lundi 15 décembre 2008

Inquiétude & Certitudes - lundi 15 décembre 2008


Lundi 15 Décembre 2008

Du gouvernement de la France

Bilan de présidence française de l'Union européenne (Nicolas Sarkozy aux commandes)

L'explosion grecque




En attendant l’ouverture de la poste, l’église. Un quart d’heure, des prospectus bien faits offerts par la paroisse de Saint-Aignan, que je connais, son château, en Loir-et-Cher. Une association éditrice : Croire. Le prêtre ? la messe ? pas trop mal expliqués, sauf que cela attend le miracle. Couverture d’une revue sur Lourdes, portrait d'un processionnaire en liturgie... splendidement photogénique, Bob…l’œil vrai, dense, magnifique, un énorme ostensoir, on ne voit qu’une partie du visage et une hostie orangée, celle d’un soleil couchant. Contagion de la consécration. Voilà un homme serein par méthode, volonté, formation, et aussi parce que l’emploi lui va à ravir, que la vie religieuse, le célibat, les honneurs, une quantité de régularités, d’habitudes et de libertés ont fait de son existence humaine un mélange bien cohérent sans grumeaux, robe sans couture. Des drames intérieurs, dans le passé, bientôt ? il a de quoi les surmonter, il a le don de l’amitié, il est fin, il me l’a montré, un accompagnement certain dans les années les pires de ma vie. Sans introspection, mais partageant peines et chants, illusions et tentatives, les chutes je les disais peu tant elles se voyaient.


L’église paroissiale, tranquille, pour éclairage, le prisme d’une lumière sur quelques bancs à l’aplomb des vitraux de de Langlais, le rétable et l’autel sont simples, un baroque sans époque, silence, propreté, un chaleureux dépouillement. Prier pour ma chère femme, et – don de ce moment – perception que je ne sais pas prier, que depuis des années je ne prie pas en débit de mes participations aux messes dominicales et plus, en dépit de ma lecture des textes chaque jour, en dépit du murmure cordial par lequel je répond à toutes visitations, mais posté devant Dieu sans lire, dire ni écrire, peut-être pas même en regardant… ni mots ni attitude ne me viennent que l’aveu de ne pas savoir prier, de ne pas prier donc. La misère comme un sac, ma présence d’absent, je ne sais pas même les déposer.
Je n’ai trouvé qu’après, maintenant, un début de réponse si c’est utile… ce que je ne crois pas. Me pousser, me projeter dans le simple geste-élan d’aimer. Aimer cet Inconnu suprême, incarné à telle époque, qui eut un visage, qui l’a en ce moment où je cherche. De grands saints, et surtout des obscurs ont su le rencontrer et ne jamais se rassasier de la rencontre que – obscurément – ils faisaient ou avaient faite. Une fois, mille fois, sans cesse, ou un unique instant ? qui le sait ? désirer prier. Désirer Dieu. Toi, Vous, mon Dieu, notre Dieu. Noël et Avent.

