rencontres de hasard. L’énumération de ceux qui se sont trouvés en super-marché (affiché israëlien) samedi, est atroce. Quant aux sorties de messe à Peschawar, statistiquement équivalente en morts et blessés : mention deux ou trois fois, et pas en boucle.


Titre du Monde à propos de Merkel, et de sa victoire électorale… « chef de l’Europe ». Ni l’Europe, ni l’Allemagne ne se sont jamais durablement bien portées sous l’hégémonie allemande. 
après-midi 

Décisif, la cour d’appel de Bordeaux valide l’expertise médicale concluant à la sénilité de Liliane Bettencourt à partir de 2006 et donc à la présomption d’abus de faiblesse : les douze prévenus dont Nicolas Sarkozy restent donc mis en examen, contrairement à la demande du parquet des avocats. 



[1] - Esdras VI 7 à 20 ; psaume CXXII ; évangile selon saint Luc VIII 19 à 21

dimanche 22 septembre 2013

Inquiétude & Certitudes - dimanche 22 septembre 2013



Dimanche 22 Septembre 2013

Prier … [1] faites-vous des amis avec l‘argent trompeur, afin, que le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles. Le détournement total ; L’instrument d’échanges, la rémunération des efforts, de la production, de l’ingéniosité devenus les possédants de notre psychologie, de nos mœurs et de nos âmes. Question récurrente, « personnifier », identifier le mal. La figure du serpent et de la tentation, le démon, Belzébuth, le tentateur etc… toutes figures attentatoires au projet initial du créateur : le bonheur de l’homme et sa participation au bonheur et à la vie de Dieu, attentatoires à notre liberté, notre identité. L’argent serait du même ordre : le fonctionnement de la société dans sa version économie serait détourné et deviendrait objet d’adoration et d’exclusive, l’argent moyen et critère de tout en notoriété et en disposition-évocation de tout plaisir et de toute puissance. Symbole de réussite. La beauté de Lucifer. Jésus propose un autre usage : la prudence si fréquement recommandée par réalisme : l’avenir, la venue, le jugement, le fait-même de Dieu. Nos chers Jésuites, particulièrement illustrés par celui qui a été élu pour brandir haut la houlette du berger… user du monde comme n’en usant point… La parabole de l’intendant est psychologiquement juste : un home riche avait un gérant qui lui fut dénoncé parce qu’il gaspillait ses biens…  Le gérant pensa : que vais-je faire ? … Ce gérant trompeur, le maître fit son éloge : effectivement, il s’était montré habile, car les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière. La distorsion effectivement : pas seulement l’argent, mais la soi-disant chasteté, les obsessions de pureté (évidemment sexuelle et « concrétisée » par l’abstinence et le refus, en réalité, d’admettre une des plus belles forces qui ait été donnée à la personne humaine, force relationnelle, force d’admiration et de soin mutuels, force spirituelle), voire même l’exercice de la profession, etc…  Nos déifications ; l’édification constante d’idoles qui nous prennent au rebours d’une liberté que nous n’avons pas conscience de perdre. Jésus prend « les choses » par un second aspect, le relationnel, entre nous. La confiance, ce que nous recevons d’autrui, si gratifiant : sa confiance. Elle peut être signe de celle de Dieu. L’article premier de la loi scoute (si belle et vraie pour son ensembe autant que pour chacun de ses énoncés) : le scout met son honneur à mériter confiance. Cette hantise implicite de mon adorable et vénérable mère qui m’assurait en fin de chacune de ses lettres, de sa confiance. La question-même selon le Christ est la confiance qui nous est donnée, dans notre capacité à nous « gérer » nous-mêmes : si vous n’avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers, le vôtre, qui vous le donnera ? Mon cher Moktar donna l’aphorisme du Christ comme titre à l’un des chapitres de ses mémoires.Iln »’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous les hommes. La rançon pas en argent, mais en vie. La véritable valeur… et il n’y en a pas deux, à plus ou moins combiner. Le prophète Amos et nos façons d’aujourd’hui : la rentabilité poussant à toutes tromperies et oppressions. Puisse le pontificat de François être enfin celui d’une dénonciation impitoyable et sans échappatoire (je vais terminer ma lettre de l’entretien donné aux revues de la Compaagnie, et scruter ce qui s’y annonce en ce domaine névralgique puisque toute la vie sociale en dépend, et aussi le diagnostic de la crise économique et donc politique, mondiale). Écoutez ceci, vous qui écrasez le pauvre pour anéantir les humbles du pays, car vous dites : « Quand donc la fête de la nouvelle lune sera-t-elle passée, pour que nous puissions vendre notre blé ? Quand donc le sabbat sera-t-il fini, pour que nous puissions écouler notre froment ? Nous allons diminuer les mesures, augmenter les prix, et fausser les balances. Nous pourrons acheter le malheureux pour un peu d'argent, le pauvre pour une paire de sandales. Nous vendrons jusqu'aux déchets du froment ! »Le Seigneur le jure par la Fierté d'Israël : Non, jamais je n'oublierai aucun de leurs méfaits. »


début de matinée

Les élections allemandes. Le Bundestag. L’évidente collégialité en conseil des ministres, que le gouvernement soit ou non de coalition. Il y a les adaptations d’un pays à la nouvelle donne économique : nous n’en sommes pas capables depuis au moins vingt ans, à la nouvelle ambiance politique : nous en avons été capables pour la décolonisation grâce à Mendès France et plus encore à de Gaulle, mais nous n’en sommes plus capables ; La proposition et la démonstration européennes ne peuvent être que nous, nous en sommes devenus incapables depuis 2005, alors que nous avions toutes les cartes, que la réponse ait été ou qu’elle fut non (l’exigence alors avec les Pays-Bas de la démocratie directe et d’un traité simple et sincère). Et il y a un pays qui a su se transformer mentalement et choisir entre ses sources, entre la dégénérescence du militarisme prussien et tout ce qui prépara et permit-servit le nazisme (le « mauvais traité » de Versailles, notre bêtise en 1923, la non-élection de Briand en 1932, notre lâcheté de 1935 à 1938…), entre la face sombre d’une possible figure allemande, et la lumineuse, celle du Vor-Parlament de Francfort en 1848… La République fédérale est démocratique. Qu’elle soit impérieusement et à courte vue économique n’enlève à rien cela, d’autant que le remède est l’Europe. A l’évidence, c’est la lacune – sans doute pas électorale – mais au regard de l’Histoire et même de l’avenir à presque court terme, de la chancelière Merkel. Hollande qui n’a aucune des qualités allemandes, ni celle de la collégialité en gouvernement, ni celle de l’imagination (il lui faut un cabinet américain de conseil pour déterminer le catalogue qu’on appellera une politique industrielle, une politique est un mouvement et une animation, pas une liste de projets : on ne parle plus même de « priorités » ce qui était encore une formule dynamique) n’a pzs non plus le réflexe européen.

Il semble que l’on aille vers un gouvernement de coalition – grande ? avec le S.P.D. – malgré l’écart actuel de vingt points dans les intentions de vote, ce qui est inimaginable pour la France, au moins au niveau des législatives. Donc, on va vers des surprises en quelque sens que ce soit. Il sera enfin intéressant d’évaluer le vote vert, et le vote pirate, si tant est qu’on puisse identifier ce nouveau mouvement, apparu en force aux élections locales de Berlin.


[1] - Amos VIII 4 à 7 ; psaume CXIII ; 1ère lettre de Paul à Timothée II 1 à 8 ; évangile selon saint Luc XVI 1 à 13

mardi 17 septembre 2013

lundi 16 septembre 2013

la constellation de Gaulle - propos pour une biographie de Maurice Couve de Murville - 1



Jean-Marcel Jeanneney
sur Couve de Murville



ancien ministre d’Etat au moment du référendum de 1969
ministre des Affaires sociales de 1966 à 1968
ministre de l’Industrie de 1959 à 1962

propos recueillis par Bertrand Fessard de Foucault

lundi 13 mars 2000


BFF : L’équation Couve, référendum, de Gaulle était-elle la bonne ?

JMJ : Ce n’était certainement pas la bonne. La suite l’a démontrée.

BFF : Je souhaiterai que nous évoquions aujourd’hui la personnalité de Couve, son image...

JMJ : Il y avait une fuite de capitaux organisée par des grandes entreprises peut-être même nationales. Je me souviens pendant les 10 ou 15 jours où j’ai fait l’intérim du Premier ministre à sa demande au mois d’août, il m’a dit que ce qui était important c’était de surveiller que le gouverneur de la Banque de France fait racheter les billets au cours officiel en Suisse. Il pensait qu’en soutenant le cours du billet en Suisse, cela allait suffire pour maintenir le cours du franc. Egalement, quand on voit qu’il a fait son gouvernement en partie sur les conseils de Pompidou. Moi, lorsqu’il m’a proposé d’être ministre de l’Education nationale, il m’a dit que c’était Pompidou qui lui avait conseillé mon nom. Cela n’a pas marché, heureusement pour moi. Il a pris dans son gouvernement deux séïdes de Pompidou, Ortoli aux Finances et Chirac au Budget. C’était Pompidou qui était ministre.

BFF : Ortoli se fait gloire d’avoir préparé ce qu’il appelle le succès de la dévaluation de 1969. Par ailleurs, j’ai découvert aux Finances qu’alors qu’il est avéré qu’on arrivait pas à faire dire à Ortoli si on allait vers une dévaluation ou pas, il y a la preuve écrite qu’à partir de juin 1958 jusqu’en juin 1959, nonobstant le refus de dévaluer du 25 novembre, l’opération Parme consistait à préparer la dévaluation. On a fait tout le train  de mesure depuis juin 1958 et on les remettait sans arrêt au goût du jour. Les services n’obéissaient plus au Cabinet ni au ministre. JMJ : Ils obéissaient à Ortoli. Etant donné qu’au lendemain de la non dévaluation, réception à la présidence de l’Assemblée nationale. Les ministres sont réunis dans un salon avant d’entrer. Il y a Chirac. Pompidou entre et dit ostensiblement à Chaban : “Au moins vous, vous ne vous êtes pas dégonflé et vous avez soutenu la dévaluation”. C’est clair.

BFF : Couve m’avait confié ses semainiers pour 1968-1969 et le mardi 28 mai 1968, Couve reçoit Haeberer pendant plus de deux heures. Haberer en a gardé un souvenir très précis. Il avait été envoyé par Debré sans doute à la demande de Couve. Couve à ce moment-là était partisan d’une dévaluation et il a changé d’avis au bout de quelques semaines lorsqu’il a vu que les prix ne s’envolaient pas et que nous avions plus de réserves qu’il ne l’avait pensé. Couve est passé d’une analyse de dévaluation très forte à pas de dévaluation jusqu’en août 1968.

JMJ : Tous ces inspecteurs des Finances n’avaient aucune culture économique. C’est frappant. Jean-Noël m’a fait donné les souvenirs de Delattre. J’y ai vu une ou deux erreurs manifestes comme par exemple de dire que Wormser quand il a été nommé gouverneur de la Banque de France était le fils de l’ancien chef de cabinet de Clemenceau. Il n’y a aucun rapport familial entre Georges et Olivier. Par ailleurs, il raconte que le fameux BDI (Bureau de développement industriel) que j’avais voulu faire lorsque j’étais à l’Industrie, qui a été torpillé par les Finances, était l’équivalent de ce qui existait en Italie qui aurait englobé toutes les entreprises nationales alors que ce n’était pas cela du tout. J’avais expliqué en Conseil des ministres qu’il s’agissait de faciliter la création de petites entreprises autour du bassin minier. Couve avait pris position contre en disant que je voulais aidé des canards boiteux.
            Pour revenir à notre sujet, c’est très intéressant comme document historique car il a sûrement pris des notes tous les jours et les moindres détails des négociations financières sont là. Mais il n’y a pas une seule réflexion économique. Aucune allusion aux conséquences économiques des décisions financières. Cela rejoint Baumgartner. Lorsque j’ai fait Sciences- po., Baumgartner nous donne comme premier sujet de devoir la crise économique. Je lis des livres sur la crise économique de mes maîtres et je fais un devoir à partir de cela. J’ai une très mauvaise note et il me met un grand trait le long de l’exposé que je fais des diverses théories des crises : “Laissez  ces pauvres gens  tranquilles”. Voilà la considération que l’Inspection des Finances pouvait avoir pour les professeurs d’économie et les théories économiques.

BFF : Vous arrivez au gouvernement six mois après Couve et Malraux ?

JMJ : J’arrive en janvier 1959, après avoir été au Comité des experts avec Rueff.

BFF : Quelle impression avez-vous en entrant au gouvernement. Comment vous apparaît Couve ?

JMJ : Il ne m’apparaît pas. Il est ministre des Affaires étrangères, je suis ministre de l’Industrie je me trouve avoir dans mon escarcelle, les relations avec la CECA. Naturellement, j’en parle avec Couve, et nous sommes d’accords sur à peu près tout. Il me laisse une très grande liberté. Michel Debré qui était tout à fait contre toutes ces organisations me laisse aussi une très grande liberté, alors qu’il sait que je suis plutôt proeuropéen. A ce moment-là, j’ai vu Couve de temps en temps pour nous mettre d’accord sur  les positions à prendre, mais c’est  tout.

BFF : Avez-vous le sentiment qu’il y ait eu à l’époque une réflexion qui était de dire on met en oeuvre les traités  de Rome parce que c’est  l’ouverture des frontières, on va vers une déréglementation ou en tout  cas une baisse  des barrières douanières et Couve y est attaviquement attaché, Debré  n’est pas forcément contre, et en même temps, on se pose la question de savoir  sur quelle matrice faire l’Europe, pas la faire sur une matrice traité de Rome, commissions, etc, mais on a  l’idée d’une Europe politique sur laquelle on réfléchit   et  on ne tient pas tellement à prolonger le système  en politique qui va prévaloir pour le traité de Rome.

