Je reçois ceci d'une collègue - anthropologue enseignant à Paris VIII (ex-Université de Vincennes - expérimentale créée par Edgar Faure au lendemain des "événements de Mai" 1968
De la part d’un ami enseignant
Catherine
J'essaye de récapituler, en vrac.
Je vous demande aussi de balancer au maximum les infos qui suivent autour de vous.
Dans l'Education nationale, Darcos (le ministre) n'a qu'une formule "la réforme, la réforme !"Cela se traduit, dans l'enseignement professionnel, par la préparation du bac pro en 3 ans au lieu de 4 actuellement. Pour faire court, c'est une façon de laisser des élèves sur le carreau et / ou dans la main de patrons qui, eux, complèteront la formation (i.e. formation maison, nécessité du strict bassin d'emploi, précarisation, etc). Il y a eu des grèves chez élèves des lycées pro, on a vu des élèves du pro dans les manifs (enfin, je n'étais pas dans celle d'hier, importante apparemment).Dans certains bahuts du 9-3, c'est un véritable "plan social" qui est prévu sous le nom (tenez-vous bien...) de "Pôle d'excellence". La réalité, c'est paillettes grises et ternes, puisqu'il y aura des heures de cours en moins (remplacés par des aussi vides que pompeux projets - mot phare du consensus UMPS sur la question de l'instruction), des classes surchargées et, donc, plus de 600 postes supprimés sur l'Académie (à Utrillo, 160 heures annuelles sautent ; à Henri Wallon, à Aubervilliers, plus de 170, enfin vous voyez le tableau). Pôle d'excellence, comme label, est donc de l'ordre de l'antiphrase orwellienne.
Il y a eu contre ces projets des grèves (je pense, personnellement, avoir fait plus d'une semaine en jours accumulés - et je serai à nouveau en grève demain pour des raisons que j'expliquerai plus bas). Des grèves de profs, pas énormément suivies sauf, parfois, en des bahuts très localisés (le mien, par ex.) mais surtout des mouvements d'élèves qui, selon la télé d'hier, criaient dans leur dernière manif "Rendez-nous nos profs !"Jeudi dernier, la manif était, en plus de profs, composée massivement d'élèves enfants d'ouvriers, de gens de toutes provenance, de gens de partout, mais du peuple et, spécifiquement, de Seine-Saint-Denis et de la Seine et Marne "pauvre" (Meaux par ex.).
C'était une belle manif, volontaire et déterminée avec, passez-moi l'expression, des gens réels.
Le mouvement côté profs a connu ensuite un coup de mou. 1 semaine de grève, je le reconnais, ça calme les ardeurs d'autant qu'à mon avis, la seule chose qui est en jeu, c'est notre honneur et l'honneur des lycées des banlieues populaires. En plus, il y a le souvenir de 2003 (un trimestre de grève et des retraits de salaire conséquents comme vous pouvez l'imaginer).
Côté élèves, la fortune du mouvement a été différente selon les bahuts. Gros blocages au lycée Paul Eluard à St-Denis, par ex. tandis qu'à Utrillo, l'administration a menacé les élèves, un CPE à la botte a même molesté un (ou des) élève(s) pour les forcer à rentrer et, enfin, la BAC (oui, la Brigade Anti Criminalité !) est venue mercredi il y a deux semaines pour aider l'administration !Aussitôt, nous nous sommes remis en grève (nous, des profs) et ce, au lendemain de la grève "nationale" du 18 mars et jusqu'au vendredi inclus. C'est lors de ces 4 jours consécutifs qu'eut lieu la belle manif du 20 mars.Ensuite, et de façon consécutive à la pression de l'administration (appel aux parents, menaces de sanctions graves contre les élèves bloqueurs et / ou grévistes), il y a eu un reflux du mouvement avec occupation(s) du lycée hyper minoritaire(s) laissant penser à un pourrissement.Malgré tout, les élèves ont manifesté dans Saint-Denis (ils étaient fiers d'être passés à la télé !) puis, une dépêche Reuters parlant du caractère crescendo du mouvement a relancé l'énergie des élèves. Mardi (avant-hier, donc), le lycée était bloqué comme à la veille des vacances et lors de la rentrée. Là aussi, grosse violence (aussi réelle que symbolique) du proviseur (ex-PS) et de ses sbires (un P"C", président de l'ANACR (!!!) et un conseiller municipal PS de Stains) mais les élèves se sentant plus forts ont assez bien tenu le coup.En AG des profs, la grève n'a a pas été votée et les élèves sont allés manifester...
Hier soir, deux élèves du lycées étaient en garde à vue pour "outrage à agent", en vérité parce qu'elles ont été témoins de violences de la BAC dans le métro contre des lycéens manifestant, que l'une d'entre elles a filmé la scène avec son portable et que l'autre a appelé les types de la BAC a cessé leurs violences (ci-joint, l'extrait du mail d'une collègue : je suis allée au commissariat de gare du nord puis de gare de lyon avec Amélie et Rébecca (quand j'ai dit à Colas que je partais voir les élèves enfermées,il m'a dit: vous avez des élèves?); elles nous ont vues, on afait plein d'interventions, etc...finalement elles sont sorties; demain, il faudrait faire un communiqué rien que sur ce qui leur est arrivé pour protester contre la répression). Je précise du reste que la semaine dernière, déjà, des élèves ont passé plusieurs heures au commissariat.Les deux élèves arrêtées comparaîtront bientôt et nous (profs) avons décidé d'être en grève ce jour-là mais également demain 1/ pour aller manifester avec les élèves et 2/ pour marquer notre ras-le-bol, au sein du bahut, contre l'administration qui se sert des pions du bahut pour fliquer les profs et vérifier s'ils prennent bien leurs élèves.
Deux choses essentielles :IL Y A UN VERITABLE MOUVEMENT LYCEEN POPULAIRE CONTRE DARCOS (ET SARKOZY) ET IL EST LARGEMENT TU MEDIATIQUEMENTIL Y A EN CE MOMENT ET CONTRE UNE PARTIE DE LA JEUNESSE POPULAIRE UNE VIOLENCE DE L'ETAT VIA SA POLICE (des gaz lacrymo et des flashballs auraient été utilisés devant un lycée à Gagny (93), à vérifier).
Complément :
A la station Vanneau, vers 16h30 environ, les policiers en civil ont soudainement stoppé la rame, saisi des manifestants qui étaient sagement en train de rentrer chez eux, les ontfrappés, traînés hors du wagon, puis menottés, mis à terre et tabassés copieusement. Un des garçons ainsi frappés vomissait et perdait du sang. Plusieurs autres passagers se sontindignés de ces pratiques. Une de nos élèves a eu le réflexe de filmer avec un téléphone mobile. Une autre est sortie en demandant aux agresseurs de cesser, fussent-ils policiers,puis en demandant aux passagers de sortir avec elle pour s'interposer. Alors que les portes se refermaient, cette élève ainsi qu'une de ses camarades qui la tenait par le bras ontété tirées hors du wagon par les policiers, tandis qu'un autre était repoussé dans le wagon, qui a démarré.Les deux jeunes filles, dont une seule est majeure, ont été placées en garde à vue au commissariat de la gare du Nord.
vendredi 4 avril 2008
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