mercredi 26 novembre 2014

Inquiétude & Certitudes - mercredi 26 novembre 2014




Mercredi  26 Novembre 2014

Chaque matin, la grâce, l’espérance. Et maintenant que je l’écris, l’espérance bien concrète, et même la prière – que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel, que votre règne arrive – pour que ces affaiblissements soient passagers et palliés : la résurrection dans nos vies, les renouveaux et les re-départs. Même si chaque soir me fait sombrer dans la semi-inconscience, tombant de sommeil et d’inertie sur ce clavier, ne pouvant avancer même d’un mot, dans mes écrits et devoirs du jour, quand celui-ci a passé… est en train de passer. Souvent au lit avant mes aimées, celle-ci terminant ensemble une séquence de télévision, César hier avec Stéphane Bern.
Faire-part et remerciements pour le décès de son mari, la belle-sœur de mon cher aîné, dont j’ai été passagèrement et discrètement amoureux, répond à mes condoléances évoquant ces antériorités : le passé bien sûr… mais le présent n’est-il pas plus important. Non, il est d’un autre ordre. Le passé nous est un viatique, un socle comme il peut être aussi un terrible fardeau. Mon expérience à nouveau – hier – avec mon cher Denis M. : son impuissance sur le présent, son désarroi donc et sa sensation de solitude alors même qu’il est entouré, soigné  avec habileté et affection, tient en grande partie à la perte périodiquement de sa mémoire immédiate, donc de tous repères en lieu et temps (la date du jour, l’habitude de sa chambre), tandis que du passé il garde la certitude d’avoir à en rejeter presque tout car il n’a presque jamais pu faire ce qu’il aurait aimé faire. Résultat d’ailleurs de déplorables gestion des ressources humaines dans l’Eglise de France, au moins antan… et ces appellations pour les « maisons » de « supérieur » : le responsable ou l’administrateur ou le gestionnaire. Maisons de retraite, collèges religieux, etc… Montherlant… ce moine ne disant pas : abbé, mais supérieur… les supérieurs… A Saint-Jean-de-Passy, collège diocésain à Paris où je ne restai quà’ mes quatre-cinq ans, on disait « supin »… (d’ailleurs, en la personne de l’Abbé Dussoulier que j’ai dû entretevoir une ou deux fois, mais qu’on savait par rumeur, il était chaleureux, bienveillant et sans doute tout à fait indiqué pour animer notre ensemble enseignés et enseignants). Je ne pourrai vivre le présent sans me projeter, et ces deux élans, sereins, grâce à Dieu, ne me sont possibles que par un passé personnel avec lequel je suis entièrement d’accord et pour lequel je rends grâce constamment. Passé qui d’ailleurs coincide avec une longue période pour notre pays de réussite et d’équilibre.
Notre pays… je crois maintenant et avec précision qu’il va s’en sortir, mais sans que ses dirigeants politiques et d’entreprises y soient pour grand-chose, au contraire. La débrouille générale, notamment dans la jeune génération, pour la plupart des carrières professiuonnelles, des exercices de métier, est une invention non encore décrite pour ses aspects positifs (le négatif étant connu : l’absence, la perte, le déni de solidarité et du jeu « collectif ») : elle est une remise à leur juste place de nos dirigeants et un jugement terrible sur eux, celui de leur incapacité ou de leur égoïsme. Ils sont éxogènes, car le plus souvent introduits dans l’entreprise, seulement au moment de la diriger (phénomène relativement récent mais qui est une des causes de notre perte tandis que l’Allemagne discerne dans le rang ceux qui continueront la direction…) Les déboires français ne sont pas des incapacités nationales mais des intoxications dogmatiques et des erreurs stratégiques. Tandis que tout le quinquennat peut désormais s’analyser en un tentaculaire gouvernement de déréglementation