JMJ : Cela  n’apparaissait pas. Le comité des experts avait pris une position très nette où Rueff avait un rôle considérable.

BFF : Vous connaissiez Rueff ?

JMJ : Très peu mais c’est lui qui m’a appelé. Très peu en ce sens qu’avant la guerre lorsque je terminais Sciences po, Roger Seydoux m’avait proposé d’aller à Londres comme collaborateur de Rueff, proposition que j’avais refusée. Je ne voulais pas de patron au-dessus de moi, et dans les facultés il n’y avait de patron. Peut-être aussi, je me suis dit que peut-être un jour je voudrais faire de la politique et à l’époque la tradition de l’Inspection était qu’il ne fallait qu’un inspecteur fasse de la politique. On racontait l’histoire de Caillaux, fils d’un ministre du 16 mai à qui lorsqu’il s’était présenté on avait fait promettre de ne pas faire de politique.

BFF : Germain Martin était une autorité au moment de vos études ?

JMJ : Ce n’était pas une grande autorité intellectuelle mais c’était un bon professeur d’économie politique. Je me souviens Herriot disant à mon père lorsqu’il l’avait pris comme ministre des Finances qu’il le prenait parce qu’il l’avait déjà été et qu’il connaissait à peu près les milieux économiques mondiaux. C’est après la guerre que je l’ai vraiment vu. Il était membre d’une commission sur l’emploi à l’ONU, il n’a pas pu y aller et il m’a écrit en me demandant si je pouvais le remplacer là. J’ai accepté.

BFF : Comment supposez-vous que de Gaulle et Rueff se sont rencontrés ?

JMJ : A Londres.

BFF : Non, parce qu’il n’y met pas les pieds. En 1940, il est deuxième sous-gouverneur de la Banque de France et en janvier 1941, on lui enlève sa fonction à la Banque de France, il reste inspecteur des Finances et il se retire en Ardèche.

JMJ : Quand va-t-il s’occuper de l’organisation...

BFF : C’est Jean Monnet, lui n’y a jamais été.

JMJ : Vous avez raison, je confonds avec Monnet.

BFF : Malgré l’estime réciproque qu’ils se portent Couve et lui, il ne semble pas qu’il se voient pendant la période. Je me suis demandé, parce que dès 1958, Rueff a une très grande autorité intellectuelle auprès du Général, d’où était née cette autorité. Je me suis demandé si Couve n’avait pas présenté Rueff au Général. En même temps, je n’ai pas de trace d’une liaison entre Couve et le Général entre 1946 et 1958.Il distinguait toujours ce qui est conversation et ce qui est visite. Une conversation c’est du travail, il n’a pas eu  de conversation avec lui pendant 12 ans. Guichard, Beaulaincourt n’ont pas du tout souvenir de visite de Couve.

JMJ : Moi, j’ai vaguement le souvenir que Couve m’avait mentionné que dans____ des conversations qu’il avait eu avec le Général avant 1958, il lui avait dit que l’indépendance de l’Algérie était inévitable. Couve vous a dit qu’il avait vu le Général plusieurs fois ?

BFF : Oui. A l’entendre, c’est même plusieurs fois par an.

JMJ : Alors si Couve vous l’a dit.

BFF : De 1959 à 1962, vous vous voyez peu.

JMJ : Peu mais toujours de bonnes relations.

BFF : Sentez-vous entre lui et de Gaulle, je ne dis pas des distances, mais par exemple sur le plan Fouchet, est-ce que le plan Fouchet a été débattu en conseil des ministres ?

JMJ : Non. Je n’ai guère de souvenirs de cela.

BFF : Et vous n’avez pas de souvenirs non plus d’un écart entre de Gaulle et Couve sur les questions européennes de l’époque ou sur le fonctionnement de l’OTAN ?

JMJ : Non parce que à l’époque j’ai quelques conversations avec Couve au sujet de ma mission à la CECA. A chaque conseil des ministres, Couve faisait un exposé de la situation internationale, c’était très formel, il n’évoquait pas les problèmes qui pouvaient prêter à débat entre de Gaulle et lui.

BFF : Et on sentait déjà qu’il y avait une relation forte de travail entre les deux hommes ?

JMJ : Evidemment.

BFF : Et entre lui et Debré ?

JMJ : Apparemment bien. Quand nous n’étions plus au gouvernement, un jour Couve m’a invité à dîner avec ma femme chez lui avec Michel Debré.Couve en apparence était volontiers bien un peu avec tout le monde : avec Pompidou, avec Michel Debré...Autrement dit, il ne transposait pas sur le plan des relations humaines, courtoises, les conflits qu’il pouvait y avoir sur ce qu’il convenait de faire pour la France ou même les conflits d’ambition personnelle.

BFF: De vous et de Debré, il dit de bons amis et de date antérieure à 1958.

JMJ : Non, je ne l’avais jamais vu. Je l’ai découvert au gouvernement.

BFF: Il y a des papiers croisés qui montrent un agacement profond et réciproque entre Debré et Couve même si ils s’aiment bien.

JMJ : Cela ne m’étonne pas. Avec Debré, il y avait forcément des conflits de compétence étant donné qu’il voulait toujours acquérir  des  compétences qu’il n’avait pas.

BFF: Il y a beaucoup de lettres à ce sujet. On sent également une crainte chez Debré de ne pas être pris au sérieux par Couve.

JMJ : Cela devait bien être un peu le cas avec beaucoup de politesse de la part de Couve. Je me souviens que la dernière année, lorsque Michel Debré était aux Affaires étrangères,  Couve me dit  “Vous savez, il n’y a plus de politique étrangère”.

BFF : Oui, cela il le dit mais pour des raisons économiques pas à cause de celui qui tient le portefeuille. En tous cas, ce qui  est certain,  c’est qu’il ne tenait à lire  aucune des notes qui  lui arrivaient du Quai d’Orsay à Matignon. Il estimait qu’il connaissait mieux  la question.

JMJ : Autre trait de Couve, c’est  que  lorsqu’il est  arrivé à Matignon, il a  amené son cabinet des Affaires étrangères.

BFF: Comment expliquez-vous cela?  C’est une erreur.

JMJ : C’est sa naïveté. Couve avait ce grand mérite de voir les choses simplement, mais il pensait qu’avec son grand bon sens et son intuition, il voyait les choses comme elles étaient. Ce n’était pas vrai. Par conséquent, il pensait que comme Premier ministre, il n’avait pas besoin de collaborateurs qui connaissent la préfectorale, la cuisine électorale,  les services de police.Il prend comme directeur de cabinet un diplomate.

BFF: Comment voyez-vous de Leusse, son directeur de cabinet ?

JMJ : Je me rappelle un mot de De Leusse comme directeur de cabinet  me disant que Couve était vraiment heureux d’être ici.

BFF : C’est un peu idiot. Les affaires  algériennes entre 1959 et 1962,y a-t-il des prises de position des ministres les uns par rapport aux autres.

