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Sent: Monday, April 15, 2013 9:03 AM
Subject: l'oeuvre de Dieu
Eminence, Monseigneur, mon Père,
je me permets de m'adresser à vous une nouvelle fois après vous avoir communiqué dernièrement l'expression de ma communion avec la grande succession qui vient de s'effectuer à la tête de notre Eglise.
Il s'agit de la France. Elle manque d'autorité morale, elle est désemparée à tous les points de vue, ni le peuple en tant que tel ni les dirigeants élus ne jouent actuellement leur rôle en politique, ces lacunes dans la conduite collective ont des causes multiples depuis peut-être une décennie ou plus. Mais nous sommes à un point de crise.
Il est possible que dans un passé récent, l'Eglise en France n'ait pas été assez la lumière qu'elle peut être, même au "temporel", mais depuis le début de l'année dernière, c'est-à-dire de la joute présidentielle, un amalgame a commencé de se produire entre ce dont elle a la charge et ce que proposent ou légifèrent lcertaines des familles d'esprit politiques et sociales chez nous.
La "manif. pour tous" et maintenant le "printemps français" recrutent pour eux-mêmes mais sont tellement suivis par l'un de nos grands partis de gouvernement (l'U.M.P. pour le dire, faute peut-être qu'il ait de lui-même des thèmes assez mobilisateurs pour occuper la rue et les médias), qu'il y a un risque. Les chrétiens ne peuvent être ni la troupe ni les porteurs d'une extrême-droite, même si celle-ci est d'un genre et surtout d'une masse nouveaux. Un mélange de plus en plus explicite et explosif se fait ces semaines-ci entre la défense ou l'illustration de valeurs - contestables ou pas, de foi ou de moeurs, de conviction personnelle ou "sociétale" - et une militance acharnée, haineuse et en fait néo-païenne, sans que ceux qui vont au rendez-vous sous ces bannières perçoivent la dérive.
C'est à l'U.M.P. de prendre ses propres distances avec ces mouvements. Elle n'y est pas encline. Ce que ses gouvernants ont discour et perpétré à partir de Juillet 2010 et des outrances remontant - comme la proposition de ministère de l'immigration et de l'identité nationale - à la précédente campagne présidentielle, celle de 2007, l 'empêchent sans doute de jouer son rôle d'encadrement et de proposition, dans le domaine qui est le sien : la politique. Car sur le sujet du mariage et de la famille, le gouvernement actuel, certes, n'a pas su préparer et concerter des textes perfectibles, mais les partis et même les croyants - les catholiques en tant que tels - n'ont pas su proposer à temps, ni susciter les cercles, rencontres et débats qui auraient éclairé même le gouvernement. L'errance est générale, au point que l'une des réflexions les plus complètes et les plus pacifiantes, celle du grand rabbin de France, a maintenant, du fait des maladresses personnelles de celui-ci quant à son CV, se trouve occultée.
L'Eglise en France a le devoir qu'elle a souvent assumé de mettre en garde contre les amalgames en troupes et en doctrines. Jacques Maritain, le cardinal Salièges, par exemple, à propos des graves dérives de l'Action française ou du gouvernement de Vichy, ont su faire réfléchir les chrétiens.
Il y a maintenant - me semble-t-il et c'est pourquoi je m'adresse à vous - des distances à faire prendre et des distinctions à opérer entre des discussions légitimes par leur objet et par leur forme, et des militances manifestement politiques, simplistes, haineuses, apparemment "illuminées" mais au dessein s'apparentant aux pires mouvements qu'à d'autres époques nous avons connus, au moment où se concluait la guerre d'Algérie ou encore quand se concocta la critique du Concile Vatican II. Il n'est pas possible que l'Eglise - en France - ne mette pas en garde contre un intégrisme politique se réclamant en bonne part de convictions religieuses, sinon même d'elle explicitement, et que soit expérimenté dans notre pays ce que nous dénonçons ailleurs, et notamment en terre d'Islam : la pétition théocratique et l'exploitation de la foi et de la ferveur religieuses à des fins politiques.
Les vraies lacunes et indécisions des gouvernants de maintenant comme de leurs prédécesseurs immédiats - qui désarment l'Etat face à la désindustrialisation et au chômage, qui ne remédient pas aux souffrance de plus en plus de nos compatriotes privés de travail et plus encore de considération pour l'effort de toute leur vie - méritent bien davantage la mobilisation et les propositions des chrétiens. Beaucoup de chrétiens sont engagés sans que cela fasse drapeau ni manifestation pour une société plus juste et plus humaine, ils ne se laissent "récupérer" par personne.
Puissiez-vous nous rappeler tous, Eminence, Monseigneur, mon Père, à un discernement serein. L'Eglise et notre pays en ont besoin.
Avec reconnaissance et fidèlement.
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