Prier de toutes mes forces, de toute ma foi, de toute mon impussance. Le commandement, pas la recommandation, du Christ et de la Bible, tu aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes forces, c’est bien plus prenant que la prière, et d’ailleurs le point commun est la ferveur, le recueillement, l’espérance, la guette du sourire. Hier, Paul aux Thessaloniciens : soyez toujours dans la joie, priez sans relâche, rendez grâce en toute circonstance [1]. Ce moine, que nous pensons notre frère spirituelle : la prière de louange est la plus efficace. Allons-y. Louer Dieu de recevoir de Lui la force, le goût de Le prier. Jésus nous convie au spectacle, à une joute dialectique, rhétorique, philosophique. Les chefs des prêtres et les anciens du peuple l’abordèrent pour lui demander : ‘’ Par quelle autorité fais-tu cela , et qui t’a donné cette autorité ?’’. Dispute qui se conclut par un aveu d’ignorance tenant aux contradictions dans lesquelles s’enferrent les incrédules quand ils se croient supérieurs : coincés superbement, ils entendent Jésus les enfoncer : Moi, non plus, je ne vous dirai pas par quelle autorité je fais cela. Il y a parfois de « bons moments » dans les Ecritures… dans l’évangile. Jésus se voyait, en fait, refuser l’autorisation d’enseigner dans le Temple : A mon tour, je vais vous poser une seule question ; et si vous me répondez, je vous dirai, moi aussi, par quelle autorité je fais cela. Et de s’appuyer sur l’exemple qu’a donné Jean Baptiste. Quant à l’oracle de Balaam, fils de Béor, payé pour maudire Israël, mais complètement retourné au moment de prononcer son texte (l’esprit de Dieu vint sur lui), c’est l’ouverture d’une bande dessinée : Ce héros, je le vois – mais pas pour maintenant – je l’aperçois – mais pas de près : Un astre se lève, issu de Jacob, un sceptre se dresse, issu d’Israël, c’est-à-dire dans la lignée des promesses faites à Abraham et ainsi de suite. Qui suis-je pour prier ? sinon un descendant d’Abraham que les disciples du Christ ont enseigné à reconnaître que ce qui avait été promis et attendu, s’est réalisé. Se réalise…. Le secret du Seigneur est pour ceux qui le craignent ; à ceux-là, il fait connaître son alliance. [2]



Du gouvernement de la France… que de textes, que de débats, que d’essais dans la France du XIXème siècle, changeant de régime tous les vingt ans. Nous avions depuis près de cinquante ans trouvé les solutions, assuré des coûtumes et des jurisprudences. De Gaulle, les circonstances algériennes, l’ébullition de Mai 68, puis la mise en jeu de la responsabilité preésidentielle par referendum étaient la fondation. François Mitterrand, comme sans doute l’aurait fait Valéry Giscard d’Estaing, y a ajouté la « cohabitation ». Le dérèglement est venu – en droit du quinquennat et du couplage jusqu’à présent des élections à l’Elysée et au Palais-Bourbon – et en fait de la pratique de Nicolas Sarkozy, président de la République. L’autocratie irresponsable, sauf refus populaire de renouveler le mandat au bout des cinq premières années.

Ephémérides : le travail dominical, volonté de Sarkozy et arbitrage dans la procédure parlementaire, par Sarkozy. Le plan de relance, des mesures sur la pauvreté et la précarité, c’est lui. Une mission confiée au secrétaire d’Etat à l’industrie et au commerce – en fin à la multiplication des grandes surface, poste à mi-temps, puisque cela permet d’être aussi porte-parole du gouvernement, en fait de l’Elysée, depuis la disparition pour Hollywood de David Martinon – c’est Sarkozy. Le Premier ministre ? dont le rôle constitutionnel, conforté par toutes les jurisprudences de nos cinquante ans de Cinquième République, aurait été de mener ces différences actions et procédures, en est réduit à commenter les mises en cause de certains des ministres ou sous-ministres.

Résultat : la peur. Le syndrome grec, l’Ouest se soulevant dans ses principales agglomérations, la France-Comté ayant donné le signal. La réforme des lycées, non concertée et sans visibilité puisqu’affectant la seconde sans qu’on ait discuté de la première et encore moins des terminales – les suppressions de postes – le ton surtout du ministre qui ne pourra plus retrouvé la confiance de ses administrés soit parce qu’il abandonne par contrainte, soit parce qu’il a trop voulu passer en force. Hier encore, étaient programmées conférence de presse pour mardi et diverses mises en œuvres. Xavier Darcos cale ce matin, les manifestations de jeudi ne sont pas contre-demandées. Au ministre qui déclarait fièrement n’être pas celui de « l’hésitation nationale », Jack Lang, pas en retard d’une grandiloquence, lui prédisait un Vietnam s’il continuait de cette façon.

