Vendredi 13 Février 2015
Je ne viens à ma lectio divina que maintenant, les urgences de
gestion depuis mon réveil, des fournisseurs et installateurs mettant la clé
sous la porte ou se renvoyant la balle. De Strasbourg, ma chère femme reçoit
des coups analogues, la dérobade des assurances. Capter de la clientèle et
l’abandonner en île déserte. Pratiques commerciales, pas nouvelles, mais ce
qu’est la génération au pouvoir dans l’Etat et les entreprises et qu’avait
préparée un peu la mienne, et qui est nouveau dans notre histoire contemporaine
politique et économique, c’est de considérer l’argent comme critère de
réussite. Il y a encore peu, l’aisance et la fécondité au travail,
l’épanouissement dans ce que l’on faisait dans l’entreprise à quelque degré de
la hiérarchie ou de l’organisation qu’on soit, étaient la vraie gratification.
On travaillait par goût, on aimait son métier. Aujourd’hui, il n’est que
salaire et l’on est le plus souvent que malheureux et inquiet pour l’avenir
dans les entreprises. Et la direction de celles-ci devient occasion de recel.
La mise au jour – le Canard – de l’entente entre General Electric
et la justice américaine pour appâter depuis au moins deux ans Alstom et
les gouvernants (l’entreprise convaincue de fraudes et de corruption), et bien
entendu l’appât s’est défilé une fois la vente opérée. C’est de la trahison. La
brade du patrimoine national est de la trahison, elle se révèle telle par son
motif : l’argent. Judas toujours : le plus familier monnaye son
intimité avec ce qu’il faut capturer. C’est dég…
Fraicheur, rayon boucherie. Départ d’Eric pour la
succursale de LEDRU à Plescop, plus près de chez lui. Ce LEDRU, à l’unique
point de vente place des Lices a commencé dans les années 90 à racheter des
boucheries de villages en difficulté. Voilà de l’entreprise, de père en fils
depuis cent cinquante ans. – Une vieille dame, mal mise et vraiment pas belle,
petite et recroquevillée manipule un lainage en matériau artificiel. Je la vois
si heureuse, rayon lingerie et vêtements de femme, malgré son état physique et
probablement la modestie de ses revenus, que je l’encourage à « se
lâcher » et à acheter ce vêtement dont je crois qu’il lui ira bien. Elle
abonde : le beige clair est sa teinte, et ne me signifie son étonnement
joyeux d’être abordée qu’ensuite. Nous parlons, elle me croit la connaissant
déjà de vue : vous êtes de Billiers, je lui dis que non. Et tout vient,
elle a perdu son mari il y a un mois, 59 ans de mariage, prénom de l’adjudant
de son père à lui, Gervais. Vraiment
disgrâciée, sa fille, et beau, détendu, le petit-fils, grand, Frédéric :
profession, jongleur. Notamment avec Medrano, le tour de France chaque année. Je suis
invité à aller les voir. Ils sont dans l’annuaire. – Et puis l’hôtesse de
caisse, déjà remarquée à sa prise de fonctions, il y a cinq mois, le charme de
Charlotte RAMPLING, lui avais-je dit ce dont elle se souvenait. Elle
s’apparente maintenant à un souvenir bien plus personnel. Travail faute de
mieux. Que veut-elle faire ? elle dit ne pas savoir, puis lâche :
puéricultrice, quoiqu’ayant déjà deux enfants. Elle dit seulement :
assistante, or elle est jolie, a du charme, de la tenue. Comme la distribution
est injuste. La laideur et une sorte d’exhibnitionnisme de tant de femmes au
pouvoir, et plus encore des hommes. – Corinne LEPAGE périme totalement le
gouvernement et Ségolène ROYAL en particulier par l’action qu’elle initie
contre les abus des sociétés d’autoroutes. Il peut y avoir la révolte forte
avec dérouillées électorales, modèle grec et bientôt espagnol, mais il peut y
avoir la révolte du mépris : les citoyens se substituent carrément en
imagination et en savoir-faire aux gouvernants, laissant ceux-ci ratiociner sur
la question de savoir si ou non 1% de croissance crée des emplois. Car ajoute
SAPIN – les deux « personnalités » défaites, mise à nu par ce
quinquennat qui est au total une perte de temps et d’énergie pour le pays, sont
cet excellent ministre d’il y a vingt ans (mais il y avait BEREGOVOY et sa
rectitude) et ce bon débatteur « sous » SARKOZY et Ségolène ROYAL :
tous deux complètement inexistants, parlant à faux, ne terminant rien, voire
gaffeurs – pour vaincre le chômage, il faut créer plus d’emplois qu’il ne s’en
détruit, avec cette chance que nous avons, l’afflux de jeunes du fait de notre
démographie. Diafoirus aux manettes… Même pas le BTS en économie de gestion.
Mais ces rencontres m’enchantent, la vie, la vraie, est relationnelle. Le
regard des autres sur eux-mêmes ou sur la société, si lucide, si tolérant,
souvent si résigné. Il faudra peu pour que se reprenne un mouvement millénaire,
discussion sur la communauté millénaire de destin des Bretons avec les autres
Français qu’aime continuer notre boucher. Qui sait aussi les enfers, le Styx
quand je lui propose une obole pour les débris de viande qu’il stocke en pensant
à nos chiens.
