vendredi 6 juillet 2012

François Bayrou . lettre aux amis - 2 juillet 2012

Chers amis,

L’année 2011-2012 aura été une année chargée : la longue campagne de l’élection présidentielle, puis les élections législatives auront représenté pour nous autant d’engagements et de défis.
Le résultat de l’élection présidentielle (3 millions 300 000 voix et 9,2 % des suffrages), s’il n’a pas été à la hauteur de toutes nos espérances, a été cependant honorable. Mais les élections législatives ont été particulièrement difficiles. Je veux féliciter Jean Lassalle et Thierry Robert qui ont su forcer le destin, dans les Pyrénées-Atlantiques et à la Réunion, et rendre hommage aux candidats valeureux qui ont réalisé en moyenne un score de 3,3 % dans les quelque 400 circonscriptions où nous les soutenions. Pour ma part, comme vous le savez, au terme d’une triangulaire, j’ai été battu par la candidate PS.
Notre Conseil National a débattu de cette situation samedi. Je veux vous dire après une telle année et en cette veille de vacances, mon analyse et ma conviction.
Et d’abord vous dire ma détermination. Les combats que nous avons menés ont été des combats justes et les Français ne tarderont pas à s’en apercevoir. Je les assume tous.
C’est une grande fierté pour moi que d’avoir, sur tous les sujets, et depuis des années, dit la vérité à notre pays. Je continuerai à la dire. Dans quelques mois, devant l’évidence de la situation, nos concitoyens se poseront, de manière brûlante, cette question de la vérité.
Vérité sur le bilan du pouvoir précédent : le rapport de la Cour des Comptes, rendu public hier, met en lumière une fois de plus la gravité de la situation de notre pays ; et les chiffres du chômage, ceux de la croissance, ceux du commerce extérieur, vont dans le même sens.
Et vérité sur la situation réelle de la France sous la responsabilité du nouveau pouvoir. Chaque jour, le gouvernement annonce les coupes les plus sévères dans la dépense publique. C’était inévitable. Mais ce n’était pas annoncé. Les Français vont mesurer, dans leur propre vie, la distance entre les mots et les faits, entre les promesses et la réalité.
Dans peu de temps, ils regarderont le passé proche en se posant la question : « qui nous a dit la vérité quand il était encore temps ? ». Et ils sauront que nous ne nous sommes pas dérobés.
Ils n’ont pas suivi la proposition que nous leur faisions. Mais ils l’ont entendue, je le crois. Ils ne l’oublieront pas quand l’heure de vérité sera venue.
C’est en tout cas la confiance qui m’anime. Je sais et nous savons tous l’ampleur des changements que la France va devoir conduire : la crise obligera à repenser nos cadres de vie habituels. Si elle veut éviter le péril des extrêmes, il lui faudra se rassembler. J’aiderai à cette prise de conscience et à ces rassemblements.
Président de notre mouvement, en charge des grandes orientations, je m’adresserai à vous et à nos concitoyens sur tous les sujets essentiels.
Car il est des sujets qui vont devenir brûlants. La grande question européenne va exiger des réponses inédites. On voit bien que tous les dirigeants buttent sur une absence de vision de ce que peut être demain la vraie nature d’un tel ensemble, de sa gouvernance, et de ce que doivent être ses vrais périmètres d’action. C’est d’une vision nouvelle que nous aurons besoin. Je souhaite contribuer à cette réflexion.
C’est aussi vrai de la question de la relance de la production, de la défense des PME, de notre modèle social, de la place du travail, de l’avenir de l’intégration, de la refondation à concevoir de l’éducation, de la maternelle au collège de France. Je m’exprimerai sur ces sujets.
Mais je n’ai pas l’intention, dans les quelques mois qui viennent, de participer en première ligne aux affrontements et aux polémiques. J’ai la certitude que les déclarations sur l’actualité immédiate seront désormais moins éloquentes que les faits. C’est la réalité qui sera le juge de paix des débats du pays.
Chaque fois que l’actualité l’exigera, les vice-présidents de notre mouvement, Marielle de Sarnez, Jacqueline Gourault, Jean-Luc Bennhamias, Jean-Marie Vanlerenberghe, Robert Rochefort et Jean Lassalle, et notre porte-parole Yann Werhling occuperont cette première ligne, et ce sera avec pertinence et talent.
Des questions d’organisation se posent pour le MoDem. Il faut les identifier et les résoudre. La préparation des élections à venir, notamment des élections municipales, impose une méthode nouvelle pour repérer, ville par ville, et aussitôt que possible les personnalités, dans nos rangs ou proches de nous, à soutenir et à aider. J’ai demandé à Marc Fesneau de former une équipe de « quadras » pour conduire cette réflexion et faire à notre mouvement des propositions pratiques pour changer et améliorer notre vie commune. Vous pourrez participer, directement, à cette réflexion.
Il est un débat stratégique dans nos rangs qu’il faudra conduire jusqu’à sa conclusion.
Certains pensent que notre vocation, maintenant qu’une majorité nouvelle est en place est de nous rapprocher d’elle le plus vite possible.
D’autres, constatant nos difficultés électorales, plaident pour une réorientation au centre-droit.
Et nous sommes nombreux à penser au contraire que la bipolarisation dans laquelle on voudrait à toutes forces nous enfermer est une mauvaise chose pour la France, même si elle paraît provisoirement triompher.
Ce débat mérite d’être conduit avec sérieux et respect mutuel. En tout état de cause, ce débat dépend aussi de l’évolution des forces politiques autour de nous.
L’indépendance, ce n’est pas le refus des alliances. Mais je vous le dis avec certitude, la condition sine qua non de toute alliance, c’est l’existence et donc l’indépendance.
L’indépendance, c’est aussi la condition du dialogue. J’en donne ici l’assurance : si le dialogue est possible avec les courants politiques proches de nous ou compatibles, organisés ou inorganisés, nous sommes prêts à ouvrir ce dialogue avec eux. Cela vaut pour tous ceux qui se réclament des mêmes valeurs ou de valeurs proches des nôtres, qu’ils soient sur notre droite ou sur notre gauche. Car ma conviction est que le jour venu, tous ceux-là devront se rassembler pour participer au redressement de la France.
Les mois qui viennent vont être des mois de débats entre nous, à travers tout le pays. Chacun pourra s’exprimer. Nos moyens financiers vont être limités, bien sûr. Mais notre dévouement, notre engagement, notre imagination ne le seront pas.
Avec l’alternance au pouvoir, une période s’est achevée. Une nouvelle ère commence. Les solutions d’hier vont apparaître insuffisantes et inadaptées. Il va falloir que les Français réinventent un nouveau modèle pour la France et pour l’Europe. Devant ce défi, parce que nous sommes plus libres que d’autres, nous serons en première ligne.
Vous pouvez compter sur moi. Et je vous le dis avec la même franchise : j’ai besoin de vous, besoin de votre présence et de votre soutien.
Vous savez ma fidélité et mon amitié.

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