Monsieur le Président de la
République,
que
souhaiter en ce troisième anniversaire ? à vous ? à nous ? que
votre médication économique et financière porte les deux fruits qui sont de
l’intérêt de tous ; des Français et de vous, soit la diminution du chômage
et notre émancipation des marchés et des admonestations de Bruxelles dont votre
ancien ministre et directeur de campagne (après avoir été celui de Dominique
Strauss-Kahn) : oui, évidemment. Mais je n’y crois pas et en sus cette
médication a été pratiquée au rebours des espérances des Français à votre élection
et de l’électorat de gauche. C’est un changement historique que la disparition
parmi les partis supposés de vocation gouvernementale, de toute idéeologie et
pensée ou stratégie de gauche. Médication et changement pratiqués sans en
débattre avec nous. Une Assemblée nationale sous contrainte mentale, encore
davantage que sous vos prédécesseurs, un recel de nos institutions de plus en
plus illégitime de président en président, depuis le 27 Avril 1969, sauf
« l’adversaire le plus fidèle » du général de Gaulle : François
Mitterrand. Un congrès de votre parti, truqué d’avance : les frondeurs ne
savent pas passer le Rubicon, Martine Aubry non plus, alors qui vous rappellera
à vous-même ? Il n’y a eu que ce livre vite fameux, celui écrit au nom des
« sans dents ». Permettez-moi de vous dire qu’il est une aide pour le
civisme et pour l’Histoire, comprendre la psychologie de celui qui nous
détermine, activement ou par défaut, cela nous a manqué depuis le départ de
François Mitterrand. Lui et ses prédécesseurs, à commencer par « le plus
illustre des Français », nous les connaissions, nous comprenions ce qui
les animait. Depuis 1995, image de plus en plus forcée et décalée :
Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, vous-même, les médias, une spirale bruyante et
monotone nous faissant assimiler débat et décision avec « la com. »,
même plus cette paternaliste pédagogie conseillée et rédigée par les bureaux…
et les agences-conseils.
Votre
conversion à la planification « souple à la française », à une vraie
politique d’aménagement du territoire au contraire de l’urbanisation et des
« réformes » terrritoriale mettant en exergue des métropoles… votre
conversion à la démocratie référendaire (notamment département par département
pour les assemblages et les compétences faisant les nouvelles régions)… votre
obsession de notre patrimoine industriel et intellectuel… Aulnay, Florange,
Lafarge, Alcatel, Norbert Dentressangle, Areva… pour le plus visible… combien
je les souhaite, combien j’ai cherché à vous en convaincre depuis votre
investiture par le Parti socialiste.
Vous
n’avez accueilli aucune de mes propositions de fond, aucune de mes offres si
modestes de service : un quart d’heure avec vous, toutes les trois
semaines. Il y a trois mois, au moment des élections départementales, vous avez
publié que vous alliez recevoir les Français qui demandent à vous voir…
La
fermeture du Val de Grâce de renommée technique, clinique et scientifique
mondiale et outil important de notre diplomatie d’influence, m’a blessé
personnellement : j’en suis patient depuis vingt ans, ma vie plusieurs
fois sauvée… la base arrière pour François Mitterrand… Raymond Barre, Pierre
Messmer, mon ami éminent Moktar Ould Daddah, Bernard Tricot, Madame de Gaulle,
Pierre Bérégovoy dont le corps fut honoré par plus de 20.000 de nos
compatriotes et de relations chaleureuses de notre pays et de notre gauche. Et
le hideux « Pentagone à la française », des marchés truqués aux
clauses exhorbitantes. Et j’y reviens : le nouvelle carte de nos régions,
sur un coin de table, à trois plus un peu de téléphone (communication !).
Je ne peux vous pardonner cela. Etre dédaigné de vous n’est que pour moi, mais
le bien commun… que nous puissions être fiers de nos gouvernants et de notre
Président ! De même que Jacques Chirac après le scrutin calamiteux de
2002, vous avez manqué le moment du gouvernement d’union nationale, le soir du
11 Janvier dernier.
Le
plus attristant est cette forme de maladie contagieuse : des personnalités
de talent ou de caractère sont devenues médiocres en participant à vos
gouvernements. Je pense à l’excellent Michel Sapin et plus encore manifestement
à Ségolène Royal, que j’avais espérée à l’Elysée dès Mai 2007. Et un homme de
qualité morale, d’équilibre, de loyauté, germanisant de surcroît, n’a pas été
mis en valeur et a été inamicalement congédié : Jean-Marc Ayrault.
La
maladie de notre vie politique intérieure a aussi ses effets en relations
extérieures. Nous n’apportons plus rien à l’entreprise européenne depuis le
traité de Maastricht qui ne pouvait être qu’une improvisation dans le nouveau
contexte allemand et russe. Robert Schuman avait su saisir une conjoncture
analogue, lui, pour fonder. François Mitterrand avait paré au plus pressé par
le plus simple. Nous n’avons pas su profiter de notre force nouvelle par le refus
populaire de Mai 2005 et par votre élection également populaire en Mai 2012. Le
traité de Lisbonne a été écrit et ratifié à huis-clos et le soir-même de la
prise de vos fonctions vous avez couru à Berlin ratifier le pacte budgétaire
dont nous ne voulions pas et qui n’avait pas même été discuté par vous. Au
contraire, dans l’opposition, vous vous y opposiez… Couru à Berlin alors que
Schmidt s’était précipité à Paris, à la Pentecôte de 1981 et que l’été de 1958,
c’étaient Foster Dulles et Harold MacMillan qui faisaient le déplacement. Nous
sommes seuls en Afrique, vous n’avez pas su convaincre nos partenaires
européens, alors que la soi-disant si faible Quatrième République avait su
faire prendre par nos partenaires du « Marché commun » une partie de
notre fardeau Outre-Mer, Algérie comprise si peu ragoûtante alors du fait de
cette guerre maléfique.
Si
vous lisez cette lettre, c’est qu’il y a encore une espérance de changement en
vous. Je resterais alors jusqu’à la fin de votre actuel mandat à votre disposition,
si vous voulez dans la tranquillité d’une confiance mutuelle enfin organisée en
conférer un peu avec moi hors clivages, hors tribus, hors organigramme.
On
n’attend jamais trop, mais quelles racines a mon espérance ? après trois ans de ce mandat, si
chaleureusement déféré à celui qui paraissait en équité, en calme, en
intelligence l’homme nous répondant avec sincérité, plus encore que l’homme de
la situation. Vous nous paraissiez notre homme. Donc, celui de la France au
présent et au futur.
J’aimerai, Monsieur le
Président de la République, pouvoir vous écrire tout autrement, dans le bonheur
et dans l’admiration.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire