Election
présidentielle 2012
observations
& réflexions
V
1er . 5 Décembre 2011
Le ou les vrais débats ?
On nous prend petit
à petit
un
chasseur dans la baie de Somme – enquête de France-Infos.
diffusée le 18 Novembre 2011
Les
résultats : un élément important d’évaluation, mais pas suffisant
Franck
Riboud, PDG de Danone – Challenge 13-19 Octobre 2011
C’est la politique de la peur
et ceux qui réagissent, passent pour des révolutionnaires.
Je n’ai pas peur : j’ai
la vie avec moi
Danielle Mitterrand rappelé par France-Infos, le
matn du mardi 22 Novembnre 2011 – propos de Mars 2010
Les faits…
17
Novembre – à Montfermeil, Claude Guéant envisage publiquement de sanctionner
par le refus de renouveler des titres de séjour, les manques d’assiduité aux
« programmes d’intégration »
18-19
Novembre – sondage BVA-Orange : 1er tour, Hollande 32% - 7 contre
Sarkozy 27% + 4 ; 2ème tour, Hollande 58% (-4)
18
Novembre – le Conseil constitutionnel recule sur la nouvelle législation de la
garde à vue : possibilité d’interrogatoire du suspect pendant les quatre
premières heures sans assistance d’avocat
20 Novembre – en Espagne,
victoire écrasante du Parti populaire emmené par Mariano Rajoy sur le P.S.O.E.
enregistrant son plus mauvais score depuis 1976 (le chômage atteint 21% de la
population active et 47% des moins de 25 ans)
21 Novembre – Moody’s estime la France
en déséquilibre par renchérissement du taux de ses emprunts et défaut de
croissance – débat sur la récidive et les centres d’éducation fermés à la suite
du meurtre d’une adolescente par un camarade censément sous surveillance
judiciaire et psychiatrique – aux Etats-Unis, le « super-comité »
bipartite ne parvient à s’accorder sur des recommandations budégtaires
s’imposant à la Maison Blanche
et au Congrès
22 Novembre – aux
Etats-Unis, démocrates et républicains ne parviennent pas à s’entendre sur la
réduction des déficits publics – mort de Danielle Mitterrand – réunion UMP à
Lambersart (Nord) pour présenter le programme économique et social, « programme
du courage »
23 Novembre – l’Allemagne peine à placer
sa dette sur les marchés
25 Novembre – à Tricastin, Nicolas
Sarkozy s’exprime à nouveau sur le nucléaire – au Maroc, les élections
anticipées sont remportées par les
islamistes (Parti de la justice et du développement) : 107 sièges sur 395 et
leur chef est appelé par Mohamed VI, le 28, à former le gouvernement
28 Novembre – Moody’s préparerait une dégradation de l’ensemble des Etats-membres de la zone
euro. pour leur incapacité à résoudre la crise des dettes souveraines – l’OCDE
prévoit une récession de quelques mois pour la France et pour l’Allemagne –
rumeur d’un plan B concocté entre Paris et Berlin : durcir les critères de
Maastricht dans le traité de Lisbonne, au besoin par un traité bilatéral auquel
l’Italie serait invitée à s’associer – Le Monde publie une mise au point de François Hollande sur sa politique
énergétique
28-29 Novembre – réunion de l’eurogroupe au niveau des ministres des Finances : libération de 8 millaurs
d’euros pour la Grèce
et renforcement de la coopération avec le F.M.I. – en Egypte, premier tour des élections
constituantes : les Frères musulmans obtiennent 37% des suffrages, le
parti salafiste Al-Nour 24% et les libéraux 13%
29 Novembre – propositions par l’U.M.P.
d’un code pénal pour les mineurs
30 Novembre – rupture diplomatique des
« Occidentaux » avec l’Iran à la suite du saccage de l’ambassade
britannique – à la suite d’un accord budgétaire le 27, les partis belges
s’accordent sur Elio di Rupo, président du parti socialiste wallon, pour
diriger le gouvernement après 535 jours sans gouvernement – Laurent Gbagbo est
incarcéré à La Haye,
premier ancien chef d’Etat à passer en jugement devant la Cour pénale internationale –
séminaire-bilan présidé par le Premier ministre sur la « révision générale
des politiques publiques », lancée en Juin 2007 par le président de la République – François
Hollande à Bruxelles confère avec le groupe socialiste au Parlement européen et
s’entretient avec le président de la Commission, notallent sur l’avenir du site
d’Arcelor à Florange
1er Décembre – à Toulon,
Nicolas Sarkozy discourt sur la crise, l’Europe et le couple franco-allemand tout en attaquant
le PS sur l’immigration, la retraite à 60 ans et les 35 heures
2 Décembre – devant le
Bundestag, Angela Merkel reconnaît la perte de crédibilité des politiques en
Europe, à laquelle échappent seules les banques centrales, la B.C.E. et la Cour constitutionnelle de
Karksruhe – Marie-Laure divorcée de Dominique de Villepin est interrogée, dans
l’affaire Relais &
Châteaux de surfacturation, sur le
financement du cabinet d’avocats et des activités politiques de l’ancien
Premier ministre
4 Décembre – en Russie, le
parti de Wladimir Poutine passe de 64,03 % des voix en 2007 à 49,54% - en Croatie,
le parti nationaliste fondé par Franjo Tudjman est battu par celui de Zoran
Milanovic obtenant 80 sièges sur 151 à la Diète – en Slovénie, les élections anticipée
donnent par surprise la victoire à Zoran Jankovic, maire de Llubjana et de
centre-gauche contre le favori ancien Premier ministre et chef du Parti
démocrate Janez Jansa
5 Décembre – Greenpeace démontre par son intrusion dans plusieurs centrales nucléaires
françaises que n’est pas leur sûreté face à des individus déterminés, ni a
fortiori contre l’imprévisible genre accident d’avion – publication d’un
sondage selon lequel 36% des Français (65% des ouvriers et 53% des employés)
souhaitent un retour au franc, 44% jugent que l’euro. est un handicap mais 49%
contre 37% sont favorables à un renforcement
des pouvoirs de l’Union européenne en matière fiscale et budgétaire – déjeuner
de travail Merkel-Sarkozy à l’Elysée : refus des euro-obligations,
perspective d’un nouveau traité européen à 17 au lieu de 27 et sur la rigueur
budgétaire – Standard & Poor’s annonce
en soirée qu’elle s’apprête à dégrader les six pays de la zone euro. encore
cotés AAA (Allemagne, Autriche, France, Finlande, Luxembourg, Pays-Bas) et que la France sera la seule à être
dégradée de deux crans – François Baroin assure qu’il n’y aura pas de troisième
plan de rigueur
7 Décembre – François
Bayrou officialise sa candidature
8-9 Décembre – réunion du
Conseil européen
La campagne
pour l’élection présidentielle française est lancée. Deux candidats sont
visibles. L’un sans changement depuis son élection en 2007, incapable de
surprendre même s’il renonçait, tant son personnage est devenu explicite et
expliqué, tant il a fait savoir qu’il changeait et se
« présidentialisait » : Nicolas Sarkozy, tenant du titre mais
défait selon les sondages avec un écart qui diminue mais demeure d’une dizaine
de points, L’autre peu prévu il y a un an, peu connu comme personnalité et
pouvant donc surprendre en bien ou en moins bien, pouvant décaniller en
quelques jours dans les sondages et dont la victoire sera difficile, les débuts
à l’Elysée héroïques, herculéens. Deux personnages qui ont un point
commun : un fort « ego », la volonté de parvenir à leurs fins,
et quoiqu’en dise l’U.M.P. une grande expérience chacun. Nicolas Sarkozy a
celle l’exercice de l’autorité par cynisme et intimidation, autant que par le
sacre électoral et les prérogatives de la fonction, maintenant en débat.
François Hollande celle du débat, de la consultation, de l’accompagnement,
ainsi de François Mitterrand, président de la République, puis de
Lionel Jospin, Premier ministre. Les camps et soutiens en faveur de l’un et de
l’autre sont de force – je crois – équivalente, mais de consistance très
différente. Le soutien au président sortant est de mise dans son parti, sa
majorité, son entourage, la suite des carrières dépend de sa réélection. Qu’il
la manque, et il faudra attendre cinq ans pour les grandes responsabilités si
l’on est dans la partie exécutive, avec l’aléa considérable d’ignorer le
successeur ou le candidat de la revanche (aujourd’hui ce serait François Fillon
ou Jean-François Copé, puisqu’Alain Jupé ne peut concourir qu’en remplaçant
haut-le-pied du président sortant, ce que continuent d’espérer beaucoup de la
majorité sortante), et ce sera la débâcle électorale pour l’U.M.P. L’Assemblée
Nationale sortante est analysée, statistiquement, comme la plus âge de
Discernement
aussi sur les temps actuels et les remèdes qui ne sont pas techniques mais
politiques et spirituels. La
France a subi ces crises morales, pas seulement en perdant
des guerres (ce qui la faut davantage réfléchir que ses victoires, cf. l’issue
de la Grande Guerre)
mais en hésitant sur les élections : entre 1981 et 2002, tout s’est passé
comme si les Français changeaient constamment d’avis, sans vraiment trouver une
orientation à laquelle se tenir. L’immobilisme de Jacques Chirac et la
crispation du discours de Nicolas Sarkozy, l’absence de diagnostic d’ensemble
proposé par les politiques, à commencer par le président de la République quels que
soient les surabondances de la prise de parole et les décisions d’organigramme,
les nominations faisant réseau ont abouti à la cécité collective et au possible
mutisme de l’électeur en 2012. Ainsi est mis en cause la possibilité-même de la
politique et de la démocratie. Peut-on décider ? y a-t-il dans les
circonstances actuelles matière à décider, s’il n’y a aucune alternative aux
politiques seulement réactives de la
France et de l’Union européenne depuis quatre ans ?
2° un referendum ou un plébiscite ?
Comme en 1965,
l’élection à venir est binaire, quels que soient le nombre et la qualité des
candidats, c’est-à-dire des adversaires de Nicolas Sarkozy. Maintient-on le
général de Gaulle dans les fonctions qu’il a créées ? approuve-t-on la
forme et le fond des politiques imposées par Nicolas Sarkozy à l’ensemble des
politiques de son camp et de l’autre. Il y a cependant une différence entre
1965 et 2012, même si le personnage principal est tel que sa réélection ne le
changera pas. De Gaulle vécut son élection comme sa banalisation et surtout
comme un signe que son temps et sa manière étaient désormais surveillés, en
sursis ; cela produisit un prodigieux testament, un legs que son premier
septennat n’aurait pas donné. La décolonisation, les institutions, la
réconciliation franco-allemande étaient un cadre : à tout faire. La percée
à l’Est et vers l’Union soviétique, le défi aux Etats-Unis à propos de la
question israëlo-arabe et de la guerre du Vietnam, le Québec libre et surtout
la grande pétition de la participation sociale et politique, en trois ans et
demi seulement ont inauguré une politique étrangère mondiale en rayonnement et
en efficacité autant qu’une dialectique en politique intérieure reprenant, sur
le mode démocratique, celle de la lutte des classes et des grands intérêts
travail/capital… et caractérisé, par la possibilité de sa sanction, la
responsabilité présidentielle (la démission en cas de referendum négatif).
Tandis que la réélection de Nicolas Sarkozy ne conduira à aucune imagination
collective et confirmera la séparation entre les gestionnaires et les
administrés, contribuables, chômeurs et assujettis de toute sortes. Le
président sortant n’arguera pas de son bilan mais des excuses pour
celui-ci : la crise. Il ne peut rien promettre, notamment parce que son
immobilisme confirmé à propos de la réorganisation européenne ne lui donne
aucun espace ni intellectuel ni politique, et parce que ses grands engagements
de 2007 n’ont pas été tenus. Le referendum porterait sur un programme. Le
compte-rendu de mandat par le président sortant le lui interdit.
C’est donc
bien une question de personne qui sera tranchée en 2012. Un plébiscite, qui
peut être négatif, si l’adversaire socialiste incarne l’ensemble de
l’opposition des Français soit à la manière, soit aux décisions prises, soit
aux lacunes et aux injustices et si son propos devient un programme, une perspective :
alors l’élection vaudra referendum. Mais l’élection présidentielle est aussi la
meilleure figuration de l’opinion publique ; elle est pour l’heure la
seule prise en compte de courants d’opinion ou de familles politique qui ne
peuvent ni au scrutin de liste sénatorial ni au scrutin uninominal à deux tours
pour le Palais-Bourbon, faire élire l’un ou l’une quelconque des leurs.
L’élection présidentielle confirme – ou rappelle – que les élections à
l’Assemblée nationale sont très insuffisamment représentatives et que la
consultation directe des Français en circonscription, donc le referendum en
cours de mandat présidentiel, est populaire, efficace, source de légitimité et
d’autorité vraies.
3° un jeu à trois
Jusqu’en 1986,
les trois forces en compétition pour l’exercice du pouvoir redéfini par la Constitution de 1958
étaient une majorité présidentielle, unie jusqu’en 1974, désunie manifestement
en 1981, qui refusait l’étiquette de droite d’une part, et deux partis
explicitement réformistes en société et en économie, se revendiquant de gauche.
L’entrée du Front national au Parlement en même temps que les institutions
devenaient émollinentes du fait de la « cohabitation » a modifié l’un
des trois partenaires. Depuis vingt-cinq ans, le Front national sans accéder
jamais à un pouvoir de gestion démontrant des capacités positives (Orange et
Toulon, Vitrolles dans une certaine mesure ont vite changé l’étiquette de leur
nouveau maire) arbitre l’élection présidentielle : la dualité de
candidatures crédibles à droite depuis 1981 a moins modifié les donnes électorales que
l’arbitrage du Front national qui dominera en 2012, bien qu’en 2002 ou en 2007.
