Une diplomatie pour « la fille aînée de
l’Eglise »
L’avenir : l’Eglise, la France aussi qui est sa
fille aînée, le voient avec sérénité, avec fermeté, avec confiance. L’Eglise est éternelle et la France ne mourra pas.
L’essentiel, pour elle, est qu’elle reste fidèle à ce qu’elle est et, par
conséquent, fidèle à tous les liens qui l’attachent à notre Eglise.
C’est le cas ! Et c’est pourquoi, quels que
soient les dangers, les crises, les drames que nous avons à traverser,
par-dessus tout et toujours nous savons où nous allons. Nous allons, même quand
nous mourons, vers la Vie.
Vive la
France !
le général de Gaulle, au sortir de
l’audience du pape Paul VI, le 31 Mai 1967
une
expérience personnelle présentée à l’accueil Saint Joseph
des
Soeurs Dominicaines de la Présentation à Saint Pierre Quiberon
le
matin du vendredi 10 Juillet 2015
ces pages ne sont pas un verbatim mais
une mémoire sommaire
Sauf si elle se concentre sur un événement ou une
période, la mémoire d’une vie ne s’exprime qu’en considération reconnaissante
d’une continuité de convictions et de comportement, ou en regret d’une vocation
manquée et d’opportunités non saisies ou pas discernées.
La grâce m’a été donnée que l’indécision d’une
vocation religieuse et la modicité relative d’une carrière diplomatique donnent
– ensemble – à ma vie une logique et une persistance. Celles-ci demeurent
d’ailleurs dans un début de vieillesse que caractérisent une retraite précoce
et un mariage tardif béni par une paternité heureuse.
Vocation religieuse : une foi reçue au berceau et
qui ne m’a jamais été, depuis, retirée – un état de vie sur lequel je
m’interroge pendant une grande décennie ou une « adolescence prolongée »
– des études et une école suggérées par un père, lui-même passé par une grande
école mais scientifique. C’est l’éducation jésuite, c’est le règne du général
de Gaulle, c’est une harmonie entre un emploi au mérite et une France
ressuscitée, exemplaire, belle. Missionnaire laïc et dans un milieu, une
profession qui ne sont pas dans le besoin ni matériel ni culturel. Diplomate
dans la partie la plus technique de nos dispositifs pour soutenir la présence
et le commerce extérieur du pays. Je ne vois aucune contradiction au contraire
dans ces deux soucis. Ils vont m’habiter dans chacune de mes affectations à
l’étranger, sans que je le planifie ni ne m’équipe précisément. Le départ du
général de Gaulle en 1969 coincide avec mon entrée dans l’administration, celle
des relations économiques extérieures au ministère de l’Economie et des
Finances. Mon regret, puis l’enquête que je mène, à titre personnel, pour
comprendre les raisons de ce départ et du désaveu national, me font rencontrer
en nombre et en qualité les principaux collaborateurs du fondateur de notre
régime. Témoigner encore plus de ce que nous devrions faire et être grâce au
legs d’un tel recommencement français est mentalement, plus encore en
comportement, de même nature que contribuer à la présence de l’Eglise partout où
à l’étranger je suis amené à vivre. C’est donc une militance selon des
convictions et une foi qui – généralement – ne s’affichent pas dans la haute
fonction publique ni dans les ambassades. C’est du domaine de l’implicite, mais
cela explique comportement et manière de traiter presque toutes les affaires,
car cette foi française et chrétienne stimule, structure la liberté et
l’indépendance de l’esprit, donc donc à qui les pratique et s’en sent le fruit,
une originalité et une efficacité utiles même à l’administration la plus banale
ou quotidienne. Je ne l’avais pas délibéré mais ce fut – de fait – ma manière
de vivre ma profession et quand j’y ai réussi, je l’ai dû à cette identité
intime.
