Dimanche 13 Juillet 2008
Un sommet pour la gloire ?
ou une Union ? mais pour quoi ? ou pour qui ?
Prier… la belle mais énigmatique phrase d’Isaïe, une puissance divine qui est conséquente mais passe par les voies et les événements les plus naturels : la pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, pour donner la semence au semeur et le pain à celui qui mange ; ainsi, ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission. Démonstration d’une physique bien assimilée pour l’époque, finalité de la parole divine, rôle si éminent de celle-ci que c’est déjà, en schéma, le rôle du Verbe dans l’histoire humaine et celle de la rédemption [1]. Jésus donne les clés, simples, de son enseignement, il le situe dans la psychologie de ses auditeurs. La parabole du semeur donne la typologie de ceux-ci mais le Christ en ajoute une seconde, les disciples sont privilégiés parce que toutes explications leur sont données certes, mais surtout parce qu’ils sont autour de Lui à la place et dans l’époque tant souhaitée et désirée par les prophètes et les justes. Jésus parlant du lac, il a été observé que la voix porte sur l’eau, une foule immense se rassembla autour de lui.. Les deux images publiques du Seigneur, la prédication, la mort en croix. C’est simple et apparemment désespéré, alors que la création aspire de toutes ses forces à voir cette révélation des fils de Dieu, car la création a été livrée au pouvoir du néant, non parce qu’elle l’a voulu, mais à cause de celui qui l’a livrée à ce pouvoir. Pourtant elle a gardé l’espérance d’être, elle aussi, libérée de l’esclavage. Nous en sommes là… dans les douleurs d’un enfantement qui dure encore. Memento des vivants et des morts, il y en a tant dans nos cœurs, et nous sommes dans quelques cœurs, nous aussi, ce matin.
Faire s’accorder Israëliens et Palestiniens, en sorte que deux Etats coexistent, à peu près sur le même territoire et dans la même économie – projet de quinze ans déjà… projet de cet après-midi encore… réussite éventuelle commandant le sort de tant de minorités palestiniennes dans les Etats arabes voisins, et changeant tous les clivages qui font de la nation arabe un puzzle manipulés par tous, y compris les dictateurs nationaux… Désintéresser la Syrie du Liban, ce qui rendrait celui-ci à l’indépendance et peut-être à ses anciens équilibres si la diaspora surtout chrétienne revenait dans l’ancienne Suisse du Moyen-Orient, ce qui conduirait aussi à défaire tout argument pour l’Iran ou pour Israël de garder pied dans cette terre initialement si pacifiste… Donner au partenariat euro-méditerranéen – processus de treize ans bientôt – des institutions multilatérales et une priorité que les élargissements de l’Union européenne vers l’est lui avaient fait perdre, à peine engagé… cela ne se réussit pas en vingt-quatre heures ni à la baguette d’un seul maître de l’orchestre à quarante-quatre pupitres, mais si Nicolas Sarkozy y arrive tant soit peu, c’est évidemment à son crédit.
Il s’y est pris comme en tout depuis sa campagne électorale et surtout sa prise de fonctions, révélant une hiérarchie nouvelle de ses traits personnels : au culot, en force, au pari. La méthode a fait fiasco pour presque tout, puisque le traité de Lisbonne ainsi repris de la Constitution, moins l’esprit de celle-ci (qui était tout, on s’en rend compte maintenant) ne peut – tel quel – entrer en vigueur quand des Etats-membres le refusent ou rechignent. Sur la scène intérieure, le récital a continué sans désemparer mais la popularité a disparu, la confiance à terme aussi et les votes au Congrès de révision constitutionnelle vont manquer. Cet après-midi est donc une nouvelle épreuve d’une vieille méthode. Le président français a été aidé par une grande mansuétude de ses homologues européens : il est le seul à oublier qu’il invente l’eau tiède ou le fil à couper le beurre puisque tout ce qui peut gêner ou achopper cet après-midi ou d’ici le rendez-vous plus opérationnel de Novembre, a déjà été essayé, rodé depuis la conférence de Barcelone en Novembre 1995. Et que beaucoup fonctionne et que ce n’est nullement la première fois qu’avec les Européens, les Arabes s’asseyent à la table où est venu Israël.
Par huit ans d’enseignement universitaire, et beaucoup d’anciens élèves depuis… 1972 et des amis maghrébins et sahariens depuis… 1966, je crois assez bien connaître ce processus de Barcelone – dont Nicolas Sarkozy n’avait guère été avisé quand il a sorti sa première mouture d’Union méditerranéenne. Il a été heureusement suppléé par un travail à l’Assemblée nationale française, dessinant des institutions, des alternatives, et des contours, suivant une excellente méthode : évaluer ce qui existe, remédier aux lacunes que tous reconnaissent. Et la France a dû admettre que l’Union à mettre sur pied ne pouvait être distincte de l’Union européenne ou en constituer une réplique.