En réalité, il faut considérer que cette dualité – toujours à droite – n’est
plus entre R.P.R.-U.M.P. et les modérés, mais bien entre l’U.M.P. et le Front
national, mais sa nature est plus complexe : en 1974, 1981, 1986, 1995 il
y avait lutte pour l’exercice du pouvoir mais peu de différence entre les
politiques proposées, tandis que depuis 2002 le débat est entre protestataires
et exécutif. Il n’y a aucune chance pour que le Front national gagne l’élection
présidentielle, mais il est déjà acquis depuis 2007 que ses thèses ont triomphé
en France, à défaut de l’étiquette.
L’inconnu de
2012 – en fait de ces mois-ci – est au « centre », c’est-à-dire qu’il
existe une famille d’esprit ne se reconnaissant pas dans la politique et le
dire de la majorité et du président sortants, mais ne votant pas a priori pour
l’opposition de gauche. Elle se cherche un champion, Jean-Louis Borloo n’a pas
saisi cette occasion, François Bayrou est sollicité davantage par les
principaux candidats que par les électeurs car si les sondages lui donnent un
potentiel de 29% des votants, seuls 7% sont décidés à ce suffrage. L’un et
l’autre – à l’épreuve – manquent du charisme ou de l’autorité dont Jean
Lecanuet en 1965 et Valéry Giscard d’Estaing en 1974 firent preuve au point de
rompre le manichéisme d’une consultation jusques-là dominée par le seul second
tour.
*
* *
II – Pour le présent : les hors
sujets et ce qu’ils appellent à leur contraire
1° un débat sans orientation
Symbolique, la
libairie politique actuelle [i].
D’abord qu’un ancien président de la République, longtemps ministre des Finances en
des temps certes très différents mais dont la mémoire devrait produire une
grande liberté d’examen et une sûreté technique, puisse commettre un pâle roman
« de gare » au lieu d’écrire un diagnostic et une médication
d’ensemble. D’autant que Valéry Giscard d’Estaing a brigué une présidence de
l’Europe qu’il eût certainement exercé avec certitude et rayonnement. Une
autorité morale – tardive mais peu contestable – aurait pu apparaître,
relativisant notre campagne et notre élection présidentielles françaises comme
elles doivent l’être tant la crise des économies et des institutions
européennes appellent d’autres dimensions. Nous élisons le partenaire de nos
partenaires, notre représentant mais non plus notre seul décideur. Valéry
Giscard d’Estaing dont n’est pas contesté le don de débatteur et de metteur en
page sur les sujets difficiles, manque à sa vocation, même s’il est expliqué
rétrospectivement qu’il n’a candidaté à son époque que faute d’inspiration
littéraire et par doute de sa capacité…Ensuite, Dominique Strauss-Kahn,
parfaitement dimensionné pour une synthèse d’électorats flottants en France et
pour une conciliation des positions entre Etats-membres en Europe, s’est
probablement fait piéger à New-York mais passait trop de temps en pensée et en
agenda à ses addictions, et a laissé trop d’éléments en France-même pour que sa
vulnérabilité soit établie. J’aurais préféré un livre de lui consacré d’une
seule plume à sa compréhension de la crise, surtout s’il est avéré que ce sont
les débats imminents sur la défaillance grecque et ses propres propositions qui
firent décider en urgence, et selon un habile processus, sa mise à mort. Deux
livres manquent. Ceux qui sont en devantures s’égalent les uns les autres en
superficialité : candidats, programmes, règlements de compte, évaluations
des psychologies sont de camapgne en campagne de moins en moins approfondis et
de plus en plus mal écrits. En 1965, il y avait eu le destin secret de Georges Pompidou (les frères Bromberger),
ce qui était – même avec la candidature du Général – un vrai sujet, et en 1969,
le Pompidou de Pierre Rouanet
(déjà connu pour son excellent Mendès
France) donnant – déjà – la thèse du complot (contre de Gaulle). De
semi-émule en 2007, que le livre de Catherine Nay sur Nicolas Sarkozy, parce
qu’il donne l’état de ce que l’on savait de lui avant son élection : ce
fut immédiatement précieux, ce l’est plus encore aujourd’hui en termes de
responsbailité collective pour ceux qu’il a séduits ou réduits.
Significativement, les quarante ans de Mai 68 ont bien mieux produit que la
projection de notre avenir à partir de 2012. Les livres de candidats :
Ségolène Royal et François Bayrou avaient en 2007 une substance approchant, en
alternative à nos médiocrités d’alors, les publications du programme commun de
gouvernement en 1972 et ses commentaires pour ou contre. Nicolas Sarkozy
saura-t-il écrire – de sa main – comme Valéry Giscard d’Estaing, Démocratie française, et comme
François Mitterrand, la Lettre à tous les Français. Ces deux
rédactions, chacune en situation, ont de la qualité et ont eu de l’impact. Un
ou deux grands livres vont-ils bientôt sortir ? Morin ? Delors ?
Lionel Jospin ? Mes projets : la compilation de mes analyses pendant
la campagne de 2007 et les débuts de la présente, la compilation de mes
adresses au pouvoir et à l’opposition depuis Mai 2007, l’évaluation par
empathie des six présidents de la Cinquième République…
2° des polémiques sans fondement
Significatif,
le discours du pouvoir encore en place prêchant d’autant plus sa réélection
qu’il feint de n’avoir en rien à la préparer, tout à son devoir d’état qu’il
veut paraître… la pose avait été celle de Jacques Chirac face à François
Mitterrand, dans les derniers mois de la première
« cohabitation » : il fait de la politique (politicienne,
s’entend), moi je veille sur la
France… Le mélange des genres s’accentue donc : il a
pour effet pervers d’empêcher une prise de conscience de ce que sont les
pouvoirs publics, la responsabilité
présidentielle, la compétence gouvernementale, et il installe l’évaluation la
plus pernicieuse de la représentation nationale par les électeurs.
Exemple : les accidents de la route, catalogue de « décisions »
présenté hier par Nicolas Sarkozy en tant que président de la République. Naguère,
c’était du ressort du délégué interministériel à la sécurité routière.
Communications… ne pas dépasser trois mille morts, comme s’il n’y avait pas
qu’une ambition, zéro mort. Jacques Chirac a donné le départ de ce genre d’abus
de thèmes et de compétence : la sécurité routière, grande cause nationale
pour son second mandat en 2002, avec le cancer et peut-être l’illettrisme.
[i] - en librairie actuellement
L’urgence de comprendre . pour une société meilleure (l’Aube . Novembre 2011 . 601 pages)
Philippe Bernard, Thierry Gaudin, Susan Genge, Stéphane
Hessel, André Orléan
La fabrique des présidents (La
Martinière . Octobre 2011 . 222 pages) Florence
Vielcanet
Le pouvoir dans la peau (Plon . Octobre 2011 . 238 pages) Jacques Séguéla
Les jeux du pouvoir
(éd. de l’Atelier . Novembre 2011 . 110 pages) Jean de La Fougerie
Les loups et les chiens . la droite sous Sarkozy (éd. du Moment . Novembre 2011 . 179 pages) Alain Auffray
Tir à vue 1965-2012
(Novembre 2011 . 366 pages) Jean-Jérôme
Bertolus & Frédérique Bredin
François Hollande, l’inattendu (l’Archipel . Novembre 2011 . 268 pages) Richard Michel
Les meilleurs ennemis . histoire secrète de la primaire
socialiste (Fayard . Novembre 2011 .
201 pages)
Hélène Fontanaud & Sophie Landin
Dans la tête des candidats . le profil psychologique des
présidentiables (les Arènes . Novembre
2011 . 383 pages) Pascal de Sutter &
Hélène Risser
La fin du malheur français . un nouveau devoir politique (Stock . Septembre 2011
. 217 pages)
La République des idées .
refaire société (Seuil . Novembre 2011
. 89 pages) coll. préf. Pierre
Rosanvallon
Histoire secrète de la droite . 50 ans d’intrigues et de
coups tordus (Nouveau Monde éd. Octobre
2011 . 640 pages) Eric Branca &
Armand Folch
Sarko m’a tuer
(Stock . Août 2011 . 355 pages) Gérard
Dayet et Fabrice Lhomme
La face cachée de Marine Le Pen (Flammarion . Octobre 2011 . 125 pages) Romain Rosso
La France d’en bas face
à Sarkozy (Favre . Octobre 2011 . 125
pages) Pierre Le Menahes
La société des égaux
(Seuil . Septembre 2011. 428 pages) Pierre
Rosanvallon
Le retour du citoyen
(Cherche-Midi . Janvier 2012 !!! 320 pages) Jean Lassalle
Juppé, l’orgueil et la vengeance (Flammarion . Septembre 2011 . 226 pages) Anne Cabana
Anne Sinclair (Calmann-Lévy
. Octobre 2011 . 319 pages) Alain
Hertoghe & Marc Truchet
Le débat sur
les emplois publics, notamment dans l’éducation nationale, soulevé par François
Hollande en réaction à la tension dans l’Education nationale, et réactivé par
l’U.M.P., pour un principe excédant ce seul ministère, n’a pas de sens. Les
emplois dans la fonction publique et dans le service public correspondent
certes à de la dépense publique, donc à un soutien de la consommation des
ménages, mais leur justification est tout simplement le service public pour
lui-même. L’assurer est la première responsabilité de l’Etat. L’Etat n’a
d’existence qu’à trois conditions : qu’il ait des ressources humaines,
qu’il ait des ressources financières, qu’il ait « le monopole de la
contrainte organisée ». S’il doit y avoir débat, ce ne doit pas porter sur
les effectifs, mais sur leur emploi et sur les tâches à remplir. Ne pas partir
de la description de ce qui est fait pour en déduire ce que l’on peut
supprimer, mais partir de ce qu’il faut faire pour en déduire des moyens. La RGPP (révision générale des
politiques publiques) ne se prête ni à un bilan précis de son exécution et de
ses effets budgétaire, ni à une validation par la Cour des comptes, le Conseil
économique social et environnemental, le Parlement. Une approche comptable de
la modernisation de l’Etat dressee contre les gouvernants les agents et les
usagers. Elle n’a pas donné lieu à une actualisation des définitions et des
missions de l’Etat. Le principe de subsidiarité établissant le partage des compétences
dans l’Union européenne entre les Etats-membres et les politiques communes
n’est pas mis en œuvre. Ce serait la voie d’une évaluation qualitative de ce
qu’il y à améliorer ou à rationnaliser. Les économies seraient la conséquence
d’un meilleur fonctionnement de la puissance publique, au lieu que les
rechercher pour elles-mêmes désorganise et décourage.
Les thèses du
Front national sur l’immigration, le traitement des étrangers ne méritent la
discussion publique que pour une seule raison : elles ont été reprises
presque intégralement par le parti présidentiel à l’initiative du candidat de
2007. Ce contenu nouveau et avoué pour un programme plus présidentiel que
gouvernemental – François Fillon est en retrait et bien des ministres ne
l’abordent jamais en public – mérite discussion pas pour lui-même mais en tant
que stratégie d’un parti qui attente à l’unité nationale et à l’image de la France vis-à-vis des
Français et vis-à-vis du reste du monde. Ce dévoiement s’est affiché dès la
campagne de 2007 par le projet d’un ministère compétent pour l’identité
nationale. Il a été malheureusement avalisé par Simone Veil, présidente du
comité de soutien au candidat Nicolas Sarkozy. La politique d’intégration ou
d’assimilation en revanche doit se débattre en définition, en moyens, en fins
poursuivies. Elle a ses applications, elles-mêmes soumises à un débat qui ne
peut se traiter hors ensemble : le vote des étrangers aux élections
municipales, la sécurité. – J’ai proposé au pouvoir et à la Commission européenne
(Viviane Reding) que soit instaurée une citoyenneté européenne indépendante
d’une quelconque nationalité selon les Etats, en sorte que des communautés
manifestement transnationales puissent être reconnues et s’organiser en tant
que telles, et même être représentées au Parlement européen. Ce qui suppose
évidemment une révision du traité.
« Sortir
du nucléaire » n’est qu’un débat théorique à l’échelle d’un quinquennat. Il
nous faut de l’énergie et sa production, sa disposition ne doit pas nous rendre
tributaire sans réciprocité. François Hollande a posé avec justesse le problème
qui est celui de notre indépendance et du progrès de nos technologies en tous
domaines, généré ou pas par le nucléaire. Une substitution prend du temps et
suppose des avancées techniques considérables pour l’exploitation d’autres
sources d’énergie. L’entretien du parc existant importe autant que la recherche
des énergies de l’avenir, et réciproquement. La question du coût avancé par
Henri Proglio pour l’E.D.F. (un million d’emplois seraient détruits), par
Benard Bigot pour le Commissariat à l’énergie atomique (750 milliards d’euros) et
par l’Elysée pour l’U.M.P. (200.000 emplois détruits et augmentation de 50% du
prix de l’électricité) n’a pas de sens puisque les paramètres sur les quelques vingt-cinq
ans nécessaires à cette « sortie » varieront d’une façon peu
prévisible, notamment la demande en électricité fonction de la conjoncture
économique, des progrès techniques, de l’apparition de nouveaux besoins. Mais
il est étrange que ce débat occupe tellement le début de la campagne alors que s’opposant
en public, entre les deux tours de l’élection de 2007, Nicolas Sarkozy et
Ségolène Royal étaient à égalité d’ignorance sur les principaux chiffres et de
notre arsenal nucléaire et de notre parc de centrales, signe que la question
étant alors secondaire, il n’avait pas ni à l’un à l’autre, de se préparer à
traiter le sujet… Aussi étrange, le regain d’intérêt pour la sécurité nucléaire
né de la catastrophe de Fukushima n’a pas suscité une véritable attention à ses
suites, aux médications physiques, politiques et financières mises en œuvre au
Japon. L’attentat du 11-Septembre avait déterminé une noria de visiteurs
compassionnels sur le site new-yorkais. La nature de l’accident et les
autorités locales ont rendu le pèlerinage difficile. Les écologistes français
jouent leur avenir politique sur la question nucléaire, en cela ils se
différencient de tous les autres mouvements et partis mais Greenpeace est bien plus convaincant que les prestations de leur candidate.
