lundi 30 octobre 2017

«Pour l'instant, Laurent Wauquiez ne voit qu'un seul aspect de la question identitaire» - Le Figaro




 


«Pour l'instant, Laurent Wauquiez ne voit qu'un seul aspect de la question identitaire»
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Entre les ralliements d'élus LR à Emmanuel Macron et les difficultés actuelles de Marine Le Pen, Laurent Wauquiez doit trouver sa voie. L'analyse de David Desgouilles.

David Desgouilles est membre de la rédaction de Causeur. Il a publié Le bruit de la douche, une uchronie qui imagine le destin de DSK sans l'affaire du Sofitel (éd. Michalon, juin 2015), et Dérapage (éd. du Rocher, 2017).


FIGAROVOX.- La charge de Laurent Wauquiez au JDD contre Macron a fait couler beaucoup d'encre. «Contrairement à ce qui émanait d'un Pompidou, d'un Giscard, d'un Mitterrand, d'un Chirac, d'un Sarkozy ou même, à sa façon, de Hollande le Corrézien, je ne sens pas chez Macron un amour charnel pour la France», écrit-il. Le candidat à la présidence de Les Républicains accuse également le président de la République d'opposer les générations et de diviser les Français en deux catégories: ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien. Qu'en pensez-vous sur le fond? Wauquiez vise-t-il juste ou fait-il dans la caricature?
 
David DESGOUILLES.- J'ai moi-même signé dans vos colonnes une tribune très sévère sur ce thème après les déclarations du président de la République sur le «bordel».
Cependant, je pense que Laurent Wauquiez intente un procès d'intention à Emmanuel Macron en mettant en doute son amour de la France. Pour ma part, je m'étais borné à décrire une déconnexion complète et une méconnaissance de la France périphérique.
Laurent Wauquiez me semble taper juste lorsqu'il évoque l'opposition des Français les uns contre les autres, notamment entre ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien.
En revanche, Laurent Wauquiez me semble taper juste lorsqu'il évoque l'opposition des Français les uns contre les autres, notamment entre ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien, ou celle des métropoles contre la France rurale et périphérique. Mais je note que lui aussi partage cette tentation, notamment lorsqu'il oppose souvent caricaturalement, la France qui travaille et la France qui prendrait plaisir à l'assistanat.

Ces adversaires lui reprochent de se droitiser. Dans la perspective d'une élection interne, cela peut-il réellement lui nuire?
Ils lui reprochent d'autant plus facilement qu'il l'assume totalement. Le problème, c'est que le terme «droitiser» n'a plus guère de sens, alors que l'élection d'Emmanuel Macron a fait exploser le clivage droite-gauche. De ce fait, aussi bien Laurent Wauquiez que ses détracteurs se fourvoient. A ce jeu à somme nulle, il n'est effectivement pas perdant pour cette élection interne.
De doute manière, tout a été fait pour que le véritable débat idéologique n'ait pas lieu: l'absence du seul candidat, Julien Aubert, qui souhaitait aborder la question interdite, les transferts de souveraineté ou l'association de Laurent Wauquiez avec Virginie Calmels, aveu de sa volonté de ne fâcher personne aussitôt élu, préférant le sauvetage de l'appareil LR plutôt que la clarté idéologique.

La méthode Wauquiez ressemble-t-elle à celle de Nicolas Sarkozy qui, lui aussi, aimait transgresser?
Elle lui ressemble dans la manière de transgresser mais aussi dans le brouillage qu'il effectue en s'associant dans le même temps à quelqu'un de totalement opposé idéologiquement à ses transgressions.
L'association avec Virginie Calmels me rappelle à cet égard la nomination comme porte-parole de NKM pour la campagne «Buisson» de 2012 ou celle de Gérald Darmanin comme directeur de campagne de la primaire l'an dernier, tout en expliquant que les petits musulmans auraient double ration de frites à la cantine. Pour devenir président de LR, ce n'est pas vraiment un problème. Pour s'adresser à tous les Français, cela le sera davantage.

Après la transgression, va-t-on assister à la triangulation?
Pour l'instant, le véritable spécialiste de la triangulation, c'est Emmanuel Macron. Il a donné des signes à l'électorat de droite sur la question du droit du travail, mais plus encore sur les questions éducatives qui constituent un sujet de préoccupation majeur (sans doute davantage que les questions économiques, d'ailleurs), voire sur le retour là la Realpolitik sur le plan diplomatique.
Laurent Wauquiez me semble davantage dans le brouillage sarkozyste que dans la triangulation. Une véritable triangulation serait d'aborder de front les questions comme le danger du CETA etc.
Laurent Wauquiez me semble davantage dans le brouillage sarkozyste que dans la triangulation. Une véritable triangulation serait d'aborder de front les questions de souveraineté sur le plan économique, la puissance de la grande distribution, le danger d'un traité comme le CETA etc…
Se borner simplement à un discours sur la lutte contre le communautarisme, c'est ne voir qu'un seul aspect de l'identité. Cette dernière est aussi mise en danger par la défiguration de ses entrées de ville, ce que Périco Légasse appelle la «France moche», la mort de la paysannerie, de nombreux centre-villes. Et pour l'instant, tout à son obsession d'apparaître absolument «de droite», il ne les traite pas.

Wauquiez peut-il réussir ce qu'avait fait Nicolas Sarkozy en 2007 en siphonnant les voix du FN? Quels sont ses atouts et ses handicaps pour s'adresser à la fameuse «France périphérique»?
Le FN est affaibli actuellement depuis la présidentielle, et plus encore depuis que sa présidente s'est séparée du conseiller qui avait mis ses idées en musique depuis 2009. Laurent Wauquiez souhaite sans doute en profiter en allant sur le terrain identitaire où elle ne semble pas à l'aise. Le problème, comme dit plus haut, c'est qu'il ne traite qu'un versant de cette question de l'identité.
Comme c'est un homme intelligent, et qu'il connaît cette réalité, je suppose qu'il s'agit d'un choix de sa part. Il est très probable que mener la bataille contre le CETA et pour la remise en cause de la suprématie du droit européen sonnerait définitivement le divorce avec toute une frange des élus LR, y compris des élus qui le soutiennent aujourd'hui dès le premier tour.
Le danger, c'est que la France périphérique ne soit ni séduite par la mue de Marine Le Pen, ni emballée par les contradictions de Laurent Wauquiez et qu'elle continue de se réfugier dans l'abstention comme elle l'a fait aux dernières élections législatives.
9 commentaires
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Beaucoup d'électeurs ne se font pas d'illusions sur les véritables ambitions de Wauquiez, qui ne sont pas de servir la France mais de servir ses propres intérêts. Son action pendant le mandat Sarkozy, son soutien à la guerre en Libye (qui est un peu pour la France ce que l'Irak est pour les Américains.), son silence lorsque Sarko a nationalisé les avoirs toxiques des banques...
Rien ne plaide en faveur de l'image d'un élu proche de ses administrés et qui se soucie de leur difficultés. En tout cas il n'a pas l'air de se soucier des conséquences de ses propres décisions et de sa complicité avec la mandature Sarkozy.
Le 31/10/2017 à 09:17
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Je n'apprécie pas Vauquiez sur les critiques qu'il formule à l'encontre de M. Macron même si je suis de droite. Je préfèrerais qu'il critique la hausse de la CSG, la suppression de la taxe d'habitation, le maintien de l'ISF pour l'immobilier plutôt que de vouloir monter les Français les uns contre les autres, notamment ceux qui réussissent contre ceux qui ne réussissent pas. Il y a ceux qui en veulent et ne s'économisent pas. Il y a ceux qui se complaisent dans l'assistanat et qui souhaitent que cela dure. On en voit tous les jours et ils s'en ventent. On dit qu'il faut partager ce que l'on gagne. Moi je ne suis pas d'accord d'aller travailler et partager le fruit de mon travail avec ceux qui se lèvent à midi. Tout le monde peut réussir mais il faut se bouger. Monsieur Vauquiez a tord de critiquer Macron pour parvenir à exister. On l'attend davantage sur ses idées. Macron réussit à faire ce que la droite aurait dû faire et n'a pas osé. Alors stop.
Le 31/10/2017 à 09:05
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mais ce n est pas wauquier qui sera le leader de cette droite recomposee. il est trop europeiste et federaliste et ne pourra pas faire le grand ecart entre la souverainete nationale pillier du gaullisme et du RPR et ses penchants pro-bruxelles et sa technocratie. il va se dechirer.
Le 31/10/2017 à 04:35
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Les Macron et consorts ont la trouille d'une recomposition de la droite républicaine. Ne leur donnons pas la joie et le plaisir de rentrer dans leurs provocations. RESISTANCE
Le 30/10/2017 à 23:25
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Je ne partage pas les idées de Laurent Wauquiez, pourtant je comprends son positionnement actuel.
A quoi sert d'être honnête et de dire la réalité de ce que l'on pense et veut faire... si c'est pour être dans une perpétuelle opposition .
M. Wauquiez à un projet politique global. Les détails n'importent pas, ce qui importe, c'est la philosophie générale.
Le 30/10/2017 à 22:27
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Effectivement ....aucun homme politique n'ose aborder les vraies questions! Aucun n'ose appeler un chat un chat et pour cause , ils cherchent tous à ménager l'électorat! Par contre tôt ou tard ,et n'importe lequel qu'il soit , l'addition sera lourde de conséquences .Les Français dans leur grande majorité n'ont pas , mais alors plus du tout confiance en ces gens droite ou gauche qui s'amusent de leur avis , qui se gavent d'argent public et se moquent complètement de leur avenir ! Oui n'en doutons pas , l'addition sera conséquente et certainement moins calme qu'il n'en paraît !
Le 30/10/2017 à 21:55
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Les propos de M. Wauquiez sur le Président de la République sont inacceptables et indignes d'un candidat à la présidence de notre parti. (Adhérent LR, 2ème circonscription des Vosges)
Le 30/10/2017 à 20:53
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On ne va pas nous faire le coup des primaires..? Remuer l'épouvantail FN alors que des électeurs qui votaient LR sont partis a cause qu'il ne voulaient pas voter Fillon Juppé...
Le 30/10/2017 à 20:09

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