jeudi 7 novembre 2013

changement de signe 05 - fiction politique - chapitre 3



Changement de signe


« premier jet » d’une fiction politique
voir aussi http://lireecrire.blogspot.com  littérature : notes de lecture & écrits inédits



Chapitre 3


Le Président de la République
à Monsieur le Premier ministre


Dimanche matin, le 20 … 201…

Mon cher Premier ministre,

je vous confirme ce dont nous sommes convenus à mi-mot, tout hier, et surtout hier soir à la suite de notre moment télévisé ensemble.

Il n’y a pas de changement de gouvernement. Il y a choix du cap national et européen de la France. Il faut cependant que nous adaptions le gouvernement et notre organisation à ce choix, qui nous est dicté par ce que nous entendons des Français. Ce sont eux nos pédagogues, et non pas nous les leurs. Le gouvernement doit donc être d’écoute, et mettre en place ce que cette écoute nous prescrit.

Nous sommes, vous et moi, les seuls à travailler en équipe depuis mon élection. Trop nombreux, les ministres – le voudraient-ils – ne le peuvent pas.

Veuillez restreindre le gouvernement aux strictes responsabilités dites régaliennes de l’Etat (défense, relations extérieures, économie et finances, solidarité sociale, culture et transmission du savoir aux sens les plus larges) et choisir sans considération d’élection ou pas des personnalités aptes à commander nos administrations centrales et à consulter nos compatriotes dans les domaines dont vous les chargerez. L’administration et le contrôle du budget seront directement rattachés à vous, quitte à ce que vous désgniez un secrétaire général ou un ministre délégué auprès de vous. Le ministre de l’Economie et des Finances ne doit pas s’absorber dans la comptabilité ni dans la fiscalité : celles-ci sont l’affaire de tout le gouvernement.

Le temps n’est plus à l’affichage, aux pistes, aux propositions ni aux fonds de tiroir. Nous sommes sous la pression d’une prise de conscience des Français. Notre devoir est de leur permettre au plus vite de donner le meilleur d’eux-mêmes, quelles que soient leurs positions sociales, leurs générations, leurs origines et même leur statut au regard de notre nationalité.

Vous présenterez au Parlement notre nouvel ensemble au Parlement dès mercredi prochain, l’ après-midi à la suite du conseil des ministres. Vous y exposerez aussi l’échéancier des premières réunions pour l’élaboration du prochain plan de développement avec tous les acteurs économiques, sociaux, culturels et financiers, qui ont été de tradition depuis la Libération ou qui sont apparus à l’évidence depuis quinze ans qu’a été supprimé ces dédcisives institutions et procédures. Le nom du Commissaire général au Plan, dont l’administration sera rattaché à vous, devrait s’imposer pendant ces premières délibérations que vous présiderez.

Notre pays attend effectivement d’être libéré des entraves et du manque d’audace, d’imagination et d’écoute dont mes prédécesseurs immédiats et moi-même pendant ces dix-huit premiers mois d’exercice du mandat qui m’avait été accordé avec tant de confiance et de maturité, avons malheureusement administré la preuve.

Cettre lettre n’est destinée qu’à vous.

Je saisis cette occasion, mon cher Premier ministre, pour vous redire ma confiance et la reconnaissance.


19/…/201… à 10:55
Deux lettres du président de la République aux responsables allemands

Le Premier ministre vient d’atterrir à Berlin. Il a été chargé par le président de la République de deux lettres à remettre et à commenter aux responsables allemands. Le texte en est réservé aux destinataires.


Journal du Président

Au palais, en fin de matinée du dimanche 20… 201...

La machine est en route, l’administration, la production de textes n’ont jamais cessé de fonctionner chez nous. Mon épistolier, travaillant un moment à exposer la posture de cinq Français vis-à-vis de l’Allemagne [1] depuis la Grande Guerre – ce qui me donne l’idée pour lui donner une première marque de ma considération de le charger de m’écrire quelques interventions pour le centenaire de ce conflit dont personne n’est plus capable de dire de quoi il a été le fondateur, à défaut d’être cause de beaucoup chez nous et dans le monde – a dit, à titre d’exemple de cette persévérance de nos mécaniques qu’à la fin de Juillet 1944, en commission allemande d’armistice, palais d’Iéna, on discutait et convenait du montant mensuel que la Banque de France allait verser en fin de journée au titre des frais d’occupation.

Pour ce soir, je reviens une dernière fois chez Arte, ensuite les télévisions viendront me « prendre » ici, j’inviterai en surprise une ou un des nouveaux ministres ou le commissaire au Plan ou quelque correspondant dont la lettre et les suggestions ou réactions m’auront retenu. C’est l’aléa de cette boîte à lettres du président de la République : physique ou virtuelle. M’écrire est dispensé de timbre-poste. Je reçois beaucoup, sans doute autant que mes prédécesseurs. On a publié des lettres d’enfants au général de Gaulle et les quelques cinquante mille lettres – c’est ce qu’il m’a été dit – adressées à Colombey ont été répertoriées et analysées à l’époque. Quoi donc me parvient ? comment tout lire ? Je fais publier maintenant deux lettres qui constitueront le thème de mes vingt minutes tout à l’heure. J’ai refusé que l’on cherche un nom ou un sigle à ces émissions, mais je les vis comme un moment entre l’Histoire, les Français et moi, leur président du moment. Président par raccroc.

J’ai répété en campagne que je m’étais préparé, que j’étais prêt. Jeudi 7 Novembre 2013 –  15 heures 20 à 16 heures 45 Les Français n’y ont pas prêté attention. Il était surtout dit que je n’avais aucune expérience gouvernementale, qu’indirecte, veillant le Parti tandis que Lionel Jospin à qui j’avais succédé, se préparait – lui déjà – depuis Matignon à entrer à l’Elysée, selon tout probabilité. Moi, il y a juste deux ans, j’étais l’improbable. A quoi étais-je prêt ? à la victoire électorale, mais ensuite ? le plan était bon, aller à Berlin et motiver notre refus du traité budgétaire que je n’avais pas négocié et que je n’aurais pas voulu. Dater certes notre retrait d’Afghanistan mais faire évoluer la relation euro-atlantique en quittant de nouveau l’O.T.A.N. cette fois non pas pour « hégémonisme » américain, mais pour obslescebce d’un système qui est devenu mondial et qui peut préfigurer une nouvelle forme de sécurité collective. A tous. Je ne l’ai pas fait, on a ressorti des crédits communautaires « non consommés » et j’ai propagandé la farce qui m’était joué, un pacte de croissance. Réédition du coup fait à Lionel Jospin au Conseil européen d’Amsterdam dans les deux mois de notre victoire électorale. J’ai fait étudier les avantages et les inconvénients de sortir ou de rester : la question de l’O.T.A.N. a surtout été l’occasion pour l’ancien ministre des Affaires Etrangères que j’avais chargé de m’argumenter, de faire valoir à ce poste. Il était déjà pourvu.

Depuis deux jours me voici enfin prêt. Je me suis entendu dire avant-hier et hier soir ce que j’étais incapable de dire quand je suis arrivé ici,  même si je l’avais pensé, ce qui était pourtant fugitivement le cas. Ce qu’a cru mon épistolier, selon ses premières missives à mon entrée en fonctions : j’ai fait ressortir son dossier. Cocasse, il y avait aussi ce qu’il écrivait à Jacques Chirac et qui avait été systématiquement détourné par Dominique de Villepin, ce que – selon un double – admis un des directeurs du cabinet ensuite. Les archives de mon prédécesseur ont disparu, et parce que ses œuvres complètes sur le site de l’Elysée étaient d’un entretien informatique payé à une officine privée, je les en ai fait retirer. Mesquinerie ? il a fait détruire toutes les lettres qui me furent adressées – à ses bons soins – entre le soir de mon élection et le matin où il a quitté ces lieux.