Je ne suis mandaté par personne. Par aucune autorité
religieuse ni française ni du lieu où j’exerce mes fonctions de conseiller
économique et commercial près notre ambassade, jusqu’au temps bref où en
qualité d’ambassadeur j’ouvrirai la relation entre la France et le Kazakhstan,
et entre le Kazakhstan et le Saint-Siège. Mais je me crois responsable par
défaut d’une certaine représentation de la France, celle dont beaucoup dans le
monde ont la nostalgie ou le souvenir et qu’a réincarnée de Gaulle. Responsable
aussi de ce que « la fille aînée de l’Eglise » soit perçue comme
telle, comme un Etat, une nationalité à part, une totalité de conviction, mais
certainement pas – évidemment – une proposition théocratique ou un appendice de
chrétientés qui, localement, ont chacune, et donc en France aussi, leur physionomie
propre. Françs chrétien, chrétien français, gaulliste au sens de ce qui a
marqué notre histoire de 1940 à 1969. L’expression publique – sans mention
professionnelle, ainsi à partir de 1972
dans les colonnes des journaux Le Monde
jusqu’en 1982 et La Croix jusqu’en
1997 notamment – n’est pas interdite à un haut fonctionnaire, et en tant que
représentant de la France dans un pays étranger, tout est question de ton et de
référence au bien commun des deux parties. Le champ du possible est large. Il
l’est plus encore quand les propositions et décisions se dialoguent dans le
huis clos des ministères et des bureaux de l’ambassade.
Sans que j’en ai eu conscience à l’époque, la première
scène se joue à l’Ecole nationale d’administration quand Hervé Alphand,
prestigieux secrétaire général du ministère des Affaires étrangères (Maurice
Couve de Murville en est pour dix ans le titulaire, fidèle à de Gaulle depuis
leur rencontre à Alger en 1943 jusqu’à être le dernier de ses Premiers
ministres) vient donner à ma promotion une synthèse de notre politique
étrangère. La guerre des Six-Jours vient d’avoir lieu et, dans quelques
semaines, va retenir un constat : vive le Québec libre ! sans que
personne le pressente, sauf le Général et une équipe très restreinte dont fait
d’ailleurs partie mon maître de conférence pour les relations internationales.
L’exposé est peu circonstancié, pas factuel mais la France, ainsi, paraît
uniquement spirituelle. Rompant le silence qui suit comme toujours une
conclusion d’estrade à se prêter à toute question, j’avance que notre
diplomatie, ainsi énoncée, semble vaticane et en manière : la proclamation
de l’idéal, et en pauvreté de moyens concrets, sinon d’un poids intrinsèque. Je
ne développe pas, j’ai étonné, je découvre pendant même que je parle ce qui
fait la force d’un pays : non ses gains matériels selon les conjonctures,
mais son rayonnement moral. On est à la fin de Juin 1967. L’entretien entre le
président français et le pape régnant : de Gaulle et Paul VI, est du même
moment. La dernière scène, baisser de rideau que je ne soupçonne pas, à
quelques jours près, est un aparte, en Novembre 1994, avec le Premier ministre
du moment, Edouard Balladur. Fin de la seconde « conférence des
ambassadeurs » (elle est à huis-clos à l’époque, seuls le président de la
République, le Premier ministre et nous), François Mitterrand a surtout
expliqué le Rwanda. Quand il a terminé, c’est le désert, personne n’ose aller
le saluer, encore moins s’entretenir avec lui, ni non plus avec le Premier
ministre. J’y vais. Depuis Juin 1977, je suis reçu périodiquement par
l’opposant rue de Bièvre ou au siège du Parti socialiste, puis par le tenant du
pouvoir – un ancien conseiller judiciaire de l’Elysée, au temps de Valéry
Giscard d’Estaing, l’a qualifié avec justesse d’ « adversaire le plus
fidèle du général de Gaulle » – l’approcher m’est naturel. La pompe
amorcée, le chef de l’Etat est bientôt entouré et je vais à Edouard Balladur
qui m’entretient de son souci de nommer un ambassadeur près le Saint-Siège.
Personne ne veut y rester et les liturgies ennuient les épouses… Je me porte
volontaire, mon haut interlocuteur me fait comprendre que ce serait une
solution quand je l’assure que je resterai bien les dix-quinze ans me restant professionnellement
à courir. Il habite en contre-bas du collège jésuite où j’ai fait toutes mes
études secondaires avec plusieurs messes par semaine, facultatives ou
obligatoires, auxquelles j’ai parfois ajouté de servir celle, solitaire, d’un
« des bons pères ».
Intuition de début et expérience convaincante en fin
d’exercice : les deux diplomaties et les deux réseaux se ressemblent
beaucoup en universalité et en thèmes. Celui de l’indépendance et de la dignité
des peuples. C’est manifeste à propos de la Palestine et de la question permanente
que pose au monde le Proche-Orient depuis la guerre des Six-Jours et
l’occupation illégale de territoires au-delà des frontières de 1948. Une
diplomatie qui croit à la force des thèmes, aux symboles et aux exemples et non
aux relations d’habitudes ou de violence. C’était évident dans la survivance de
l’ascendance française au Canada, groupée et organisée par la vie et
l’encaadrement des paroisses catholiques. Nous le vivons à propos des pratiques
émollientes des droits de l’homme guère concédés aux populations migrantes en
France depuis l’été de 2010 ou de la persécution collective, souvent le martyre
subis par les chréétiens au Proche-Orient. L’Eglise en France rappelle aux
pouvoirs publics leurs devoirs. Je l’ai fait moi-même dès le discours présidentiel
de Grenoble, avant même les échos dans l’épiscopat (la remontrance des évêques
de Vannes et de Belfort chargé de la pastorale de ces populations), puis à la
Commission européenne (Viviane Reding) et enfin dans la bouche du pape Benoît
XVI, faisant alors application de ses messages depuis Novembre 2006, à chaque
journée mondiale des populations migrantes ou réfugiées. Au même moment
apparaissait, sur le plan international, la précarité nouvelle des communautés
chrétiennes au Proche-Orient. Explicitement, j’ai appelé l’Elysé, et j’ai
réitéré sous le mandat actuel, à se compter en « fille aînée de
l’Eglise » et à créer au Conseil de sécurité le précédent d’un débat
portant sur une question non étatique et sur la protection de populations non
identifiables selon les critères habituels de la nationalité ou de la race [i]. A
l’inverse, un laïc peut communiquer ses espérances à la hiérarchie catholique [ii],
voire discuter des manifestations publiques se disant d’inspiration
catholique : celles de 1984 contre le projet Savary (est-il certain que
les collèges confessionnels forment davantage et mieux des chrétiens que les
lycées de l’Etat ? La Croix
publia le point de vue d’un élève des Jésuites) ou de 2012-2013 contre le
projet de loi étendant la législation sur le mariage aux couples homosexuels.
La convergence des intérêts, des filiations et des
responsabilités entre la France et le Saint-Siège n’a pas pour seul champ la
diplomatie, les questions d’organisation internationale, mais bien tout ce qui
concerne l’homme, sa liberté, sa destinée. C’est ce que par excellence avait
exprimé de Gaulle. Politique et spirituel.
Mise en pratique.