3° l’entreprise européenne abandonnée
En 1965, le
général de Gaulle fut mis en ballotage par les paysans, qu’il faisait défendre
pourtant à Bruxelles, et par les catholiques alors qu’il était d’évidence le
dernier « roi très chrétien ». Je le crois, avec le ministre de sa
confiance, Maurice Couve de Murville, un fondateur insigne de l’entreprise
européenne. Sans doute la réconciliation franco-allemande, mais surtout la
pratique institutionnelle à Bruxelles, réaliste et efficace, assortir d’une perspective
pas du tout gestionnaire : la réunification du Vieux Monde notamment par
son émancipation de l’hégémonie américaine et le contact avec l’Est. Les
décisions prises depuis lui sont difficilement réversibles en ce qui concerne
la participation de tous les peuples européens à l’entreprise – moyennant les
formes d’une « maison commune » telle que proposée par Mikhaïl
Gorbatchev pour y associer la
Russie, le Belarus, l’Ukraine et les mises de la Turquie laïque aux normes
de l’Europe. Elles le sont, quoiqu’on en hésite ces mois-ci, pour ce qui est de
la monnaie unique : plutôt qu’envisager des retraits, c’est au contraire
la participation britannique qu’il faut prévoir et obtenir. Le marché intérieur
unique est fondamentalement sain, ce sont les idéologies et les intrusions et
exploitations de tiers qui sont à éradiquer au simple motif que c’est une
tricherie et que c’est sa destruction économiquement et mentalement, car les
peuples ne peuvent admettre de passer, pour cause d’Europe, d’une position historique
suprême dans la plus grande partie du monde au statut de grand marché de
consommation livré aux pays dits émergents. Rien d’original à l’écrire, mais
c’est peu formalisé et cela ne produit pas le départ pour une réflexion
émancipatrice.
L’Europe est en
crise de gouvernement, en crise de perspective, en crise d’indépendance. Bien
plus gravement et substantiellement qu’en crise économique et financière. Elle
n’a jamais pu sortir militairement et stratégiquement, intellectuellement même,
de l’emprise américaine. Parce qu’elle ne l’a jamais voulu au niveau de la
plupart de ses dirigeants nationaux. Elle avait commencé d’inventer la relation
riches-pauvres, nord-sud, elle a beaucoup perdu en ne résolvant pas à ses
portes le conflit israëlo-arabe, elle dépend aujourd’hui pour les finances de
ses Etats-membres et donc pour la sécurité sociale chez chacun de ceux-ci, de
marchés financiers et boursiers dominés par l’étranger. Elle sait user de la
contrainte contre l’immigration, pas contre le dumping fiscal et social. Elle
est épouvantée à l’idée d’être un modèle de démocratie et d’en faire dépendre
ses relations avec des partenaires qui n’ont pas cette morale :
principalement la Russie
et la Chine, en
tant que dictatures, évidemment pas en tant que peuples.
Morale,
orgueil et dignité bien placées, intérêts immédiats et à terme enjoignent tous
de nous donner des institutions fortes dont l’efficacité dépendra de
l’aadhésion populaire qu’elles susciteront en fonctionnement, en audace
collective, en résultats. Il faut une initiative française pour l’Europe. Rien
dans la campagne en cours n’en donne le présage. Aucun des candidats,
actuellement les plus favorisés par les sondages, n’affiche une priorité pour
la question d’Europe, à plus forte raison aucun ne s’en dit le champion. Point
besoin d’une candidature spéciale, mais la conviction qu’il n’y a plus de
sursaut national qu’européen manque. Aucune des élections précédentes n’en a
été à ce point dépourvue. Sans doute, la candidature du radical Jean-Michel
Baylet aux primaires « citoyennes et socialistes » était-elle pâle,
elle avait le mérite de l’affichage européen.
Cet affichage,
d’instinct, les candidats l’évitent ou ne s’y adonnent que fugitivement, en
fonction d’une circonstance – qui pour le moment ne s’est présentée que pour le
président sortant, selon le calendrier des réunions avec ses homologues, tandis
que son compétiteur se contente d’aller s’entretenir avec le groupe socialiste
au Parlement européen. Les idées et propositions courent les colloques et remplissent
les boîtes à idées mais ne sont portées par aucun politique, en France ou dans
l’un quelconque des Etats-membres. Quatre scenarii ont été résumés après une
rencontre à Varsovie à la mi-Novembre [i] : 1°
une intégration asymétrique sans révision du traité et ne s’appuyant que sur le
Conseil européen, donc en court-circuitant la Commission et le
Parlement ; 2° une zone euro réduite aux Etats les mieux notés ; 3°
une union de stabilité ou une union budgétaire et fiscale supposant la révision
du traité ; 4° une union des pionniers (Jacques Chirac) ou de
l’avant-garde (Joshka Fischer), les autres Etats-membres laissés en arrière. Trois
pays seulement débattent de l’avenir de l’Union.
Plus ils sont
rudimentaires, plus ils importent. S’agissant des médias, c’est certainement la
leçon qu’apporte une récapitulation des campagnes présidentielles précédentes.
La toute première, mettant en cause la suite de l’action du général de Gaulle,
brisa le monopole dont jouissait le pouvoir à la télévision, il y avait même un
ministre de l’Information. La réponse à cette forme de dictature était de faire
remarquer que l’ensemble de la presse écrite était hostile au pouvoir en place,
aux institutions nouvelles et que les ondes sous le régime précédent avaient
été interdites d’accès à l’homme du 18-Juin. Les « événements de Mai
68 » commencèrent au Parlement par un débat sur la publicité à l’O.R.T.F.
et le statut de cet Office fut l’un des enjeux de l‘élection de 1974, en tout
faisait, ainsi que les écoutes téléphoniques, la différence entre Valéry
Giscard d’Estaing et l’U.D.R. le parti présidentiel. Les médias télévisés
restèrent cependant sous tutelle gouvenementale jusqu’à François Mitterrand :
les radios locales, les démultiplications puis l’abandon du monopole d’Etat
datent de lui. Les médias pendant un siècle et demi ont donc été un enjeu de
libertés publiques. Les textes sur les équilibres à maintenir entre familles
politiques comme entre entreprises privées, publicité d’une part et
audio-visuel de l’Etat d’autre part garantissent, en principe, des égalités
comme si un parti ou un personnage public dépendent de sa fréquence à la
télévision, accessoirement à la radio. C’est ce qu’a posé, cependant, en
méthode de communication, Nicolas Sarkozy, et c’est ce qu’espèrent les
candidats à l’élection présidentielle en mal de notoriété et surtout de
parrainages, quelle que soit leur valeur personnelle : Nicolas
Dupont-Aignan ainsi, d’excellente présence télévisuelle, peut espérer en
campagne officielle opérer une percée. Christine Boutin devrait répliquer de
façon audible au président sortant qui l’a déçue. Et ainsi de suite.