Fonctionner ? Oui, le mouvement inverse du bouche à oreille. La culture atavique de notre pays, le bon sens de mes compatriotes, le peu que je commence à savoir des usages et des gens pour en conclure que ces manières avancent peu les questions et ne permettent pas les décisions ni ici ni entre amis européens. Prendre du temps pour projeter et pour voir, après avoir entendu de toutes parts. Il va me falloir trouver où marcher et quand réfléchir. Avec Héro, ensemble, nous allons bien. Mais seul ? qui dois-je affronter en moi. Je me suis révélé aux autres, aux Français, à moi-même : obstiné. Je ne mesure pas la justesse de ce que d’autres ont qualifié d’immobilisme à l’aune de mon impopularité. Elle ne me gêne pas personnellement. Mais rien ou presque de ce que j’ai décidé et de ce que je maintiens si tant est que ce sont des orientations, n’a prise sur la réalité, ne provoque les esprits et ne remédie à nos situations. Je crois que je suis – tout bonnement – sorti de moi-même et me consacre depuis quarante-huit heures à une fonction de service. Non plus de présidence ou de chefferie. Responsable de tout médiatiquement comme il a été justement observé pour mes prédécesseurs et maintenant pour moi, du fait des techniques et des habitudes de la communication de masse. Responsable constitutionnellement ? oui, selon les formules du général de Gaulle que Gaston Defferre avait reprises à son compte pour candidater selon l’esprit alors nouveau et rejeté par François Mitterrand et surtout par Pierre Mendès France. C’étaient des questions de cours en faculté et à Sciences-Po. Comprendre une époque, correspondre à un peuple, les faire se rencontrer pour qu’un morceau de la collectivité mondiale avance et peut-être entraine le reste de la planète humaine, c’est cela ma fonction présidentielle, n’est-ce pas ?

Je crois que Héro va faire un bon travail à Berlin.

Jeudi 7 Novembre 2013 –  18 heures


19/…/201… à 11:05
Deux lettres du président de la République aux responsables allemands (2)

Le Premier ministre vient d’atterrir à Berlin. Il a été chargé par le président de la République de deux lettres à remettre et à commenter aux responsables allemands. Le texte en est réservé aux destinataires. Il semble cependant que M. Héro va préciser à la Chancelière allemande où veut en venir son partenaire français et lui proposer la matière et le calendrier d’une relance eurropéenne souhaitée à Paris comme aussi fondatrice que la déclaration Schuman. Il devrait rencontrer aussi le président du S.P.D. qui a de bonnes chances de devenir vice-chancelier dans le gouvernement de grande coalition si celui-ci se constitue finalement.

Un commentateur de la radio bavaroise observe que les propos tenus ces deux derniers soirs par le président français ont tellement rencontré les souhaits du S.P.D. même peu exprimés dans la campagne de ce parti, qu’ils étaient en train d’empêcher l’accord de coalition avec les conservateurs C.D.U. Ce serait donc au Premier ministre français, parfait germanisant, de faire aboutir cet accord.

Le paradoxe s’était déjà rencontré il y a plus de quarante-cinq ans quand l’ancien chancelier Adenauer avait fait mettre en minorité son successeur Ludwig Erhard pour « gaullophobie ». Les Français avaient provoqué le premier gouvernement de grande coalition chez leurs voisins allemands, celui de Kurt-Georg Kiesinger et Willy Brandt.

19/…/201… à 11:10
Un couple franco-anglais s’adresse au président de la République à la suite de ses déclarations sur Arte

La présidence de la République communique, sans en citer les signataires, le souhait laissé sur la messagerie du site de l’Elysée, par un jeune couple franco-anglais, éleveur de chevaux en Normandie.