et une improvisation occulte, subordonnée à on ne sait qui… la « carte » de nos « territorires » dessinée puis imposée en douce, sans referendum, sans consultation pour obéir à qui ? et faire quelles économies … des économies sur la démocratie et la participation ! … la mise à mort du fleuron mondial de la médecine française : le Val de Grâce, centre de recherches, comme à la place de la sidérurgie un centre de recherches sur la sidérurgie ! L’antidote, c’est nous. Ce sont les reprises d’entreprises et d’actifs par des salariés, par quelque cadre trouvant un peu de capital. Le vrai ministre du redressement inudstriel et productif, le ministre réel de l’économie aujourd’hui, ce sont nos tribunaux de commerce… une économie, des procédures s’inventent sur le tas, pratiquement… je le ressens et découvre jour après jour. Sans doute, la litanie quotidienne des redressements judiciaires et des licenciements de masse (le vocabulaire à la chinoise, au sens du mensonge et des apparences truquées de la légalité : celui de PSA avant-hier matin), mais aussi ces re-départs.
Prier… si j’ai réellement quelque chose à transmettre, que les forces me soient données de l’accomplir, d’en être digne…, quelque témoignage à donner et à laisser… de notre pays tel qu’il est en profondeur et peut être et veut être… de la psychologie vécue de ma foi, la foi que Dieu maintient en moi depuis ma naissance, et je l’espère jusqu’au dernier souffle de cette existence, de ce mode d’existence humaine, si beau parce que si dépendant. La dépendance nous donne la vérité de l’amour, d’aimer et d’être aimé. Dépendance de Dieu, dépendance vis-à-vis de ma chère femme et de notre fille, gratification par tout geste ou attention d’autrui. Les autres sont l’enseignement de la vie et la connaissance de nous-mêmes. Plus il y a de limites, plus il y a de vérité, de réalisme et donc de fécondité.
Prier… le plus âgé de nos chiens à mes pieds, la rumeur des autres, la nuit totale, sans lune ni étoile, elle-même endormie en elle-même, imposant un silence qui est d’une douceur, d’une disponibilité intenses. Prier… l’apocalypse certes, l’accomplissement de la colère de Dieu [1] mais toute épreuve que nous subissons a ces deux marques, ce sens : la fin, l’aboutissement sont garantis et accomplis par Dieu pour notre bonheur, et l’épreuve en elle-même, légère ou terrible, l’écoulement-même du temps avec cette conscience à tout âge de notre existence des limites caractérisant nos jeunesses et nos vieillesses, sont le lieu de nos témoignages, de nos persévérances de notre amour pour Dieu et pour nos semblables, proches, intimes ou inconnus. Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie. … Mettez-vous dans la tête que vous n’avez pas à vous soucier de préparer votre défense. Moi-même, je vous inspirerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance ni contradiction. Certes, les flammes de Rouen réduisant en cendres Jeanne d’Arc dont il a été dit qu’elle croyait rester finalement indemne, certes l’horreur des prisons, des exterminations et des massacres quand aucune issue n’est prévisible ni envisageable… pourquoi d’ailleurs l’Eglise n’inaugurerait pas une « procédure » de canonisation immédiate et en masse pour tous ces martyrs d’Irak et de Syrie. On relèvera les noms ensuite, on fera les monuments, mais quelle proclamation au monde en même temps qu’une réelle saisine internationale pour ces mises à mort plus même en raison de la race ou de la politique, mais simplement pour une foi, une identité, une persévérance millénaires. Vous serez livrés,… ils feront mettre à mort certains d’entre vous… Mais, le Seigneur a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations ; il s’est rappelé sa fidélité, son amour. Prier tout ce jour qui vient.

Hier
. . . Saint-Joachim, la maison diocésaine de retraite pour nos prêtres âgés ou handicapés, 10 heures 30 à 15 heures + Denis ne sait ni la date du jour ni où il se trouve mais me reconnaît, analyse bien les photos. Après le déjeuner ensemble, et un peu de texte avec deux de ses confrères, promenade dans le parc aux arbres sans doute tricentenaires, le fauteuil roulant qu’il ne quitte guère, la hantise que nous ne nous retrouvions pas. Puis de retour dans sa chambre, la prostration mentale, un dire qui est cohérent poour exprimer la détresse d’une solitude tous azimuts. Je suis perdu, tout seul, sans rien. Pour le moment, c’est le vide. Je ne fais plus le lien entre ce que j’ai fait hier, avant-hier et maintenant, ce matin, avant la nuit, c’est le vide. Je n’ai plus rien, que ce que j’ai sur moi, et je vais me lever deux nuits, ainsi… Je ne sais même pas à qui m’adresser. Tandis que je tente de lui faire la lecture… je ne suis pas ce que vos dites, je suis dans mes pensées. A quoi pensez-vous ? A ce que je vais faire, à ce que je vais devenir, je suis dans le grand vide en ce moment… Je suis inutile parce que j’ai dépassé l^’age de 82 ans.  Je lui avais demandé à table quel est son meilleur souvenir, il avait éludé, demandé le temps de la réflexion sans s’intéresser à la question, je n’avais pas chercher à l’entrainer par mon propre dire : les quelques très mauvais souvenirs que je garde mais la floraison, la foison des bons, des magnifiques moments de tous ordres. Je ne referais rien de ce que j’ai fait. Dans les choses que j’ai faites, je rejette presque tout. Qu’est-ce que vous ne rejetez pas ? ce n’est pas le moment d’y réfléchir. – Je retranscris ces mots avec respect et dans la prière, c’est tout autre que triste. C’est le risque de l’humanité, c’est a contrario la preuve que l’esprit, l’Esprit Saint sont décisifs. Qu’est-ce que la souffrance mentale ? Les intermittences. Il n’a pu revenir à terre, au présent qu’à la vue de ma chère femme, venant me reprendre après son temps d’enseignement, les prénoms lui étant tout à fait présents. Interrogation inutile ? sa foi, la piété qui demeure, sont-elles une aide ? il ne les mentionne pas, en disserte encore moins. Il a d’ailleurs toujours été explicatif du fond, jamais démonstratif de lui-même, 
C’est dans cette ambiance qu’avant le déjeuner et après la messe, toujours si émouvante – ces rangs de fauteuils roulants, derrière deux-trois lignes de prêtres à la tête et aux mains pour la plupart tremblantes, mais aubes et étoles – je regarde-écoute le pape François s’adressant au Parlement européen. Présentation désastreuse (comme en audience générale sur la place Saint-Pierre, il y a un mois, regardée déjà ici). Lecture, les yeux baissés, pas même le « prompteur » (orthographe) offert par les Américains à JC, de Gaulle apprenait par cœur, pouvait donc rencontrer les regards ou en donner la sensation, et à la force du texte s’ajoutait, la décuplant, la performance personnelle de mémoire et de présence. Pas même le cadeau à la France et à l’Histoire de l’original en français. C’est de l’italien, et c’est l’Europe vue de l’extérieur. Paul VI au Mont-Cassin avait admirablement suggéré les structures plus encore que la mission à notre cher Vieux Monde. Maintenant, c’est une Europe priée de se changer, mais l’Eglise elle-même n’a-t-elle pas à faire en elle-même et pour sa propre mission une telle investigation,, sa mûe et sa réinvention ?.. Ce n’est pas dit. Ce n’est d’ailleurs jamais dit : l’échange entre le monde et l’Eglise, à égalité de péché, d’humanité et de devoir. Mais je reconnais que les formules fortes et neuves abondent. Cependant, quel texte du Vatican depuis que les sites informatiques permettent de les lire en remontant jusqu’à Léon XIII, n’est pas excellent. Je crains que ce qui est déjà présenté comme une « visite-éclair », quatre heures, n’ait pas d’impact. Il me semble, mais c’est bon, que les voyages en ambiance d’Islam et de stratégie, l’Albanie il y a peu, la Turquie bientôt, sont plus soignés, plus vivants.
Un numéro de La Croix, celui de la veille, m’apprend la mort d’Emile Poulat. Je n’ai fait que l’entrevoir à un colloque sur la sainteté à Vannes. Excellent et posé. Couple très uni à table, je n’ai appris qu’ensuite sa fécondité et aussi son parcours initialement sacerdotal. Le papier rappelle son œuvre considérable. Une œuvre qui correspond exactement au point où se trouve l’Eglise de France, et dont j’ai essayé d’écrire au cardinal Barbarin, comment je le ressens.
. . . à la piscine, Aquagolfe de notre village, 18 heures 40 + Route de retour de Saint-André tout à l’heure avec notre fille, puis maintenant de chez nous pour arriver ici… je dis la visite du Pape à Strasbourg. Marguerite me demande s’il a dit la messe, s’est recueillie dans la cathédrale que nous aimons en trinité et fréquentons à égalité avec la paroisse de son baptême. Réponse : non. Elle se scandalise, c’est un prêtre d’abord, il doit dire la messe et aller prier. La politique, certes, mais ce n’est pas un président de chrétienté, c’est un chrétien et il doit faire attention aux gens. Je ne lui donne pas tort. Mais lui résume le message de ce matin, et lui explique que Jean Paul II, lui, avait alors fait toute une visite en France, au moins de l’Est. Et qui n’était pas politique : réunion avec les prêtres d’Alsace, les évêques de Lorraine. Elle ne voit pas pourquoi le pape, la chrétient feraient de la politique. Je lui dis le message de ce amtin : s’occuper des peuples fragiles et des personnes fragiles, ce qui requiert force et tendresse. Cela et le diagnostic d’une Europe fatiguée et vieillie, n’a jamais été dit, alors que c’est vérité et programme. C’est Marguerite qui a le mot : final et juste. L’Europe, c’est une famille.

Des faits divers, du remplissage.Préparant ma note de synthèse : Mars-Décembre 2014, je classe. Les dires de Nicolas Sarkozy, ses X « retours » depuis qu’il a été battu, ses variations vis-à-vis de la manif. pour tous ou sur l’Europe. Le côte-à-côte : lui et le président régnant, traités à égalité par les hebdomadaires. En réalité, il y a une différence. Hollande est légal, même s’il n’est plus légitime pour une écrasante majorité de Français, mais Sarkozy ne peut se prévaloir d’aucune légitimité, aucun fait ou acte de son quinquennat ne transcende et relativise sa défaite électorale. Invoquer devoir et capacité ne regarde que lui. – A Londres, Valérie Trierweiler fait un tabac.


[1] - Apocalypse de Jean XV 1 à 4 ; psaume XCVIII ; évangile selon saint Luc XXI 12 à 19

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