C’est mal
observer une évolution plus pernicieuse qui n’est pas l’accaparement ou pas des
outils audio-visuels existants, mais qui portent sur la propagation de
l’information – de plus en plus indépendante de tout contrôle politique,
scientifique et déonotologique – et sur le commentaire de celle-ci. L’Agence France Presse dont le pouvoir en
place entend modifier le statut hérité de la Libération et pérenne
depuis 1957, est la base de la totalité des médias écrits et parlés
francophones. Les dépêches suppléent les rédactions sur beaucoup de sujets ou d’événements, apparemment
secondaires, la source n’est d’ailleurs pas citées par les médias oraux. Le
statut est peut-être à adapter, mais certainement pas dans le sens d’une
rentabilité d’un service public.La base de l’information est en danger,
actuellement. Le commentaire est dirigé dans beaucoup d’occurrences, il tend à
faire passer pour exceptionnel ou de fond ce qui ne l’est que par intitulé, un
discours du président de la
République, et pour banal ce qui ne l’est pas, un autre
discours du même président de la
République : le discours de Toulon II ce 1er
Décembre, le discours prononcé à Grenoble le 30 Juillet 2010.
Présentation,
commentaire, équilibre n’ont donné lieu jusqu’à présent qu’à deux
réglages : le débat entre les deux tours de l’élection présidentielle
depuis 1974, les primaires « citoyennes » ou socialistes.
Le cumul
est-il un « mal français » ? je ne sais pas assez la vie
politique de nos partenaires pour en décider. Il est facilement observable que
quelques journalistes sont à la fois titulaires d’émissions ou invités
systématiques d’émissions sur des chaines de télévision à grande audience,
éditorialistes dans la presse écrite, débatteurs sur des radios publiques ou
privées. Le Monde en a dressé une
liste assortie de portraits. Le commentaire audio-visuel en France, après avoir
été le monopole du pouvoir « gaulliste », est devenu un oligopole que
renforce l’édition et que soutient la tendance à l’endogamie : les
liaisons et compagnonnages durables ou pas se font en milieu unique et fermé,
et se pratiquent entre objets et sujets puisque la carrière politique et la
carrière médiatique s’épousent ou se lient de plus en plus. En « traversée
du désert » affectivement, le candidat Nicolas Sarkozy a donné dans le
système. François Hollande en est, Dominique Strauss-Kahn en fut, Bernard
Kouchner aussi. Faute d’introduction dans ce milieu qui n’est plus qu’image et
intelligence artificielles, souvent brillantes, mais ne communiquant plus avec
les Français ni avec ce qui n’est pas parisien, je ne peux conjecturer davantage.
Autant la
question des cumuls de conseils d’administration et de mandats électifs appelle
de la nuance pour la régler, puisque ce peut être aussi bien (positivement) un
mode d’information permanente, une manière de relier souplement des intérêts ou
des équipes qui ne le seraient pas autrement
que (négativement) la sécurité que se donne un groupe, une profession,
un individu pour ne pas se faire pénétrer par la concurrence et même en
empêcher la naissance, autant celle des accaparements d’antenne introduit à
« l’idéologie dominante », à « la pensée unique » sans
qu’apparaissent des autorités morales – ce dont nous manquons. La France vit dans le comique
de répétition, mais en pleure. Ces dictions R.P.R., puis U.P.M. à la tribune du
Palais-Bourbon ou en débats télévisés : répéter inlassablement les
deux-trois premiers mots de la phrase sur un ton de lassitude péremptoire,
celui de désespérer d’un adversaire que l’on aurait cru à sa hauteur et qui
déçoit par sa petitesse ou son esquive. La bourde de François Baroin affirmant
qu’en 1997 la gauche n’arriva au pouvoir que « par effraction » m’a
aussitôt paru involontaire, pas même agressive, puisque sur le même plan :
est-ce du courage ? est-ce du courage ? étaient posées les mesures gouvernementales
et celle que ne prendrait ou n’avait pas prise la gauche, puisque surtout
l’orateur ne maîtrise manifestement pas sa langue maternelle et avait, sans
doute, voulu dire : par surprise.
L’accaparement
est notre plaie, il est l’exact contraire en esprit de ce qui fondait la Cinquième République,
voulue et pratiquée par de Gaulle. Il n’est pas un indice de personnalité, il
n’est pas libertaire, il emprisonne même celui qui l’organise à son bénéfice.
Peut-on
codifier les cumuls ? peut-on promouvoir par discrimination positive des
représentations – sélectionnées par qui ? – et censément positives. Les
quotas hommes/femmes, ethniques et pourquoi pas d’âges ? La question est
culturelle et psychologique, affaire d’éducation. Permettre aux vocations de
s’épanouir sans distinction – selon la Constitution – de conviction, de sexe, d’origine.
Les apports au débat ou à la collectivité, les novations et imaginations sont
affaire de personnalités et aussi des systèmes sociaux et éducatifs répondant
aux vocations, les discernant et assurant leur promotion, ils ne sont pas liés
principalement à l’âge, au sexe, à la naissance. Les discriminations positives
traitent en statistique ce qui doit être regardé en qualité et en judicieuse
affectation des talents. Nous nous enfonçons dans une mauvaise voie, la
précocité n’a que faire de la mémoire mais elle perd pied et n’a pas le sens
des réalités qu’elle prétend incarner, la longévité au pouvoir peut tendre à
éliminer les concurrences à naître et donc à tout assurer sauf l’avenir, bien
des femmes en politique ne servent avec pas mal d’exhibition que l’homme en
elle, la finesse, la compassion, l’empathie qu’elles devraient apporter dans la
vie publique n’est, à l’expérience des années de leur promotion notamment
gouvernementale, pas bouleversante pour l’établissement et la pérenité d’une
chose publique qui reste dure aux administrés, aux citoyens, aux assujettis, en
fait : aux inférieurs.
L’accaparement
le plus contraire à l’imagination collective et à la démocratie est
certainement l’appropriation des circonscriptions électorales pour l’élection
des députés à l’Assemblée nationale. Le scrutin uninominal en est moins la
cause que le caractère de plus en plus décisif des investitures par les partis
pour le choix des électeurs. Les personnalités, dont la carrière et la
promotion importent autant à elles qu’à la machine d’un parti, sont ainsi
placées de force, soit parce que la circonscription est « sûre »,
soit parce que son élu vieillissant peut être circonvenu et parrainer
efficacement. Naguère Laurent Fabius, hier Alain Juppé qui comme Lionel Jospin
avait tenté du XVIIIème arrondissement de Paris, la circonscription de
Clemneceau et de Louis Vallon, sans succès. Jacques Chaban-Delmas ou Jacques
Baumel donnent ainsi Bordeaux ou Rueil-Malmaison. Passe encore, mais le député
de la Sarthe,
Premier ministre, s’installant à Paris pour aller de la mairie de Sablé à celle
de la capitale en 2014, et la candidate à l’Elysée en 2007 passant des
Deux-Sèvres à la Rochelle
pour 2012, choquent les électeurs et étonnent eu égard à ce qu’ils sont. Le
scrutin uninominal – précisément – devait, devrait lier une personnalité et ses
concitoyens. C’est de représenter un pays à l’Assemblée nationale qu’il s’agit
et non un parti dans une ville ou un terroir donnés, encore moins combiner un
rebond ou un surplus de carrière. La République, à l’usage, renforça le lien
puisqu’initialement les candidatures muiltiples étaient loisibles : en
1848, Louis-Napoléon… en 1871, Thiers… puis Boulanger. C’est bien d’un choix
mutuel, personnel qu’il s’agit. Ségolène Royal, sans peut-être le savoir,
proposa en 2007 des rendez-vous en cours de mandat entre le mandataire et ses
mandants. Comme dit plus haut, avoir fauté au point d’être démis du
gouvernement ou bien choisir de ne plus y appartenir impose au ministre,
précédemment député, de revenir devant les électeurs au lieu de se rasseoir à
son banc dans l’hémicycle, comme si rien n’avait été… Déjà le Parlement
européen, élu au scrutin de liste, est à la disposition des partis pour placer
et faire rétribuer les gens de sa machine, exemple Benoît Hamon, porte-parole
du Parti socialiste, ne parvenant à se faire élire à Auray.
