Samedi 9 Octobre 2010
Prier… [1] textes sur l’abolition de tout racisme, de toute inégalité, de toute sécession de quelque ordre que ce soit : en Jésus-Christ, vous êtes tous fils de Dieu par la foi… il n’y a plus ni Juif ni païen, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus. Et Jésus lui-même nous regarde ainsi : Comme elle est heureuse la mère qui t’a porté dans ses entrailles, et qui t’a nourri de son lait ! – Heureux plutôt ceux qui entendent la parole de Dieu et qui la gardent. Les traductions de mon enfance donnaient : et qui la mettent en pratique. Pourtant cette prédilection mariale, le Christ la cultive, il laisse sa mère l‘accompagner jusqu’au pied de la croix et se soucie du matériel et de son avenir. Le spirituel, Marie, d’une certaine manière, ne le tient que d’elle-même par le dialogue disant, lors de l’Annonciation, sa totale disponibilité à Dieu, à son Fils. On ne lui connaît que deux phrases, sauf erreur de ma part : vois comme ton père et moi… quand, avec Joseph, elle retrouve l’enfant au Temple, après trois jours de calvaire déjà, d’inquiétude, et à Cana : ils n’ont plus de vin. Marie ne demande jamais rien, elle reconnaît les faits. Jésus reste dans ce registre : le fait d’une béatitude générale de l’humanité croyante et exaucée. Paul, avec audace, conclut : la Loi comme un surveillant, nous a menés jusqu’au Christ. Et maintenant qu’est venu le temps de la foi, nous ne sommes plus sous la domination de ce surveillant. La loi, le rite, le péché, sans doute : Jésus va vers les pécheurs, les accueille, est reçu par eux, le péché est plus identifié selon ceux qui en sont socialement porteurs, quasiment des malades aux yeux des tiers, que selon sa matière, son objet. En revanche, la foi, la liberté, l’accomplissement sont un état, un constat, un chemin.
La dépêche AFP confirmant ce que je redoutais : Sarkozy au Vatican « soulagé ». L’Eglise de France avait su lui faire observer ce qu’il faisait. Le pape, dont j’admire la lettre aux Irlandais qui me paraît avoir clos, au printemps dernier, la si périlleuse discussion sur le clergé et les mœurs les plus dégradants, semble avoir oublié cette polémique bien plus corrosive : Pie XII et les abominations nazies pas assez dénoncées et publiquement condamnées. Voici Benoît XVI donnant tous moyens de propagande au pouvoir actuel, en France, quand celui-ci est critiquée par tant de Français, par tant d’évêques, par la Commission européenne, par les Nations Unies, par le président des Etats-Unis … la dépêche précise que Sarkozy a assuré au pape qu’il allait continuer et pourtant il quitte le Vatican « soulagé ». La foi et la confiance – dans la personnalité de ce pape comme de ses prédécesseurs – n’excluent ni la tristesse ni la réprobation. Les miennes sont totales ce matin. Une telle bêtise d’un côté : se laisser envelopper ainsi alors qu’il suffisait d’éluder ou retarder l’audience…, une telle propagande cynique de l’autre : Le président français a enfin estimé que l'Église et la République française pouvaient travailler pour « proposer à l'humanité un sort meilleur que celui qui lui semble promis aujourd'hui par l'accumulation de tant de déséquilibres et d'injustices ». Evoquant la crise financière de 2008, il a rappelé qu'un « monde uniquement gouverné par la rente, la spéculation, l'appât du gain à court terme et, disons-le, par l'égoïsme et le cynisme, n'est pas viable ». « Réguler la finance pour éviter que la folie spéculative n'entraîne une fois encore le monde au bord du gouffre, en finir avec les paradis fiscaux, taxer les transactions financières pour avoir les moyens d'arracher les pays les plus pauvres à la misère, c'est un impératif moral ! », a-t-il déclaré. « Lutter contre l'immigration illégale qui produit tant de détresse et de drames, qui prive les pays les plus pauvres de leurs forces vives, c'est un impératif moral ! », a-t-il ajouté.
J’écris au Nonce. "Merci pour tout ce que vous faites pour la France et pour la chrétienté", a déclaré le pape à l'issue d'un entretien de trente minutes avec M. Sarkozy, selon des enregistrements videos du Centre de télévision du Vatican visionnés en fin de journée par l'agence d'information religieuse i.media
petit matin
Ecrit au Nonce apostolique en France.
Reniac, le mercredi 15 Septembre 2010
dans l’ambiance qui se caractérise de plus en plus au sujet des expulsions et aussi des déchéances de nationalité française, toutes marquées par la discrimination et le racisme, et pour ne pas mésestimer le vent de révolte, de honte et de répriobation en France envers la politique actuelle,
puis-je vous supplier ? de dire à Sa Sainteté que recevoir le président de la République française ces temps-ci, serait contre-productif. La propagande de l’Elysée fera état d’une compréhension quel qu’en soit le degré et enfermera le Souverain Pontife.
J’avais quant à moi déjà regretté que Celui-ci daigne se rendre à l’Elysée alors que le Dalaï Lama était interdit de palais officiel en France et regretté aussi qu’Il ait reçu un deux fois divorcé en audience censément privée, qui au surplus n’a pas eu le maintien physiquement convenable pendant ce haut entretien.
Depuis Sa lettre aux Irlandais, le Saint Père a manifestement trouvé Ses marques et a le ton qui correspdent très bien aux fondements si assurés des convictions qu’Il commence de rendre contagieuses, et qui accompagnent la prise de conscience contemporaine que notre époque manque de repères et de structures.
Opposer au président français un refus d’audience, même si le refus reste secret, sera très significatif. Le cher Paul VI avait su le faire vis-à-vis du président français ayant promulgué, et en fait explicitement voulu la loi sur l’avortement. Ce sera aussi approuver l’attitude de compassion et de fraternité de beaucoup de nos évêques envers les Roms et gens du voyage : ils sont au front. Et que ce soit, en grande partie, l’Eglise qui prend en charge l’honneur de la France concrétise beaucoup le magistère.
Sans qu’il y ait urgence, vous savez que je serai heureux et honoré de vous rencontrer, et vous prie d’ici là, d’être bien sûr de mes sentiments très déférents envers vous et votre haute mission, et aussi de communion avec le Saint-Père. /.
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Reniac, le matin du samedi 9 Octobre 2010
quoi de plus simple et anodin que d’éluder une demande d’audience au motif que Sa Sainteté a un agenda trop chargé ou qu’Elle est légèrement souffrante, et l’on reporte, sans dire non…
Quoi de plus parlant, après que les évêques français en charge de la pastorale des Roms et des gens du voyage aient réprouvé le fond et la manière des expulsions ethniquement ciblées, cf. a posteriori la circulaire du ministère de l’Intérieur, en date du 5 Août, et maintenant la découverte d’un fichier des Roms tenu et exploité par la gendarmerie en toute illégalité (réactions de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et de la Commission nationale informatique et libertés), après que le digne successeur du cardinal Salièges se soit exprimé à Lourdes au prix des plus lourdes comparaisons qui cependant viennent à l’esprit dans un pays se voulant image des droits de l’homme pour le monde et sous un mandat présidentiel voulant rendre « irréprochable » la démocratie française… oui, quoi de plus parlant, qu’un refus motivé d’audience au Vatican – ne concédant à l’Elysée que la non-publicité de ce refus…
Quoi de plus attristant – donc – que l’audience d’hier, et plus encore les propos tenus s’il faut en croire les videos… et quoi de plus naïf et subordonné que le communiqué émis ensuite.
Pie XII – si décrié – injustement à mon sens, car le dossier de son influence et de ses interventions auprès du Reich se tient, mais décrié quand même car les images sont fortes et beaucoup ont intérêt, même parmi des catholiques, à les entretenir et propager – Pie XII donc n’aurait pas condamné assez vivement ni publiquement les abominations du Reich. Il y avait la guerre, il y avait les catholiques en Allemagne-même et dans toute l’Europe occupée. Il y avait la personnalité de Hitler. S’en est-on souvenu en acceptant la demande d’audience ? Les poignées de main, les sourires, les mots qui restent, même si l’on a été le vainqueur de Verdun. Les choses d’aujourd’hui ne sont qu’apparemment bien plus petites et moindres.
L’audience et les propos échangés, la gratitude exprimée par le Saint-Père sont accordés à un homme que beaucoup d’observateurs, et j’en suis, juge malade d’un manque d’hérédité, d’un manque d’éducation et d’une tolérance révérentielle sans précédent en France de la part d’une cour politique et médiatique intéressée à le supporter. Accordés à un moment où se joue la réélection du président actuel selon son discours de Grenoble et tandis que se boucle au Parlement la votation d’un texte provoquant une chaîne de manifestation et de grèves qui, au mieux pour le pouvoir en place, auront pour précédent les événements de Novembre-Décembre 1995, et peut-être iront beaucoup plus loin. Accordés alors que l’Union européenne a entamé une procédure d’informations sur les expulsions des Roms et de sanction sur la non-transcription en droit français des directives pertinentes. Accordés alors que se sont exprimés – en termes de vive réprobation – non seulement la Commission européenne, bien des Etats-membres de l’Union mais aussi les organes compétents des Nations Unies et le président américain.
Les responsables du prix Nobel, à Oslo – ville déjà célèbre pour avoir donné son nom à leur seule tentative sérieuse pour la paix au Proche-Orient et dans les Lieux-Saints – le jour-même de cette audience et de ce qui est reçu en France et par les chrétiens et par l’opinion mondiale comme un soutien du Saint-Pierre au président Nicolas Sarkozy, personnellement, accorde au contraire sa plus haute distinction à un dissident chinois et, malgré sa puissance, porte le défi à un régime totalitaire que les principaux Etats de la planète déléguant leurs chefs à l’ouverture des Jeux Olympiques n’avaient pas osé signifié … par leur simple abstention.
La simple abstention du Saint-Père – après les quelques mots de réprobation prononcés et diffusés cet été – suffisait.
Vous le savez, je l’ai écrit et publié, je me bats et me battrai pour le renom de notre Eglise, quels que soient ses péchés et ses erreurs au temporel. La lettre du Saint-Père aux Irlandais a été magnifique et adéquate, le voyage d’Etat en Grande-Bretagne et la béatification de l’admirable et si politique cardinal Newman ont été d’un ton très juste : Benoît XVI est né à lui-même ces derniers mois, en tant que Souverain Pontife et une lumière pour notre temps. Le pontificat devenait très consistant, ses timidités – il y aurait à dire et à ajuster sur l’encyclique, de l’an dernier, actualisant l’excellente lettre de Paul VI Populorum progressio – allaient être palliées.
Pourquoi alors une telle bêtise, hier ? Pardonnez ce mot fort. Une bêtise si évitable… Je m’étais permis, sans doute avec d’autres dont je n’ai pas l’écho, de vous écrire pour que cela soit évité.
Sachez cependant que mon affection, mon admiration en tant qu’homme, et ma confiance et ma vénération en tant que chrétien catholique pratiquant, reçu naguère par notre splendide Jean Paul II, demeurent évidemment entière. « Errare humanum est, perseverare diabolicum ». L’erreur fait même aimer davantage, la faillibilité humaine fait ressortir la grâce donnée aux chrétiens par leur foi en l’infaillibilité pontificale.
On pourrait penser à quelques communiqués ou nouveaux propos « corrigeant » le 8 Octobre, voire à une audience donnée à des délégations de Roms de tous pays européens… ce me paraît inutile, maintenant que la bêtise a été faite. Mais toute spontanéité sera bienvenue, si le Saint-Père en a l’inspiration.
J’ajoute que notre ambassadeur près le Vatican m’avait naguère choqué quand, représentant la France au Conseil de sécurité, il avait commenté un débat sur les drames d’initiative israëlienne au Sud-Liban, avec le sourire… nous avions un sourire à peine plus contenu, au visage et dans la voix du ministre défendant le projet de réforme des retraites au Sénat, à l’ouverture du débat mardi dernier.
La prière assure notre persévérance et consolide notre foi.
En vous priant d’accepter l’expression – que j’ai voulu vive – de ma tristesse, que doivent partager énormément de chrétiens et de catholiques en France et en Europe, je vous redis cependant tous mes sentiments de filial dévouement pour notre sainte Eglise, son chef et toute sa hiérarchie.
J’ai pensé que les sentiments que je vous exprime et qui sont ceux de beaucoup, ne devaient pas seulement être devinés par vous et par le Saint-Père, mais lus noir sur blanc, ou plutôt blanc sur noir.
midi
La démocratie française, l’ « irréprochable » voulue et pratiquée par le prince régnant : l’amendement (soit disant lâcher de lest, déposé par l’Elysée) voté au canon et aussi à trois heures du matin les 62 ans, faire en sorte que les 67 ans pour la retraite sans décote soit voté avant la journée du mardi 12, de manière à ce que le début et le scrutin au Sénat ne doive rien à l’opinion des Français que l’on ne saurait consulter par referendum (inutile et absurde selon Eric Woerth) mais qui, selon les sondages, approuvent à 71% la manifestation de mardi.
Qui proteste contre le cumul de fonctions : le ministre de l’Education nationale est aussi le ministre de la Propagande ! abus par personne d’autorité sur les jeunes… texte commentant les manifestations lycéennes d’hier et les minimisant : 2% sur les 4.300 lycées. De crainte (en aveu…) que pour la sécurité des lycéens s’il leur venait à l’idée de grossir les manifestations des adultes (en fait, la jonction des mouvements lycéens et étudiants avec l’ensemble du mouvement social puis les grèves de tout le secteur public, en gros les transports, l’énergie, plus la paralysie chez Total, c’est la hantise du pouvoir régnant) : mon rôle est de dénoncer les tentatives de récupération et les dangers courus par les lycéens, les anonymes et les appels locaux, les tracts. Je veux rappeler que les manifester sur la voie publique est dangereux. Mon rôle est d’expliquer que la réféorme des retraites est pour eux, une retraite sur dix déjà n’est payée qu’à crédit, éviter qu’ils payent les retraites de leurs parents et de leurs grands-parents. Cette réforme c’est d’abord pour les jeunes…
soir
Chaîne du Sénat, débuts de la Cinquième République, en noir et blanc, le 8 janvier 1959, l’extraordinaire majesté produit la plus grande communion, au-delà de l’émotion ou de l’admiration. De Gaulle dit – par cœur, mais sans le moindre effort – ce qu’il a sur le cœur, tout est dans le ton, les mots servent le ton, la diction et la stature physique, historique tout est dans ce final en crescendo : Vive la Communauté ! Vive… la République (celle-ci non pas au sens fumeux, des valeurs, c’est-à-dire des reproches aux autres ou des choses qu’on revendique, ni même un régime, ce qui serait plus exact mais pas beaucoup plus, celle-ci au sens de la chose qui est centrale, que nous avons construite, qui nous meut et nous structure, que nous voulons) ! Vive (l’accent tonique à plein presque crié, aidé de la main droit mais sans emphase, que la force)… vive… la France (le ton paraît avoir tombé, il est tout simplement intensément, immensément posé, le tout est donné, l’avenir, le passé, l’actualité, la foi, le beau, le contingent, le vivant) ! Il m’a semblé que René Coty aidait l’homme du 18-juin, « le plus illustre des Français », à se défaire du Grand collier…
La courte séquence vaut toutes les appréciations de l’instant politique que nous vivons et que Le Monde – mon cher journal, mais à lire la notice sur Pigasse dans le cahier thématique du Canard Fric et politiquemquelle inqquiétude, quelle angoisse, flibuste et réseaux au pouvoir partout, ibido de la puissance-soi et de l’écrasement d’autrui) – titre : L’Elysée veut refermer au plus vite le dossier de la réforme des retraites. Il n’y a pas un mois, ce devait être le bilan et la démonstration d’excellence du quinquennat. Cet homme a peur, ce pouvoir a peur, cette politique a peur, elle ne sait pas s’expliquer, et sans doute pas à elle-même non plus.
[1] - Paul aux Galates III 22 à 29 ; psaume CV ; évangile selon saint Luc XI 27.28
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