JMJ: Oui, le 16 août 1959 au moment du tour de table. De Gaulle nous avait prévenu qu’il nous demanderait à tous notre avis sur l’Algérie. Dans ce conseil, je suis le seul à avoir dit  que je pensais que l’indépendance de l’Algérie était inéluctable. Michel Debré Premier ministre n’a pas dit grand-chose, Couve a été très  prudent, Soustelle et Cornu-Gentille ont pris des positions très dures pour le maintien. Les autres ministres sont restés vagues. Quelques jours après, j’ai demandé un rendez-vous à Michel Debré.Il m’a reçu dans le jardin de Matignon et je lui ai demandé si je n’avais pas trop choqué le Général par ce que j’avais dit sur l’Algérie.  Il m’a regardé d’un air triste et m’a dit  que de tous les ministres, j’étais le plus proche de sa pensée.

BFF : Couve ne s’est pas dévoilé à ce moment-là.

JMJ : Non; il ne se dévoilait presque jamais.

BFF: Et Joxe?

JMJ: C’était un homme avec lequel j’ai toujours eu des relations faciles voire amicales. Mais il ne  se confiait pas volontiers. Il avait une formation de diplomate.Il était un peu secret. Je me souviens qu’au moment où je faisais mon rapport sur la coopération en 1963, il m’a fait part de son inquiétude par rapport à l’attitude de Pompidou vis-à-vis de De Gaulle.

BFF : Jean Mauriac m’a rapporté une conversation qu’il avait eu avec Joxe au début des années 80 relatant l’entretien entre Joxe et Pompidou, rentrant  d’Iran en mai 1968 ; Joxe ayant fait l’intérim du Premier ministre l’accueille et pendant le trajet de retour, Pompidou tient des propos effrayants sur la conduite de la crise et surtout dit que de Gaulle a fait son temps.

JMJ :  Fin 1962, Joxe est déjà méfiant vis-à-vis de Pompidou

BFF: Rétrospectivement, de Gaulle aurait-il pu nommer un autre ministre des Affaires étrangères en 1958. Parodi était ambassadeur au Maroc et avait été Secrétaire général. Joxe était Secrétaire Général. Il  a assuré tellement de fois l’intérim du Premier ministre que l’on pouvait penser pendant très longtemps que c’était un Premier ministre de remplacement.

JMJ : Oui mais enfin, sauf cas de  crise, le Premier ministre par intérim n’avait aucun rôle.

BFF : Donc, à votre avis, il n’a jamais été question qu’il soit Premier ministre ?

JMJ : Je n’enai pas l’impression.

BFF : Y avait-il un autre ministre des Affaires étrangères possible en 1958 ou ensuite ?

JMJ : En 1958, ce qui a étonné un peu c’est que ce ne soit pas Joxe étant donné qu’il avait été secrétaire général du gouvernement et qu’il était aux Affaires étrangères. D’autant plus, que dans ce gouvernement de 1958, le Général a nommé des hauts fonctionnaires (le préfet de Paris ministre de l’Intérieur, etc.). C’était normal qu’il nomme Joxe.

BFF : J’ai rencontré Guichard que je prenais depuis 1970 à la fois pour Ballot et pompidolien à tout crin. Il ne voit pas qu’il y ait conflit entre Pompidou et de Gaulle. Mais j’ai trouvé cet homme malgré son physique et malgré le peu d’éclat qu’il a eu en étant ministre, fin d’analyse politique constitutionnelle et sur les gens.

JMJ : Sûrement. C’est à ce titre là que de Gaulle l’a toujours utilisé. Mais il ne lui faisait pas tellement confiance, il ne voulait pas l’avoir comme ministre. Il a fallu que Pompidou, qui était bien avec lui, insiste pour que Guichard devienne ministre.

BFF : En revanche, Guichard est formel . Il dit qu’il y a eu, fin mai-début juin 1958, beaucoup de conciliabules à trois (de Gaulle-Pompidou-Guichard) pour le gouvernement, mais que si on a trouvé une solution Pelletier pour l’Intérieur, le cas Couve et les Affaires étrangères n’ont pas été débattues une seule seconde entre de Gaulle et qui que ce soit d’autre. Selon Guichard, il était clair dans l’esprit de De Gaulle que ce serait Couve et personne d’autre et il prétend que Joxe avait demandé à de Gaulle de le prendre lui comme ministre des Affaires étrangères.

JMJ : Cela ne m’étonne pas, c’était normal. Couve m’a dit que lorsque de Gaulle l’a appelé, il pensait que c’était pour être ministre de l’Economie.

BFF : Est-ce qu’ensuite, il se dessinait un autre ministre des Affaires étrangères jusqu’en 1968 ?  Si de Galle avait voulu nommer Couve ministre des Finances par exemple ?

JMJ : Je ne pense pas qu’il l’aurait nommé plus tôt comme ministre des Finances, il l’aurait nommé Premier ministre si en 1967 si Couve ne s’était pas fait battre aux élections. Plus exactement, si Pompidou ne l’avait pas poussé à se présenter dans le VIIIe où il avait de fortes chances de se faire battre. C’est là encore la naïveté de Couve.

BFF : De façon étrange, Couve avait la conviction que c’était proprio motus qu’il s’était dit je ne vais pas rester toute ma vie  sans entrer en politique.

JMJ : En réalité il n’était pas fait pour cela.

BFF : Oui, mais il voulait durer et il pensait que pour durer en politique il fallait être élu.

JMJ : Oui, mais alors il fallait choisir une circonscription sûre. Cela lui était possible. En 1967, Pompidou s’est présenté dans le Cantal. Je me souviens de Debré disant à l’époque que Pompidou avait appliqué la méthode des bons radicaux d’autrefois, c’est-à-dire qu’il avait examiné, constaté que son adversaire serait nul et donc il s’est présenté. Couve n’a pas demandé une bonne circonscription.

BFF : Il paraît qu’il existe une note d’Olivier Philip sur la circonscription de Couve disant qu’elle était presque imprenable.

JMJ : Pompidou a lancé Couve sur cette circonscription en se disant que la naïveté de Couve ferait qu’il accepterait d’y aller sous prétexte que c’était là qu’il résidait. De même que Couve s’est laissé coller Ortoli au ministère des Finances et Chirac comme secrétaire d’Etat.

BFF : Qui fallait-il aux Finances ?

JMJ : Moi.

BFF : Il ne semble pas qu’on y ait pensé ?

JMJ : De Gaulle a pu y penser mais je crois qu’il n’a pas eu un très grand rôle dans la formation de ce gouvernement. Il en a eu un mais moindre peut-être qu’on ne le croit. En 1962, j’étais ambassadeur en Algérie,  lorsque je suis venu dire à de Gaulle  que je pouvais me présenter en Haute-Saône, que j’étais sûr d’être élu puisque le député Indépendant et Paysan avait voté la censure et que de plus j’avais reçu à Alger un coup de téléphone inattendu de Maroselli me disant que si je me présentais en Haute-Saône, je n’aurais pas de radical contre moi. J’ai raconté cela à de Gaulle et je lui ai demandé si je devais y aller. Il m’a dit qu’étant ambassadeur en Algérie, je ne pouvais pas m’absenter durant la campagne.Ce n’était pas une bonne raison, puisqu’il fallait quinze jours.Il a  ajouté qu’ à l’avenir, il faudrait de plus en plus que les ministres soient pris hors du Parlement, et que le jour où on ne serait plus obligé de prendre, comme il l’avait fait, des inspecteurs des Finances à l’Economie, il faudrait que ce soit moi. Il y avait pensé.

BFF : Couve a pensé très nettement à Olivier Wormser.

JMJ : Il lui ressemblait comme caractère :  un détachement, des sous-entendus, des  litotes. C’est possible qu’il y ait pensé. Mais au moment de la non-dévaluation, j’ai été trouvé le Général, après la décision, et je lui ai dit qu’il fallait changer Ortoli, nommer Barre ministre de l’Economie et que j’étais disposé à faire le sale boulot comme ministre du Budget. Il m’a répondu que oui, peut-être et il ne l’a pas fait.

BFF : Ortoli dit qu’il a présenté sa démission à Couve le dimanche, lundi ; Tricot prétend que Ortoli était malade comme un chien depuis une dizaine de jours ; Barre prétend qu’il était beaucoup trop jeune aussi bien en juillet qu’en novembre 1968 pour qu’on pense à lui comme ministre mais c’est un homme qui voyait Couve depuis qu’il était à la Commission du Marché commun un samedi sur deux.

JMJ : Couve avait sûrement une grande confiance et admiration pour lui. Je ne comprends pas pourquoi il ne l’a pas fait. Mais lorsque je vous dis moi, ce n’était pas moi pour l’ensemble, mais moi en tandem avec Barre.

BFF : Mais avec l’intérêt que l’un coupait les crédits et refaisait passer tous les ministres à l’examen des dépenses et que l’autre s’arrangeait pour que la réunion des gouverneurs de banques soutiennent.
            Dans ce livre sur Couve, j’ai trois procès à soutenir. Un qui est de collaboration avec Vichy, un tendant à dire qu’il n’était pas vraiment ministre des Affaires étrangères, mais simple exécutant, c’est certainement la chose la plus facile à réfuter mais c’est aussi le point sur lequel il y a le moins de documents et enfin, de Gaulle le voulait comme Premier ministre mais il a été un mauvais Premier ministre. Je me suis  demandé si après Mai 68, de Gaulle a deux envies: la première : il veut à nouveau un Premier ministre  qui  fasse de la politique comme lui de Gaulle voudrait que le Premier ministre la  fasse, c’est-à-dire à la fois un contenu mais également sans faire écran  entre de Gaulle,  les gouvernants...

JMJ :En réalité, après 1968,  et cela  Michel Debré me l’a dit à l’époque,  de Gaulle veut  regouverner lui-même comme il l’a fait en  1958.

BFF : En tous cas, certainement un Premier ministre beaucoup plus transparent et beaucoup moins arrangeant avec tout le monde.

JMJ : Et qu’il  fasse ce que de Gaulle  voulait qu’il fasse.

BFF : De Gaulle répartit les rôles de la manière suivantes : un Premier  ministre qui tienne le coup en Economie et Finances, qui fasse une politique qui soit perçue comme celle du général de Gaulle mais exécutée par le Premier ministre et la grande politique et le mouvement et la dialectique politique qui reprennent c’est de Gaulle qui s’en charge et c’est le régime du référendum. D’une certaine manière, Couve correspond tout à fait à ce que de Gaulle souhaite, y compris dans ce qu’il a été jusqu’en avril 1969.Couve, malgré qu’il ne soit pas pour le référendum, laisse de Gaulle le faire, alors que Pompidou aurait mis sa démission dans la balance.D’autre part, sur une décision aussi importante que le franc, Couve veut que ce soit la décision de De Gaulle et en même temps, de Gaulle, peut-être, s’est sur-estimé car il n’a pas non plus mener la campagne politique d’après Mai 68 jusqu’en avril 1969 tambour battant. Le référendum a été  long à se mettre en branle et la campagne a été menée en dépit du bon sens.

JMJ : Ce n’est pas tellement la campagne, c’est la chronologie. De Gaulle avait prévu que le référendum devait avoir lieu fin décembre 1968, il avait raison. J’en ai été chargé au mois de juillet, je pouvais être prêt.

BFF: De Gaulle voulait qu’il soit très détaillé.

JMJ: Il a été d’autant plus détaillé que nous avons eu trop de temps pour le faire. On aurait pu le faire plus simple.Guichard avait raison là-dessus. De Gaulle voulait que cela soit applicable sans nouvelle loi. On aurait pu persuader le Général que ce n’était pas possible.Il voulait que je mette dans le référendum le type d’impôts que les régions pourraient prélever.Je lui ai dit non. Si Couve avait voulu que le référendum ait lieu en décembre, si lorsque je lui ai demandé de définir rapidement mon rôle et celui de Guichard (avec lequel je n’étais pas en conflit d’ailleurs)...

BFF: Il y avait une hésitation...

JMJ :Bien sûr. Couve m’ a dit que le temps était galant homme !

BFF : Vous pensez que le calendrier a  été de sa responsabilité.

JMJ : Tout  à fait. D’ailleurs l’idée de Couve c’était qu’il ne fallait pas faire  les réformes ni quoi que  ce soit  avant qu’il ait  remis sur pied l’économie française. Je crois qu’il n’aurais pas sur pied car il n’avait pas d’idées économiques modernes. Il a fait traîner, il était content que ça traîne jusqu’à ce que le Général se fâche. Et on a  fait  le référendum au plus mauvais moment. Il était délicieux comme Premier ministre ; il vous recevait quand on voulait, il était gentil, il vous écoutait, il ne vous contredisait pas. Mais cela a  été un mauvais Premier ministre.

BFF : Vous diriez qu’il datait au point de vue techniques financières, budgétaires  ?

JMJ: Pas au niveau  budgétaire, mais macroéconomique comme on dirait aujourd’hui.  Je me rappelle toujours à deux heures du matin, revenant de  la Mutualité où j’avais  fait un grand discours sur le référendum devant les jeunes  gaullistes,  j’étais  passé à la Chambre des députés. J’ai trouvé Couve tout  seul  dans la salle des Quatre Colonnes. Je lui ai dit qu’il fallait  faire quelque chose  pour empêcher cette dévaluation. Il me  répond : “Oui bien sûr, mais les capitaux se sauvent”. Je lui ai dit que lorsqu’ils auraient fini de se sauver pourvu qu’on serre un peu il  n’y en aurait plus.

BFF: Il y a eu une délibération sur la levée du contrôle des changes en septembre 1968, après votre intérim.

JMJ: Oui, mais cela il voulait déjà. C’était une erreur formidable, compte tenu de ce  qu’il avait trouvé en arrivant. Il faut bien comprendre que si le président du CNPF que j’avais reçu la veille pour lui demander de ne pas trop lâcher  sur le  SMIC, sur ce il lâche 30  sur le SMIC ordinaire, à Grenelle.  Pompidou n’était pas du tout de cet avis. Il disait qu’il était fou. J’ai eu l’explication beaucoup plus tard. Il y avait eu une réunion des gens du CNPF qui  avait conclu que ce qu’il fallait  éviter à tout  prix c’était la  section syndicale entreprise. Quant à  l’évaluation du SMIC  ce n’était pas  très grave, on  dévaluerait.