2° les responsabilités jamais examinées
Les
« affaires » qui caractérisent l’actualité française ne sont pas des
débats politiques, mais la discussion de culpabilité au sens pénal. La plupart
– emplois fictifs de la ville de Paris quand Jacques Chirac en était le
maire…recel de commissions occultes ayant financé la campagne présidentielle
d’Edouard Balladur à l’occasion de ventes d’armes au Pakistan et à l’Arabie
saoudite… confusion par Eric Woerth et sa femmes des fonctions de trésorier de
l’U.M.P., de participation à la gestion de la fortune de Liliane Bettencourt,
de ministre du Budget … procédure et fond de l’arbitrage rendu en faveur de
Bernard Tapie contre le liquidateur du Crédit Lyonnais… mais aussi conditions
de la nomination de François Pérol à la tête du second groupe bancaire français
puis de l’ensemble de la corporation… conditions d’écoutes téléphoniques visant
à connaître les sources d’un journaliste – tiennent soit à des retouches par
complaisance des textes en vigueur, soit à l’absence de contrôle, soit à une
aménité forcée des juges de la procédure ou du fond : l’affaire
Clearstream (Dominique de Villepin relaxé le 14 Septembre) reflète simplement
les haines et intérêts communs de deux candidats à l’élection présidentielle
dont l’un a doublé l’autre mais recherche celui-là pour sa réélection.
L’immunité pénale du président de la République n’avait jamais été légiférée, ni à
plus forte raison constitutionnalisée depuis l’instauration définitive de la
forme républicaine en France ; l’affaire des emplois fictifs de la ville
de Paris qui a motivé la construction jurisprudentielle, puis fait saisir
l’occasion des exceptions de juridiction pour la Cour pénale
internationale consacre en fait une
immunité viagère du président de la République, à compter de son élection et cette
immunité a été unanimement consentie par les politiques (accord entre l’U.M.P.
et le maire socialiste de Paris pour exonérer en majeure partie Jacques
Chirac). Elle a conduit à davantage, la non-comparution du prévenu, et
l’extension, sauf prochaine cassation, de l’immunité à l’ensemble des
collaborateurs de confiance du président de la République (le marché
de sondages conclu par la directrice du cabinet à l’Elysée en ouverture du
mandat de Nicolas Sarkozy, et condamné par la Cour des comptes). Il apparaît aussi que le
passage de Christine Lagarde de la rue de Bercy à la direction générale du Fonds
monétaire international l’exonère de toute responsabilité dans le détournement
de procédure permettant à Bernard Tapie de refaire fortune, et par extension le
président de la République
en personne, donneur d’ordre à la ministre pour continuer ce qui avait été
initié quand il était lui-même à cette place : bien que la commission
d’instruction de la Cour
de justice de la République
ait autorisé l’ouverture de l’enquête, la retraite du procureur Nadal a bloqué
la suite. Il est maintenant avéré (entretien du professeur Jacques Robert,
ancien membre du Conseil constsitutionnel, accordé au Parisien libéré) que la vérification des comptes de campagne
présidentiel peut n’être qu’ « une entourloupette » selon le
candidat à examiner et un enrichissement personnel est soupçonné (la propriété
de Tourgeville dans le Calvados, acquise en 1996), tandis que l’instruction de
l’« affaire de Karachi » ayant causé mort d’hommes fait évoquer
Nicolas Sarkozy, ministre du Budget à l’époque (l’Elysée a cru devoir
communiquer le 22 Septembre que « le nom du chef de l’Etat n’apparaît dans
aucun des éléments du dossier »). Quant aux flux d’espèces entre l’Afrique
et la France,
forme avérée de rétrocommissions payant de l’influence en divers domaines (les
dires de Robert Bourgi et d’autres intermédiaires : Ziad Takieddine,
intervenu aussi pour la libération des infirmières bulgares… et Alexandre
Djouhri, en écho à la « cassette Méry » des années 90 pour un
fait des années 80), il semble punissable seulement selon les lois du pays expéditeur.
Quant à « l’affaire Clearstream », elle tourne tellement à la
« comedia del arte » qu’elle a peut-être caché de véritables
détournements et recel, non éloigné de l’« affaire Karachi ». Non
seulement, on ne sait pas bien, mais la suspicion fait tache d’huile. Grands
personnages et institutions s’abîment dans l’opinion générale, elle-même
conviée pourtant au sens des responsabilités et à la pédagogie par l’exemple
pour les jeunes générations. Lentement, la socciété française est conviée à se
détruire par schizophrénie et mauvais exemples ; comme l’alcoolique est
entretenu dans son addiction par les mauvais génies qui ont intérêt à son
déclin, la France
est privée autant des nourrritures terrestres que de ce qui, d’ordinaire, la
subjugue et la remet en mouvement.
A défaut de
contrôle juridictionnel de droit commun ou tel que prévu par les textes
constitutionnels, le contrôle politique n’est pas davantage opérationnel. Une
réforme majeure, selon la révision de Juillet 2008, est revenue sur une des
ruptures opérées par la
Constitution dans sa version originelle : un
parlementaire devenu ministre, s’il quitte le gouvernement, ne retrouve son
siège que selon sa réélection, celle-ci soumise aux électeurs par la
complaisante démission de son suppléant, ou bien faisant partie du
renouvellement de la Chambre
dont il faisait partie. Cette réforme fait donc siéger d’anciens ministres
démis pour indélicatesse ou imprudence, mais pas pourtant mis en examen :
André Santini, Eric Woerth, Michèle Alliot-Marie, Georges Tron, d’autres
moindres.
