lundi 16 juin 2008

Inquiétude & Certitudes - dimanche 15 juin 2008

Dimanche 15 Juin 2008
Vitry-le-François : comprendre ?
People, le spectacle depuis toujours, mais le niveau littéraire en baisse nette
Savoir-faire diplomatique : réaction au vote irlandais, refus algérien et libyen de l"Union pour la Méditerranée
Le secrétaire général des Nations Unies : l'homme de l'avenir

Prier donc … servez le Seigneur dans l’allégresse, venez à lui avec des chants de joie ! Le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les coupables que nous étions. Accepter de mourir pour un homme juste, c’est déjà difficile ; peut-être donnerait-on sa vie pour un homme de bien. Or, la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous éions encore pécheurs. La lignée de nos pères dans la foi, ces conciles des premiers siècles, établissant, d’inspiration et selon le décisif Esprit saint, les canons de nos viatiques et installant chacune de nos icônes qui baliseront nos vies, nos existences humaines. Une foi qui n’est pas d’abord une expérience ou un morale, encore moins des recettes, bien qu’elle les recèle toutes, une foi qui est le rappel et l’assemblage de faits, la déduction d’unelogique, qui est le paraphe même de Dieu dans l’Histoire de la création. Un retour de Dieu à son travail de création des « premiers jours et nuits ». Nous mettons notre orgueil en Dieu, grâce à Jésus Christ notre Seigneur, qui nous a réconciliés avec Dieu. Ce dialogue dont au Paradis, après notre péché de convoitise mentale, nous avions eu peur au point de nous cacher aux heures de l’habituelle venue de Dieu, est repris, à l’initiative de celui-ci. Où es-tu ? J’ai eu peur. Génie de Jean Paul II, la phrase entendue à son arrivée à notre tête, peut se lire autrement qu’à l’époque – qui fut : n’ayez pas peur de ce que nous vivons et allons vivre, je le lis aujourd’hui : n’ayez pas peur de retrouver Dieu… Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, chassez les démons. Nous sommes tentés de répliquer : facile à dire, mais à faire ? Le malade, qui souffre à chaque mouvement qu’on lui fait faire, nous apprend, dans son sourire et par le mutisme dont il me prévient, que c’est possible, puisqu’il le vit lui-même : Dieu se sert tout, diagnostique sur lui-même et sur nous, notre frère spirituel. Il exauce, en lui, ce que nous demande le Christ : Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. C’est en conclusion de cette demande aux hommes, que Jésus l’exauce, l’exécute lui-même : alors, Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir de … y compris celui-là même qui le livra. Et tout s’accomplit ainsi, nous le savons : vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte. L’Histoire réconciliée, même si le péché est au cœur de toute la relation humaine à Dieu, jusques dans les détails de la vie du rédempteur, il y a encore le ver dans le fruit, et dans la moindre de nos pensées d’hier, de cette nuit, et d’aujourd’hui. Priez-nous pauvres pécheurs. [1]

Vitry-le-François… est-ce Villiers-le-Bel ? La police et les pompiers ne semblent intervenir que pour séparer des groupes rivaux, la drogue ou l’argent ayant probablement supplanté l’amour comme pomme de discorde et facteur de haine, West side story. Là, place-forte, commandement militaire séculaire, vieille ville et ses canaux mais la constitution – sui generis – d’une périphérie très différente d’habitat et de peuplement, pour ne pas écrire plus crû. Nous sommes aujourd’hui à une époque où tout se paye, et cela devenir comptant. Toutes les erreurs de gestion collective qui s’amortissaient, se palliaient, se compensaient autrefois et jusqu’à il y a peu encore, se révèrent aujourd’hui belligènes, dès qu’il y a nombre. En revanche, les situations individuelles que les solidarités anciennes soulageaient, se règlent dans le désespoir, et le silence. Il y a les sans-papiers, il y a la condition des filles et des femmes, cela fait manifestations et manifestes, mais les familles et les solitudes, sans le sou ? Violences donc des « jeunes », et en « bande organisée ». Pendant cent cinquante ans, la France connaissait la mort violente du fait des guerres vêcues comm guerres franco-allemandes, et plus aventureusement les entreprises coloniales. Il y avait l’héroïsme et les décorations, on souffrait mais l’on comprenait, les guerres, surtout coloniales (qui à leur époque respective évidemment n’avaient pas cette qualification, aujourd’hui péjoratives) posaient des cas de conscience. Jaurès les a parfaitement résumés à propos notamment du Maroc. Cas de conscience plus aigüs encore que le débat sur l’opportunité politique ou la morale de telles entreprises : la torture en Indochine, en Algérie. L’abbé Pierre, député de 1945 à 1951, posa la question par écrit…[2]au gouvernement. Les débats intimes de certains appelés, les grands témoignages de Michel Rocard, publié sous *** par Le Monde, ou de Jean-Jacques Servan-Schreiber. Mais les banlieues et les périphéries, les morts infligées entre jeunes par balle ou à l’arme blanche, et bien entendu les voitures brûlées et les magasins saccagés ? la gare du Nord à Paris, il y a un an, chroniquement pendant plusieurs semaines. Aurefois, c’était grave mais d’une certaine manière circonscrit, la société, les valeurs dominantes, les hiérarchies-mêmes n’en étaient pas entamées. Aujourd’hui, on ne comprend pas, sinon que l’on ressent notre fragilité collective. C’est périlleux aussi bien dans la cause de ce sentiment public, que dans l’effet. Le débat – qu’a prétendu trancher l’élection de Nicolas Sarkozy – est bien la confiance en nous… nous ne l’avons guère, modèles étrangers à tout propos, de l’organisation des classes maternelles à l’allemande et la flexi-sécurité de l’emploi à la danoise, à un imaginaire modèle américain, libéral, capitaliste qui ne fonctionne nulle part… nous ne puisons plus en nous-mêmes. Ce ne serait pas moderne !

