vendredi 29 août 2014
courriel à l'Elysée - la ligne du temps
----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: Jean-Pierre Jouyet, secrétaire général de l'Elysée
Sent: Friday, August 29, 2014 9:30 AM
Subject: matinales
Cher ami, Monsieur le Secrétaire général,
il y a la bulle politique dans laquelle - en gros depuis 1997 et une mûe des comportements des politiques et des dirigeants économiques - sont entrés aussi le MEDEF et les syndicats de salariés : elle n'est que débat sémantique et génére des thèmes intéressants, des vocables mais qui deviennent des combats et toute l'occupation d'apparence nationale. Les Français y sont étrangers et la réalité n'est pas mieux comprise, saisie ni travaillée. Ces thèmes ne sont pas "idiots" : mariage pour tous, responsabilité partagée, nombre et coûts des collectivités territoriales et ainsi de suite, mais le pays piétine et aucun résultat dans le registre ressassé et que nous nous imposons : la macro-économie, le chômage, n'est ni ne sera enregistré en positif. Ce ne sont d'ailleurs que des marqueurs. Au comptoir du café ou à la caissse des supermarchés, le débat est plus adulte, surtout davantage vécu qu'à la télévision ou en séminaire gouvernemental (tels que ceux du mois d'Août dont Le Canard rapporte des bribes édifiantes et désastreuses).
Le fond qui commence d'ailleurs d'être analysé par l'étranger (et qui tend à nous faire devenir une nouvelle Grèce au sens calamiteux et non en référence à Périclès) est notre perte de confiance en nous-mêmes. Je crois d'ailleurs que nous sommes à l'étape suivante du processus de dépression : l'inertie, la léthargie. Ni révolte sociale, ni imprécation de quelque prophète de la synthèse.
Il nous manque l'énergie et le discernement. Les moyens en sont communs. Schématiquement :
- un inventaire de notre patrimoine résiduel (matériel et intellectuel) et un examen des causes et des étapes de sa dilapidation ou de son obsolescence
- causes, étapes et affectations de notre endettement public (il est contradictoire de répéter que nous sommes un grand pays, la 5ème puissance du monde... selon quels critères d'ailleurs ? et que nous vivons au-dessus de nos moyens depuis quand ? des décennies ?)
- laisser-aller français dans la direction de l'entreprise européenne depuis Maastricht (alors que d'une part nous avions en 2005 aussi bien l'avantage que la Constitution VGE était la nôtre que celui du vote négatif nous mettant en situation d'imposer la suite à peine de sécessions mutliples - et que d'autre part avec nos nationaux à la tête du FMI, de la BCE et de l'OMC nous avions tous moyens d'être la pensée et la proposition pour chacune de ces instituions qui encadrent presque tout)
- non vigilance en démocratie et en cohésion sociale : notre soutien à des régimes illégitimes en Afrique d'expression française, la jeunesse sans le point de passage et de mixité, d'utilité générale que peut être un service universel militaire et civique pour garçons et filles - Je prends au sérieux le décalage entre la logorrhée sur la parité hommes-femmes qui, au gouvernement, notamment n'apporte aucun sang nouveau, et sur les regards que portent les jeunes filles sur notre monde (le fait divers porté à l'écran, dix-sept filles et les mineures djihadistes). - Et tout autant, le manque de vocation à l'enseignement, les 7.500 postes budgétés et non pourvus pour cette rentrée scolaire
- la planification quinquennale, les commissions et concertations du Plan resituant les discussions et contestations dans un ensemble et non seul des thèmes et des combats
Les dirigeants économiques d'apparence ne se consacrent pas à l'invention technique et à la prospection des marchés. Tenue de l'actionnariat et croissance externe en tiennent lieu. Le MEDEF est en pleine idéologie et nous cherchons à lui plaire dans ce regsitre. Le retour à la croissance n'est pas affaire de climat international ou d'énièmes textes nationaux, il est la ressource humaine affectée à l'innovation technique (et non financière),à la connaissance des marchés domestiques et étrangers, au suivi de nos contrats et positions acquises. Fabius (qui eût été bien mieux à Bercy comme au début des années 80 alors Rivoli ou à la fin des années 90) a sorti le bon chiffre en séminaire gouvernemental : part française du marché mondial en 1988 = 6,3% et en 2013 = 3,2% ... je répète de mémoire). . Non qualité des actuels au patronat, que ce soit le MEDEF ou les grands groupes ou dans la banque, relativement au CNPF de Villiers, Huvelin et Ceyrac.
Les dirigeants politiques - depuis le second revers de la gauche en 1993 - ne gouvernent plus et ne se meuvent plus (s'ils sont dans l'opposition) qu'en fonction de l'élection présidentielle. La place à l'Elysée éclipse toute autre dans la vie publique, ce qui est une erreur totale : un grand ministre, s'il est durable ou répétitif en fait plus quel que soit le régime. C'est vécu aussi dans les collectivités locales.
Il faut que le Président devienne un autorité morale et un garant d'une perspective réfléchie. Sans se cramponner à quoi que ce soit d'autre que la reprise des esprits dans notre pays. Je crois le Président vraiment détaché de sa fonction et de son éventuelle réélection : il ne candidatera, j'en suis sûr, que selon un bilan en conscience de ce qu'il aura fait. Les institutions et cette appropriation intime de notre situation nationale plus encore au mental qu'au pratique, lui donne une liberté qui doit être, à présent, silence, recul, communication rare et économe ne disant que le travail intime, la consultation réfléchie ... certainement pendant plusieurs mois.
Il peut en sortir une autorité morale chez nous, et par cette adhésion ressentie et mesurable, une nouvelle position de la France en Europe. Supplier d'être dégagé de ce à quoi, si imprudemment, nous avons consenti dès le soir du 15 Mai 2012, sans examen véritable et en considération mal notre liberté de manoeuvre donnée par le suffrage universel. serait indigne et inefficace. Il va nous falloir transférer le débat du macro-économique à la politique, aux institutions, à la démocratique directe dans l'Union. Nous ne l'emporterons pas et n'avons plus aucun titre à être convaincant sur le terrain actuel. Cela doit mûrir, se réfléchir, se consulter. C'est possible.
Il nous faut sortir de ces enfermements thématiques et de ces échéances quinquennales. Voir autrement, en histoire et en âme. Le jardin et le potager seront de nouveau bien cultivés. Le poème d'Europe, en façon française, réintéressera un monde actuellement piteux ou sanguinaire. Nous sommes des rares à continuer de penser Europe et monde, surtout quand nous savons penser français. Les jeunes générations veulent raffoler, pas plancher ou imiter des précédents gris et foireux, les nôtres en ce moment. L'idéologie de la gestion et le critère de réussite par l'argent individuellement perçu ont cru effacer la nostalgie du ciel et la pression du temps. La réalité le conteste autant que tout esprit neuf.
Bonne journée, cher ami. Voeux de force, de long terme, de libre ré-examen pour le Président.
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