Le jour humide, sans date et sans vent après les trombes de
ce matin et l’orage mouillé de cette nuit… L’Eglise continue de proposer la
parabole et le sens de la Création. Ceux qui n’y voient qu’obscurantisme ou
méli-mélo des cosmogonies du Proche-Orient se privent, à mon avis, de beaucoup
de plaisir intellectuel et d’objets de réflexion, à défaut de pressentir que le
spirituel nous porte à longueur de vie, explicitement – le ressentir est une
grâce, en rendre grâces est une joie – ou implicitement. Alors, Dieu vous a vraiment
dit : « Vous ne mangerez d’aucun arbre du jardin ? ». Avant même d’analyser le dialogue, il faut
s’en pénétrer pour sa justesse psychologique. Le livre de Job est un modèle
d’entretien psycho-thérapeutique, la justesse des attitudes de cœur et d’âme
traduites en psaumes a été et restera un des principaux vecteurs de conversion
à Dieu et sans doute à l’Eglise (liturgie monastique), exceptionnel
« mélange » de souveraineté et de compassion que les dialogues du
Christ avec ceux qu’Il miracule (peut-être même sa dernière apostrophe de
Judas : ce que tu as à faire, et non pas ce que tu veux faire. Nous ne
serons jamais condamnés, si jamais nous devons l’être, ce que je ne crois pas,
pour nos limites et ce que nous subissons de contraintes. Nous le serons, si
nous le sommes, qu’à raison de ce que nous faisons et aurons fait de notre
liberté). C’est en croyant mieux pénétrer les commandements divins, en donnant
à ceux-ci un sens et une motivation, qu’Eve subit l’attrait de ce qui lui
importait si peu auparavant : la femme s’aperçut que le fruit de
l’arbre devait être savoureux qu’il était agréable à regarder et qu’il était
désirable, puisqu’il donnait l’intelligence. La potion magique, le plus
matériel, le plus fétichiste pour le summum de l’esprit, qu’elle croyait ne pas
avoir. De fait…[1]
et qu’obtient-elle ? nullement une vision du monde ou quelque
compréhension suprême de la divinité ou le sens de l’histoire ? alors
leurs yeux s’ouvrirent et ils se rendirent compte qu’ils étaient nus. Connaissance
de soi, de la condition humaine, mais aucun réflexe d’appel à l’aide pour
remédier à leures limites, à nos limites. La fuite… l’homme et sa femme
allèrent se cacher aux regards du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin. Relation
avec l’évangile ? la relation d’Adam et d’Eve avec leur Dieu Créateur est
manquée tandis qu’ils entendirent la voix du Seigneur Dieu qui se
promenait dans le jardin à la brise du jour. La relation de Dieu avec sa
créature, avec l’homme dans le détail de l’incarnation, de la chair, de la
maladie ou des handicaps : Jésus est supplié de mettre la main sur lui
(le sourd-muet). Il fait bien plus et intimement, alors qu’en d’autres
occurrences, Sa parole, comminatoire, suffit : Jésus l’emmena à
l’écart, loin de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, et avezc sa
salive, lui toucha la langue. Processus long, intime. Jésus se donne à fond,
l’homme qu’Il guérit y gagne une extraordinaire densité. Ce dont il échappe,
c’est l’isolement, c’est l’expression de soi, c’est l’approche d’autrui
également impossibles. Qui n’est pas sourd-muet ou « simplement »
mal-entendant ne peut ressentir ce que subit, à longueur d’existence, quelqu’un
d’aspect physique et d’intelligence intacts, mais qui en réunion est exclu, dès
qu’il a été vérifié qu’aucun propos ne lui est perceptible, et qui dans
l’intimité du tête-à-tête doit faire répéter et impose à l’autre de choisir les
mots les plus simples et d’en dire le moins possible. – J’ai eu la grâce de
vivre cette intimité et d’en recevoir une communion de cœur et de corps
inégalée. Il y avait aussi la beauté exceptionnelle et l’amour durable,
auxquels j’ai été inférieur. – Leçon… ainsi, chacun des tiens te priera aux
heures décisives.
Je
suis très hostile à ce contrat d’armements avec l’Egypte de Sissi (quel nom
! pour qui a vécu quatre ans à Vienne ou qu’enfant on revoit le mariage-surprise
du très jeune François-Joseph en film avec Elisabeth, la cadette d’une branche
assez obscure des Wittelsbach, jouée par Romy Schneider…). L’homme, élu seul
candidat après son putsch, a déjà massacré plus que Moubarak et n’a pas le charisme
ni l’envergure de Nasser. Les tyrans d’aujourd’hui : Poutine, Déby, lui ne
sont que des atrophiés d’humanité et ne font pas même courir la grande aventure
à leur peuple. Ils ne connaissent que le maniement d’armes et les geôles
pleines. Nous perdons le droit d’observer son mode de gouvernement et de le
faire réfléchir sur les droits de l’homme. Nous sommes devenus un pays mendiant :
la Chine, le Qatar et maintenant ce régime, nous n’avons aucune conviction et
notre gouvernement ne nous représente pas, nous qui avons ces siècles-ci
inventé à presque chaque génération les droits de l’homme et les révolutions
triomphantes. Sans compter le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, l’auto-détermination
et la participation, chères à de Gaulle. C’est assez logique puisque nos
gouvernants actuels n’ont aucune mémoire de l’espérance sur laquelle ils furent
élus en Mai 2012. – Et évidemment l’Egypte ne paiera jamais. Et évidemment
aussi, nous sommes assurés qu’il n’y aura plus de conflit israëlo-arabe tant
les voisins de la Palestine sont complices de la main-mise de l’Etat hébreu sur
les gens de Canaan.
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