Déjeunant de bœuf bourguignon, gâteau de riz
et gâteau « fait maison » par ma chère femme, je me suis plongé dans le Monde.
D’évidence, le monde change, pas seulement l’époque, et pas forcément pour du
nouveau. Je vois plutôt la conséquence de nos lacunes et de nos inerties depuis
une grande vingtaine d’années : l’implosion soviétique, l’émergence
chinoise au premier rang mondial n’ont pas été vraiment perçue, compris, analysée.
Nous nous sommes focalisés, à l’initiative américaine, sur l’Islam et la dérive
des « printemps », puis sur le terrorisme. L’amalgame aujourd’hui entre
cette absence d’analyse de fond et de mise en perspective de grands
changements, et ce que nous subissons en
quasi-récession économique, reculs sociaux et terrorisme ambitionnant le spectaculaire,
la prise psychologique, la fascination des opinions, nous rend mentalement très
dépendants de l’imprévu et très improductifs. Rien ne se construit depuis deux
décennies, et ce qui se construisait il y a vingt ans fait fiasco. Notamment
l’Union européenne, et aussi une « mondialisation » qui aurait pu
être bénéfique et libertaire, et ne l’est pas, faute d’encadrement,
d’ajustement et des accompagnements, thème par thème, région par région qu’il
aurait fallu. – Paradoxalement, la Grande-Bretagne ces derniers temps n’avait
jamais été plus européenne, et notamment en binôme avec nous. L’affaire des
deux centrales EPR pour lesquelles la nouvelle Première ministre a annoncé un
délai de réflexion, valant sans doute remise en cause est probablement l’événement
le plus important de l’année, bien plus que le Brexit qui n’est qu’un faux départ puisque l’Union n’existe plus dans les
esprits. J’apprends que le partenariat initié en Chine-même par EDF et avec Areva avait surtout pour portée, et première mise en pratique ces EPR. La
Chine y a vu son entrée dans le marché international, elle qui est déjà, mais
pour elle-même, le premier constructeur mondial de centrales nucléaires. Donc,
une mauvaise humeur très clairement exprimée, sinon menaçante : rappel que
l’établissement de la confiance mutuelle n’avait pas été facile et n’est que
récent. Quel contentieux auparavant ? Hong-Kong ? Le partenariat
britannique pour certaines pénétrations en Europe, mais aussi pour la mise en
œuvre d’une Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures, que
les Américains considèrent comme un anti-Bretton woods. Il est évident que le
concours de la City peut être décisif pour les Chinois. Le débat
sino-britannique est donc porteur de beaucoup de conséquences d’envergure
mondiale. Nous sommes au cœur de ce sujet, d’autant qu’assez maladroitement
nous avons affiché notre envie de profiter des éventuels déserteurs, en fait
nos compatriotes qui avaient émigré à Londres, pourraient faire retour et
surtout nous donner des éléments pour une stature de grande place financière
sur le continent. Coincidence accentuant la frustration chinoise, alors que
depuis dix-quinze ans ce n’étaient que des succès dans cette avancée au premier
rang, sans scrupule et avec de moins en moins de précautions d’apparence ou de
langage : la mise en place, en Corée du sud, d’une défense anti-missiles
américaine répondant aux essais nord-coréens, est également considérée comme
une menace à Pékin, visant à neutraliser sa propre dissuasion nucléaire. Déjà
POUTINE avait ressenti comme une atteinte à la Russie le bouclier anti-missiles
déployé par les Etats-Unis sur le sol des anciens vassaux de l'URSS. Cela fait
donc beaucoup de coincidences, et de surcroît Mrs MAY ne cache pas que les
droits de l’homme ne sont pas une litote, alors que son prédécesseur n’évoquait
jamais la question. Second changement considérable : le climat, cette fois
ce ne sont plus des projections, des extrapolations, mais c’est le record de
2015 vraiment inquiétant. Le Brésil a d’ailleurs très bien compris l’enjeu
puisque le remède, l’antidote au réchauffement, ce n’est pas principalement la
diminution des pollutions, mais bien de favoriser par tous moyens les
reforestations, les plantations, l’alliance prioritaire de l’homme avec le végétal.
Le logo antinucléaire enrichi d’une arborescence construite sur son Y. La
forêt, le végétal, c’est par excellence l’Amazonie et le Brésil. Changement
enfin qui tend à devenir structurel et induit décisivement des comportements
stratégiques : la baisse constante du cours du pétrole, autour de 40
dollars le baril. Les monarchies du Golfe font de l’épargne investissement en
Europe principalement tandis qu’avec des effets appropriatifs et d’accaparement
analogue, la Chine acquiert des propriétés de matières premières au lieu de se
contenter de flux. L’Afrique et l’Europe ont en cela une solidarité de
destin : marchés pillés et ressources hors souveraineté. – Qui fait la
synthèse, qui présente une analyse et une prospective ? ce à quoi excellait
DG. Propos de fête patronale, hier soir, que ceux de FH, bien malheureusement.
Et manifestement, la campagne présidentielle américaine ne va pas structurer
l’opinion mondiale. Alors que la plupart des questions sont
pluridisciplinaires, que les réponses sont contagieuses, le simplisme a tout
envahi
Confirmation
par mon cher journal de l’impression que j’avais hier soir. L’enthousiasme, la
logorrhée étaient forcés, joués, pas vécus. Ces Jeux olympiques 2016 sonnent
faux. Et ils vont avoir une fonction inattendue : décrire la dérive d’un
peuple, d’un continent peut-être. D’ailleurs pas de foule, du moins à l’écran,
et pas de dire de spectateurs brésiliens au micro. Je viens surtout de passer
près de trois heures à compiler les dépêches numériques du Monde.fr, les
unes appelant les autres, et formant pour moi une passionnante mise à jour, au
moins selon les deux années 2015-2016. Deux excellents journalistes : une
fille, GATINOIS, à Sao Paulo, et un garçon, BOURCIER, à Rio. Je comprends
donc le marasme économique, relativement nouveau, mais générant la crise
politique et la contestation. Car « de mon temps » la question
n’était ni la dette (un pays dont l’excédent commercial est le second au monde
peut emprunter), ni la croissance mais l’inflation qui avait été réduite, artificiellement
sans doute, en sollicitant les statistiques et en changeant les signes
monétaires : mon cher Dilson FUNARO, bien trop tôt disparu. L’ambiance
était alors à la détente politique plus encore car le passage du pouvoir des
militaires, après leur dictature de plus en plus théorique, pendant vingt ans,
aux civils – je l’ai vécue – avait été réussi. Notamment grâce à la
personnalité ambivalente de Tancredo NEVES d’autant même que le président élu
en assemblée et non au suffrage universel direct, n’avait pu prendre ses
fonctions pour raisons de santé, inopinément mais défihitiveent très aggravées
la veille du grand jour.en scrutin. Le Brésil était même parvenu à remédier à
l’un des vices de sa Constitution : l’interdiction pour le président sortant
de se représenter. Œuvre de la relation la plus sûre de notre ambassade quand
j’y étais : Fernando Henrique CARDOSO. A l’expérience de maintenant,
fut-une bonne chose que Dlima soit rééligible, et réélue. Donc, un pays tendu,
comme toute l’Amérique latine, victime de proche en proche des cours du
pétrole, pas seulement la dépendance bolivienne vis-à-vis d’un Venezuela
moribond. Une dialectique assez simple : Petrobras qui n’était qu’à ses débuts quand j’étais à Brasilia (1984-1986) et le
pétrole qui n’était pas une ressource nationale majeure, semble à l’origine de
la crise politique ayant abouti à la procédure de destitution de Dlima
ROUSSEFF. Car c’’est dans une ambiance de récession accentuée par des plans
d’austérité qu’a donc éclaté le scandale de corruptions immenses, affectant
plus d’une centaines de parlementaires et
le parti gouvernemental. Et j’apprends le point décisif : Dlima
ROUSSEFF avant de succéder à son mentor LULA dirigeait l’entreprise pétrolière.
Celle-ci était considérée par le PT (Parti des travailleurs de LULA) comme sa
chose. De même que Dlima revendique la tenue des JO comme l’œuvre de son patron
et d’elle-même). Comment va se dénouer la crise ? puisque tout le monde
est impopulaire, que le « tombeur » de Dlima, le président de l’Assemblée
a lui aussi été » convaincu de corruption et a dû démissionner, et que
l’intérimaire, plus qu’ambitieux, est unanimement détesté. Personne n’évoque
dans nos médias, ni semble-t-il déjà dans l’opinion brésilienne, la possibilité
d’un coup militaire. Mais on accuse les différents protagonistes de la
destitution de Dlima, et aussi celle-ci, de se conduire en
« golpistes », l’expression datant de la " révolution des
oeillets " au Portugal, telle aussi que j’en ai vécu les dernières phases
de 1975 à 1979.
Les
JO ne passionnent donc pas grand monde. Peu de chefs d’Etat, et dans certains
sports la préférence donnée par les principaux champions à d’autres formes et
aires de compétition. De toutes les personnes que j’ai sondées ce matin :
une dizaine dans mes lieux, personne n’avait regardé la trop tardive, pour nous
en Europe, cérémonie d’ouverture. Les filles de mon pharmacien, bonnes
nageuses, ne vont suivre que leur discipline.
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