Michel Serres réfléchit sur la vague de « people » et ne la date pas d’aujourd’hui. Le spectacle a toujours fait partie de la grande histoire et de la politique, de la société. L’Odyssée, le genre époque, la tragédie classique, l’organisation du spectacle de la cour de notre Ancien Régime. Ds ces époques, deux niveaux, le grand monde, avec des chroniqueurs pour s’en moquer, le duc de Saint-Simon, et à la ville le monde, les gens, sinon le demi-monde voire le petit monde qui ont leur Balzac. La chose ne change pas, mais cest la littérature qui est beaucoup moindre. Pourquoi un lectorat et des spectateurs aujourd’hui ? parce qu’en politique comme en sports, ce n’est pas la chose-même qui passionne, mais qu’il soit répondu à la question : qui va gagner ? Le Paris-Saint-Germain, l’O.M. ? la gauche ? la droite ?

On pouvait s’interroger, je m’interrogeais sur la capacité et déjà certains résultats de la diplomatie de Nicolas Sarkozy – essayant d’être sans précédent ni sans a priori dans des matières qui pourtant sont presqu’entièrement faites de précédents, de jurisprudence e que façonnent l’histoire plus encore que la géographie et même l’argent. Il me semble que l’on a la réponse. En tout cas, je constate que dans deux directions où le président régnant s’emploie beaucoup, il y a manifestement mauvaise méthode et de tristes résultats à très court terme.

Traitement de la question d’Europe et vote irlandais par referendum. Première réaction, parler d’une seule voix avec Angela Merkel, ce qui a requis plusieurs heures, pour conclure qu’il faut continuer les ratifications, instruction et de quel droit ? aux Etats qui n’ont pas encore ratifié ? Le dire franco-allemande ne convainc pas : la Tchéquie, chez qui pourtant se trouve le Président, et la Grande-Bretagne surtout sont perplexes. Le président de la Commission assure que le traité n’est pas mort. Seconde réaction française, Jean-Pierre Jouyet, l’expert et qui a monté l’ordre du jour de la présidence française, est effondré parce qui vient de Dublin : l’Europe ? non, le calendrier français, sinon la « stature internationale » de son maître. La réalité est qu’on n’avancera plus avant les élections au Parlement européen, l’an prochain, que celles-ci auront un sens qu’elles n’avaient jamais eu auparavant, et vont désigner – de fait, sinon de droit – une assemblée constituante. L’initiative française devrait être de pressentir et donc de dire, puis soutenir ce mouvement, et d’en appeler la conclusion : le referendum européen, sur un texte repris à zéro et selon l’expérience de la désaffection des peuples. Tel que s’est montré Nicolas Sarkozy sur le sujet et sur les procédures depuis treize mois, ce n’est pas ainsi que cela va se passer. L’Europe au niveau de ses dirigeants, est sans autorité morale, et sans charisme. L’interdiction de la pêche au thon rouge en Méditerranée occupe davantage. Succès et prophétisme de qui ?

Union pour la Méditerranée, le sigle trop proche en français de celui du parti présidentiel, est mal trouvé. Discussion au Liban et en France sur l’invitation qu’il fallait ou pas lancer à Bachar El Assad, le syrien. Pourparlers trop tributaires avec celui-ci des réactions de l’opinion française, et toujours Claude Guéant dans la haute diplomatie. Le conseiller diplomatique est tout aussi déplacé. Le représentant personnel du président de la Rtépublique fran,çaise, à l’étranger, est l’ambassadeur de France qu’il a nommé et qui y est accrédité. Je ne regrette plus de ne pas exercer encore cette haute (et passionnante) fonction. L’important n’est pas là : refus de la Libye, alors qu’l y a eu ce fameux voyage de Muammar Khadaffi chez nous, et avec tant de cadeaux verbaux et de déploiements divers. Et surtout, refus de l’Algérie. Le prétexte israelien n’est pas tout, c’est la forme-même du projet qui paraît en recul avec les acquis mentaux de la décolonisation. Le processus de Barcelone économe de grands textes multilatéraux existe, la question israëlo-palestinienne ou israëlo-arabe le freine mais ne l’empêche pas, on se voit, on se parle, on avance sans fanfare, mais des habitudes ont été prises, aux niveaux de l’efficacité. D’emblée – faute d’information ? – le candidat relayé par le président de la République l’a méprise et offert la table rase. Une commission ad hoc de l’Assemblée nationale a réécrit le projet, donnant de la chair au lyrisme d’Henri Guaino, lu fidèlement à Tanger et à Constantine. Depuis, si le projet finalement arrive au jour, la Commission l’a totalement repris. Succès et autorité de qui ?

Ban Ki Moon ne sera pas un secrétaire général médiocre ou inefficace. La crise pétrolière a peut-être trouvé son médiateur – dans la conversation du sud-coéren avec le roi Abdallah. La capacité et l’autorité de celui-ci sont en revanche anciennes et proverbiales, indépendamment de son accession pas très ancienne au trône saoudien. J’écoute la thèse de Frédéric Ancel, elle est réaliste. Seul souci de l’Amérique et de l’Arabie, l’Iran. Le shah n’était pas moins ambitieux que les maîtres actuels : une civilisation aussi ancienne que celle de la Chine, et ayant sa continuité à peu près sur le même territoire – ce qui caractérise aussi l’Empire du milieu – ne peut pas ne pas être fière, et donc ambitieuse, ce qui ne signifie pas forcément une expansion territoriale mais des objectifs forts et dérangeants pour les tiers si ceux-ci se croient supérieurs en morale et en technique... (gage fréquent de cécité politique). Capacité militaire, politique et nucléaire d’un Etat musulman qui a ses coreligionnaires dans l’ensemble de la région où les guerres et le « terrorisme » ont un fondement dit religieux. L’Arabie a les plus fortes réserves d’ « or noir » et des liquidités en dollars (mais combien en euros ?) fantastiques. L’augmentation de 200.000 barils/jour d’une production de quelques neuf millions, diminuera-t-il le prix sur les marchés internationaux ? et donc les rentrées de devises en Iran ? Evidemment, Israël et Abdallah sont objectivement solidaires contre l’Iran. Faute que l’Union européenne soit restée sur la ligne d’il y a un an, le secrétaire général a légitimement pris le rôle, au pied levé – il est vrai qu’il peut se fondeer sur l’Agence internationale de l’énergie atomique et son chef El Baradeï. Je n’avais pas vingt ans quand Dag Hammarksjoeld est « tschombé » du ciel katangais [3]: il se perdit alors quelque chose, quelque chose qui alors n’était pas le « machin » caricaturé par le Général dans les premières années de sa présidence, mais plus par la suite, au contraire. En cela, pour nous qui cherchons aujourd’hui une organisation de la démocratie mondiale, laquelle postule un chef visible, avons perdu quarante-sept ans déjà.


[1] - Exode XIX 2 à 6 ; psaume C ; Paul aux Romains V 6 à 11

[2] - 1949… demande à interpeller sur la publication faite dans la presse de récits d’atrocités attribuées aux troupes françaises engagées dans les combats d’Indochine et sur les mesures par lesquelles le Gouvernement entend, soit mettre fin à l’atrocité de telles publications, si leurs affirmations, qui jettent sur l’honneur français, une honte intolérable, sont fausses, soit rendre définitivement impossible le renouvellement de tels crimes si, par malheur, ils devaient être reconnus vrais, J.O. – D.P., p. 3738

[3] - jeu de mot du Canard enchaîné, puisqu’il apparut aussitôt que l’avion du secrétaire général des Nations unies se rendant en médiation à Elisabethville, a été « descendu » par des engins faisant feu du Haut-Katanga gouverné alors par un gouvernement provincial sécessionniste du reste du Congo ex-belge : à sa thèse, Moïse Tschombé

Aucun commentaire: