Jeudi
30 Janvier 2014
Me suis
à nouveau endormi sur ce clavier puis m’effondrant au lit, « fou »
de fatigue, après une journée de stress, de stérilité et de démarches de
gestion, mon journal en témoigne : totalement incohérent. Trop de morts
dans nos vies, nos chers chiens et maintenant, tutélaire et pacifiante, ma
chère belle-mère. L’offrande de larmes tellement discrètes, venant à la
glissade des yeux, la tête de profil sur l’oreiller, notre fille qui me
demande, comme tant de fois à propos de sa naissance, comment s’est passée la
mort de sa grand-mère, comment l’on peut mourir ? Les questions sur
l’injustice et les questions sur la manière. Je réponds avec la tendresse et la
douceur, la sensation si forte de communion qu’elle, la petite-fille, et sa
grand-mère que je vénère, me donnent. Elle a donné sa vie pour son mari, pour
ton grand-père. Elle s’est arrêtée de respirer, elle nous avait attendus, nous
sommes arrivés d’ici, de loin, fatigués, bien accueillis par un infirmier puis
une chef. Elle nous attendait sans bouger. Nous sommes restés. Et dimanche,
elle nous attendait à nouveau. La bouche avait été bien fermée, soignée, elle souriait
presque quand elle a été bien habillée, tandis que nous étions sortis un
moment, avec ta Maman pour aller ses vêtements, le pantalon marron que tu
connais et un joli chemisier chandail. Comment as-tu su ? qu’elle allait
mourir. Les choses importantes, on ne les sait pas, on ne les apprend pas, on
les ressent, c’est comme cela que j’ai su. Notre fille écoutait et s’endormait.
Elle n’avait aussitôt pensé qu’à son grand-père, quand dans les circonstances
que j’avais suggérées, des courses alimentaires, mère et fille, au village pour
le voyage en train, elle a appris. Un téléphone d’ailleurs de notre ami
restaurateur, père d’une de ses amies de Strasbourg, appelait ma chère femme :
organiser, convenir pour après la messe. Vertige que la vie désormais et depuis
deux décennies, progressivement, inexorablement ? celle de mon beau-père,
désormais central. Sa femme, ma belle-mère, la mère de ma femme, de mes beaux-frères
nous paraissait centrale : c’est qui ? c’est qui ? quiva prendre
la relève, balbutiement de plusieurs heures pour le plus jeune de mes
beaux-frères, vivant à demeure chez ses parents ou tout comme, un étage à monter
ou à descendre, une vie conjugale de dix-huit mois, Marguerite me reprend quand
je dis un an. C’était il y a presque trente ans. Il dit mieux que nous
l’effondrement de l’étai, de la portance. Depuis plusieurs années, grabataire,
aphasique, même la main gauche a tout perdu, la moue, le regard restent seuls,
et toute la santé et la capacité de vivre encore des années. Quelle vie intérieure ?
quelles pensées, quelle conscience ? d’autres attentes que nos visites,
forcément espacées, rares, lui donner à manger, être là, ne toujours pas lui
dire que sa femme… De ce vertige que portait, sans fléchir apparemment, que
physiquement, ma chère belle-mère nous avait dispensés. Nous voici avec ce
fardeau, à plein.
Evidence
que les fins de vie sont devenues un problème énorme psychologiquement dans
tant de familles, et économiquement pour le pays, le financement, l’aide à la personne. Un gouvernement
qui ne résoud pas la vie sociale, le droit au travail, l’éminence du facteur
travail dans la production, l’évidence que la consommation suppose des salaires
et que les salaires ne sont pas une rétribution de subsistance mais la
rétribution d’un apport…. Un gouvernement qui ne garantit pas, ne maintient pas
la dignité et les chances de s’accomplir de chacun au plus fort de sa vie et de
sa biologie, un gouvernement qui n’a pas la légitimité et la science du succès
économique, social, financier de la vie courante et nationale, l’a-t-il pour
légiférer sur ce qu’il y a de plus délicat et qu’il faut rendre consensuel
textuellement, des textes serviteurs et non des textes amoindrissants, qui abaissent
le pays à se discuter lui-même… un tel gouvernement ne peut traiter ces sujets,
puisqu’il ne répond pas d’abord à sa mission, qu’il ne replit pas son devoir
d’état . J’incline de plus en
plus à penser que ce doit être le dialogue entre patients, médecins et
familles, éventuellement avec l’arbitrage ou la sanction du juge, des juges,
mais des textes généraux ? pour des cas particuliers ! et dans une
société et une époque sans mémoire ni repères ? ce n’est pas discuter la
gauche, le gouvernement, le président comme beaucoup, les haïr comme certains,
c’est constater.
