Vendredi 28 Janvier 2011
Prier… [1] Quand le Seigneur conduit les pas de l’homme, ils sont fermes et sa marche lui plaît. S’il trébuche, il ne tombe pas, car le Seigneur le soutient de sa main. La Bible judéo-chrétienne (l’Ancien Testament, pour l’Eglise) est réconfortante, elle s’adresse si souvent à la sensibilité au risque que nous nous méprenions et entrions dans quelque thérapie compassionnelle, elle est imagée et anecdotique ce qui enchante tout enfant ou toute âme d’enfant, elle est proche, alors que l’évangile peut être sévère, mais toujours pédagogue : par de nombreuses paraboles semblaables, Jésus leur annonçait la Parole, dans la mesure oùs ils étaient capables de la comprendre. Il ne leur disait rien sans employer de paraboles, mais en particulier il expliquait tout à ses disciples. Dieu, dans notre histoire personnelle, dans le parcours de sa création, dans les Ecritures qu’Il a inspirées, dans les commandements qu’Il nous a donnés et nous donne, est à notre portée. La parabole de l’épi, celle de la graaine de la moutarde, du petit et banal à l’immensité d’un accomplissement et de notre salut. Nous ne sommes pas les hommes de l’abandon (thème cher au Coran), pour notre perte, mais les hommes de la foi, pour la sauvegarde de notre âme. Ainsi soit-il.
matin
Aucun écho du discours de Sarkozy hier à Davos… Egypte, tout se joue cet après-midi à la sortie de la Prière. Ce sera la troisième manifestation. Selon Boutros-Ghali, El Baradeï, de retour hier et se proposant pour diriger un gouvernement de transition, n’a pas chez lui l’audience qu’il a internationalement (la direction générale de l’A.I.E.A. et le prix Nobel de la paix), mais on va bien voir. Un pays ayant un prix Nobel de littérature et deux prix Nobel de la paix, tous trois vivants… ce n’est pas rien. Les Frères musulmans sont de la partie, eux aussi. Internet est coupé, les communications SMS et texto devraient l’être dans l’après-midi. Quelle position vont prendre les Etats-Unis ? et quels conseils sont-ils en mesure de donner à l’armée ?
Le début du parler vrai… pas tant à cause de « l’islamisme » qui triompherait faute qu’aient pu tenir les dictatures arabes, mais parce qu’il est vital de faire de la Chine un partenaire « normal » au sens d’un accord sur les règles du jeu, puisqu’elle est déjà – avec l’Inde – assez exceptionnelle par son poids à tous égards.
fin d’après-midi
On interroge un des chefs du parti d’opposition tradionnelle, le Wafd : il est à Washington, venant de France et repart dans deux jours pour l’Egypte. Son propos dans un français impeccable est de portée universelle.
Je le note à la volée, tandis que je suis en voiture. à compléter ainsi que les nouvelles factuelles
début de la nuit
La télévision donne sur l’Egypte beaucoup plus que que sur la Tunisie, la semaine dernière, pas à cause de la différence de taille, considérable, ni de la position stratégique, elle aussi considérable sinon capitale, mais parce que la Tunisie – où pourtant rien n’est joué ni terminé puisqu’il a fallu deux semaines pour que le gouvernement s’épure des partisans de Ben Ali mais encore du Premier ministre nommé par celui-ci il y a maintenant plus de douze ans – a fait croire à un scenario répétitif. Donc, tout le monde est venu au Caire avant le paroxysme, tandis qu’à tunis on est arrivé après… Internet et téléphone coupés, aucune vue ni analyse globale ne sont possibles. Comme en Tunisie, l’acteur filmé et interrogé est « le peuple », pas les tenants du pouvoir.
Quelques secondes d’El Baradeï dans la foule, quelques images d’une voiture de police qui cernée et sans doute pouvant être renversée et incendie, fuit, puis… des véhicules blindés de l’armée.
L’allocution annoncée et attendue de Moubarak depuis le début de l’après-midi n’a pas encore eu lieu.
Réactions américaines ne condamnant pas encore Moubarak mais le mettant en demeure de dialoguer et de réformer : Hillary Clinton lit un long texte, je ne peux m’empêcher de la regarder comme un personnage factice et très secondaire, sans charisme ni réelle expérience. J’avais une meilleure impression d’elle pendant sa campagne. Réactions françaises : le porte-parole du Quai, où vont-ils chercher des noms qui sont un peu frontière ? Bernard Valero… ce serait sans importance quand on a eu Klotz (alsacien) ou Pam accompagnant tous deux Clemenceau, s’il y avait du talent et de la présence. Visage filmé de trop près, sans doute pas beau au naturel, affreux et caricatural tel que présenté au petit écran. Contenu nul : appel au rétablissement de l’apaisement, sic… pour nous, pas même la leçon de communication de la Tunisie.
Ce que j’attendais se produit alors mais sans doute à huis clos : discussion « parisienne » sur la brochure-cri de Stéphane Hessel qui serait tout simplement l’anticipation française des indignations tunisienne puis égyptienne. Un docte opine que l’indignation trop continue empêche l’action (la mienne est attestée par mon premier article dans Le Monde, le 30 Mars 1972, et n’a plus cessé depuis), un autre interroge sur le pourquoi du rayonnement de la brochure, on cherche si c’est ou non son désintéressement ou son peu de programme. On oublie tout simplement qu’à quatre-vingt-quinze ou quatre-vingt-seize ans, un homme qui s’exprime et qui n’a rien à cacher, n’est que pur.