Leçon, les adultes n’en imposent pas alors que la mise en cause de l’âge de la retraite, du repos dominical ou des libertés audio-visuelles tant vis-à-vis de l’argent que du pouvoir politique, devraient les mobiliser et surtout leur faire inventer des formes de protestation intimidant vraiment le pouvoir : ce n’est pas le cas depuis le mouvement – corporatiste s’il en est et contraire au bien commun, notamment écologique – des chauffeurs-routiers en 1996. Depuis douze ans, aucun mouvement social n’a fait dévier le pouvoir en place, généralement de droite et féru de déréglementation. Seuls, les lycéens dévissent leur ministre, les étudiants qui avaient fait démissionner Alain Devaquet il y a vingt-deux ans n’ont pas fait bouger Valérie Pécresse il y a un an : quelques brandons seulement, les I U T. Lycéens qui se sont organisés sur internet et qui savent analyser le sort qu’on veut leur donner : une discrimination pour leur avenir et pas seulement pour leur emploi, par la diversité des baccalauréats.

L’incertitude maintenant sur la plupart des portefeuilles ministériels : Rachida Dati sans doute en sursis pour que toute l’ex-UDF, Jdean-Pierre Raffarin et Jean-Pierre Fourcade viennent à son secours, mais surtout parce que les graffiti sur les tombes musulmanes profanées dans le Nord sont nommément injurieuses à son endroit. Bernard Kouchner donnant dans des définitions qui demanderaient à être très affinées ou réservées au seul huis-clos élyséen, a pris position sur le secrétariat d’Etat aux droits de l’homme (à ne pas perpétuer) et sur la personne et les amitiés du successeur de Jean-Pierre Jouyet, auprès de lui, mais surtout auprès de Nicolas Sarkozy. Michèle Alliot-Marie pour des raisons qui ne sont pas dites – elle est plus docile que jamais, molossoides, déraillements de train, voies de fait commises par un policier, profanation de cimetières, le communiqué de son indignation et la réunion de crise sont fébrilement au pointage de l’Elysée – la réalité est qu’elle fût utile pour rameuter les chiraquiens et une minorité de l’U.M.P. en 2007, et qu’aujourd’hui elle ne l’est plus. Justice, Affaires étrangères, Intérieur. Mais le Premier ministre tient la corde. S’il démissionnait – avec de fortes raisons – il priverait Nicolas Sarkozy d’un partenaire assez présent et compétent pour ne jamais affaiblir le jeu de l’exécutif, et au contraire souvent le rétablir (notamment à propos de la révision constitutionnelle ou dans la conduite de l’économie), et une personnalité tenant un poste qui demeure essentiel, même pour le président de la République dans la pratique actuelle de nos institutions, sans donner prise à des critiques médiatiques ou populaires. Ce qui n’avait pas été le cas pour les Premiers ministres de Jacques Chirac, quand c’étaient les siens (Alain Juppé, Jean-Piere Raffarin et Dominique de Villepin.


Bilan de la présidence française de l’Union européenne. Le Monde titre sur le retour à l’Europe des Etats du fait de Nicolas Sarkozy. La Fondation Robert Schuman, sous la signature de son président Jean-Dominique Giuliani, évalue les choses comme suit .

La France a beaucoup investi dans sa 12ème présidence du Conseil de l'Union européenne. Elle l'a préparée avec soin et a mené à bien la réalisation du programme qu'elle s'était fixé. Mais c'est sa gestion des crises internationales qui a été le plus saluée. Elle a révélé une pratique nouvelle des institutions européennes et une vision de l'Europe dans le monde qu'elle a tentée de faire partager.