Elle est aisée si elle n’est pas artificielle mais
fonction de la situation locale. Toujours, la hiérarchie catholique a un ou
deux mentors de fait, quel que soit leur âge ou leur position. Ainsi, le
cardinal-patriarche de Lisbonne pendant la « révolution des œillets »
et la « transition démocratique » qui s’en suivit – Helder Camara,
cardinal-archevêque de Recife – le cardinal König à Vienne me conduisent et
m’aident à comprendre, à titre personnel, des situations complexes : la
relation au parti communiste et la décolonisation dans le Portugal de 1974 – la
« théologie de la libération », les élections pontificales de 1978
d’expérience brésilienne – la relation de l’ancienne capitale des Habsbourg
avec l’ensemble de l’Europe centrale de l’Est se libérant du système
soviétique. A l’inverse, toujours à titre personnel, je dialogue des solutions
françaises : l’accueil au plus vite du nouveau Portugal dans l’Union
européenne (alors Communauté économique européenne), de même pour l’Autriche si
demanderesse et ne devant pas pâtir d’une certaine exclusion de son président
fédéral de l’époque (Kurt Waldheim en 1989-1992). Par les entrées que m’ont
données mes contributions de presse dans les milieux gouvernants français, je
puis en concaincre (1976) Raymond Barre, alors ministre du Commerce extérieur
ou Pierre Bérégovoy qui vient même à Vienne (1989), ministre de l’Economie et
des Finances. La Grèce, encore aujourd’hui, se comprend par la place qu’y tient
l’Eglise othodoxe, lien vivant perpétuant la nostalgie de l’Empire byzantin qui
fut millénaire. Plusieurs séjours au Mont-Athos où j’emmenais mes jeunes
« coopérants » du service national affectés dans les bureaux
commerciaux de l’ambassade permettent de faire comprendre plus vivement dans
l’Eglise de France cette Grèce dont se réclament aussi les socialistes
helléniques. Vivant près de quatre ans à Münich (1979-1982), mais occupé par
une position électorale que je tente d’acquérir dans le Haut-Doubs pas trop
distant par la Suisse, je manque la rencontre essentielle du cardinal
Ratzinger. Ma chance cependant a été de parler à un prophète tel qu’Helder
Camara et d’avoir un temps pour père spirituel le cardinal König. Relation
entre le temporel et le spirituel que d’autres pays que le nôtre savent avoir,
sans cléricalisme ni théocratie : l’archevêque de Boston et le président
Kennedy, le chancelier Kreisky et le cardinal König par exemple. Sur lesquels François
Mitterrand s’appuya pour la réunion à Prague des éventuelles parties prenantes
à une autre architecture européenne que celle, très Europe de l’Ouest et
atlantique, issue des traités de Paris et de Rome au temps de la « guerre
froide ».
Au Kazakhstan qui n’avait pas reçu de visiteurs
français plus de deux ou trois fois en trente ans, tout est à ouvrir. J’y
arrive quand le drapeau de la République fédérée soviétique flotte encore sur
les bâtiments officiels : Juillet 1992. L’Eglise orthodoxe a un seul lieu
de culte dans la capitale, située à l’extrême-sud-est par la conquête russe.
Islamisé seulement au XIVème siècle, le pays a pratiqué l’écriture arabe
jusques vers 1910 et à peine moins qu’en Ouzbékistan, s’énorgueillit de
mosquées sur le modèle d’Isfahan en Iran. La religion quelle qu’elle soit n’est
pas en vogue, elle est ethniquement clivée : les Kazakhs, potentiellement
musulmans, les Russes traditionnellement orthodoxes. Les catholiques ont leurs
paroisses distantes les uns des autres de parfois mille kilomètres. Le clergé
sort à peine de décennies d’emprisonnement, il est originaire de l’Europe
soviétique ou des pays baltes, comme l’évêque d’Asie centrale. Celui-ci dont le
diocèse est aussi grand que l’Europe et ne peut se parcourir qu’en avion,
manque forcément d’autorité et aussi de finances. Je ne découvrirai la paroisse
d’Almaty tenue par des franciscains tchèques qu’au bout de deux ans de séjour :
elle est à la périphérie, elle est fervente. Il en existe une par chef-lieu de région,
et je les visite à chacune de mes venues sur place. Dialogues passionnants avec
le clergé souvent âgé et surtout germanophone : ainsi une église Notre
Dame de Berlin. Les Allemands de la Volga, « prêtés » par Frédric II
à Catherine II pour des mises en valeur agricoles, ont été exilés dans
« les terres vierges » et les zones frontalières de la Russie et du
Kazakhstan, loin de l’avancée allemande en 1942. Même sort et éloignement en
fonction de la menace japonaise pour des minorités coréennes.
Deux évidences alors. L’Eglise en Asie centrale ne
peut survivre et s’augmenter qu’avec une ouverture extérieure et des concours
d’ailleurs. Mais ceux-ci risquent d’être analysés comme une ingérence
inamicale. D’autre part, la jeune indépendance n’a pas encore trouvé ses repères
et ses alliances. Le Kazakhstan de mon époque (1992-1995) et j’y encourage
autant que je le peux le président Nazarbaev, cherche une voie autonome, et
compte sur l’Europe puisque Moscou est défaillant économiquement et incertain
politiquement : comme la Serbie en Yougoslavie qui en provoqua la
dissolution en rompant l’unité monétaire des autres Républiques fédérées avec
elle, la Russie d’Eltsine ne lègue à ses anciennes possessions quasi-coloniale
qu’un rouble dont elle ne répond plus elle-même. Si le Kazakhstan suit sa
propre voie à tous égards et ne donne plus exclusivité ou priorité à la Russie,
il peut y avoir des « retours de bâton ». Une observation
internationale de la situation si elle se tend ne sera pas crédible, quels que
soient les ambassadeurs sur place. La France – j’ai la chance d’être le doyen
du corps diplomatique – a d’autant plus la prééminence morale que l’autre
ambassade forte est celle de l’Allemagne qui procède sans discrétion au retour
subventionné chez elle (voire dans l’ex-Prusse orientale) de la minorité
germanique, dont le défaut gêne le Kazakhstan.
Des entretiens fréquents pour la réforme des
institutions constitutionnelles, et le progrès de l’Etat de droit avec le
ministre de la Justice, un très grand juriste dans l’ambiance soviétique,
m’amènent à suggérer une solution pour le financement des paroisses
catholiques, et aussi pour remédier au manque d’autorité de l’évêque sur ses
ouailles. Le Vatican répondrait des flux monétaires et humains venant de
l’extérieur, autorité indépendante s’il en est, et notamment vis-à-vis des
« services » américains. Le Kazakhstan, acceptant qu’un nonce soit
accrédité à Almaty, disposerait d’une ouverture vers le monde étranger, voire
d’un porte-voix indiscutable et – selon les besoins et situations – discret ou
tonitruant. Via notre ambassade près le Saint-Siège, je peux présenter et la
situation et le remède à l’avantage des deux parties. Le pape l’accepte et
choisit pour premier nonce, un de ses familiers : Mgr. Marian Olès,
polonais, parfaitement russophone et francophone. Nous faisons dès lors équipe.
N’ayant pu pendant plus d’un an n’assister à une messe qu’orthodoxe, et sans
être admis à y communier, malgré une discussion très amicale avec le patriarche
local, j’ai désormais abondance. Mon éminent ami ministre de la Justice et de
la Législation se prête de plus en plus au dialogue sur le christianismes. Les
épîtres de saint Paul, les recommandations de celui-ci à Onésime à propos de
son esclave, les passages des Actes des Apôtres disant la vie économique et
sociale des premiers chrétiens, l’impressionnent. Il apprend tellement
qu’atteint d’un cancer, il va à Chartres, la cathédrale, la Vierge, autant que
l’accueille le Val-de-Grâce à Paris. Sourire, culture, patriotisme, sens du
droit et sens de l’homme, inoubliablement. La relation avec le Vatican :
ce fut lui, convaincu et convaincant. Il avait d’ailleurs été convenu que s’il
tombait en disgrâce, ses papiers voire lui-même, seraient bienvenus à
l’ambassade et donc chez nous. Je suis convain que Nursultan Nazarbaev, en
admiration pour François Mitterrand, n’aurait pas laissé évoluer son régime
vers un retour à l’hégémonie de Moscou et des pratiques tribales et
totalitaires s’il ne lui avait été souvent représenté par notre diplomatie
autre chose que des affaires sujettes à corruptions et échanges occultes de
bénéfices. Dès ma prise de fonction, l’option d’intermédiaires intéressés ou
d’une relation d’Etat à Etat, directe et classique, fut discutée aussi
concrètement que franchement avec le secrétaire général de la présidence du
Kazakhstan. Et dès la première visite de son titulaire – ianmovible depuis 1986
– nos gens d’affaires furent à l’œuvre. Un déjeuner improvisé à l’Elysée en
Février 1994, pour équilibrer un voyage américain, vit le gouvernement
représenté non par le ministre des Affaires étrangères (Alain Juppé) mais par
le ministre de l’Intérieur (Charles Pasqua) qui avait déjà organisé, malgré
moi, un dîner d’affaires au conseil général des Hauts-de-Seine en Septembre
1992.
La conclusion provisoire de ma mission – en pleine
campagne présiuldentielle pour la succession de François Mitterrand en France –
a son vrai sens dans la bibliothèque privée du pape : Jean Paul II, qui me
reçoit en Février 1995. Près de deux heures tête-à-tête avec un chef d’Etat,
prenant des notes, téléphonant, tandis que le lendemain matin, seul laïc admis
à sa messe « privée » dans la si belle petite chapelle créée par Paul
VI, c’est un curé de campagne avec qui je prie. Un autre entretien porte sur la
France et aussi sur l’art. Mgr. Jacques Gaillot, alors expulsé par ses
« frères » dans l’épiscopat, l’intégrisme etl’opprtunité d’une
encyclique sur l’art. Depuis, il y a eu la béatification de Fra Angelico. Sur
l’Asie centrale, ce qu’il faut ne pas manquer c’est le double rejet d’une
orthodoxie trop complaisante au système communiste et d’un Islam qui ne peut
localement comprendre les femmes que le droit et les pratiques de l’U.R.S.S.
ont émancipées. De foulard mais jamais de voile, qu’en zones quasi-désertiques
ou rurales, et ne se distinguant guère du fichu et des coiffures russes. Le
catholicisme dont la liturgie est brève et claire, par rapport à l’ésotérisme
et à l’exhaustivité orthodoxes, se présente surtout comme une ouverture vers
l’extérieur, et principalement vers l’Europe, ce que prisent la jeunesse et
aussi le gouvernement dans sa tenance native. Cette ductilité peut ne pas
durer, mettre le pied en cale-porte a été mon obsession dès que notre ambassade
à ouvrir au Kazakhstan me fut accordée par le président personnellement. Contre
les mœurs et les candidats du Quai d’Orsay. Ce qui contenait en germe ma
privation de tout lendemain. Mais quand la journée a été passionnante, cela
importe-t-il tant ? Chance de la France, chance de l’Eglise pour une
époque et des cultures précises.
Action du même ordre – toujours sans instruction mais
me paraissant conforme à l’image de notre pays et à un sens vrai de la patrie –
la manifestation de notre fidélité nationale et de notre amour pour les
« malgré-nous », les Alsaciens et Lorrains, enrôlés de force dans la
Wehrmacht et assimilés par les Soviétiques aux nazis. Un camp de la mort lente
à Spassk, au sud de Karaganda, mais une liste que je parviens avec mon attaché
de Défense à obtenir. Hostlité des associations locales d’anciens combattants
qu’une exécution de la symphonie « Leningrad », la n° 7 de
Chostakovitch, et une petite réception amicale, calment un peu. Une stèle est
érigée, la patrie garde affection, reconnaissance et mémoire pour ses enfants
si loin qu’ils soient allés, et surtout le cimetière anonyme où dorment aussi
d’autres nationalités : Japon et pays baltes notamment, est béni. Un
prêtre allemand m’offrant un bréviaire qu’il lisait à Strasbourg en période
d’annexion.
L’Eglise, la France. Nicolas Sarkozy venant en visite
officielle à Astana, la nouvelle capitale, précisément choisie dans l’aire de
l’ancien goulag, mon lointain successeur jugea la stèle politiquement
incorrecte. Par télégramme, dès que je fis part de ce qui avait été fait et
célébré le 9 Mai 1994, mes autorités pourtant prévenues à l’avance et n’ayant
rien eu à financer, m’avaient fait de vives remontrances. Le quotidien régional
les Dernières Nouvelles d’Alsace –
eut raison de toute velléité d’enlever la stèle. J’y fis publier la liste des
inhumés et les photos du site. Les autres Etats y découvrant leurs
ressortissants, nous avaient imités.
[i] - ----- Original Message -----
Sent: Friday, July 25, 2014 8:07 AM
Subject: les chrétiens du Proche-Orient et
la fille aînée de l'Eglise
Cher ami, Monsieur le Secrétaire général,
vous savez la situation à Mossoul et pour l'ensemble des chrétiens
au Proche-Orient, sans oublier le Nigéria ou le Pakistan. Vous savez aussi que
beaucoup de Français sont aujourd'hui spécialement en prière et en jeûne pour
cette cause qui nous impose communion. Cela d'ailleurs à la veille, à un ou
deux jours près, de la fin du Ramadan.
Tant qu'une question n'est pas réglée - vous le savez aussi
d'expérience, et plus encore là où vous êtes - elle se repose.
Voici ce que je suggérais il y a quatre ans à vos prédécesseurs. Je
crois que c'est faisable, je crois que ce serait efficace, se combinerait très
bien avec les différentes démarches pour Gaza, je crois que cela aurait un très
grand retentissement tant chez les praticiens des relations internationales que
dans les opinions populaires, dans les âmes. Le Président s'y affirmerait dans
un domaine qui n'est pas celui de la langue de bois ou de la prudence. Et à la
veille des nouvelles manifestations.
Espérant " prêcher un convaincu ", voici.
-----
Original Message -----
Sent: Monday, November 08, 2010 1:01 PM
Subject: la fille aînée de l'Eglise et les
chrétiens d'Irak et de tout le Proche-Orient
Cher ami,
ces communautés (ethniques ou de moeurs, vg. nos Roms et gens du
voyage - ou religieuses, spirituelles) et minorités qui n'ont pas d'expression
étatique... besoin criant d'une protection.
Les chrétiens, en ce moment au Proche-Orient. Le Vatican n'est
qu'observateur aux Nations Unies. Hors le truchement médiatique, il n'a pas la
possibilité de saisir le Conseil de sécurité.
Fille aînée de l'Eglise, la France le peut.
Débat qui situerait aussi l'enjeu et le besoin d'autorité morale
que les grandes religions et les grandes familles spirituelles peuvent et
devront - vraiment - constituer collectivement, par leurs adeptes comme par
leurs dirigeants. Les points de contact entre Bible et Coran, et plus encore
entre gens d'expérience du spirituel et de la pratique de la prière, sont
nombreux. La religion au lieu d'être faiseuse ou prétexte de terrorisme, peut
être lien et fondation. Le Proche-Orient au lieu d'être la boîte aux chagrins
peut être école de partage (territoires, ressources, legs scripturaires). Le
terreau et les outils existent donc. Il manque le politique, le juridique, la
prise en charge, le cadre...
Dans l'immédiat, le débat poserait la question des minorités en
tant que telles et de leur protection : des Arméniens à la shoah, aux Roms et
tziganes, de ceux qui veulent pratiquer leur langue, nos Basques et nos
Corses... il y a une immense recherche d'Etat à initier.
L'urgence montrée par les massacres en Irak et par un climat de
tension - qui risque de ne conduire qu'aux exodes (la désertion des chrétiens
au Liban a des conséquences géo-stratégiques immenses depuis la guerre civile,
et la francophonie bien entendu y perd).
Soyons grands et volontaires. Etudier la faisabilité d'un tel
recours - dans l'urgence - et avec si possible un partenaire arabo-musulman (à
l'instar du "ticket" franco-tunisien pour parrainer l'admission il y
a cinquante de "notre" Mauritanie). Ce serait une jurisprudence et
nous l'aurions ouverte dans la ligne de notre inspiration, parfois mot à mot
pour la Déclaration universelle des droits de l'homme (Cassin, Hessel,
d'autres... Décembre 1948).
Sent: Monday, March 11, 2013 8:07 AM
Subject: pour le conclave, des voeux de
l'Eglise de France - en prière, en confiance, en perspective
Eminences, chers Pères,
je m'adresse à vous ensemble puisque vous allez
être l'Eglise de France au conclave.
J'ai eu l'honneur de rencontrer l'un et l'autre
de vous, mais dans des circonstances très différentes Vous, cher Père
Vingt-Trois, dans l'espace d'attente, à la Villa Manrèse des
Pères Jésuites (Clamart) quand nous entretenions successivement avcec le
regreté Jean Laplace : vous étiez évêque auxiliaire de Paris. Et avec vous,
cher Père Barbarin, ma femme et moi nous sommes entretenus des possibilités
d'une gestion éthique et solidaire d'éventuelles disponibilités de votre
diocèse à placer. J'ai mieux connu certains de vos prédécesseurs respectifs et
ne demande qu'à vous revoir, selon vos convenances, pour contribuer,
modestement, aux commencements du prochain pontificat tel que vous l'aurez
décidé avec vos Frères éminents. Je courielle aussi aux cardinaux Ricard et
Tauran, dans le même sens qu'à vous, mais sans les avoir jamais rencontrés.
Et je vous ai de temps à autre adressé, comme à
quelques-uns de vos Frères dans l'épiscopat de France, des notes sur l'Eglise
ou sur la situation de notre cher pays.
Celle qui est jointe m'est venue à l'esprit et
au coeur dès la renonciation de Benoît XVI. En effet, je l'ai ressentie -
certes ainsi que tout le monde, chrétien ou inceyant, modeste ou grand en ce
monde-ci comme un acte de courage et de lucidité personnels rare et exemplaire
- mais surtout comme un appel à une réflexion en profondeur quoique très
pratique sur la vie, l'organisation, les fins et moyens de l'Eglise en ce
temps-ci et par rapport au monde tel qu'il est, et spécialement sur le
gouvernement "suprême" de l'Eglise, et par contagion ou analogie, sur
le gouvernement de chaque diocèse, de chaque paroisse, communauté,
congrégation, mouvement. Hoc si quod dicitur... authenticité et l'imagination
libérante dont les Pères de l'Eglise, nous établissant dans la foi, ont fait
montre à l'émerveillement de chacune des générations qui les ont suivis.
Il n'est pas sûr que la "culture du
chef" qui - à l'instar des partis de droite en France instrumentant
souvent les prises de position de l'Eglise, vg. 1984 pour l'école ou depuis la
campaagne présidentielle de 2012 comprise jusqu'à ces prochains mois - ait
incité chacun de nous à cette réflexion, au point que le conclave en soit porté
à s'inspirer. Bien plus que l'élection d'une personne - qui pourrait, je crois,
n'être pas l'un de vous tous, membres du Sacré Collège, mais un
"simple" évêque ou prêtre, cf. Ambroise de Milan, arrivé dans la
matinée préfet païen de Théodose, je crois, et archevêque baptisé,
ordonné, consacré avant la nuit... - il doit y avoir un diagnostic.
J'ai ressenti cet appel de Benoît XVI et ce
dernier - bouleversant la relation du monde avec lui et la faisant communion -
a été aussi pressant que possible, ne pouvant être explicite que par son
seul acte.
Vous savez mes sentiments filiaux et déférents,
et je vous prie de croire en mon dévouement et ma totale confiance envers
notre Sainte Mère l'Eglise.
note à la haute attention de Leurs Eminences, Messieurs les Cardinaux
conclavistes français
(14 pages – sur demande à b.fdef@wanadoo.fr)
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