Voici l’état des lieux.
Le partenariat euro-méditerranéen a été un relais aux relations coloniales entretenues par quelques Etats-membres avec la rive sud, essentiellement la France, et dans une moindre mesure l’Italie. Avantage pour l’Union européenne : marquer sa compétence en relations extérieures ; avantage pour la France : mutualiser l’effort financier et les concessions commerciales.
Il a été élaboré, par la commission à l’époque de Jacques Delors, et doit beaucoup à un commissaire espagnol remarquable, Matutes. Pour beaucoup, il devançait et équilibrait l’extension vers l’Est de l’Union européenne du fait de l’implosion soviétique.
Succès diplomatique considérable : Israël et les pays arabes sont assis à la même table. Politique aussi : le réseau de gestion par les hauts-fonctionnaires compétents dans la discrétion et très efficace. Les trois « corbeilles » : politique & sécurité ; économie & concours financiers ; social, culturel & humain – sont rtemplies et leur gestion fonctionne. D’autres acteurs, non étatiques, publics ou privés : sociétés civiles, associations, fondations, villes, régions sont parties prenantes et se sont d’eux-mêmes imposés. Les institutions multilatérales sont leur fait alors que les Etats ne sont pas même parvenus à établir un secrétariat commun.
Mais trois déceptions : la propension des entreprises du nord à investir au sud, pourtant la plus grande proximité de l’Europe, est la plus faible, comparée aux autres régions du monde ; la question de Palestine n’est pas réglée et le partenariat euro-méditerranéen n’y contribue guère ; les objectifs de démocratisation et de réelle hausse du niveau de vie au sud ne sont guère atteints. Il faut donc concentrer imagination et moyens sur ces sujets permanents.
A ces problèmes s’ajoutaient l’absence de structures multilatérales, la Charte rédigée dans les dix-huit mois de la conférence de Barcelone, jamais examinées formellement, encore moins adoptée. Une base juridique constituée par des traités bilatéraux de consultations politiques et surtout de libre-échange à terme, soutenus par diverses aides, dans l’esprit de la mondialisation décidée par la création de l’Organisation mondiale du commerce. Une pratique : des conférences des ministres des Affaires étrangères, tous les deux ans, des conférences ministérielles nombreuses pour les domaines particuliers. Des initiatives de villes portuaires ou en lien avec la mer Méditerranée, et des parlements nationaux. Une fondation prestigieuse du nom de la ministre suédoise des Affaires étrangères assassinée, et bien située, Anna Lindt : à Alexandrie là où s’est refondée la bibliothèque de Manéthon. Les parlementaires français ont su proposer au président de la République les institutions qui manquaient à l’ensemble, les partenaires de la France, et l’Allemagne décisivement, ont imposé la présence à la réunion de tous les Etats membres de l’Union et pas seulement des seuls riverains européens de la Mer Méditerranée.
Faire s’accorder Israëliens et Palestiniens, en sorte que deux Etats coexistent, à peu près sur le même territoire et dans la même économie – projet de quinze ans déjà… projet de cet après-midi encore… réussite éventuelle commandant le sort de tant de minorités palestiniennes dans les Etats arabes voisins, et changeant tous les clivages qui font de la nation arabe un puzzle manipulés par tous, y compris les dictateurs nationaux… Désintéresser la Syrie du Liban, ce qui rendrait celui-ci à l’indépendance et peut-être à ses anciens équilibres si la diaspora surtout chrétienne revenait dans l’ancienne Suisse du Moyen-Orient, ce qui conduirait aussi à défaire tout argument pour l’Iran ou pour Israël de garder pied dans cette terre initialement si pacifiste… Donner au partenariat euro-méditerranéen – processus de treize ans bientôt – des institutions multilatérales et une priorité que les élargissements de l’Union européenne vers l’est lui avaient fait perdre, à peine engagé… cela ne se réussit pas en vingt-quatre heures ni à la baguette d’un seul maître de l’orchestre à quarante-quatre pupitres, mais si Nicolas Sarkozy y arrive tant soit peu, c’est évidemment à son crédit.