La présidence française a fait l'objet d'un engagement politique très fort de la part des plus hautes autorités françaises et d'une médiatisation réussie. Dans le pays du Non à la Constitution européenne, elles ont manifestement voulu saisir cette opportunité pour contribuer à rapprocher les Français et l'Europe. Pour la première fois les bâtiments publics ont arboré les couleurs de l'Union et la Tour Eiffel elle-même n'a pas résisté au déferlement du bleu européen ! Plus de 117 colloques et conférences [1], de 4000 rencontres [2] ont été organisés dans le pays, à Paris comme en province. L'ensemble des services de l'Etat a été mobilisé. L'impulsion est d'abord venue de la Présidence de la République, appuyée sur des services expérimentés qui ont géré une lourde tâche avec efficacité. La consultation des 27 Etats membres a été réalisée avec un grand professionnalisme. Le réseau diplomatique français, le deuxième au monde, a été sollicité avec succès : 8 Sommets à très haut niveau avec des pays tiers ont eu lieu pendant ces 6 mois : Union pour la Méditerranée, Ukraine, Afrique du Sud, Inde, Canada, ASEM, Brésil, Russie. Trois Conseils européens [3] et deux réunions informelles des Chefs d'Etat et de gouvernement ont été organisés. La diplomatie et la politique françaises se sont mises aux couleurs de l'Europe comme jamais auparavant.

Nicolas Sarkozy a obtenu des décisions rapides et efficaces, qui marquent un véritable changement des pratiques européennes. Il s'est engagé personnellement dans la recherche de solutions communes pour tous les sujets. La Présidence du Conseil de l'UE ne peut plus être résumée à une fonction administrative et logistique. On en attend désormais une méthode d'impulsion et des décisions politiques.

Nicolas Sarkozy pense que la construction européenne, ce n'est déjà plus de la diplomatie, même si ce n'est pas encore à l'évidence de la politique intérieure ; mais c'est, pour lui, de la politique et il souhaite " politiser l'Europe ". Pendant ces six mois de présidence, il aura eu l'occasion de montrer ce qu'il entend par là.Le Président français n'a pas hésité à bousculer les canons de la politique européenne en multipliant, avant la présidence française, les prises de position fermes, voire provocatrices, pour ouvrir des débats qui, selon lui, doivent être publics, instaurant un rapport de force avec ses partenaires européens. Son style personnel a marqué sa présidence.

Le président français a critiqué la Banque Centrale européenne pour ne pas vouloir baisser ses taux d'intérêt, s'en est pris au Commissaire au Commerce dans des propos fort critiques (" Pendant que toutes les 30 secondes un enfant meurt de famine dans le monde, M. Mandelson souhaite réduire la production agricole de 21% dans les négociations à l'OMC ") [7]. Quelques jours avant la visite de Brian Cowen, le Premier ministre irlandais, suite au " non " référendaire en Irlande, Nicolas Sarkozy déclare que les Irlandais n'ont pas d'autre choix que de revoter.

Le Président français aime à bousculer les raisonnements réputés acquis dans les enceintes européennes, pour obliger à des changements de cap. Mais une fois le tabou levé, il montre par tous moyens qu'il connaît et maîtrise les règles du fonctionnement à 27. Il s'est rendu en Irlande le 21 juillet (" Le peuple irlandais s'est prononcé, on doit l'accepter [8] "). Il a soigné ses relations avec la Commission à qui il n'a pas hésité à rendre visite personnellement et qu'il a associée étroitement à toutes ses initiatives. Il a joué le jeu des institutions. Il a institué un dialogue privilégié avec le Parlement européen. Son président a été associé aux grandes réunions internationales, les présidents des groupes parlementaires ont été consultés et invités à trois reprises à Paris. Le président en exercice de l'Union a participé à trois débats avec le Parlement de Strasbourg. Il y répondu à toutes les questions, lui consacrant un temps qu'aucun Chef d'Etat avant lui n'avait offert à la seule institution européenne élue au suffrage direct, polémiquant même avec certains de ses membres.

