jeudi 9 juin 2011

Inquiétude & Certitudes - jeudi 9 juin 2011

Jeudi 9 Juin 2011


Mon arrêt temporaire, la mise entre parenthèses, voulue et non subie, le paradoxe : une petite baisse physique donne plus de discernement sur le ménagement à me donner et la capacité de m’y donner, qu’une surcharge en tout m’imposant de fait un tri dans les activités, les écrits, et une certaine stérilité. Ne faisant que peu, lisant tranquillement mon cher Patrick S., Chardonne, Bonaventure selon Benoît XVI, un petit recueil du cardinal Marty, des homélies particulièrement ajustées, précises et libérantes, je me sens au bon endroit et au bon moment de ce que j’ai à vivre. Mes devoirs envers mes aimées, les témoignages – sur bien des sujets – que j’ai à rendre demeurent présents, mais ce n’est pas moi, ce sera Dieu dans ma vie qui va les accomplir.


Les collationnant, je viens d’être saisi par l’émotivité, la chaleur, la justesse, l’étendue de la documentation permettant la vérité la plus profonde de la prière et de la méditation – des différentes interventions du Pape à Viterbe (la patrie de Bonaventure, dont il dit par ailleurs que l’itinéraire a beaucoup contribué à sa propre formation) qu’il visite le 6 Septembre 2009. Ainsi, ce rapport de Benoît XVI à l’Eglise dont il est l’actuel chef, quand il évoque, ce chemin que toi aussi, Eglise bien-aimée qui vis sur cette terre, tu es appelée à parcourir. L’ensemble des textes et évocations est peuplé de saints d’autrefois ou de moins longtemps, mais aussi des pasteurs de maintenant, de leévêque du lieu, du curé de la paroisse. Je l’avais senti dans la lettre aux Irlandais du printemps de 2010 : ce pape, cet homme est d’abord une âme, un cœur, une intelligence aimant. Il est bon et aimant. Il a également ce don de percevoir, physiquement, biographiquement, le peuple de Dieu, et donc toute l’humanité… en relation, une fin de journée ici de notre évêque venu célébrer dans une chapelle de campagne. Juste et touchante initiative, mais homélie plate, non située, dans laquelle ni le paroisse ni notre roide mais pieux recteur ne sont mentionnés, ni a fortiori analysés et au vin d’honneur ou de l’amitié et de la sympathie, il est certes là et fait le tour, mais il n’a pas le mot qui demeure. François MARTY, à la cantonnade, souvent : « J’embauche ! », et à moi : nous ne nous étions jamais vus, automne de 1968 ou début de 1969, « où en êtes-vous ? ». Pas de question plus juste à cette époque de ma vie, et pas de question plus vraie et permanente. Seulement maintenant, grâce à Dieu, et grâce à de telles gens, je sais et puis répondre.


Prier en action de grâce…
[1] tu ne peux m‘abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. Je n’ai pas d’autre bonheur que toi. Tu m’apprends le chemin de la vie. De fait, Jésus devant ses disciples leur fait enfin partager la totalité et l’intensité de sa relation de demande et de louange à son Père, et cela porte sur eux, les concerne. Ils sont le souci de celui qui va vivre l’horreur, et nous sommes de ces disciples, déjà présents dans le cœur humain du Seigneur : Je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là mais encore pour ceux qui accueilleront leur parole et croiront en moi. Parole qui ira loin. Le Seigneur vint auprès de Paul et lui dit : ‘ Courage, le témoignage que tu m’as rendu à Jérusalem, il faut que tu le rendes aussi à Rome ’. Bilan apostolique du Christ, « rapport de fin de mission »… Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître encore, pour qu’ils aient en eux l’amour dont tu m’as aimé, et que moi aussi je sois en eux. Ambition de Dieu, raison et dialectique de l’incarnation, être en nous, être au cœur aimant (s’il le devient…) de sa créature.

Fiévreux, au lit, depuis maintenant cinq jours, je ne « prends » guère la radio et n’écoute la télévision que rarement. Lecture du Canard, cependant et un peu du Monde. Arnaud Montebourg, sérieux et musclé à la télévision, hier soir (la chaîne parlementaire) mais tard. Il est également encore très jeune, le sait puisqu’il excipe de sa longévité parlementaire, déjà, et de quatorze années de pratique d’avocat. Qui a – article du Monde ? – remarqué que la Cinquième République, d’abord de grands fonctionnaires et d’anciens résistants, est recevenu comme les précédentes, au règne des avocats (ceux de maintenant sont souvent des faux : Mamère, Villepin, Copé) ?

Ephémérides complètement « à côté ».

La comparution de D.S.K. devant son tribunal lundi avec des commentaires de médias audiovisuels retranscrits pour leur ridicule par les médias écrits. Des épisodes nouveaux comme la demande des avocats de la défense de ne pas donner à l’accusation l’analyse du portable car des conserations sont tout à fait condidentielles : secrets d’Etat, du F.M.I., nouveaux rendez-vous galants pour Paris ou ailleurs ?

Les élucubrations du gouvernement et de l’U.M.P. Comment se donner une nouvelle apparence fiscale ? Le « président des riches » ne me gênerait nullement si cela profitait au pays, pas forcément en retour des capitaux placés à l’étranger, toujours compliqué à obtenir, sauf immense mouvement historique (celui de 1958), mais en création d’emplois, en investissements privés, en grands travaux publics (dénomination ministérielle, très symboliquement disparue, oubliée). L’important n’est pas l’image d’un homme ou d’une femme, mais sa capacité à mobiliser et sa créativité. Cette réforme fiscale est uniquement à visée électorale, on est bien en peine d’en dire le substratum éthique ou la novation technique (comme avaient été la TVA, la CSG). Pis, l’agitation qui continue sur les prestations sociales, sur l’immigration et maintenant sur la double nationalité : cette pratique et cette notion n’ont jamais existé en droit positif français, pourquoi réfléchir sur elle. Elle correspond non pas à des doubles fidélités comme il est insinué, et qui seraient impossibles à vivre loyalement, elle tient simplement aux identités de chacun, aux origines et aux terroirs, qu’ils soient régionaux ou étrangers. Copé avec ses « propositions » de conditionner le RSA par du travail obligatoire de proximité supprimerait des emplois existants et pérenniserait des situations désastreuses. Lui-même, cumulant X emplois électifs, plus une rémunération de l’ordre de dix mille euros par mois pour sa matinée hebdomadaire de présence chez Gide, est mal placé pour moraliser les rélunérations et aides sociales… c’est à vomir, et il n’est sans doute pas conscient de son cynisme.

D’une manière générale, comment n’être pas inquiet en profondeur de ce vide et de ces dévoiements de la politique en France à huit-dix mois de l’ouverture d’une campagne qui figera ensuite tout pour cinq ans, si Sarkozy est reconduit à l’identique, et donnera le signal de vociférations haineuses de la droite si elle perd le pouvoir… Les réseaux, les cooptations étaient déjà très apparents depuis une vingtaine d’années, mais les thèmes n’étaient pas – par leur diversité extrême – pernicieux. La corruption financière des partis et de certaines individualités étaient l’objet d’enquêtes et de procès, de punitions., parfois mal dirigées : Emmanuelli, Juppé, Galley…

Trois novations sont intervenues que consacrerait une réélection de Sarkozy – que l’ambiance médiatique malgré des sondages de popularité lamentables pour l’impétrant, tend à faire croire possible…

La première est décisive pour l’esprit public et a marqué la fin du gaullisme en tant que référence générale et surtout lecture de l’histoire de la France contemporaine. C’est l’aboutissement d’une mise en exergue de la shoah et de la participation des autorités, au moins administrations et policières de Vichy, à une partie du dispositif allemand : aboutissement pour des raisons électoralistes faisant porter à la République et à la France la responsabilité de ces crimes. Le discours de Jacques Chirac, salué par beaucoup, comme un élément aussi important pour qualifier son règne, que la non-intervention en Irak, est un reniement de la France libre et une mise très en retrait par rapport à la shoah, de la Résistance, de son persosnnel, et surtout de ses thèmes. Il se trouve que ces thèmes sont tout l’acquis social et institutionnel que la Cinquième République commençante avait porté à leur meilleur degré d’efficacité, de synthèse et surtout de constsitutiuon d’un consensus national : secteur public, nationalisations du crédit, solidarité nationale, tripartisme pour la négociation sociale et la gestion des régimes de sécurité, de santé. Tous éléments combattus par le président régnant, auxquels – ayant perdu son referendum de 2005 – ne sut pas se raccrocher ni pour la consommation intérieure ni pour une mise en cause à Bruxelles de l’ensemble de l’entreprise européenne, donc pour deux nouveaux départs… La conséquence de ce triomphe posthume d’une continuité d’Etat par Vichy et non par Londres et par Alger, a pour effet une pratique de la politique du genre de celle reprochée au Maréchal : enfoncer les gens dans la nécessité du malheur, leur donner des boucs émissaires à haîr, à exclure et à stigmatiser. Elle se développe en culpabilisation des Français archaïques s’ils tiennent à leurs « acquis » et à leur pays face au mondialisme, au libéralisme et aux profits éhontés de leurs dirigeants, à titre personnel.

Justement, la seconde novation est une révélation – mi-assumée (le bling-bling, le Fouquet’s, la fiscalité originelle du quinquennat), mi- accidentelle – de la décomposition morale de nos soi-disant élites. Les recels et cofusions d’intérêts ne sont plus du tout ressentis comme tels par ceux qui les pratiquent : à tel point qu’ils seraient de bonne foi, ils ne se rendraient plus compte… cf. Woerth. Mais le consensus pour que Chirac ne soit pas « embêté » montre combien l’esprit des dirigeants est gangrené de complaisance mutuelle et corporative. Les emplois fictifs de la ville de Paris, à nouveau susceptibles de procès, ne sont toujours pas jugés, l’affaire Clearstream non plus : en plus de quatre ans du nouveau mandat présidentiel… et maintenant ce sont les affaires de mœurs catastrophiques surtout pour l’image de la France à l’étranger. Un président-pantin, des camps de rétention, des prisons lamentables, des législations répressives avec emploi d’armes faisant chroniquement des victimes (la fillette de neuf ans au flash-ball à bout portant) et maintenant D.S.K., George Tron, les insinuations de Luc Ferry… Lupanar d’autant que la plupart de nos dirigeants sont divorcés et en concubinage.

La troisième novation est fille des deux précédentes. Comment un pays discernerait-il ce qu’il doit faire et ce qu’il doit être quand – selon des sondages récents – 24% seulement des Français se disent gaullistes (confusion complète des repères politiques dont l’évolution de l.U.M.P. porte la plus grande part de responsabilité) et moins de quatre Français sur dix croient en Dieu. Plus de structures familiales, plus de repères en morale individuelle, plus de convictions politiques, plus de convictions religieuses. Le vide ? ou la transition ?

La notion-même, la nécessité-même de repères et de structures sont-elles aujourd’hui vraiment ressenties ? Si le chacun pour soi est à court terme, sans solidarité et si tout l’art est d’arriver et de se maintenir, les coudes les plus points et remuants possible, il n’y a forcément plus de vie collective. Le pays n’est qu’un souvenir, mais ce souvenir est ancré – précisément ? – chez beaucoup des immigrants : ceux que nous avons colonisés nous reprochent d’être infidèles à notre idéal ou à notre image.

A suivre…


[1] - Actes des Apôtres XXII 30 & XXIII 6 à 11 ; psaume XVI ; évangile selon saint Jean XVII 20 à 26

Aucun commentaire: