Inquiétude & Certitudes - dimanche 15 février 2009

Dimanche 15 Février 2009

Prier… [1] c’est le Christ. Pour saint Paul, mon modèle à moi, c’est le Christ. Ambition d’une certaine perfection qui a fait courir des générations de religieux et de religieuses, la perfection, la vie parfaite. Je n’en ai jamais été tenté. Le Christ, pour moi et je le suppose comme pour tout chrétien, comme pour tout croyant, comme toute personne en quête d’un tout indicible, en quête de Dieu sans Le nommer, en qupête de la réalité fondamentalement, c’est tout simplement la seule voie d’accès à Dieu, la seule identité saisissable – un petit peu – de Dieu. Si tant est que nous puissions instrumentaliser Dieu, Jésus est Celui par qui nous pouvons connaître Dieu. La perfection, le péché, la rédemption, c’est son affaire, qu’Il nous y associe si cela lui semble utile, c’est merveilleux de délicatesse et de respect pour nous. Mais c’est secondaire, celui que nous cherchons, c’est Lui, celui qui nous équilibre et nous auve de la folie et du désespoir, c’est-à-dire du non-sens, c’est Lui, celui qui nous éblouit, nous réchauffe et garantit nos puissances d’aimer et de comprendre, c’est Lui. Ne soyez un obstacle pour personne, et nous le sommes tous les uns vis-à-vis des autres, plus ou moins, tandis que le Christ, c’est la voie, la vérité, la vie… il regarde la terre pour entendre la plainte des captifs et libérer ceux qui devaient mourir. Les hommes et les commandements ou autres rites divers excluent : les lépreux selon la loi mosaïque : tant qu’il gardera cette plaie, il sera impur. C’est pourquoi il habitera à l’écart, sa demeure sera hors du camp. Jésus – Dieu fait homme – ne dit pas mais fait tout le contraire : Si tu le veux, tu peux me purifier… Pris de pitié devant cet homme… Je le veux, sois purifié. Et paradoxalement, c’est lui qui est exclu par les bienfaits mêmes qu’il apporte : Il était obligé d’éviter les lieux habités mais de partout on venait à lui.

matin

Abdallah, roi tardif d’Arabie séoudite mais depuis longtemps (sous Fahd) le véritable maître du pays, en tout cas de sa politique extérieure, se révèle un très grand souverain, à la manière du fondateur de sa dynastie. Le limogeage du chef de la police religieuse, l’entrée d’une femme au gouvernement avec mission explicite de promouvoir l’éducation moderne des filles sont une véritable révolution. Marche prudente depuis plusieurs années vers un régime plus électif avec la notation – que ma très chère Mariem Daddah – fut l’une des premières à exprimer et mettre en pratique en Afrique subsaharienne : pas de développement, pas de démocratie concrète sans compter d’abord sur les femmes, davantage que sur les hommes. La course au dévoiement et à la barbarie que mène l’intégrisme musulman – de même que nos intégrismes en chrétienté démolissent la figure de Dieu et le sens vrai du spirituel – n’est pas forcément gagnée si une nouvelle théologie triomphe en Islam : je suis convaincu qu’elle existe, et bien entendu que les textes la fondent et l’appellent authentiquement (que les « Occidentaux » sauf des génies comme Massignon et Gardet, ont figés et travestis)et si quelques grands politiques la mettent en termes d’Etat. Abdallah est manifestement de ceux-là. Mais ce sont des sujets que je ne connais guère : la Jordanie ? le Maroc ? l’Islam en Europe (France et ex-Yougoslavie) ?

Christiane Taubira, ministre de l’Outre-mer, comme il faudrait charger des Finances, de la fiscalité, de la réindustrialisation du pays Michel Sapin et une équipe de son choix – en gouvernement de « grande coalition »… pari de même envergure que celui que Jacques Chirac n’avait pas su discerner en 2002 après un plébiscite qui a tout dû au « personnage » de Jean-Marie Le Pen. Elle relève – ayant pris place dans les cortèges guadeloupéens – que les manifestations et bientôt les révoltes socio-économiques de nos Antilles tournent forcément à l’identitaire et au culturel (façon pudique et mesurée d’évoquer une poussée probable d’indépendantisme malgré – précisément – la totale dépendance financière et économique de ces pays). Les gouvernants à Paris n’ont rien compris, et ce n’est pas de ces semaines-ci. Il me semble – mais c’est à approfondir – qu’il faudrait changer les institutions, en sorte que – toujours dans l’unité terrioriale de la République et dans un esprit de communion nationale française – ces îles s’administrent directement et que le lien avec la métropole ne soit plus fait par le préfet et le représentant sur place de l’Etat central, mais soit établi et quotidiennement exprimé par la délégation de ces îles à Paris. Il y a quelque chose à imaginer, je ne suis qu’au seuil de cette réflexion.

soir

Paradoxe … le mouvement social capable de défaire le pouvoir en place nous viendrait de l’outre-mer : 63% des Français croit à la contagion du mouvement guadeloupéen en métropole. Il est vrai que le système parlementaire et médiatique actuel est complètement rigide et qu’il y a trop d’éléments de mécontentement et maintenant de désesopoir pour que la sanction attende l’éventuel non-réélection en 2012 du président régnant. D’où une certaine psychose, puisque pendant les émeutes grecques, 72% des Français croyaient possibles chez nous des soulèvements similaires. Donc d’une tout autre nature que les revendications sociales et maintenant identitaires nous interpellant des Antilles, et semble-t-il – aujourd’hui – de la Réunion également.

Depuis quarante-huit heures, le syndrome du C P E poursuit Valérie Pécresse. Nicolas Sarkozy lui suggère d’autres pistes, il est question d’appliquer le décret sur les enseignants-chercheurs différemment de sa lettre. Voici maintenant un député U M P, lui-même président d’université qui proposerait un texte de rechange. Les personnels concernés veulent davantage : convaincus que le pouvoir veut la suppression du C N R S et considérant que quelques 8.000 emplois sont promis à la suppression. Le moment est arrivé où toute « proposition » gouvernementale, généralement présentée à la manière présidentielle, soudaine, sans concertation et faisant table rase de toutes les expériences et de tous les acquis, sera considéré systématiquement comme le début d’un bouleversement sans rapport avec les assurances patelines données pour entrer en matière.

Il semble que le processus de notre réintégration de l’O T A N fait intervenir l’étranger devant nos députés. Le secrétaire général de l’organisation intégrée (Jaap de Hoop Scheffer) aurait ainsi « planché » jeudi.

Raymond Soubie battant sans doute Jacques Chirac en longévité dans les sphères du pouvoir… il était déjà à Matignon pendant tout le septennat de Valéry Giscard d’Estaing… probablement à l’origine des objections gouvernementales à tout plan de relance par la consommation au prétexte des précédents de 1975 et de 1981, argument si controuvé (en 1975 et 1981, inflation à 1 puis 13%, pas de monnaie unique, décrochage France/Allemagne) que le président ne l’avait pas repris à son compte, laissant au Premier ministre le ridicule d’une lecture trop rapide de notre histoire économique… en une seule journée explique qu’augmenter les salaires aux Antilles serait faire baisser les revenus : dangereusement… et que le protectionnisme ce sont les autres, signant ainsi l’argument présidentiel : maintenir chez nous, voire rapatrier nos investissements automobiles de Tchéquie, par exemple. La Tchéquie qui n’a pas encore ratifié le traité de Lisbonne et qui exerce la présidence tournante de l’Union. Chefs d’œuvre de gestion des conflits sociaux et de nos relations intra-européennes. Relais pris d’Henri Guaino, silencieux depuis des mois… C’est évidemment Raymond Soubie qui dirige la politique économique extérieure et outre-mer de la France : l’affirmation d’Yves Jégo censément secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, selon laquelle l’Etat n’a pas le pouvoir d’intervenir dans les négociations salariales, est la récitation de ce qu’avait dit quelques heures auparavant le conseiller social du président de la République.


[1] - Lévitique XIII 1 à 46 passim ; psaume CII ; 1ère lettre de Paul aux Corinthiens X 31 à XI 1 ; évangile selon saint Marc I 40à 45