à
partir d’une émission sur France 5, dans la série « Duels »
Hubert
Beuve-Méry . de Gaulle
l’expérience d’une mémoire personnelle
L’émission, dans un genre qu’on pourrait souvent croire
souvent déjà épuisé, passionne car elle apporte deux bouquets rares. Pour de
Gaulle, des images pas fréquentes, soit par elles-même : l’immense voiture
quittant la cour de l’hôtel de Matignon en 1946 après la foule entourant un
homme à chapeau et sourcils sombres… le discours de Bayeux dont les feuillets
immenses sont dans la main d’un orateur qui d’habitude parle de mémoire…
l’ascension lente, de dos, de la tribune de l’Assemblée nationale en 1958… soit
par un montage inédit, ainsi l’appréciation des questions en conférence de
presse, limitée à un bout-à-bout (évidemment artificiel) du « bien »
donnant la parole au suivant, ou la photographie de face au lieu du profil plus
connu pour la boutade en réponse à l’affaire Ben Barka. Pour Beuve-Méry, des
collaborateurs ou des historiens, Jean-Noël Jeanneney, Maryvonne Baby, Patrick
Eveno, Laurent Greilsammer, quelques autres encore faisant une redondance qui
apporte. Jean Charbonnel, dont c’est peut-être la dernière filmographie, est
seul à donner l’effet du journaliste sur le politique, et l’accentue.
L’ensemble témoigne que la mémoire de l’œil, de l’oreille, du vécu est
constructive, que toute enquête est seconde, que le contemporain quand il
bénéficie du recul et du regard rétrospectif ds générations suivantes, est dans
une position idéale pour, précisément, conclure. Conclure en identifiant et en
recommandant. Transmission de ce qui n’est pas un secret mais de ce qui peut se
perdre. Et qui dans la France de ces années-ci est perdu, sans doute faute
d’être recherché, désiré et parce que la fatuité est le caractère de presque
tous.
L’émission est passionnante, parce qu’elle représente
parfaitement l’éthique et la manière des deux personnages – des géants qui ne
sont anthétiques qu’en apparence – constituant son thème. Une orientation qui
n’a sa documentation et sa force que par le développement, annoncé et jamais,
lâché d’une thèse. Celle-ci n’est pas la mienne mais elle magnifie aussi bien
le journaliste que le fondateur. Beuve-Méry aurait été marqué à vie et dans son
exercice professionnel par une dépendance, une dette originelle envers de
Gaulle, lui devoir son journal, le journal, Le
Monde. Le fait donc, explicite et reconnu en documents et par chacun des
deux protagonistes, que de Gaulle renvoya le journaliste à son métier, à sa
fonction et à sa brillante et convaincante expérience de son affectation à Prague juste avant la
guerre et « pour » les accords de Munich, donc refusa de donner une
ligne, voire d’établir une censure sur le journal, a été paradoxalement
insupportable pas tellement pour le fondateur, mais pour son exercice
quotidien. Réciproquement, la principale critique blessant ou agaçant de Gaulle
aurait toujours été celle du Monde et
particulièrement de Sirius. Les
points communs sont autant d’époque que de structure morale personnelle. Le
journaliste a conscience d’être la voix de la France, l’homme d’Etat a fait de
son appel aux Français le constant et presque toujours efficace moyen de son
action. Chacun est dépassé par le rôle qu’il sert et qui pourtant tient
absolument à son « équation personnelle ».
Je pense quant à moi que le couple n’est pas autant
dialectique que les présentateurs le disent. Si le Général st un prospectif,
c’est tout autant un homme de l’intendance, de la nécessité quotidienne, mais
pour que celle-ci soit assumée, traitée, il faut une compréhension. Le
commentaire de presse n’en est pas un chemin, la consultation référendaire, la
relation entre le peuple et le dirigeant, en fait l’antique relation du sacré,
de l’institution avec des ressortissants, ou des assujettis dont le roi a la responsabilité
devant ses ascendants et, en conscience, devant Dieu, est cette voie. La
compréhension de l’action tandis qu’elle est vécue par les Français et par
celui qui l’initie avec leur appui supposé ou demandé, doit être vérifiée. La
presse est alors, le plus souvent de Gaulle, un obstacle à une vue claire ds
choses par le grand nombre. C’est – là – accorder une grande importance à la
presse, au journalisme en tant que tels, et c’est marquer sa déception en
constatant une sorte d’inintelligence et des faits et de l’intention.
Réciproquement, là est le lien entre deux. Car si Le Monde déçoit de Gaulle, c’est à proportion de l’estime a priori
qu’il lui porte ainsi qu’à son directeur, celui qu’il a choisi. Beuve-Méry le
lui rend donc, déçu que de Gaulle ne joue pas mieux telle carte, en dédaigne
telle autre et ne corresponde ni à la France ni à une certaine vue des choses
internationales. Je ne crois pas à une interdépendance.
La thèse a pourtant ceci de bénéfique – surtout quand
le documentaire est suivi d’un débat sur notre actualité, soit les 50 milliards
à trouver et la réponse de la majorité parlementaire à ce déni de toutes les
espérances d’il y a deux ans – qu’elle met en évidence une relation presque
exemplaire, modélisante mais aujourd’hui morte, entre le politique et le
journalisme. Relation qui grandit les deux acteurs. Il y faut plusieurs
ingrédients dont le principal est l’état des médias à l’époque. Le débat existe
et a de la profondeur parce que l’écrit le transcrit, le commande. De Gaulle
écrit ses discours et ses interventions, surtout quand elles surprennent, sont
préparées. Hubert Beuve-Méry ne regarde pas le Général à la télévision, il
l’écoute et attend en bas de chez lui (boulevard Raspail) qu’un cycliste lui
apporte la transcription intégrale. La presse écrite l’emporte de beaucoup –
alors – sur le journal télévisé. Jean Daniel, Jean-Jacques Servan-Schreiber et
évidemment Raymond Aron, le prix Nobel François Mauriac, le grand enquêteur
Jean-Raymond Tournoux comptent et apportent comme aucune des vedettes
aujourd’hui du petit écran et de l’audimat, dont la notoriété se fait en endogamie avec les
politiques et en boucle dans un ensemble de magazines tous « people »
(les couvertures de Match pour les
filles ou femmes de télévision). Une grande part de la crédibilité du Général,
et de sa mise en explication, tient à un organe de presse allant au-delà de lui
pour toucher à un fond, celui dont le 18-Juin a démontré la pertinence et la
permanence dans l’esprit public français : Notre République. Le propre du Monde
est d’avoir, pendant de Gaulle, deux signatures, celle du journal qui ne donne
jamais la sensation d’un débat interne mais clairement la somme d’une réflexion
collective, et celle de Sirius, la
valeur ajoutée étant la réputation pour chaque rubrique de celui qui la tient. Le génie de son
directeur n’est pas un parti pris en politique intérieure nationale mais un
libre examen du pays, de ses forces dans le contexte mondial et selon les
relations internationales. Le « tiers-mondisme », le non-alignement
dans une époque manichéenne sont d’une franchise et d’un réalisme qui
semblaient à première vue interdits. La démarche se transpose en
politique intérieure. Au fond, Sirius
répète que le meilleur est possible et qu’il y a, pour la France, puis pour de
Gaulle, un manque à gagner. C’est indiquer les plus grandes ambitions et leur
donner une spiritualité.
J’apprends peu. Le monachisme rentré de Beuve-Méry, sa solitude, mais je ne
savais pas le referendum « interne » pour une « remise à
plat » du journal après le départ du général de Gaulle, referendum
également perdu et j’avais oublié que le dernier article sur le Général fut
donné au Times. J’aurais aimé des
témoignages sur la manière de recruter les collaborateurs, les journalistes, au
début de l’époque fondatrice. Des exemples aussi d’échanges en réunion de
rédaction. En revanche, l’exhaustivité des mots et des échanges entre les deux
personnages semble donnée.
J’ai été assez vite empoigné, puis bouleversé, parce
que le thème court toute ma vie, que je suis né dans cette matrice de Gaulle
Beuve-Méry pour ma compréhension du monde et de la société, sans doute aussi
pour une recherche d’emploi sans nom, titre, école préparatoire. Quinze ans à
l’accession d’un général de Gaulle dont je n’ai aucune idée, sinon qu’il est
tout autre et qu’il cristallise, fait tout questionner et assembler pour ou
contre lui, mais jamais sans lui. Vingt-six quand il part, laissant des
possibilités exceptionnelles à un pays qu’il a rendu de nouveau exceptionnel.
Donc une enquête d’abord haletante, puis devenue permanente et se poursuit
encore qui m’a donné de comprendre de Gaulle, de le deviner même et surtout
pour ce qui reste l’intimité de ses ressorts propres, le secret de son charme
qui a séduit l’Histoire d’emblée et durablement tout un chacun à son époque. Je
crois donc connaître de Gaulle comme si je l’avais connu, quoique dans des
positions que je ne peux choisir, donc encore moins reconstituer, ambiance, enquête,
défense et illustration. Hubert Beuve-Méry, je l’ai connu, lui aussi, mais
moins. Parce que je n’ai pas enquêté et que je ne suis pas entré dans sa
mouvance ni de métier. Métier, ce n’est pas pour ne pas l’avoir désiré, et
d’une certaine manière, je l’ai exercé. Sirius,
critique ligne à ligne de chacune des prestations publiques du prince, et
penseur publié de ce qui sous-tend l’action politique en général et
sous-tendait celle de de Gaulle, je crois l’avoir été, dans les mêmes colonnes
que lui, et dans la même posture que lui, faute de sa position. J’ai été publié
plusieurs fois par mois, parfois par semaine, souvent à la une, à quelques
reprises en regard même du texte présidentiel. Publié par ce journal que dès
l’entrée à Sciences-Po. il était imposé de lire : Septembre 1960. J’avais
commencé par le Monde diplomatique,
cinq mois auparavant, étant encore collégien.
Le Monde de 1972 était, pour son édition quotidienne sauf le
nombre de pages, de même présentation que depuis 1944 et pendant toutes les
années 1950 et 1960. Jacques Fauvet apporta deux innovations, l’accueil presque
quotidien, mais rarement en première page, d’un dessin : Konk et Plantu
d’abord, l’accueil fréquent de pigistes, non professionnels, non consacrés et
sans véritable titre . Chronologiquement, je fus le premier [1]et
bénéficiais d’une fréquence de publication qui fit aussitôt débat en rédaction
et dans la sphère politique parisienne. Là aussi, les conditions de la
technique à l’époque furent décisivs car elles permettaient que soit considéré
l’effort personnel. Ecrire dans l’heure une réponse au discours présidentiel ou
à l’événement dans l’heure, la porter dactylographiée jusqu’au journal fermé
mais ayant son guichet de veille, ou la dicter par téléphone à des sténo. se
relayant quand le texte est long, parfois même en descendant à chaque gare d’un
trajet transfrontalier quand le sans-fil n’existait pas pour le public, donnait
certainement un droit d’entrée. Mais il fallut une circonstance et il fallait
une ambiance où le commentaire était attendu comme la ligne manquant à un texte
déjà conséquent : la critique de Georges Pompidou [2]par le
général de Gaulle, ou plus modestement en son nom. Ce n’était pas la ligne du Monde, mais c’était ce qu’il lui
manquait, car c’était la plus efficace. Me publier tournait l’interdit que
continuait de cultiver la rédaction dans son ensemble. J’apportais une
référence, non par ma collaboration puisque j’étais inconnu – Jacques Fauvet
signait lui-même les chèques qui ne me paraissaient pas petits : de deux
cent cinquante à quatre cent francs des années 1970 – mais par mon système
d’analyse et de réplique. J’eus donc du journal à cette époque une
expérience exceptionnelle car le directeur, précis et personnel dans son
jugement sur les papiers, les collaborations autant que pour ce dont le journal
avait à rendre compte : la vie nationale, me recevait fréquemment
tête-à-tête, me parlait selon la journée, comme à un cadet au talent estimé,
donc connaisseur d’une certaine manière du métier, mais étranger aux querelles
internes, et aux travers d’une profession. Jacques Fauvet avait deux soucis de
même poids et rituellement m’en donnait le point, en recul, en succès. Tout
était mobile, précaire… s’arrachait. La copie qu’il lisait intégralement,
passant la matinée au marbre en sous-sol de la rue des Italiens, l’équilibre
financier, surtout le niveau de publicité et celui du « bouillon ». La publicité : les campagnes contre le
journal prenaient ce moyen pour le mettre en difficulté en la coupant quand
celui-ci gênait (le pamphlet de Legris affligea manifestement JF). Les chiffres
de vente réelle comparés à ceux du Figaro.
Il se fit que j’entrai ainsi dans sa confidence mais sur le présent que pour
l’avenir, car il ne me parla pratiquement jamais ni de celui à qui il avait succédé, ni de ceux auxquels il
pensait, un à un, pour la
suite. Il ne pensait pas en dynastie par adoption, mais il eut
certainement le goût et l’idée de me faire entrer au journal, ma tournée,
limitée au premier étage, n’aboutit pas.
Je n’ai jamais su comment Jacques Fauvet maintenait
son autorité sur la rédaction, ni si les nombreux votes le prolongeant faute
qu’un successeur possible se distingue surtout par le nombre des suffrages le
préférant à d’autres, étaient une marque de confiance ou au contraire de
lassitude. Signé de ses initiales, l’éditorial engageait toute la rédaction et
avait été débattu. L’équipe dirigeante, de forte expérience, semblait homogène,
le delphinat était-il reconnu ? L’ouverture à des matières peu traitées,
notamment à la société, aux mœurs, fut le fait, je crois, de sa propre vie de
famille qu’il ne séparait pas de sa respnsabilité professionnelle. Elle
m’inspira et me correspondait [3]Hubert
Beuve-Méry qui me reçut plusieurs fois, avait un bureau presque sous les
combles. Je crois qu’il devait impressionner davantage dans la durée et en
cercle qu’en tête-à-tête d’un moment. Son écriture n’était pas faite de
formules mais d’une pensée, développée et se critiquant elle-même. Une
conférence, à public pas très nombreux, sur son métier, non sur le journal,
qu’il ne dirigeait plus, porta notamment sur les dilemmes opposant le devoir de
loyauté et l’impératif de l’information. Le hasard l’avait fait visiter Israël
à l’instant où se décidait la coalition pour Suez : il sut même l’heure
convenue pour commencer d’opérer. La fare connaître au journal et trahir ses
hôtes, il ne le fit donc pas. Sa persévérance était celle de l’analyste et sa
matière les évolutions contemporaines : relations internationales, régime
intérieur français. Jacques Fauvet était au contraire un homme d’action,,
affectif et doué moralement pour se scandaliser, donc faire partager ses
sentiments. Il le fit, pas seulement pour des « affaires » ni pour la
gestuelle du président régnant. L’ensemble de la vie publique, les questions de
mœurs devinrent sujets du journal. Il prit parti contre Valéry Giscard
d’Estaing et Le Monde conféra aux
« diamants » offerts par Bokassa, un poids que seul Le Canard, dans sa catégorie, n’aurait
pu ainsi certifier. La vie française devenue bipolaire en politique, le journal
se donna une orientation que le manichéisme de la « guerre froide »
et suscité par la personnalité du général de Gaulle l’avait, au contraire et
paradoxalement, dissuadé de prendre. Le journal demeura une autorité morale et
l’est encore, mais désormais par défaut, non plus par construction.
L’ensemble du propos et des images m’a fait cristalliser
quelque chose d’important pour moi, pour la suite de ma vie et a confirmé une
continuité obligée, dont je n’ai pas assez tiré la conséquence pratique jusqu’à présent à quoi employer et
surtout le temps qu’il me reste, pour son maximum prévisible. A l’évidence,
combiner le vécu d’oreille, de regard, d’émotion avec ce qu’apporte en
documentation et en mise au net le recul des années et le ressenti de
contemporains ou celui des générations suivantes, c’est-à-dire plue jeunes que
la mienne, place idéalement celui qui veut témoigner. Or, j’en suis. Sans
pouvoir sur mon époque, j’ai celui de dire et faire comprendre intimement ce
qu’a été une autre. Devoir aussi de démontrer la nécessité de la mémoire pour
un pays dans son ensemble, ce à quoi la France n’est plus conviée que pour
assimiler des schémas, du vocabulaire, de la convention figée, et ce que n’ont
pas nos dirigants en politique et en entreprise, et pas non plus nos
commentateurs et nos présentateurs.
La biographie dont je porte le projet, d’un très grand
fonctionnaire puis d’un très grand ministre, celui que de Gaulle voulut pour
notre diplomatie et comme son Premier ministre, dans la dernière donne à jouer,
est donc un devoir pour le septuagénaire que je suis devenu, plus vite que je
ne prévoyais du vivant de ceux dont j’ai joui qu’ils fassent ce qu’ils
faisaient. Actualiser notre pays, répondre à tous égards de notre destin.
L’esthétique en était évidente, l’éthique moins visible est aujourd’hui ce
qu’il me faut écrire et dire. Modèle qui nous endette pour l’avoir oublié.
Rappel enfin d’une spécificité de l’époque. Ses
fortes structures étaient simples, elles n’étaient pas érigées en défense,
elles n’étaient pas cofidiées. J’ai vécu une accessibilité aux médias qui ne
devait rien à la recommandation ou au physique. Cette notoriété passagère – je
dois à Jacques Fauvet ma signature – a beaucoup déterminé mes envies, mes rêves
et aussi, en termes de carrière, ce que j’ai reçu et ce dont j’ai été empêché.
Enfin, observer, scruter l’actualité quotidiennement ne m’a plus jamais quitté.
Au Monde, outil d’information et de
réflexion, depuis près de cinquante-cinq ans, et m’ayant admis en son sein
pendant dix ans, je dois une façon de voir et vivre d’autrefois à maintenant,
pas substantiellement changée. Je dois aussi de grandes rencontres, celles de
Michel Jobert et de François Mitterrand, que les questions directes sur de
Gaulle ne m’auraient pas données [4]
France 5 – soir du jeudi 24 Avril 2014, 21 heures 40
[1] - Gabriel Matzneff,
principalement, fut peu après accueilli, lui aussi, et fort régulièrement
[2] - « Du oui au
non » 30 Mars 1972
[4] -
celles-ci me firent recevoir dès le départ du Général par Louis Vallon, puis Maurice
Couve de Murville, René Capitant, Michel Debré, Jean-Marcel Jeanneney et tant
qui demeurent pour moi la constellation
de Gaulle – en rectitude de vie et en apport à notre pays, aucun de ceux
qui, à ma connaissance et selon nos tête-à-tête, la composent, n’est de petite
magnitude
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