La discipline
de vote, le chantage à la réinvestiture ne sont pas nouveaux, mais l’ambiance –
interdisant le vote de conscience et empêchant tout scrutin de confiance
librement exprimée – rend artificielles les procédures parlementaires. Les
présidences de commission concédées à l’opposition socialiste au Sénat et à
l’Assemblée nationale ne gênent ni le système ni le pouvoir en place. Quand une
nomination pourrait être dangereusement refusée – François Pérol, les membres
du Conseil supérieur de l’audiovisuel – ou qu’une procédure pourrait aboutir –
des commissions d’enquête – elles sont frappées d’interdit, et les élus
exécutent. La notion de bien commun, supérieure par construction aux
allégeances ou aux habiletés de carrière, disparaît. Les « éléments de
langage » font loi, jamais un président de la République n’a exercé
aussi personnellement la présidence du groupe parlementaire de la majorité dite
présidentielle. Ni referendum, ni censure, ni renvoi en Cour de justice. Seuls,
les sondages font infléchir la posture du pouvoir. Un régime aussi fermé
s’admettrait en raison de circonstances exceptionnelles – nous y sommes – s’il
générait des propositions, des décisions, des mises en œuvre d’exception,
insusceptibles de passer autrement dans les faits. L’occupation des médias, la
complaisance rigide des commentaires, des plaidoyers en défense, la
revendication incessante des accaparements pour le présent et d’une lecture
personnelle du passé défaussant systématiquement le président sortant n’ont
encore rien produit qui change la donne en Europe et dans le monde sur les
sujets qui nous obsèdent. S’il est compréhensible que finalement la décision
soit l’apanage d’un seul, il est certain que des délibérations la préparent au
mieux et que la démocratie est, au minimum, le contrôle en honnêteté et en bon
sens.
3° revenir à la Cinquième République
façon 1960
La pratique
actuelle du pouvoir – sans que la révision de Juillet 2008 y soit pour quelque
chose, sauf la portée politique de son vote, à une voix de majorité, entérinant
déjà une pratique d’un an de nos institutions, radicalement différente de tous
les exerciecs qui avaient précédé ceui de Nicolas Sarkozy – a instauré de fait
un nouveau régime caractérisé par son invulnérabilité et son immunité pour toute
la durée du mandat présidentiel avec lequel se confond en durée mais plus
encore en attitude, le mandat de l’Assemblée nationale.
Il faut
rétablir fluidité, débat et répartition des compétences. La présidence de la République oriente et
arbitre, le président de la
République est seul à parler et rarement, les conseillers ne
sont qu’instrumentaux et n’existent pas pour le public ni pour les journalistes
ni pour les ministres ou les parlementaires. Le Premier ministre est le chef de
la majorité – sans qu’il y ait à distinguer le parlementaire du présidentiel
puisqu’en principe l’Assemblée nationale est élue pour soutenir le programme du
président de la République
qui ne choisit le Premier ministre, éventuellement hors du Parlement (Georges Pompidou,
Raymond Barre qui ne furent élus députés qu’ensuite) que selon ses propres
vouloirs. La « cohabitation » n’est pas saine car c’est elle qui
introduit une dyarchie et des rivalités dans le fonctionnement des pouvoirs
publics ; elle ne fut compréhensible que pour donner quelque chance de
pérenniser des acquis de gauche en 1986 ; elle avait bien moins de raisons
de se renouveler en 1993. A
ces deux dates d’ailleurs François Mitterrand n’était pas personnellement mis
en cause, le renouvellement de l’Assemblée s’était fait à terme constitutionnel
et les deux dissolutions qu’il avait prononcées à chacun de ses élections lui
avaient donné raison. Ce qui ne fut pas le cas de 1997 pour Jacques Chirac.
De même qu’il
a fallu un siècle pour que la laïcité – version tolérance et pluralisme de la
démocratie et du civisme – soit consensuelle en France, de même faut-il œuvrer
pour que le politique, l’économie, le social, l’éthique trouvent chacun leur
sphère sans en sortir. Il est présomptueux de la part du Président de trancher
de tout en réaction à tout, que ce soit ou non de sa compétence. Il est
inopérant dans les faits et dans les esprits que le législateur tranche ce qui
devrait rester du domaine personnel : les diverses parités, la marche du
couple, les cas de conscience posés par les tout débuts ou la toute fin de la
vie. Ce qui doit restaurer l’autonomie de la morale pour la rendre de nouveau
impérative par le spirituel et non par la contrainte, est du même ordre dans
l’économie. Il y a un patrimoine national séculaire, il y a eu des
investissements publics financés par l’impôt ou des renflouements : le
chemin de fer, l’acier, l’automobile récemment, notre avance dans la production
énergétique à moindre coût que dans les autres Etats-membres de l’Union. Cela
ne peut se vendre, cela ne peut se délocaliser. La morale et la finance se
rejoignent pas tant pour l’éthique – la loi organise en principe les finances
publiques, collectives et individuelles – que pour inculquer et maintenant chez
les dirigeants un certain patriotisme, le sens du bien commun, le souci en
père de famille que prospère notre pays en tant que tel : les délocalisations,
la défroque des hauts fonctionnaires disposant des entreprises ou procédures
qu’ils ont privatisés de l’intérieur des ministères dont ils ne sortent que par
goût du lucre et du pouvoir sont des trahisons. Du vol encore plus dommageable
pour nous que la fraude fiscale ou aux prestations sociales.
Il se trouve
que le fonctionnement responsable, démocratique, référendaire des débuts de
notre Cinquième République coincida avec ce sens de l’Etat et du pays, toutes
générations et ambitions confondues, sans aucun cynisme, et avec une culture du
service public, de l’entreprise publique. Tant que nous n’y reviendrons pas –
sous des formes à réinventer, dont la première, cadre de beaucoup d’autres,
sera la planification « souple à la française » des années 45 à 75 –
nous n’aurons de solutions ni pour notre crise nationale, notre mise globale à
l’encan et au chômage, ni pour la crise européenne, crise de désespérance et
non de dénuement.
L’élection
présidentielle n’en décidera pas seule. Le mouvement social – sans résultat
depuis « Mai 68 », quelque force qu’il ait montrée en 1995, 2003 et
2010, en s’opposant au pouvoir de la droite étant – sera indispensable pour
soutenir le nouveau président de la République et son gouvernement dans leurs
décisions, si celles-ci ne sont pas de compromis. Mouvement de ssoutien qui
aura peu de précédent dans notre histoire, mais auquel beaucoup sont prêts. Il
le faudra face aux désertions du capital, de groupes industriels quand il nous
en reste, face à un simplisme haineux, sinon vociférant, d’une droite qui
pourrait être tout autre mais nous en donne l’idée depuis l’automne de 2007 à
chaque protestation devant l’injustice ou la simple précipitation pour
surprendre et contraindre les Français.
A défaut,
l’inconnue et l’intraitable politiquement et sociologiquement que sont devenus
et que représentent pour l’ensemble du pays : les banlieues, de nombreuses
zones rurales, et tous ceux qui sont exclus de la vie économique, du travail et
de la considération publique détermineront – peut-être le prochain scrutin –
certainement une désagrégation ou un retour de la France à l’unité
spirituelle et nationale. Quant au problème politique et financier posé par
l’endettement des « souverains » que sont les Etats, il n’est rien –
en souffrance et en bouleversement – à côté de ce que – de plus en plus
nombreux – couples, ménages, vieillards vivent et endurent aujourd’hui. Le
slogan politique de la dette nationale par habitant à ne pas « léguer à
nos enfants » est d’une application dramatique, jusqu’au suicide, dans des
familles françaises. Ce qu’avait commencé de vivre l’Amérique au moment où
s’identifia, pour les banques et pour les politiques, « la crise » ./.
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