Il s’y est pris comme en tout depuis sa campagne électorale et surtout sa prise de fonctions, révélant une hiérarchie nouvelle de ses traits personnels : au culot, en force, au pari. La méthode a fait fiasco pour presque tout, puisque le traité de Lisbonne ainsi repris de la Constitution, moins l’esprit de celle-ci (qui était tout, on s’en rend compte maintenant) ne peut – tel quel – entrer en vigueur quand des Etats-membres le refusent ou rechignent. Sur la scène intérieure, le récital a continué sans désemparer mais la popularité a disparu, la confiance à terme aussi et les votes au Congrès de révision constitutionnelle vont manquer. Cet après-midi est donc une nouvelle épreuve d’une vieille méthode. Le président français a été aidé par une grande mansuétude de ses homologues européens : il est le seul à oublier qu’il invente l’eau tiède ou le fil à couper le beurre puisque tout ce qui peut gêner ou achopper cet après-midi ou d’ici le rendez-vous plus opérationnel de Novembre, a déjà été essayé, rodé depuis la conférence de Barcelone en Novembre 1995. Et que beaucoup fonctionne et que ce n’est nullement la première fois qu’avec les Européens, les Arabes s’asseyent à la table où est venu Israël.
Par huit ans d’enseignement universitaire, et beaucoup d’anciens élèves depuis… 1972 et des amis maghrébins et sahariens depuis… 1966, je crois assez bien connaître ce processus de Barcelone – dont Nicolas Sarkozy n’avait guère été avisé quand il a sorti sa première mouture d’Union méditerranéenne. Il a été heureusement suppléé par un travail à l’Assemblée nationale française, dessinant des institutions, des alternatives, et des contours, suivant une excellente méthode : évaluer ce qui existe, remédier aux lacunes que tous reconnaissent. Et la France a dû admettre que l’Union à mettre sur pied ne pouvait être distincte de l’Union européenne ou en constituer une réplique.
Voici l’état des lieux.
Le partenariat euro-méditerranéen a été un relais aux relations coloniales entretenues par quelques Etats-membres avec la rive sud, essentiellement la France, et dans une moindre mesure l’Italie. Avantage pour l’Union européenne : marquer sa compétence en relations extérieures ; avantage pour la France : mutualiser l’effort financier et les concessions commerciales.
Il a été élaboré, par la commission à l’époque de Jacques Delors, et doit beaucoup à un commissaire espagnol remarquable, Matutes. Pour beaucoup, il devançait et équilibrait l’extension vers l’Est de l’Union européenne du fait de l’implosion soviétique.
Succès diplomatique considérable : Israël et les pays arabes sont assis à la même table. Politique aussi : le réseau de gestion par les hauts-fonctionnaires compétents dans la discrétion et très efficace. Les trois « corbeilles » : politique & sécurité ; économie & concours financiers ; social, culturel & humain – sont rtemplies et leur gestion fonctionne. D’autres acteurs, non étatiques, publics ou privés : sociétés civiles, associations, fondations, villes, régions sont parties prenantes et se sont d’eux-mêmes imposés. Les institutions multilatérales sont leur fait alors que les Etats ne sont pas même parvenus à établir un secrétariat commun.
Mais trois déceptions : la propension des entreprises du nord à investir au sud, pourtant la plus grande proximité de l’Europe, est la plus faible, comparée aux autres régions du monde ; la question de Palestine n’est pas réglée et le partenariat euro-méditerranéen n’y contribue guère ; les objectifs de démocratisation et de réelle hausse du niveau de vie au sud ne sont guère atteints. Il faut donc concentrer imagination et moyens sur ces sujets permanents.
A ces problèmes s’ajoutaient l’absence de structures multilatérales, la Charte rédigée dans les dix-huit mois de la conférence de Barcelone, jamais examinées formellement, encore moins adoptée. Une base juridique constituée par des traités bilatéraux de consultations politiques et surtout de libre-échange à terme, soutenus par diverses aides, dans l’esprit de la mondialisation décidée par la création de l’Organisation mondiale du commerce. Une pratique : des conférences des ministres des Affaires étrangères, tous les deux ans, des conférences ministérielles nombreuses pour les domaines particuliers. Des initiatives de villes portuaires ou en lien avec la mer Méditerranée, et des parlements nationaux. Une fondation prestigieuse du nom de la ministre suédoise des Affaires étrangères assassinée, et bien située, Anna Lindt : à Alexandrie là où s’est refondée la bibliothèque de Manéthon. Les parlementaires français ont su proposer au président de la République les institutions qui manquaient à l’ensemble, les partenaires de la France, et l’Allemagne décisivement, ont imposé la présence à la réunion de tous les Etats membres de l’Union et pas seulement des seuls riverains européens de la Mer Méditerranée.
On en était là en milieu de journée quand tout le monde est entré au Grand-Palais.
[1] - Isaïe LV 10.11 ; psaume LXV ; Paul aux Romains VIII 18 à 23 ; évangile selon saint Matthieu XIII 1 à 23
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