Notre pette
fille avec laquelle je vais passer la journée de train, qui me donne hier soir
quand je cherche la housse de sa tablette, me donne le conseil : ne pense
pas sans cesse à cela, ne te le répète pas, cela va devenir plus important que tout
le reste, Papa. – Elle m’apprenait par ses questions, elle m’apprend désormais
directement comment vivre…Hier soir, leçon de choses. Confier notre chien le
plus remuant, puisque ne voyageant pas en voiture, nous devons le laisser ici,
le reste de la meute, sédentaire ne fait pas problème et les visites de Franck
pour les croquettes, l’eau et aussi pour Boule-de-neige et le rythme de ses
médicaments anti-épilepsie suffisent. Mais Fonzy peut sauter les grillages de
notre chenil. SIMON qui l’avait capturé il y a trois ans quand il venait faire
le sabbat ou le « ram’dam » autour de son propre chenil, accepte de
le prendre dans un de ses « casiers », nous l’y plaçons tout à
l’heure avec Finette, sa soeur comme compagne. Vous venez me demander un
service. Je savais l’homme dur mais pas forcément hostile, au contraire de tout
notre voisinage, plus immédiat physiquement il est vrai. Demander un service,
soit ! Il consulte sa femme plus du regard que d’une phrase. Elle présente
bien, leur maisonnette est nette, ils travaillent tous deux : des
enfants ? pas là.. Elle souvent de nuit, infirmière, lui dans le
camionnage, je ne me souviens plus bien. Les bois où il chasse sont de l’autre
côté du rentrant de mer et de marais qui fait frontière pour nous. Qu’est-ce
que vous me donnez en échange ? Une battue aux sangliers. C’est carré, ce
n’est pas agréable, mais c’est sûr. Les relations internationales sont cela, si
elle sont comprises et pratiquées. Nous n’en avons plus que l’enveloppe avec du
baratin et des conférences de presse commune, sans contenu. La confiance n’est
pas a priori, elle vient après l’échange. ADENAUER à Colombey : 1958. La
fondation fut là, ni le traité ni le rite. Impossible avant ces guerres, qui
n’étaient pas échanges. Après cela tient. J’accepte. On discute un instant des
deux équipes et GIC de chasseurs, rivales, peut-être un jour mortellement pour
les droits et les battues, ici. Le fond de presque tous les « rapports
humains » dans ce pays est dominé par cette passion-addiction des hommes.
Les femmes jugent, regardent, se taisent. L’écrivant ce matin, après l’avoir
vécu dans la pénombre, et ayant passé devant les deux « casiers »
voisins, des biggles, aussi, gentils et petits, je perçois l’immense distance
entre cette réalité, ces vies – partout chez nous, en France concrète et quotidienne
– qui ont leurs analogies avec des passions autres, mais des passions, des
couples ayant d’autres généalogies et métiers, mais en ayant cela d’une part
qui est nous, qui est la France aux mémoires, aux exploits, se transcendant de
temps à autre mais étant foncièrement ces gens : travail, addictions,
couples, habitat… et les magazines, les décors, les commentaires, exhibitions,
décryptages. Les Match avec SARKOZY puis HOLLANDE, les faux couples de la montre, les titres
à rapprocher d’une année sur l’autre qui se répètent bêtement, supposant le
lecteur amnésique ou se contredisent..La politique-feuilleton n’abaissant plus
que ceux qui sont sur les images et la vie de tous. Je comprends que pour les
prédateurs en tous genres, c’est du gateau. Toute la vie censée publique et
faire un cadre pour la vie privée, n’est plus qu’à côté des réalités qu’elle
abîme et ignore. Et l’intimité de la mort qui a noué ses écharpes et jeté ses
capes sur nous depuis des semaines, et la vérité simple que donne notre fille,
en émotion, en larmes si fines, si belles, si transparentes, illuminées de
reflets, ornant soudainement ses yeux.
Prier
maintenant et toujours. Avancer dans la confiance, les yeux bandés ? mais
dans la confiance, je suis guidé, aimé, et ma femme, notre fille, nous
avançons… et le paysage est beau ou rendu beau, ainsi. [1]. Faites attention à ce que vous entendez ! Le sérieux de notre existence, des versions
que nous donnons à la vie quand nous la pratiquons et en bénéficions. Des
paroles d’une dureté, d’une logique qui effrayent, celle-ci qui m’a toujours
paru un résumé implacable de l’expérience humaine en presque tous
« domaines » : Celui qui a recevra encore, mais celui qui
n’a rien se fera enlever même ce qu’il a. La
phrase précédente explique-t-elle cette conclusion du Christ ? La
mesure dont vous vous servez servira aussi pour vous, et vous aurez encore
plus. Je ne retiens que la confiance dont
Dieu m’a envahi ces jours-ci plus encore que d‘habitude. La propension à donner
et à prier en est le gage. Sauvés ? condamnés ? dépouillés ?
qu’importe et qu’y puis-je ? seules mes aimés, pour ce qui est du salut,
du bonheur, m’importe. Car moi ? mais tout est limpide, si dans mon
impuissance, dans nos limites et ambivalences à tous, nous avons la confiance,
et celle-ci nous ne la décrétons pas, nous la recevons. Tous :
nus devant Dieu. La confiance et l’assurance viennent de cette vérité. Car
rien n’est caché, sinon pour être manifesté ; rien n’a été gardé secret,
sinon pour venir au grand jour. … Seigneur, c’est toi qui es Dieu, tes paroles
sont vérité, et tu as fait cette magnifique promesse à ton serviteur. David, de bonne volonté, s’est fait
éconduire par son Seigneur, ce n’est pas lui qui construira la maison de Dieu,
le Temple, mais c’est le Seigneur qui va construire sa maison, sa dynastie et
en fait la dialectique de toute la rédemption à travers une généalogie humaine.
Tu as fait d’Israël, de nous, de
chacun de nous, de nous tous, en toutes époques et civilisations, tu as
fait d’Israël ton peuple pour toujours, et toi, Seigneur, tu es devenu son
Dieu. Le destin de chacun de nous un par
un, quand nous le comprenons, et cela finit par nous être donné, quand nous le
regardons chez ceux/celles qui nous sont proches, que nous aimons, le destin de
notre fille aimé, précieuse plus que je ne puis le dire et que nous ne
l’imaginons même : regarder l’amur de Dieu en celles et ceux que nous
aimons. Le voir, le sentir, le comprendre et en bénéficier à notre tour,
reflet, ricochet, vase débordant, vie. – J’essaye de me relire par égards pour
ceux à qui j’envoie quelques-unes de ces lignes et pensées, un peu de ce que je
reçois et viens de transcrire : faute de saisie fréquente, j’écris ailé pour aimé.
après-midi
Le
franco-allemand : la SNCF et son bilinguisme sur le trajet Paris-Est Stuttgart hbf pour notre destination d'Alsace. Merkel et le
modèle Schröder, selon Die
Welt. Or, c’est elle qui a battu ledit
Schröder. Mais celui-ci semble prendre une revanche par un livre de critique
précise et pas seulement des mémoires. Chez nous, on attend toujours le livre
de Sarkozy… Un Antillais ou un Africain passe des rafraichissements ax
voyageurs « internationaux » ; je lui demande s’il est Français
ou Allemand, je lui fais plaisir et il répond : Français.
Le
pape, « personnalité de l’année 2013 » selon Time…
Il n’est pas plus sympathique qu’un autre et pour l’image qui ne peut faire
peuple et social que si l’on croit que les visages dans le « peuple »
sont communs et guère beaux… il n’a pris comme décision que de s’entourer de
neuf cardinaux, régulièrement réunis, son encyclique reprenant sans doute et à
raison beaucoup des premiers jets de Benoît XVI n’est pas percutante… et la
fibre sociale, donc, qui apparaissait dans ks premiers mois est maintenant bien
moins évidente que le retour à la vieille bataille du droit à la vie et de la
déense de la famille censément menacés par des gouvernants mal-intentionnés et
païens. François suit ses troupes, et ses troupes sont des intégristes, plus proches
de la haine, surtout quand la plateforme est plausible, que de l’amour. Donc la
recherche de la persécution et pas la contagion de l’amour.
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