Evidemment, à Paris, qui pourrait croire à une contagion chez nous de ce qu’il se passe de l’autre côté de la Méditerranée. Alors même que la corruption, le cynisme… l’indifférence vis-à-vis de la misère, de l’indignation ou du rejet populaires sont du même ordre sans l’excuse absolutoire des pays qui n’ont aucune expérience de la démocratie. La France régresse alors que ces pays avancent.
nuit
Le chef d’état-major de l’armée égyptienne se trouvait à Washington à la veille des premières manifestations. – Selon les informations dont je dispose, pas encore de discours de Moubarak.
A ce rythme haletant que l’on ressent – malgré le tamis des commentatrices des bords de Seine interrogeant gravement les correspondants sur place pour leur faire dire que l’armée ne tirera pas, et leur aire traduire les arrière-pensées des sous-officiers égyptiens… comment ne pas imaginer qu’en quelques heures – sauf sous de Gaulle – un régime français serait emporté s’il lui arrivait d’être ainsi pris à partie et sommé de s’en aller. L’exemple de l’indignation nous vient d’un nonagénaire et de peuples où près de 70% de la population a moins de 30 ans.
début de la nuit
La télévision donne sur l’Egypte beaucoup plus que que sur la Tunisie, la semaine dernière, pas à cause de la différence de taille, considérable, ni de la position stratégique, elle aussi considérable sinon capitale, mais parce que la Tunisie – où pourtant rien n’est joué ni terminé puisqu’il a fallu deux semaines pour que le gouvernement s’épure des partisans de Ben Ali mais encore du Premier ministre nommé par celui-ci il y a maintenant plus de douze ans – a fait croire à un scenario répétitif. Donc, tout le monde est venu au Caire avant le paroxysme, tandis qu’à tunis on est arrivé après… Internet et téléphone coupés, aucune vue ni analyse globale ne sont possibles. Comme en Tunisie, l’acteur filmé et interrogé est « le peuple », pas les tenants du pouvoir.
Quelques secondes d’El Baradeï dans la foule, quelques images d’une voiture de police qui cernée et sans doute pouvant être renversée et incendie, fuit, puis… des véhicules blindés de l’armée.
L’allocution annoncée et attendue de Moubarak depuis le début de l’après-midi n’a pas encore eu lieu.
Réactions américaines ne condamnant pas encore Moubarak mais le mettant en demeure de dialoguer et de réformer : Hillary Clinton lit un long texte, je ne peux m’empêcher de la regarder comme un personnage factice et très secondaire, sans charisme ni réelle expérience. J’avais une meilleure impression d’elle pendant sa campagne. Réactions françaises : le porte-parole du Quai, où vont-ils chercher des noms qui sont un peu frontière ? Bernard Valero… ce serait sans importance quand on a eu Klotz (alsacien) ou Pam accompagnant tous deux Clemenceau, s’il y avait du talent et de la présence. Visage filmé de trop près, sans doute pas beau au naturel, affreux et caricatural tel que présenté au petit écran. Contenu nul : appel au rétablissement de l’apaisement, sic… pour nous, pas même la leçon de communication de la Tunisie.
Ce que j’attendais se produit alors mais sans doute à huis clos : discussion « parisienne » sur la brochure-cri de Stéphane Hessel qui serait tout simplement l’anticipation française des indignations tunisienne puis égyptienne. Un docte opine que l’indignation trop continue empêche l’action (la mienne est attestée par mon premier article dans Le Monde, le 30 Mars 1972, et n’a plus cessé depuis), un autre interroge sur le pourquoi du rayonnement de la brochure, on cherche si c’est ou non son désintéressement ou son peu de programme. On oublie tout simplement qu’à quatre-vingt-quinze ou quatre-vingt-seize ans, un homme qui s’exprime et qui n’a rien à cacher, n’est que pur.
Evidemment, à Paris, qui pourrait croire à une contagion chez nous de ce qu’il se passe de l’autre côté de la Méditerranée. Alors même que la corruption, le cynisme… l’indifférence vis-à-vis de la misère, de l’indignation ou du rejet populaires sont du même ordre sans l’excuse absolutoire des pays qui n’ont aucune expérience de la démocratie. La France régresse alors que ces pays avancent.
nuit
Le chef d’état-major de l’armée égyptienne se trouvait à Washington à la veille des premières manifestations. – Selon les informations dont je dispose, pas encore de discours de Moubarak.
A ce rythme haletant que l’on ressent – malgré le tamis des commentatrices des bords de Seine interrogeant gravement les correspondants sur place pour leur faire dire que l’armée ne tirera pas, et leur aire traduire les arrière-pensées des sous-officiers égyptiens… comment ne pas imaginer qu’en quelques heures – sauf sous de Gaulle – un régime français serait emporté s’il lui arrivait d’être ainsi pris à partie et sommé de s’en aller. L’exemple de l’indignation nous vient d’un nonagénaire et de peuples où près de 70% de la population a moins de 30 ans.
minuit
Moubarak limoge ses ministres et promet des « mesures ». L’essentiel n’est pas cédé : il reste, pas même une promesse d’élections vraies. Une vingtaine de morts pour un changement très subalterne. Il n’a pas compris. – Tunis, la Kasbah évacuée, c’est-à-dire les bureaux du Premier ministre, en place depuis douze ans, dégagés… avec violence.
[1] - lettre aux Hébreux X 32 à 39 ; psaume XXXVII ; évangile selon saint Marc IV 26 à 34
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