Dimanche 24 Janvier 2010
Prier… les circonstances font parfois les « révisions » de vie ou plutôt des retours en perspective qui ne sont pas en arrière mais font voir où nous sommes arrivés, miraculeusement, compte tenu de tant de handicaps et d’impasses passées. La saisie de mon journal 1967-1971 est un exercice dont le départ a été de hasard mais qui m’absorbe complètement maintenant et que je vis comme une sorte de prière, tant d’ailleurs je l’ai écrit avec deux compagnons seulement : l’appréhension que j’avais de Dieu à mes vingt-cinq ans et le journal-même. L’un et l’autre me soutenaient et à leur manière me répondirent. Relecture et méditation selon un matériau que je n’avais jamais faites depuis… Nous avons ainsi nos « anciens testaments » qui annoncent quelque chose, notre présent, et nous poussent à un futur plus dense et plus détendu. [1] Le feu, difficile à prendre, persiste jusqu’à ce matin et frémit. En une de mes absences parisiennes avant Noël, il avait neigé ici, ma fille m'a recommandé, désignant un de ses seaux sur la terrasse : ne jette pas l’eau de la neige, c’est mon dernier souvenir de la neige. Je place cela en exergue de mon journal d’il y a quarante ans (c’est Maurice Grimaud + qui m’a poussé à cette saisie et à cette tentative d’édition). Depuis, notre petite fille a été virtuose sur les pistes de Rochebrune à Megève et la neige a été surabondante, elle voudrait désormais habiter là-bas, l’associant au fait qu’il n’y a pas classe, sauf les cours de ski…Les passés, les amours, nous-mêmes si contingents et en regard, la splendeur du Christ. Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : « Cette parole de l’Ecriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. ». Et qu’avait-il donc lu, à l’invitation de tous, revenu à Nazareth où il avait grandi ? Ceci : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, et aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération. Jésus est prophète, mais prophète de Lui-même et l’Ecriture entière est son annonce. Il se l’approprie avec un naturel qui va confondre l’assistance et partagera le monde pendant son ministère public et depuis. Il se leva pour faire la lecture. On lui présenta le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit… rencontre de son initiative, du hasard ou du dessein que sert le préposé à la présentation du livre. La proclamation de sa divinité et de l’ensemble du plan divin sont en germes dans cette conclusion du Christ, lapidaire, à la suite de sa courte lecture. – Accessoirement, la coûtume du Christ puis de Paul, n’arriver nulle part sans commencer par entrer à la synagogue du lieu, serait à cultiver. Nous venons – nous, chrétiens, et donc d’une certaine manière, nos amis musulmans aussi – nous venons du judaïsme. Peut-être une application à cette généalogie spirituelle de la comparaison par Paul des diversités dans l’Eglise à l’image du corps et de ses membres, serait-elle fructueuse. Pour soulever le monde et répondre à Dieu, les diverses religions et morales ne seraient-elles pas chacune nécessaires, et tous les chemins pourvu qu’ils soient sincères et défricheurs, du moment qu’ils nous sont nativement ou circonstanciellement donnés, n’ont-ils pas une grande valeur, ne serait-ce que pour nous-mêmes, parce qu’ils sont le nôtre. Dieu a organisé le corps de telle façon qu’on porte plus de respect à ce qui en est le plus dépourvu : il a voulu qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les différents membres aient tous le souci les uns des autres. … Car ils pleuraient tous en entendant les paroles de la Loi. La redécouverte de l’Ecriture par le peuple de retour. On demanda au scribe Esdras d’apporter le livre de la loi de Moïse… Esdras ouvrit le livre ; tout le peuple le voyait car il dominait l’assemblée. Quand il ouvrit le livre, tout le monde se mit debout… Jésus referma le livre… tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui. Avions-nous déjà, intuitivement, compris ? comprenons-nous ? Si j’ai une expértience de la vie, elle est bien que je ne comprends jamais assez profondément, et que si souvent je comprends de travers en assurant et en m’assurant que j’ai compris.
Un timbre commémoratif de l’Abbé Pierre, pour le troisième anniversaire de sa mort. Notre besoin d’icônes, presque chaque jour exaucé sinon organisé – comme on crée les conditionnements publicitaires et autres en marchéage et appel à la consommation. L’icône, « opium du peuple » et qu’encouragent les exploitants. Ainsi, pendant ce temps-là, Hubert Védrine et Tony Blair chez L.V.M.H. – à l’exacte façon de ces prestations de serment bidon de la gent politique entrant au barreau sur présentation de cabinets d’avocats d’affaire (Rachida Dati après Noël Mamère, Dominique de Villepin et Jean-François Copé, aux titres divers). Philosophie, avoir avec soi des gens de couloir. La corruption, l’abus du carnet d’adresses acquis pendant l’exercice de fonctions publiques, la privatisation et le recel de ce qu’a conféré, pour le bien commun, une responsabilité éminente, plus ou moins bien assumée d’ailleurs.
L’icône peut gêner, parfois. Je raconterai dans un livre dont j’ai la matière toute personnelle et pour cause, comment j’ai découvert l’Abbé Pierre aussi saint que pécheur, aussi vulnérable et peu estimable qu’il est admirable, héroïque et donc estimable, quand il se trouva seul, abandonné de tous, à commencer par ses compagnons d’Emmaüs et sa propre Fondation, au prétexte du soutien – aventuré – qu’il avait accordé à Roger Garaudy au printemps de 1996. Seul, absolument seul, pas un media pour le défendre. A notre époque, l’antisémitisme est mortel. Il fallait que ce soit l’Abbé Pierre pour après quelques mois d’enfer, puis de purgatoire, cela s’oublie – au moins dans les médias. Rien n’était beau à voir, ni le saint homme, pécheur pas par antisémitisme mais par souci excessif de son image et de la concurrence que lui faisait Zineddine à la une des journaux, chaque mois. Et tout avait commencé – courageusement de la part de l’abbé – par une vive sortie contre le Premier ministre de l’époque, Alain Juppé dont il put dire à beaucoup de micros en Avril 1996 qu’il lui avait menti à propos des sans-papiers. L’affaire Garaudy arriva donc à point nommé pour faire éluder le casus belli. Un de ses amis, lui devant beaucoup et sans même la vie physique, homme prééminent de radio, me refusa toute intervention. La collection de La Croix est intéressante dans ces semaines-là. La correspondance que provoqua ma circulaire aux évêques de France pour expliquer le faux-pas de l’Abbé Pierre, est édifiante. L’icône véritable serait là – pierre d’achoppement. Bien entendu, ce n’est pas elle qu’honore le timbre-poste. Celui-ci serait à rapprocher de l’affichage sauvage du visage de l’abbé dans Paris, un homme révélé louche et inquiétant. Comme c’est oublié, pour la santé publique ! J’y ai quant à moi gagné de comprendre et vivre que la sainteté s’édifie sur une misère, des lacunes, un tempérament, une libido personnels et qu’elle se prouve, aux yeux des hommes, par une organisation et des dons que n’ont plus les hommes politiques : imagination et énergie pour autrui et non culot pour soi-même. L’Abbé Pierre me parut dans nos conversations de plusieurs jours tête-à-tête, clandestines à Zermatt puis à Praglia, de la même trempe que Jean Paul II, admirablement organisé et pécheur. Je reçus un historique étonnant de relations avec de Gaulle et avec François Mitterrand, et la confirmation que l’histoire ne se fait pas sur la scène. Quant à la relation avec Dieu, il me fut donné un mot qui ne s’invente que par expérience : un éblouissement supportable. Il qualifiait ainsi un moment décisif de sa vocation plus religieuse que sacerdotale.
France-Infos. relève que ses auditeurs auront corrigé d’eux-mêmes sa revue de presse, ce n’est pas par mois mais par an que Proglio touche deux millions d’euros, cela fait quand un million de francs par mois. La même chronique continuant sur tout autre chose : les votations antillaises qui ne mobilisent presque personne et ne résoudront absolument rien, peuvent donner lieu à une loi organique que prendra Nicolas Sarkozy… Lapsus plus grave qu’à propos des maigres ressources concédées au cumulard de l’EDF et de Veolia : le Président de la République promulgue les lois dont le gouvernement et les parlementaires ont l’initiative. La loi n’est faite que par le Parlement.
Pour éradiquer tout esprit de corps et toute expression critique dans la masse des exploités, il faut non seulement des icônes, mais des thèmes : la crise, Clearstream, H1N1, le climat, le nigérian d’Amsterdam à Detroit, Haïti est maintenant du passé. Il va se produire autre chose cette semaine. On souhaite presque que vite une suite soit donnée à l’avertissement lancé par Oussama Ben Laden. Catastrophe terrible, faudrait-il espérer, puisqu’il est solennel : l’attentat manqué par le « héros » nigérian est le seul, avec le 11-Septembre, à être revendiqué dans cette forme personnelle. Or, Oussama est pour beaucoup une icône, lui surtout.
fin de soirée
Les Kurdes débarqués en Corse. Les témoignages d’associations et de témoins, la décisive CIMADE aussi – dont nos dirigeants veulent absolument qu’elle sorte du jeu, elle est notre prophète et notre imprécateur pourtant, elle est la voix dont on pourra dire dans vingt ans ou cinquante, tous les Français ne soutenaient pas la politique haineuse et raciste de leurs gouvernants, à cette époque-là, bref elle sauve l’honneur – tout s’accorde pour indiquer l’ôdieux des camps de détention, le mépris des procédures pour exercer le droit d’asile, le manque complet d’égards y compris pour une femme enceinte de neuf mois. Au passage, la liste est donnée – France-Infos. – de ces camps, une dizaine, avec des systèmes de planque des arrivées et des re-départs (forcés) en bout d’aéroports locaux.
Sur Arte, succession de deux films.
Documents et reconstitution des itinéraires de la Résistance. Les commentaires français sont légers et presque souriants, le paraître de l’universitaire à la télévision, l’étranger – allemand ou américain – est grave et dit vrai. Débat sur la valeur militaire de la Résistance en 1944, indication que la masse maquisarde s’est spontanément soustraite au S.T.O., faute majeure à tous égards aliénant la jeunessse à Vichy et fournissant, toute prête à tout, des combattants à la Résistance dont elle a changé la figure. Débat enfin ouvert par Henri Frenay en 1971-1972 sur la relation entre les stratégies communistes et gaullistes, autour de la personnalité absolument décisive de Jean Moulin. Et qui se poursuit. Reconstitution des moments de fins de procès et des exécutions, qui est poignante. Leçon montrant que la France occupée a été une France où l’on s’est déterminé dans un sens ou dans un autre, poussé sans doute par les événements nationaux et mondiaux mais chaque histoire personnelle prit du sens, cf. La fenêtre ouverte de Georgette Elgey. Aujourd’hui, il n’y a de prise de parti que pour la carrière ou pour se défendre d’être cumulard et en fait hors-la-loi. Une masse de spectateurs qui se f… du spectacle, qui sont assommés de réformes, d’adaptation et de modernisation dont ils ne veulent pas tout et qui désespèrent que les ajustements ou améliorations qu’ils désignent et explicitent fort bien, se fassent jamais…
Saga d’une Allemande et d’une Française (alsacienne de mère allemande) pendant les trois quarts du XXème siècle : deux photographes-cinéastes ayant du coup travaillé pour toutes les propagandes, une amitié sans doute autant d’âme que de chair « malgré » le mariage de l’Allemande, c’est pathétique et magnifique. Rien ne dit mieux le malaise alsacien et qu’en général les Allemands ont été plus fins que les Français pour comprendre ce malaise. L’Europe résolvait la chose par le haut, mais aujourd’hui qu’y a-t-il d’Europe… On a osé faire passer la mise en vigueur du traité de Lisbonne et les nominations d’un président du conseil pour cinq semestres et d’un ministre des Affaires étrangères, comme un renforcement et un débouché institutionnels… pitoyable, ces deux personnages qu’on a choisi, en haut lieu, parce qu’ils étaient falots, tiennent leurs promesses. Le silence en tout et pour tout.
Sur Arte, succession de deux films.
Documents et reconstitution des itinéraires de la Résistance. Les commentaires français sont légers et presque souriants, le paraître de l’universitaire à la télévision, l’étranger – allemand ou américain – est grave et dit vrai. Débat sur la valeur militaire de la Résistance en 1944, indication que la masse maquisarde s’est spontanément soustraite au S.T.O., faute majeure à tous égards aliénant la jeunessse à Vichy et fournissant, toute prête à tout, des combattants à la Résistance dont elle a changé la figure. Débat enfin ouvert par Henri Frenay en 1971-1972 sur la relation entre les stratégies communistes et gaullistes, autour de la personnalité absolument décisive de Jean Moulin. Et qui se poursuit. Reconstitution des moments de fins de procès et des exécutions, qui est poignante. Leçon montrant que la France occupée a été une France où l’on s’est déterminé dans un sens ou dans un autre, poussé sans doute par les événements nationaux et mondiaux mais chaque histoire personnelle prit du sens, cf. La fenêtre ouverte de Georgette Elgey. Aujourd’hui, il n’y a de prise de parti que pour la carrière ou pour se défendre d’être cumulard et en fait hors-la-loi. Une masse de spectateurs qui se f… du spectacle, qui sont assommés de réformes, d’adaptation et de modernisation dont ils ne veulent pas tout et qui désespèrent que les ajustements ou améliorations qu’ils désignent et explicitent fort bien, se fassent jamais…
Saga d’une Allemande et d’une Française (alsacienne de mère allemande) pendant les trois quarts du XXème siècle : deux photographes-cinéastes ayant du coup travaillé pour toutes les propagandes, une amitié sans doute autant d’âme que de chair « malgré » le mariage de l’Allemande, c’est pathétique et magnifique. Rien ne dit mieux le malaise alsacien et qu’en général les Allemands ont été plus fins que les Français pour comprendre ce malaise. L’Europe résolvait la chose par le haut, mais aujourd’hui qu’y a-t-il d’Europe… On a osé faire passer la mise en vigueur du traité de Lisbonne et les nominations d’un président du conseil pour cinq semestres et d’un ministre des Affaires étrangères, comme un renforcement et un débouché institutionnels… pitoyable, ces deux personnages qu’on a choisi, en haut lieu, parce qu’ils étaient falots, tiennent leurs promesses. Le silence en tout et pour tout.
[1] - Néhémie VIII 1 à 10 passim ; psaume XIX ; 1ère lettre de Paul aux Corinthiens XI 12 à 30 ; début de l’évangile selon saint Luc I 1 à 4 & IV 14 à 21
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