Ce style si personnel s'est mué en méthode, appuyé sur la conviction que l'Union européenne " manque de politique ", doit acquérir plus de vitesse de réaction face aux bouleversements en cours et doit s'accepter comme acteur mondial. Cette manière de procéder a pu choquer. La presse européenne s'est montrée très critique envers certaines initiatives françaises. Le style a surpris, agacé, dérangé. Dans ses relations avec la Chancelière Angela Merkel, certains ont cru y voir une remise en cause notamment du couple franco-allemand, où se prépare nombre de décisions européennes. Pourtant, rien, dans le concret, ne permet d'accréditer cette thèse.
Toutes les décisions européennes d'importance ont fait l'objet d'un accord franco-allemand préalable et les différences exprimées entre les deux pays ont toujours disparu au moment de la décision.

Nicolas Sarkozy a appliqué scrupuleusement son programme, évoquant la nécessaire mise en place d'un gouvernement économique devant le Parlement européen le 21 octobre [9], mais il n'a pas hésité non plus à prendre ses risques. En se rendant en Géorgie et en Russie pour arracher la conclusion d'un cessez-le-feu entre les belligérants, contre toutes les recommandations de prudence, il a sauvé le régime géorgien, renoué avec la Russie tout en maintenant l'unanimité des 27 et permis à l'Union de s'affirmer avec autorité sur la scène internationale.

Depuis bien longtemps les observateurs réclament un leadership européen. Il est indispensable à la conduite des travaux d'un Conseil de 27 délégations et incontournable dans les relations de l'Union avec le reste du monde.

Dans le même temps la Suède ratifiait le Traité de Lisbonne le 20 novembre et le Premier ministre tchèque, Mirek Topolanek, donnait des assurances à ses partenaires, tout en renvoyant le débat au sein de son parlement au 3 février 2009.

Au Conseil européen des 11 et 12 décembre, l'Irlande s'engageait à soumettre une seconde fois le Traité à référendum avant la fin de l'année 2009, obtenant en contrepartie l'assurance qu'elle disposerait toujours d'un Commissaire européen et que sa neutralité et sa souveraineté en matière fiscale et de moeurs (avortement) seraient garanties.

Pour la réforme institutionnelle, la patience du Conseil n'a donc d'égale que son pragmatisme. La présidence française n'a pas dérogé à cette attitude et a facilité une décision " à 27 ".

L'Union parvenait, en outre, pour la première fois, à passer la tête dans la cour des grands de la politique internationale. Elle a réussi une médiation internationale arrêtant le conflit russo-géorgien. C'est un incontestable succès diplomatique qui a mis en évidence la nécessité d'une politique européenne envers la Russie plus élaborée et plus constante, mais aussi celle d'une présence politique et financière plus active dans le voisinage de l'Union. Malgré les divergences d'appréciation, le " Blitzkrieg " de la présidence a démontré que les Européens acceptaient de rester unis pour atteindre un but précis et limité : la cessation durable des combats. Les Etats baltes, la Pologne et certains pays d'Europe centrale, réticents, ont entériné les accords négociés par la présidence française.

La France avait annoncé qu'elle entendait dynamiser la politique de défense européenne.
Plusieurs initiatives ont été lancées ou accélérées pendant sa présidence: un rapport complétant et renforçant la Stratégie européenne de Sécurité adoptée en 2003 ; l'opération contre la piraterie en Somalie ; la modernisation des hélicoptères européens et l'entraînement des pilotes ; la mise en place d'une flotte de transport aérien européenne ; la création d'un groupe d'intervention navale et aérienne ; de nouvelles capacités pour le Centre satellitaire européen ; le renforcement du rôle de l'Agence européenne de défense
[13] . Ces initiatives ont donné lieu à une ratification du Conseil européen qui s'est clairement prononcé pour le renforcement des capacités militaires, l'amélioration de la réactivité des forces européennes, la coordination des opérations pour évacuer les citoyens européens des zones de conflit, la contribution des militaires pour la surveillance maritime, la mise en place de formation commune des officiers. L'Union sera capable de déployer 60 000 hommes en 60 jours, de conduire simultanément deux opérations importantes de maintien de la paix, ou deux opérations de réaction rapide et les Etats membres se sont engagés sur d'autres objectifs précis. La défense européenne prend corps. Elle acquiert une réelle crédibilité. [14]

La France avait exigé la création d'un Groupe de réflexion sur l'avenir de l'Union, chargé de se pencher sur les vraies questions stratégiques posées à la construction communautaire. Présidé par Felipe Gonzales, assisté de Vaira Vike-Frebeirga et Jorma. Ollila, celui-ci a été complété et officiellement installé [20]. Il doit rendre ses conclusions en 2010.

L'Union a un urgent besoin d'une stratégie commune envers la Chine [21], qui ne pourra s'abstraire de relations normales avec l'Europe, qui demeure le plus grand marché de consommation du monde. Les Chinois devront s'attendre à des positions européennes plus exigeantes sur l'état de droit et le respect des droits de l'Homme. La conduite des relations extérieures de l'Union par la présidence française a été considérée publiquement par plusieurs Chefs d'Etat et de gouvernement comme efficace et réussie. Plusieurs d'entre eux ont émis des inquiétudes sur la présidence tournante au regard des enjeux posés par l'évolution de la situation internationale et la crise économique mondiale. La présidence tchèque s'est ainsi retrouvée interpellée.

L'entente franco-allemande s'est, une fois encore, manifestée sur les dossiers concrets soumis au Conseil européen. Elle a été en mesure de permettre des décisions. Sur les sujets précis, la coopération entre les deux pays a atteint un nouveau seuil de confiance et d'efficacité. Jamais les diplomates et les responsables en charge des négociations n'ont autant collaboré à la préparation des décisions européennes. En revanche des divergences, jadis cachées ou retenues, portant sur la politique économique ont été rendues publiques. Elles traduisent les différences de situation des deux pays. Elles exigent des débats franco-allemands renouvelés qui devraient être organisés sur les finalités européennes et les moyens de la politique communautaire. Les deux partenaires historiques doivent manifestement retrouver, au-delà des rites et des symboles, les moyens de démontrer leur communauté de vues sur l'avenir de l'Union.

La présidence française a démontré un fort leadership politique interne, qui a permis de surmonter des difficultés que la seule négociation diplomatique aurait rendu insurmontables.

L'Union, qui a consacré toute son énergie des 50 dernières années à abolir les barrières entre ses Etats membres, doit désormais relever le défi extérieur et se penser face au monde.
Sur la scène internationale, en effet, elle dispose d'une place et d'un statut à part. Union pacifique et volontaire d'Etats souverains, elle incarne naturellement les valeurs du multilatéralisme, du règlement pacifique des différends, de la prospérité par la paix. Elle est pourtant confrontée à des défis très concrets qui la contraignent à agir de manière plus unitaire.

La relation transatlantique sera vraisemblablement au cœur de la politique européenne en 2009. Les prises de position du nouveau président américain ont enthousiasmé les opinions européennes, mais tout porte à penser que la politique étrangère de la nouvelle administration diffèrera peu de la précédente. ….accepter l'objectif " d'Europe puissance ", jusqu'ici trop identifié comme une revendication française. Il semble qu'elle n'ait pas le choix. Un consensus se dessinera-t-il sur ce but et dans quel délai ? Par son activisme positif et engagé, qui respecte la nature de l'Union tout en bousculant des pratiques et des usages réputés acquis, la présidence française aura démontré que c'était possible. Nul ne doute qu'un long chemin attend encore l'Union européenne avant de s'accepter elle-même comme telle.


Je n’adhère pas à cette énumération laudative.

Les institutions sont en plan, le système des traités a fait long feu, si une autre présidence que la française se risquait aux désinvoltures et aux effets de manche elle se ferait rabrouer précisément par la France. La « méthode » n’a été supportable que parce qu’elle était d’une durée connue d’avance et brève. – Il n’y a pas eu d’avancée sur la défense. Les dispositifs rappelés sont ceux convenus depuis dix et vingt ans. – Le couple franco-allemand n’a pas vraiment sauvé Airbus dont les gestions, notamment en matière d’emploi et en sites visés par les délocalisations, redeviennent nationales de part et d’autre, et il ne maîtrise pas les rivalités ferroviaires ou en matière de télécommunications. La synthèse n’est pas faite en politique économique : sur les deux grandes questions que sont un protectionnisme européen et une relance par la consommation et la demande (ce qui est aussi l’analyse de Dominique Strauss-Kahn, au nom du Fonds Monétaire International), Allemands et Français sont en désaccord, et la recherche d’un substitut à Londres a seulement diminué encore la confiance entre les deux dirigeants, comme s’il en était besoin.

Il est - au total – effarant que près de soixante ans après la mise en commun du charbon et de l’acier, les Etats européens aient chacun une réponse nationale à la crise, alors que cette crise est la même chez chacun et que les moyens mis en œuvre sont en gros les mêmes. Alors qu’il y avait à inventer, au moins par l’économie, un gouvernement européen – Nicolas Sarkozy, certes, l’a dit, mais il ne l’a pas fait – et par le contrôle des banques à réinventer (aussi bien les autorités des marchés financiers, toutes défaillantes sinon complices) que la réalité de leur politique de crédit aux petites entreprises et aux particuliers, à réinventer donc la relation entre la Banque centrale européenne et le Conseil européen. Dans une telle dynamique, faire des prochaines élections européennes non pas l’occasion d’un remaniement gouvernemental au vu des résultats U.M.P/P.S. (ils seront favorables à la majorité, n’en doutons pas, puisque le P S devient ce qu’il est depuis 2002 et sans doute le quinquennat de Lionel Jospin) mais le choix d’une Constituante pour l’Europe. Occasion d’une relance de l’intégration en politique économique et de crédit, moment du grand rebond institutionnel. Elle est manquée sous présidence française.

Grèce …

Une amie très chère, depuis vingt-cinq ans, j’étais alors en poste à Athènes, y dirigeant less services économiques et commerciaux de l’Ambassade, m’écrit sur « l’explosion grecque ». Elle en sait quelque chose. Sous Kostas Karamanlis, senior, celui que Valéry Giscard d’Estaing fit revenir au pays dare-dare en Juillet 1974 quand les colonels commençaient à choir, elle fut emprisonnée pour terrorisme. C’était faux, mais l’envie ne lui avait pas manqué. Coup de filet dans des milieux gauchistes d’un gouvernement à la veille en passe de perdre les élections
(celles qui mirent au pouvoir le Pasok d’Andreas Papandreou, lui aussi senior).

Combien de points de repere dans la vie d' un homme?


Dans le quotidien, la vie avance de jour en jour semblable a elle meme, sans surprises ni evenements, telle une vaste plaine sagement decoupee en champs reguliers et bien delimites. Paysage familier et securisant certes, mais aussi combien monotone et previsible, combien mortellement repetitif et routinier ...Et puis voila que soudain l' illusion du temps rectiligne se brise en mille morceaux, le seisme que rien n' annoncait secoue la terre et bouleverse tout, la grande faille apparait sans crier gare, et l' Histoire s' accelere d' un coup, balayant en un clin d' oeil analyses savantes d' erudits, discours banals de politiciens et certitudes trompeuses du citoyen "moyen".


Voila une semaine que nous tous, moi-meme comprise, nous suivons abasourdis une explosion sociale certes "theoriquement" previsible mais que meme les plus politiquement sensibles et mobilises (et je suis quand meme supposee appartenir a cette categorie!) n' imaginions pas qu' elle nous attendait juste a l' angle de la rue. Rien de "palpable" a la veille de l' assassinat du jeune Alexandre Grigoropoulos par les balles du flic-rambo ne pouvait laisser prevoir (et encore moins esperer) l' ampleur de l' explosion qui s' est propagee en quelques heures a travers toute la Grece. Les denommes "anarchistes durs", qui systematiquement (et previsiblement) cherchent pretexte d' "agitations" contre la police se comptaient jusqu' ici a quelques centaines tout au plus, regroupes essentiellement a Athenes, dans le quartier etudiant de Exarheia. Et pourtant, voila qu' en quelques heures des jeunes de Komotini en Thrace jusqu' a Hania en Crete se battent par milliers dans les rue, hurlant leur colere a coup de pierre et de bombe molotov, sans preavis, sans organisation et surtout sans peur des consequence de leur "infraction a la loi".


Non, je n' oserai prevoir la suite. Voila deja une semaine que tout continue, manifestation sur manifestation, les eleves, les etudiants, la jeunesse dans les rues tous les jours, matin et soir, avec dynamisme mais sans violence ces deux-trois derniers jours et pourtant de plus a plus agresses par les "forces de l' ordre" (qui ont quasiment epuise leur stock en bombes lacrimogenes et autres produits chmiques et qui ont passe une nouvelle commande a ... Israel!). Non, je ne puis dire quelle sera la tournure des choses dans le court terme. L' explosion a ete tellement spontanee que c' est tout juste maintenant que les premieres revendications concretes sont mises en avant: Demission du gouvernement, hausse des salaires, desarmement de la police etc. J' affirme cependant sans aucun doute qu' un nouveau mouvement vient d' eclore en plein hiver et que dans le moyen terme de nouvelles consciences seront formees non seulement dans la rue mais aussi derriere les murs des maisons, la ou se refugie par excellence l' esprit petit-bourgeois qui cherche avant tout "paix et securite" et qui ressent pour la premiere fois aussi intensement depuis la chute de la dictature que l' echaffaudage illusoire de la "democratie representative" (des patriciens) et du "developpement" (des riches) est completement branlant, que les jours de la relative l' insouciance economique sont a jamais revolus.


Laissons les analyses du "pourquoi" a plus tard. Tu as du en lire deja pas mal en France, "Liberation" en l' occurence est assez pres des evenements et de leur cause (et prend position dans la bonne direction). Maintenant c' est surtout le temps de l' action apres des siecles d' inertie. Oui, nous sommes heureux Kostas, Oreste et moi de cette eruption.

La Grèce, nouvelle naissance d’une démocratie dont les formes étaient périmées ? Entré en relations avec Jacqueline de Romilly et contemplant, sans la posséder encore, sa bibliographie, je lui ai proposé que nous parlions de la leçon grecque pour nos moeurs et sagesse politiques de maintenant. Les événements ont commencé dès le surlendemain. L’Espagne en a été aussityôt bousculé, à Londres il a fallu arrêter plusieurs manifestants, toujours des Grecs, de jeunes Grecs donnant l’exemple. Paris de Mai 68 et Athènes ou Salonique Décembre 2008…

Le monde qui a péricilité un lundi 15 Septembre avec la faillite de Lehman Brothers suivie de celle de Fortis, est aujourd’hui devant sa vérité. Elle a deux visages, pour l’économie, la démonstration que fraude et spéculation menaient tout depuis années : la saga de Bernard Madoff, patron de l’indice des valeurs tecvnologiques pour la première place financière de la planète, et pour la politique : les adolescents d’Athènes et de presque toutes les villes grecques depuis huit jours.

[1] - 1ère lettre de Paul aux Thessaloniciens V 16

[2] - Nombres XXIV 2 à 17 passim ; passim XXV ; évangile selon saint Matthieu XXI 23 à 27


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