prière de la France
Qui êtes-vous, Vierge Marie, mère de notre
Dieu et Seigneur, Jésus Christ, pour nous, chrétiens en France ?
Certainement très familière, la Madonne qu’on prie à
genoux, vous priant d’être notre reine, chez nous. Notre Dame en l’honneur de
qui ont été bâties et consacrées la plupart de nos cathédrales. En mémoire de
qui tant de nos filles, sœurs, épouses portent votre prénom, ainsi que Gabriel,
l’archange de la décisive Annonciation, vous salua. Tant de lieux pour tant de
circonstances locales ou nationales, le portent aussi. Louis XIII, conseillé
par le si politique Richelieu, fit le vœu que vous avez exaucé et vous consacra
en retour son royaume. Vous nous avez honorés ces derniers siècles
d’apparitions et de messages, en si grand nombre et souvent décisifs à des enfants, à des jeunes
filles. La République,
sombrant sous les coups allemands en 1940, plus adroits, mieux préparés que les
nôtres, envoya son gouvernement d’alors, celui de Paul Reynaud, en corps
constitué, à Notre-Dame de Paris, y prier pour la victoire, malgré tout. La République rétablie par
le général de Gaulle, le peuple de Paris suivit celui-ci de l’Arc-de-Triomphe à
Notre-Dame de Paris pour le Te Deum.
Et dans votre cathédrale capitale, les grands de ce monde honorèrent autant les
deux grands disparus que furent en 1970 et en 1974, l’homme du 18-Juin et son
successeur, que la France,
que vous.
Qui sommes-nous ? Des sangs-mêlés, de
nos ancêtres les Gaulois romanisés à tous ceux qui se sont joints à nous de
siècle en siècle, nous prenant pour refuge ou nous choisissant explicitement,
non pour ce que nous sommes, mais pour notre pays, ce pays appelé la France. A droit égal d’enfants
adoptifs, de généalogie millénaire ou de ce matin par décret de naturalisation,
ou même étrangers de papiers mais attaché à ce sol, à ces paysages, à cette
langue et finalement à cet esprit, car notre peuple est théorique, il est œuvre
de volonté, d’adéhsion, rien ne l’impose en géographie, il reste virtuel, il est
tout histoire et c’est par l’histoire et le rayonnement d’une œuvre collective
que nous nous sommes faits, que nous aimons nous reconnaître dans l’image
idéale quand défaille notre pratique, que vacillent notre générosité et donc
notre grandeur collective. Les enfants de France, de toujours ou de l’instant
précédent, savent donc, en tant que tels, ce qu’est le spirituel, le fragile,
ce qui revient à la grâce et ce qui incombe à l’effort, à la volonté.
C’est notre pays, en grave difficulté de
discernement de son avenir, en faillite d’élites et de dirigeants, en
respiration coupée par la braderie de nos patrimoines matériels et spirituels,
qui vient à vous, ô Notre Dame. Vous êtes juive et votre fils, descendant de
David par son père nourricier, votre saint époux Joseph, et les Français juifs
peuvent se reconnaître en vous, ils ont tellement le sens de la famille, de la
parentalité, de la maternité, de la tendresse paternelle. Vous êtes vénérée par
les pratiquants du Coran et les Français musulmans peuvent vous prier avec
leurs compatriotes chrétiens. Ils viennent de le vivre et montrer en Irak, pour
la plus significative de vos fêtes : l’Immaculée Conception. Chrétiens
enfin de foi native ou retrouvée ou cherchée – malgré que la « religion
majoritaire » en France soit l’indiférence ou l’agnosticisme – qui sommes
peut-être responsables de l’ensemble, de l’âme commune donnant au pays et à son
peuple sourire et conscience.
Parce qu’à la naissance de la France, il y eut la
conversion de ceux qui l’habitaient, et d’abord celle de leur dirigeant
principal. Vous avez su, Vierge Marie, toujours – au contraire de la première
Eve – inspirer l’homme par sa femme. Ainsi, la France est-elle devenue la
fille aînée de l’Eglise, l’Eglise fondée par votre disponibilité, ô Marie. Oui,
vous avez été en chronologie comme en théologie la première chrétienne et vous
en demeurez le parfait exemple.
La
France, de
sa naissance à maintenant, a cherché à vous le dire et aussi à le manifester au
monde. Humblement, mais convaincu que – même au temporel – c’était l’avantage
autant des autorités auprès desquelles j’avais été accrédité comme premier
ambassadeur de France au Kazakhstan, que des chrétiens d’Asie centrale si
dispersés mais si fidèles et ardents, j’ai reçu l’inspiration de faire s’établi
les relations diplomatiques entre le Vatican et cette République anciennement
soviétique et potentiellement musulmane. Peut-être pas les instructions du Quai
d’Osray, mais certainement la responsabilité de la fille aînée et d’un de ses
fils laïcs.
Bien avant 1994… le 10 Février 1638, Louis
XIII obtenant un enfant selon son vœu à vous, Marie, et sans même attendre de
savoir si ce serait un fils et donc l’assurance de sa propre succession,
entendit, en remerciements éperdus
« admonester tous nos peuples d'avoir une dévotion toute particulière à la Vierge, d'implorer en ce
jour sa protection, afin que, sous une si puissante patronne, notre royaume
soit à couvert de toutes les entreprises de ses ennemis, qu'il jouisse
longuement d'une bonne paix ; que Dieu y soit servi et révéré si saintement que
nous et nos sujets puissions arriver heureusement à la dernière fin pour
laquelle nous avons tous été créés »
Quittant l’audience du pape Paul VI, le 31 Mai 1967,
le général de Gaulle constatait devant la « colonie ecclésiastique française
de Rome » « . . . quelle part
notre pays, nous Français, ont eu depuis toujours, et ont aujourd’hui, dans la
vie de l’Eglise catholique ! A tous les égards, qu’il s’agisse de la
pensée, de la doctrine, de la théologie, qu’il s’agisse de l’action et de la
vie religieuses, qu’il s’agisse de l’apostolat, des missions, que de Français
et de Françaises, ceux que l’on connaît, ceux que l’on ne connaît pas, ont
apporté leur dévouement, leur piété à cette œuvre immense qui toujour se
transforme et qui jamais ne change ! . . . L’avenir : l’Eglise, la France aussi qui est sa
fille aînée, le voient avec sérénité, avec fermeté,
avec confiance. L’Eglise est éternelle et la France ne mourra pas. L’essentiel, pour elle, est
qu’elle reste fiddèle à ce qu’elle est et, par conséquent, fidèle à tous les
liens qui l’attachent à notre Eglise. »
C’est cette France – à laquelle les pères
conciliaires, d’il y a cinquante ans, durent beaucoup de travailler et conclure
selon quelques-uns de ses fils de foi et de talent : Congar, Daniélou,
Lubac à la suite des prêtres-ouvriers ou du prodigieux intuitif Teilhard de
Chardin – qui vient à vous et qui par vous veut aller du soir à l’aurore.
C’est la France de tous qui vous adresse cette première
prière du fond des impasses où elle a conscience de se trouver sans dirigeants,
sans repères, sans plus même la disposition d’elle-même pour comprendre ce
qu’il lui arrive et pour continuer d’assurer dignité et pain quotidien à de
plus en plus des siens. La prière que vous avez su lire aux lèvres et dans le
regard des jeunes mariés à Cana.
Puisse la France, telle qu’elle est
constituée, telle que tant la rêvent et l’espèrent, entendre ce que vous avez
alors recommandé : faites tout ce
qu’Il vous dira et que ses fils, vos fils le comprennent. Tous à Cana, à
votre écoute : les hôtes et maîtres de maison, les jeunes mariés, les
invités, les étrangers, les disciples et parmi nous, grâce à vous qui étiez
l’invitée première de ces noces, le Christ.
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