vendredi 15 mai 2009

Inquiétude & Certitudes - vendredi 15 mai 2009


Vendredi 15 Mai 2009

Prier… je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que veut faire son maître ; maintenant, je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître. L’envie de connaissance qui pollua le régime paradisiaque d’intimité avec Dieu et de collaboration à son œuvre de création est exaucée [1], mais libéralement et d’initiative divine : ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis. A la table de Dieu, on ne se sert pas soi-même, je ne me sers pas moi-même. Une retraite d’élection, la énième, j’y éprouvai la résistance de Dieu à tout projet qui n’était que de moi. Obstination de la mouche contre la vitre. Vie de l’Eglise à ses commencements : l’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé. Vérifier quelle autorité se donne, aujourd’hui, un concile en ouverture et envoi d’un document… confirmation de Paul et Barnabé par leur accompagnement de mandataires venant de Jérusalem, les Apôtres ne se donnant pas l’autorité suprême à eux seuls mais s’entourant des Anciens. Ambiance générale : en évitant tout cela, vous agirez bien. Courage ! … ils communiquèrent la lettre. A sa lecture, tous se réjouirent de l’encouragement qu’elle apportait. Le rite et la vie. Pour en décider, pour discerner et discriminer, la reconnaissance d’une certaine autorité mais celle-ci selon la délibération, l’inspiration, l’unanimité. Il doit exister des travaux sur l’organisation et la vie de l’Eglise « primitive » comme modèle pour nous aujourd’hui… vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Mon commandement, le voici : aimez-vous les uns les autres. Tout est si décapé.


Michel Sapin, lumineux comme à l’habitude, ministre de l’Economie et des Finances pour Pierre Bérégovoy, l’un des soutiens les plus lucides de Ségolène Royal, désintéressé pour le premier secrétariat son parti. La crise dans laquelle nous nous trouvons, entrés peut-être un peu plus tard et un moins fort que d’autres, est sans précédent à la fois sur le plan des chiffres, moins 3% pour un an, 138.000 destructions d’emploi pour le seul premier trimestre, et sur le plan de la connaissance que nous pouvons en avoir. Comme le virus A H1N1 – la comparaison est de moi – cette crise, en sus de sa virulence, est d’un type inconnu. Des mécanismes en sont appréhendés, pas tous ; je tiens quant à moi, que c’est surtout une crise intellectuelle, un conformisme de vingt ans fondé pour le grand public sur quelques axiomes ne se vérifiant pas et dont les entrepreneurs et les praticiens savent bien l’absence de fondement : le capitalisme n’est pas la concurrence mais la concentration, la mondialisation n’est pas l’extension des chances à tous mais le champ de dumpings et de pratiques déloyales (entente des grands groupes, subventions d’Etat, exploitation de masses humaines sous-payées). Pour Michel Sapin, le gouvernement a péché par dissimulation, ce qui est impardonnable face à une crise aussi grave et durable. Quand vous ne prenez pas la mesure de la crise, vous ne prenez pas les bonnes mesures. Ce n’est pas depuis quelques mois que nous sommes, la France, en crise et en récession mais depuis un an. Les Américains ont pris les mesures et s’en sortiront peut-être d’ici un an, en tout cas avant l’Europe qui n’a pas pris encore les bons moyens, et plus encore avant la France. La crise mondiale n’exonère par le gouvernement de ses propres responsabilités. Si, selon les chiffres qui viennent d’être publiés, nous nous tirons actuellement mieux que d’autres, ce ne sont pas par les mesures prises, mais par l’existence de nos amortisseurs sociaux, qui ne datent pas de maintenant : le chômage est sans doute mieux indemnisé qu’ailleurs. Le gouvernement est responsable de trop faibles mesures. Que faire ? 1° annuler le bouclier fiscal, de ces quinze milliards chaque année on a besoin, et annuler l’encouragement fiscal et en exonération de charges aux heures supplémentaires : elle contribue au chômage. 2° un plan de relance, du genre de celui des Etats-Unis et suscitant l’activité. 3° réinventer le système financier mondial. Le G 20 a peut-être été un succès, mais rien n’est fait depuis en tout cas pas par la France.

Comme les publications faisant état d’une récession de 2,5% dans la zone euro au trimestre précédent, mais de 1,5% en France au lieu de 3% en Allemagne, le Premier ministre – en contradiction avec ses dires d’hier, dans Le Figaro : « nous ne sommes aps à l’abri de nouveaux à-coups », discours économique à visée politique : resserrons les rangs derrière, etc… - assure maintenant que si nous sommes mieux lotis, c’est bien que les mesures prises depuis la mi-Octobre sont efficaces.

Je suis surtout frappé par le quasi-consensus des commentaires et observations publics à propos des banques. Celles-ci seraient le cœur même de la crise, qu’elles se portent et c’est le désastre, qu’elles se portent et c’est la guérison de l’ensemble de l’économie mondiale. En revanche, divergence sur leur état de santé d’un quotidien à l’autre, d’un hedomadaire opu magazine à l’autre. Il y a quelques années, c’était le consensus sur l’impact décisif du degré de libéralisation des échanges internationaux. Chaque fois, la cause unique, et chaque fois, en même temps, l’hésitation sur ce qu’indique l’indicateur. Pas assez de libéralisme, règles et autres pas respectées, ou au contraire nécessité d’aller encore plus loin, faute de quoi la crise. A l’automne, l’épouvantail était le protectionnisme, ce printemps il est le paradis fiscal. Aucun des deux n’est franchement attaqué, si tant est qu’il soient, l’un ou l’autre, ou l’un et l’autre, des éléments ayant déterminé notre crise.

Or, si les banques ont une importance décisive dans le fonctionnement des entreprises et leur mise aux enchères en bourse, ce n’est pas tant de l’équilibre de leurs comptes qu’il doit s’agir mais de la nature de leurs profits et bénéfices, et comme cette provenance est immorale – au plan de l’éthique, voire même au regard des définitions légales de leur objet – et dangereuse – au plan technique – elle pose la question de leur gestion, de leur direction et partant de l’ensemble des modes de recrutement et de la déontologie des dirigeants d’entreprise. La crise économique mondiale est le produit d’une crise sociale, elle-même venue de la méconnaissance par les milieux dirigeants de la morale la plus élémentaire. Marx dirait les choses bien mieux que moi. Il y a avait une analyse marxiste à produire pour expliquer la chute de l’empire soviétique et ensuite pour expliquer la dégénérescence du communisme en Chine, d’une manière plus générale pour dire le processus totalitaire et ses impasses. Il y a depuis quelques années une analyse marxiste à produire pour structurer l’observation et l’interrogation sur l’évolution économique mondiale. Il existe une classe dirigeante dans laquelle des individus cherchent à s’infiltrer – plus par entregent que par mérite, plus par un jeu de trapèzes que par une ascension tranquille, plus par du travail relationnel que par une réelle production pour le bien commun – et qui tend à l’hérédité autant qu’à l’accaparement. Des biens et des décisions.

[1] - Actes des Apôtres XV 22 à 31 ; psaume LVII ;évangile selon saint Jean XV 12 à 17

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