Citation – Monsieur le Président, il dépend de vous que l’Angleterre se mette sincèrement à l’œuvre européenne. Vous êtes en train de définir l’obligation et les moyens de la solidarité monétaire et fiscale entre Etats-membres, qu’ils participent ou non à la monnaie unique, et vous suggérez une politique industrielle unique pour l’ensemble de notre cher Vieux Monde. N’oubliez ni l’agriculture ni aucune de nos spécificités à chacun. C’est notre pluralisme qui fait de nous tous ensemble la seule partie de la planète vraiment démocratique et où les Etats ne sont aux mains ni des financiers ni des dictateurs. Parlez, agissez. Nos gouvernements suivront. Nous croyons enfin que l’Europe a toujours été le terrain de culture de tous les métissages de toutes les sortes. Avancez et faites avancer. – fin de citation

19/…/201… à 11:12
Une élève d’HEC, en stage de gestion d’un fonds éthique et solidaire, pose la bonne question à son grand ancien

Lettre déposée cette nuit dans la boîte de la rue de l’Elysée, sous la fenêtre des chambres à coucher présidentielle. Se présentant comme débutante en gestion de portefeuilles éthiqu et solidaire, la jeune élève d’H.E.D. dont le président Effach est également diplomé, pose en deux phrases la question des capacités financières françaises. Le pays n’a plus la capacité de ses services publics ni d’investissements conséquents, donc d’une relance autant par l’équipement que par une consommation en partie libérée fiscalement. Comment y remédier ? les apports étrangers, notamment des « monarchies pétrolières » sont-ils une chance pour la France ou une main-mise sur le peu qu’il lui reste ?

En publiant cette lettre, comme la précédente, la présidence de la République précise qu’elles recevront réponse lors de l’émission de ce soir. Celle-ci sera la dernière sur la chaine franco-allemande. Le Président interviendra ensuite sur les chaînes publiques, puis, dans l’ordre croissant de leur audience, sur les chaînes privées.

Jeudi 7 Novembre 2013 –  15 heures 20 à 16 heures 45


Journal du Président

Ibidem, fin d’après-midi du dimanche 20… 201...

Je ne change rien à hier ni avant-hier. Les techniciens d’Arte ont laissé leur installation, ils viennent à sept heures et demi faire les branchements. Les lettres que j’ai fait publier me donnent la trame de ce que je vais dire. Je parle sans être interrogé ni, à plus forte raison, présenté. Je bouge de ma table de travail au canapé, sur lequel François Mitterrand aimait s’asseoir, seul, pour recevoir ses visiteurs, chacun autour de lui ou face à lui, selon leur nombre et installés dans des fauteuils. Hier, je suis allé jusqu’à la porte des aids-de-camp pour accueillir Héro. Je laisse libre le cinéaste de varier ses plans. Il a ainsi présenté mes mains, m’a filmé de dos tandis que je m’étais levé pour arranger une embrasse de rideau. Le direct n’est pas gênant, je n’ai aucun effort de récitation à produire, je peux m’arrêter de parler sans choquer, je pense… développer, laisser cheminer…

Pas encore de sondages sur le changement ou pas de ma position dans l’opinion publique, mais les télévisions, quel que soit leur statut ou leur propriétaire, me demandent. L’Allemagne et la Russie, sans le truchement des ambassadeurs, me proposent un temps d’antenne mais en différé. Je ne crois pas ce que soit affaire de censure mais de mise en valeur.

19/…/201… à  20:00
Troisième prestation présidentielle

Le Président vient de terminer son exposé vespéral, désormais quotidien. Exercice sans aucun précédent, mais dont il est dit à l’Elysée qu’il devrait prendre fin d’ici une huitaine de soirs au plus, quitte à ce que ans une forme plus classique une conclusion générale soit apportée.

Manifestement rajeuni et serein, le président Effach a remercié les Français pour leur bon accueil à ses propos. Au jeune couple franco-anglais, il propose l’ambition de donner ensemble, Grande-Bretagne et France, une voix décisive à l’Europe, la double voix portée par un représentant commun au Conseil de sécurité des Nations Unies, et une capacité propre de dissuasion nucléaire. Les deux pays sont en effet seuls dans l’Union européenne à disposer chacun d’un siège permanent avec le fameux droit de veto, et à s’être doté d’une force nucléaire. Le Président a ajouté que le même esprit de disponibilité eurropéenne pouvait valoir pour rapprocher les deux banques centrales, celle de Londres et la B.C.E. à Francfort et établir une politique monétaire commune menant à une parité fixe entre le sterling et l’euro. Il a insisté sur la nécesité du concours britannique à chacune des mesures qui seront prises contre la spéculation. L’Angleterre a sans doute le savoir-faire de sa Cité et le secret de beaucoup de paradis fiscaux. La France et même la zone euro. ne les ont pas à ce point mais les deux pays, et l’Union tout entière ont à faire avec des Etats-Unis qui ne sont plus ceux de Roosevelt, ni même de Nixon mettant fin à la convertibilité du dollar. La question est de savoir si leur gouvernement et leur législateur ne sont pas sous influence de groupes bancaires vivant de la spéculation et de l’obsession du renseignement sécuritaire. C’est même la question de démocratie. Enfin, les deux pays, actuellement bien plus dépourvus industriellement et commercialement que l’Allemagne, ont un passé à réactualiser et des savoir-faire à réaffecter. Sinon, ils seront perdus.

La question des dettes souveraines, du financement des déficits et de la reprise de l’investissement a été traitée, à la demande du Président, par l’ancien ministre des Finances de François Mitterrand et de Pierre Bérégovoy. Il passe pour le probable nouveau « patron » de Bercy, dans les jours à venir. L’étudiante d’H.E.C. a rappelé ses questions, au sein d’une assemblée tenue à Jouy-en-Josas et reliée en duplex avec les studios d’Arte retransmettant à l’Elysée. Après qu’ait été saluée la performance de l’officine où la jeune fille accomplit son stage : seules les gestions bénéficiaires sont facturées, ce qui en période aussi baissière est spectaculaire, les réponses ont été lapidaires. Moratoire des dettes souveraines. Comme les Etats émettent le papier le plus recherché par les spéculateurs, ceux-ci vont perdre le principal de leur menu. La solidarité avec les Etats défaillants du sud européen sera plus aisé à assurer. Le financement des déficits publics, à commencer par celui de notre pays, ainsi que les grands investissements d’infrastructure, se feront par appel direct aux particuliers. Le Président, connaissant maintenant ses classiques, a rappelé les emprunts Pinay de 1952 et celui du général de Gaulle avec le même Pinay en 1958. Les bons du Trésor seront gagés sur de grandes ressources et acquis par le public en tous lieux publics a repris le ministre. Le Président a alors évoqué les bureaux de poste, ceux de tabac et pourquoi pas les laveries automatiques. Ainsi, au lieu d’augmenter sans cesse les impôts directs ou indirects, une part très importante des financements publics proviendra de contributuions volontaires et rétribuées à term. Naturellement, le placement des emprunts soit pour la trésorerie de l’Etat, soit pour des investissements précis, soit encore pour le soutien de grandes entreprises égarées par des erreurs de stratégie ou la cupidité de certains dirigeants, il faut le dire, a précisé le Président en interrompant son ministre… suppose la confiance des Français dans la France et son gouvernement.

L’heure des journaux télévisés, strictement respectée, a mis fin aux exposés, juste à ce point…. De suspension. Les investissements arabes et peut-être la question israëlo-palestinienne qui n’en est guère détachable seront donc traités ultérieurement. L’Elysée n’xclut pas que le Président aille discuter un prochain jour à H.E.C., en simple ancien élève, de l’ensemble des questions posées par sa cadette.

Jeudi 7 Novembre 2013 –  18 heures 15 à 19 heures 30

19/…/201… à  22:45
Le président de la République, seul, devant la tombe du général de Gaulle, à Colombey-les-deux-Eglises

C’est une jeune stagiaire de la gendarmerie de Chaumont qui a téléphoné la nouvelle à ses parents. Il s’est trouvé que le père de celle-ci est le correspondant du journal local, qu’il n’a pu résister à se rendre immédiatement au cimetière, à prendre une image du président de la République, seul avec son aide de camp, en manteau de pluie, devant l’une des tombes les plus célèbres de France. Et à communiquer à sa rédaction qui en fait évidemment la une pour demain.

Le Président a probablement quitté Paris par hélicoptère depuis Villacoublay, comme autrefois le général de Gaulle, dès la fin de son « moment d’histoire de la France immédiatement décidée » – selon l’expression qu’il semble avoir improvisée puis retenue au cours de l’émission d’Arte, à laquelle il venait encore de se prêter à 19 heures 40 comme la veille.

L’Elysée ne dément pas.

Vérification faite, le président Effach n’avait encore jamais fait ce pèlerinage. Il avait quinze ans à la démission forcée du fondateur de la Cinquème République et a dû, à l’époque, coller les affiches de Gaston Deferre, soutenu par Pierre Mendès France, son Premier ministre putatif.

Ce geste – inattendu, mais lourd de signification – rappelle celui du président Giscard d’Estaing, étiqueté anti-gaulliste depuis qu’il avait voté non au referendum de 1969. Au premier anniversaire de la mort du Général, au début de son propre mandat, se rendit dans la même journée à l’Ile Longue pour confirmer son attachement à la doctrine nucléaire de son grand prédécesseur, puis sur la tombe de celui-ci [2].

Jeudi 7 Novembre 2013 –  15 heures 20 à 16 heures 45


Journal du Président

De retour chez…, milieu de la nuit du dimanche 20… au lundi 21... 201…

Je lui ai expliqué les dispositions provisoires que je dois prendre pour rester dans l’ambiance que j’ai suscitée impromptu dans notre vie de couple et dans la politique nationale. Je dormirai donc à l’Elysée sauf les samedi-dimanche. Elle sera libre de m’accompagner ou pas dans mes déplacements et obligations officiels, mais je me souviens d’un itinéraire de mon adolescence, sac au dos, tout près de Paris, en vallée de Chevreuse, non loin des Ecoles de Port-Royal. J’irai marcher, seul, deux ou trois fois par semaine. Si elle le veut bien, nous retournerons ensemble à Colombey, accessoirement visiter la Boisserie, mais principalement cette forêt qu’a affectionnée de Gaulle. Il y a aussi de Saint-Jean-aux Bois à la route du Vieux Moulin, des allées droites sous fûtaies. Héro aura besoin au contraire d’être sédentaire à la Lanterne et d’y recevoir les ministres de notre seconde mouture gouvernementale. Elle doit donc laisser la place. Elle ne me répond pas là-dessus sinon qu’elle s’était habituée, et m’aimait ainsi, à me voir courir la campagne électorale, mais guère à ce que je m’installe ainsi dans une action aussi prenante mentalement. Elle voit juste. A aucun prix, je ne dois perdre le fil. Il est déjà si tard.

Héro m’a appelé pendant que je rentrais de la Haute-Marne. La Chancelière l’avait retenu à dîner en invitant aussi son compétiteur S.P.D. Ils avaient visité la suite des chantiers pour ce qui avait été le no man’s land le long du Mur. Seuls, tous les trois, ils ont convenu de ce qui pourra être proposé à notre prochaine rencontre européenne. Rien de ce que j’ai dit ne les a choqués. La Chancelière dit seulement qu’elle s’était attendue à ce que cela soit notre première conversation le soir de mon élection : dix-huit mois de retard, donc... Elle est bonne joueuse car je prends le contrepied de ce qu’il lui plaisait que j’approuve, à l’instar de mon prédécesseur d’ailleurs. Mais depuis Adenauer, l’Allemagne préfère une France différente et forte, qu’une France sans opinion.

Jeudi 7 Novembre 2013 –  18 heures 58





[1] - résumé de l’argument BFF

[2] - article BFF Le Monde . de Novembre 1974 Du Terrible à Colombey

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