BFF : C’était l’idée Pompidou.

JMJ :C’était le patronat. C’est difficile de faire la distinction entre le patronat et Pompidou.

BFF : Qui a rédigé  le projet de référendum proposé le  24 mai pour avoir lieu le 16 juin 1968. Ducamin n’en sait rien. 

JMJ  : Il  était  très mal foutu. Je me  souviens très bien que  nous  l’avons trouvé sur la table. Je l’ai  lu et j’ai dit que ce n’était pas  un projet de  référendum. La séance a été levé. J’ai été trouvé Pompidou  pour  lui  faire  part de  mon  étonnement. Il m’a répondu : “Oh, je sais bien,on n’y peut rien”.

BFF : Tricot ne sait pas non plus.

JMJ : C’est peut-être le Général lui-même, c’est possible.

BFF: Ducamin l’a trouvé un jeudi soir ou vendredi matin.C’était quelque chose dont on n’avait pas entendu parler la veille et qui était tout fait le lendemain.

JMJ : C’est le Général, sûrement. Il n’était pas très juriste.

BFF: Couve était juriste ?

JMJ :Je ne sais pas. Probablement un peu. Il avait fait Sciences po, il avait sa licence en droit.
J’ai retrouvé l’article que j’avais écrit  dans la nuit le soir où a été décidée la dévaluation du mois d’août 1969. J’étais  à Rio  et un journaliste du Figaro m’a téléphoné en me demandant  ce  que j’en pensais. Je lui ai répondu que j’en pensais du mal. L’article montre avec une argumentation très solide que c’était une erreur fondamentale. Ils n’ont pas compris qu’à l’époque, notre commerce extérieur était florissant, l’inflation était due essentiellement au fait que toutes les capacités de production étaient épuisées (après 68, on avait tellement peur que cela provoque une crise, qu’on avait donné l’ordre à tous les trésoriers payeurs généraux de faire obtenir des crédits tant qu’on voulait à toutes les entreprises ; il y a eu une augmentation de liquidité formidable et qui facilitait naturellement ensuite la spéculation). On était en surcapacité de production. On ne dévalue pas quand on est en surcapacité de production.

BFF : Barre y voit l’origine de l’inflation dans laquelle on est tombé pendant une dizaine d’années.

JMJ : Il était tout à fait contre.

BFF: Il semble qu’en dehors de vous et de Barre il y ait eu deux personnes qui ont pesé : Goetze et Jean Guyot (il a quitté un poste important au ministère des Finances, et un peu dégoûté, il a quitté pour entrer à la banque Lazard).

JMJ : Goetze n’était pas contre. Le Général le convoque et lui demande ce qu’il en pensait. Il lui a dit que dans les conditions où elle  allait se faire, elle allait échouer. Il ne lui a pas dit qu’il ne fallait pas la faire. J’ai  été reçu immédiatement après lui. Comme il avait dit au Général qu’elle échouerait ça m’était plus facile.

BFF : Comment voyez-vous Jacques Brunet à l’époque ?

JMJ : Je ne le vois pas.

BFF : Couve cherche à le vider dès qu’il arrive aux Finances.

JMJ : Je crois que c’est l’incarnation des inspecteurs des Finances, ignorant tout de l’économie. Mais le Trichet actuel, c’est pareil.

BFF : Y a-t-il eu en conseil des ministres des débats sur la prévision économique en 1967-1968, parce qu’on sent qu’il y a une inquiétude, que l’on va vers une certaine dépression, il y a des poussées vers le chômage, il y a une certaine tension ?

JMJ : Oui, on se rend compte qu’il y a un petit ralentissement, au point que Michel Debré lui-même en janvier 1968, lance un programme de relance aux Finances que j’ai approuvé tout à fait. C’était un peu timide mais c’était déjà ça. Mais c’était trop tard. Un programme de relance n’a d’effet que six mois après. On avait le sentiment plutôt d’un ralentissement que d’un sentiment d’opinion publique. Il y avait à l’époque une petite publication de l’INSEE qui donnait  les prévisions tous les deux ou trois mois. Il faut voir ce qu’ils disaient.

BFF: Jugez-vous vraisemblable que Couve et de Gaulle aient eu des conversations d’économie et de Finances, en dehors des conversations sur la politique extérieures?

JMJ: Je pense que oui parce que Couve aimait beaucoup les problèmes économiques ; il se croyait tellement compétent en matière économique, il regrettait tellement de ne pas avoir été ministre de l’Economie et des Finances, que certainement  il en  entretenait le Général.

BFF : Vous-même avez l’expérience dans des entretiens théoriquement sur les Affaires sociales avec de  Gaulle, que de  Gaulle bifurque et vous demande votre opinion sur l’économie et les finances ?

JMJ : Non, il me demande si je  vais me décider à faire la participation. Je lui répond que je voudrais bien mais que je ne peux pas, son Premier ministre est contre, que les entreprises sont contre et que les syndicats ouvriers sont contre. Il m’a répondu que j’étais comme tout le monde, que je ne voulais rien faire. Couve était contre aussi la participation.

BFF: Oui, mais il ne se serait pas opposé.

JMJ: Non. Couve  ne s’opposait pas.

BFF: Vous le diriez sans caractère  ?

JMJ: Non. Il avait du caractère. Lorsque j’ai été reçu par le Général à Colombey, je venais d’écrire mon article contre la dévaluation. C’était à Noël. Je lui ai demandé si j’avais eu raison d’intervenir par cet article. Il m’a répondu que j’avais eu raison, que c’était à Couve d’écrire cela  mais  que Couve c’était Couve.

BFF : Dans ses déclarations de campagne dans  les Yvelines ou ensuite, étonnamment, il prend position rétrospectivement contre  la dévaluation et même pendant un an ou deux il a un discours sur la participation alors qu’il n’est plus au pouvoir. C’est étonnant.

JMJ : Oui, parce que c’était en cela qu’on se marquait gaulliste.

BFF : Lui avez-vous prêté des capacités d’analyses, de synthèses, d’exposés de situation qui vous paraissaient hors de pair ?

JMJ : Dans ses  exposés  du Conseil des ministres sur les Affaires étrangères, c’était très clair, très intéressant. Il avait sûrement une très grande capacité d’analyse, d’expression simple d’ailleurs, mais de choses compliquées qu’il exprimait clairement. C’est un très grand esprit. C’était un homme de caractère.Il était assez désintéressé. Il aurait bien aimé être président de la République ou Premier ministre, mais ce n’était pas un forcené. Il s’exprimait bien, il avait une vision des choses  mais c’était bilatéral. Il exprimait le déroulement de la politique tel que le Général l’avait  voulu.

BFF: On le présente comme un homme intéressé aux affaires de sa belle-famille. Or jusqu’à présent, je n’arrive pas à définir ce qu’était la banque Mirabeau, à bien situer cette HSP en banque et je ne le sens pas tellement intégré dans sa propre belle-famille ; il est presque pour ainsi dire sans famille.

JMJ : Je crois qu’il était très indépendant de tout cela.

BFF :C’est quelque chose que l’on met en avant.

JMJ  : On a  tort parce que c’est un homme en un sens très désintéressé.J’ai un peu regretté qu’il accepte d’être sénateur (j’ai refusé de le faire).

BFF : C’est un peu paradoxal.

JMJ : J’aurais pu me faire élire très  facilement en Haute-Saône parce que j’aurais eu une majorité de maires pour moi. A Paris, il n’y a aucun  mérite. Je ne voulais pas rentrer au Sénat alors que j’avais  soi-disant été le sénaticide. En plus, cela m’aurait obligé à rester fidèle au RPR.

BFF : Est-ce  qu’en 1968, il aurait été inconcevable soit que Giscard revienne au gouvernement soit que Duhamel et Fontanet y entrent déjà ?

JMJ : Vous voulez dire en 1967 ? 

BFF : Soit en mars 1967, soit, à plus forte raison, en juillet 1968. Vous, vous poseriez la question dès mars 1967?

JMJ : Elle a été posée. Michel Debré me l’a dit, au moment où il a préconisé à Pompidou et à de Gaulle de faire recours à des ordonnances. Il leur a dit qu’il y avait deux solutions  étant donné que nous avions  trois voix de majorité à l’Assemblée : ou bien on fait entrer Duhamel et Fontanet  au gouvernement et on a une vingtaine de lois de plus ou bien on avait recours aux ordonnances. Le Général ne voulait à aucun prix faire rentrer Duhamel et Fontanet, parce que Fontanet avait démissionné. Remarquez qu’il a repris Maurice Schumann. Le Général avait comme cela ses bêtes noires, ces têtes. Donc ça a été envisagé. Je ne sais pas ce que Pompidou en pensait.

BFF: Et Giscard, le reprendre en 1968 ? Parce  que  c’est Pompidou qui  n’a pas repris  Giscard en 1966, ce n’est pas de Gaulle ?

JMJ : Ce  n’est pas de Gaulle et ce  n’est  pas Debré. C’est Pompidou  qui avait été exaspéré par Giscard, car il se comportait en futur chef du gouvernement.

BFF : Couve ne l’aimait pas non plus.

JMJ: C’est Pompidou qui n’en a pas voulu, alors que  cela ennuyait le Général, parce que ce grand jeune homme intelligent l’avait un peu séduit. Il avait proposé à Giscard d’être ministre de l’Equipement, des Transports.

BFF:  Pisani vous paraît un peu un fou à ce moment-là ?

JMJ : Non. Il fait un très grand discours à l’Assemblée nationale en 1968. Je me rappelle l’avoir écouté et avoir pensé que c’était un Premier ministre possible. Je l’ai interrogé un jour là-dessus et il m’a dit que l’Elysée avait posé des conditions. Je ne me souviens pas des conditions. C’était un orateur formidable.       

BFF : Comment situez-vous Albin Chalandon ?

JMJ : Un affairiste. Chalandon et Giscard sont les deux seuls qui au cours du tour de table, ont pris ouvertement pris position pour la dévaluation.

BFF : Vous n’étiez pas au tour de table au moment du référendum pour  l’élection du président de la République au suffrage universel, mais finalement  les ministres ont été aussi mous dans les deux circonstances ?

JMJ : Oui. Si il y Sudreau. Mais c’est Giscard qui est responsable. Giscard était contre, Sudreau aussi parce qu’il était très IIIe République. Giscard a excité Sudreau. Il lui a dit de le dire. Sudreau l’a dit aux journalistes. Giscard s’est bien gardé de le dire. Il en était désolé par la suite ; j’ai parlé avec lui et il ne s’en consolait pas.

BBF : Pendant cette dernière année, vous avez été élu à Grenoble, vous êtes donc UDR ?

JMJ : Je ne l’étais pas lorsque j’ai été élu à Grenoble. Je l’étais comme gaulliste. A l’Assemblée nationale, je me suis inscrit au groupe UDR.

BFF : A la fin des événements de mai, vous êtes ministres des Affaires sociales, il y le défilé à l’Arc de Triomphe, le 30 mai.

JMJ : Pompidou nous demande de ne pas aller au défilé, il faut que vous soyez dans vos bureaux. Sur ce un certains nombre dont Malraux, Michel Debré et d’autres ont paradé.

BFF : Le lendemain, il y a un remaniement ministériel. Pompidou n’est pas renommé Premier ministre mais tous les ministres démissionnent et on forme un nouveau gouvernement.Vous n’y êtes pas.

JMJ : Pompidou m’écrit un petit mot très gentil me disant qu’il était désolé, que la politique était injuste mais qu’il ne pouvait pas faire autrement.

BFF : Le fait de ne pas vous reprendre est une initiative de Pompidou. Alors qu’il vous avez pourtant supporté pendant les accords de Grenelle.

JMJ: Oui, nous nous étions très bien entendu en ce sens que je n’avais pas ouvert la bouche exprès. Mais nous  étions tout à fait d’accord.

BFF: Et Debré est démissionnaire parce Pompidou ne le prend pas pendant les accords de Grenelle et donc Debré démissionne sans que ce soit public ?

JMJ : Il ne veut pas qu’il soit là.

BFF : L’idée de mettre Debré aux Affaires étrangères ne  vous a pas étonné.

JMJ : Non. Concernant Couve, lorsque en janvier 1967, je suis allé faire une grande tournée en Afrique à l’occasion d’un congrès médical qui avait lieu à Dakar et je ne sais plus qui m’a suggéré de demander que le décret  nomme  comme intérimaire Couve. C’était bizarre.

BFF : C’est le seul moment où le Monde pressent un avenir politique en dehors du quai d’Orsay à Couve.

JMJ : C’est pour cela que je l’avais proposé. C’est moi qui lui avais proposé. Il avait accepté avec empressement.

BFF: Qu’est-ce qui vous faisait avoir cette vue ?

JMJ : Je le savais bien. Pompidou ne le savait que trop.

BFF : Qu’est-ce qui a empêché de Gaulle de nommer un nouveau Premier ministre au début du second septennat ?

JMJ : Il a beaucoup hésité. Il ne semble pas qu’à l’époque il ait pensé à Couve. Dans les Mémoires de Flohic, il est indiqué qu’à l’époque, que de Gaulle hésite entre moi, Edgar Faure et un troisième dont je ne me souviens plus. Finalement, il garde Pompidou. Mais à l’époque, je ne l’ai pas su.

BFF : Edgar Faure avait également tapé dans l’oeil de Couve car l’idée de le prendre comme ministre de l’Education semble avoir été de Couve et pas du Général.

JMJ : Après me l’avoir proposé en me disant que c’était Pompidou qui lui avait recommandé de me proposer.J’avais accepté mais je l’ai effrayé. Quand il m’a demandé ce qu’il fallait faire, je lui ai répondu qu’il fallait faire voter tout de suite avant les vacances une loi sur l’université et marquer une très forte indépendance des facultés et d’autre part il faut dans la loi poser le principe de la laïcité de l’enseignement supérieur. Cela l’a un peu effrayé. Il m’a convoqué pour me dire que  finalement  je ne serai pas ministre de l’Education nationale, j’avais accepté 24 heures avant, il m’a dit que finalement le Général avait préféré que cela soit Edgar Faure. Je pense rétrospectivement que cela a été une très bonne chose pour moi. Il fallait toute l’astuce d’Edgar Faure pour s’en tirer.

BFF : Cela a été un numéro de virtuose.

JMJ : C’était un bien meilleur choix à mon avis, non pas pour les structures qu’il a créé, encore  que cela n’était pas mal du tout, compte tenu des circonstances. A l’époque, j’étais déçu. J’ai demandé s’il y avait un autre ministère  disponible. Il m’a répondu que non. J’ai proposé le plan,  il m’a dit qu’il était affecté et a ajouté : “Vous y croyez vous au Plan”.

BFF : De Gaulle y croyait.

JMJ : Oui. Ce qui est intéressant c’est que sur beaucoup de points les conceptions de Couve et de Gaulle étaient fondamentalement différentes. Par la suite, j’ai eu un coup de téléphone de Chirac, qui lui était dans le gouvernement, propulsé par Pompidou, me demandant un entretien. Il est venu me voir de la part de Couve pour me proposer d’être ministre d’Etat et chargé de la réforme constitutionnelle. J’ai accepté. Je savais qu’on voulait faire la décentralisation. Cela me plaisait beaucoup. En 1963, de Gaulle m’avait demandé une  note sur trois sujets étant susceptibles de donner lieu à une commission : l’éducation, la décentralisation et la coopération. D’emblée, je lui ai dit que je ne voulais pas de l’Education (j’étais universitaire). Je lui ai donc remis deux notes une sur la décentralisation et une sur la coopération. Il m’a mis en marge : “Intéressant mais prématuré”. Je me suis donc réfugié sur la coopération.

BFF :  Comment expliquez-vous le fait que Couve fasse son gouvernement sur la suggestion de Pompidou ? 

JMJ : Je n’en sais rien. C’est la psychanalyse de Couve. Cela m’a un peu étonné.

BFF : En même temps, Pompidou semble avoir déconseillé à certains d’entrer dans la combinaison.

JMJ : Je me suis demandé aussi. Je ne peux pas dire qu’il ne m’appréciait pas, mais il n’appréciait pas mon indépendance d’esprit. Il a du se dire que si je me cassais la figure tant pis.

BFF : Par exemple, on aurait pensé à Parodi pour les Affaires sociales ou le Travail. Parodi a eu, semble-t-il, la recommandation de dire qu’il était très bien au Conseil d’Etat et qu’il ne fallait pas qu’il entre dans cette galère. Cela serait venu de Pompidou. C’est paradoxal.

JMJ : Oui mais d’après ce que m’avait dit à l’époque Michel Debré, à la fin du gouvernement Couve, il y a  eu une espèce de coalition ou intrigue pour pousser le Général dehors et que Parodi était dans le coup avec Chaban.

BFF : Et l’affaire Marcovic vous a-t-elle frappée ? On en a fait avec le recul le détonateur de beaucoup de choses. Mais à l’époque, c’est probablement une rumeur qui agite le tout-Paris politique mais cela n’envahit pas les colonnes d’une manière énorme ?

JMJ : Si, par la faute de De Gaulle et par celle de Couve. Il s’est trouvé que au lendemain du jour où Capitant comme garde des Sceaux, imposé à Pompidou par de Gaulle, avait eu un infarctus. De Gaulle me convoque et me dit qu’il a reçu une lettre de démission de Capitant et il me propose d’être garde des Sceaux. Je n’ai pas accepté, Capitant étant un ami, je refusais de prendre sa place. J’ai été nommé intérimaire. Aussitôt nommé, Tricot m’a téléphoné  pour me  demander devenir le voir. Il m’a mis au courant de l’affaire Marcovic. Juste avant que Capitant ne soit malade, il a reçu une note d’un magistrat instructeur indiquant les liens de  Madame Pompidou avec cette affaire. Le Général était au courant par Tricot. Le Général est rentré à Paris le lundi, a convoqué Couve et l’a mis au courant. Il lui a demandé de prévenir Pompidou et Couve ne l’a pas fait. Naturellement, Pompidou l’a appris par des bruits du Palais. Il en a été ulcéré. 

BFF : Capitant n’est plus à l’Intérieur ?

JMJ : Il n’y est plus mais il y était au moment même. Pompidou l’a soupçonné d’avoir commencé à exploiter cette affaire contre lui.
            Deux ou trois jours après, je reçois un coup de téléphone de Pompidou qui me demande une entrevue mais pas à mon ministère. Je suis allé le voir le lendemain à son bureau. Il me précise que j’étais le premier des ministres à se donner la peine de s’occuper de lui. Il m’a vidé son coeur. Selon lui, aucun ministre n’avait eu le courage de lui parler. je l’ai mis au courant de ce que je savais, c’est-à-dire une dénonciation d’un prévenu dans une prison. Mais aussi bien de Gaulle que Couve, à mon avis, se sont très mal conduits vis-à-vis de Pompidou.

BFF : Couve n’a pas voulu parce qu’il a pensé qu’il ne pouvait pas faire état des turpitudes de la femme de Pompidou.

JMJ : Il valait mieux que ce soit lui qui le dise que des bruits de palais.

Changement de cassette


BFF : C’est toute la distance entre le journal intime et la notation biographique.

JMJ : Mon père avait pris des notes pendant la guerre, parce qu’il n’avait rien de mieux à faire et puis il pensait que s’il était traduit en haute cour, il pourrait se défendre. Pendant toute sa vie politique, il n’a jamais pris de notes. Il pensait que cela prenait du temps sur l’action et par ailleurs qu’on agissait en se demandant ce que l’Histoire allait en penser, donc que cela faussait l’action.

BFF : Vous avez une bonne mémoire.

JMJ : Mais vous savez la mémoire se transforme.

BFF : On a un peu la vie du conseil des ministres jusqu’en 1962 grâce aux notes prises par Roger Belin. Il a été le premier à me dire que de Gaulle avait une intelligence hors de pair. Personne ne le dit.

JMJ : C’est vrai. Une culture générale, une culture philosophique sur les événements et une intelligence extraordinaire, mais des lacunes qui tenaient à sa formation. Il était parfaitement capable d’apprendre quand Rueff lui expliquait les mécanismes économiques. Sa conférence de presse sur l’étalon-or est un peu utopique mais il n’y a pas de fautes économiques de raisonnement. Il avait parfaitement assimilé. Mais il fallait qu’on lui explique.

BFF : Dans les notes qu’a publiées l’amiral, les deux économistes que l’on lisait en 1925-30 semblent avoir été Charles Ryst et Gide.

JMJ : Gide avait écrit un petit manuel. Rist était mon maître. Beaucoup de ces écrits sont remarquables mais souvent difficiles.