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La dette mondiale atteint de nouveaux records
Raphael Bloch Le 10/04 à
08:15Mis à jour à 12:21
Selon l'IIF, la hausse du niveau de la dette mondiale
s'explique notamment par la progression du niveau de la dette des ménages -
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+ VIDEO. L'ensemble des dettes sur la planète représente 237.000 milliards de dollars. Un niveau historique.
S'il y a un indicateur qui ne cesse de monter, c'est bien celui de la dette mondiale. Selon une étude de l'Institute of International Finance (IIF), publiée lundi, l'ensemble des dettes accumulées à travers la planète a atteint un nouveau record à la fin 2017.Au total, les créances cumulées des Etats, des entreprises et des ménages représentent 237.000 milliards de dollars (192.000 milliards d'euros). Entre le troisième et le quatrième trimestre 2017, le montant global de la dette a augmenté de 11.000 milliards de dollars (226.000 milliards d'euros) , soit l'équivalent du PIB annuel de la Chine.
Des ménages très endettés
Selon l'IIF, cette hausse s'explique notamment par la progression globale du niveau de la dette des ménages, en particulier dans les pays développés. Et à ce petit jeu, c'est l'Europe qui est la zone géographique la plus touchée.
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La dette des ménages en pourcentage du PIB est au
plus haut en France, en Belgique, au Luxembourg, en Norvège, en Suède et en
Suisse. Seuls les ménages irlandais et italiens affichent des niveaux
d'endettement en pourcentage du PIB inférieurs à 50 %.317,8 % du PIB mondial
A noter toutefois que, si la dette mondiale atteint un record en termes de valeur, elle continue de diminuer par rapport au PIB mondial. Son ratio, par rapport à la richesse planétaire, a diminué à la fin de l'année.Grâce à la croissance de l'économie mondiale, dans les pays émergents et en Europe, il a reculé de près de 7 points de pourcentage au quatrième trimestre par rapport aux trois mois précédents. Pour atteindre... 317,8 %.
Vidéo - La dette mondiale atteint de nouveaux records
Raphaël Bloch
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La prodigieuse indifférence mondiale pour la dette
Daniel Fortin / Rédacteur en chef Le 05/04 à 14:27Mis à jour à 15:36
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La dette publique primaire des pays développés ou en
développement représente aujourd'hui 200 trillons de dollars, soit trois fois
le PIB mondial - shutterstock
Un ouvrage édifiant du Cercle Turgot montre à quel point l'endettement public gangrène l'économie mondiale sans que ni l'opinion ni les dirigeants ne s'en émeuvent vraiment. Et pourtant, la bombe à retardement pourrait bientôt exploser.
On s'habitue à tout. Cette année, par exemple, cela fera exactement quarante-quatre ans que l'Etat français est en déficit. De gauche comme de droite, aucun gouvernement n'a pu, su - ou voulu - rompre avec l'addiction qui nous conduit, budget après budget, à financer notre croissance par l'emprunt. C'est ainsi que, entre 1980 et aujourd'hui, notre dette publique est passée de 20 % à presque 100 % du PIB. Dans l'indifférence quasi-générale.C'est en effet une forme de particularisme français : qu'il pleuve ou qu'il vente, que l'on soit en crise ou en eaux calmes, on laisse dériver notre endettement public avec une décontraction qui laisse pantois.
Chiffres abstraits
A aucun moment, en effet, et surtout pas en période de croissance où l'exercice serait rendu pourtant plus facile, l'on ne se pose vraiment la question de réduire notre endettement. Plus de 2.000 milliards de dettes ? Et alors ? Oui, le chiffre est énorme. Tellement qu'il en devient abstrait. Alors on l'ignore, et l'opinion ne s'en émeut guère. Nous vivons depuis si longtemps en situation de surendettement sans que rien de grave nous arrive ! A quoi bon s'en faire ?La dette n'est donc pas un enjeu électoral. C'est ce qui en fait un levier si aisé à utiliser.
Nonchalance des dirigeants
Mais il faut être honnête : la France ne détient pas le monopole d'une économie pilotée par la dette. La nonchalance des dirigeants - politiques ou économiques - consistant à vivre à crédit sans se préoccuper des dégâts provoqués sur les générations futures est même une attitude largement partagée dans le monde.C'est tout l'intérêt de l'ouvrage collectif que publie ce mois-ci le Cercle Turgot , un centre de réflexion et d'analyses financières. Ce think tank a d'abord le mérite de rappeler quelques chiffres édifiants. La dette publique primaire des pays développés ou en développement représente aujourd'hui 200 trillions de dollars, soit trois fois le PIB mondial, nous indique Jean-Jacques Pluchart. Ce qui montre que, d'une certaine manière, dans ce domaine, les keynésiens ont gagné la bataille des idées face aux libéraux. Les premiers considèrent en effet que « l'endettement de l'Etat contribue au développement économique de la Nation », quand les seconds lui reprochent de « détourner l'épargne privée de l'investissement productif », dont de la création d'emploi.
Exemple américain
Mais l'engouement mondial pour la dette n'est pas qu'affaire de doctrine. En témoigne l'exemple des Etats-Unis. Même au pays du libéralisme débridé, l'endettement est une seconde nature et depuis longtemps, nous rappelle Jean-Claude Gruffat. Le premier gouvernement fédéral issu de la Constitution votée en 1789 prend la direction de l'Etat avec une dette atteignant déjà 30 % du PIB. Une situation née de l'incapacité à l'époque de lever l'impôt dans un pays encore fragmenté.Cet héritage culturel reste aujourd'hui un marqueur fort de la conscience américaine. Sous l'effet des baisses d'impôts, des plans de relance ou des dépenses militaires, la dette n'a cessé de se creuser, passant de 3.300 milliards de dollars en 2001 à un niveau vertigineux de 20.000 milliards de dollars. Et, à l'image de ses prédécesseurs, Donald Trump n'a exprimé à aucun moment son intention de s'attaquer au problème.
Orthodoxie budgétaire
C'est sans doute ce qu'il y a de plus fascinant dans cette revue historique et mondiale de la dette proposée par le Cercle Turgot. Si beaucoup de mesures ont été imaginées pour la rendre soutenable, rien - ou si peu - n'a été fait pour imposer sa décrue massive. Au fur et à mesure de son gonflement et des crises qu'elle a pu provoquer dans les pays d'Asie en 1997, en Argentine (huit défauts de paiement) ou plus récemment en Grèce (2010), la dette et ses excès ont suscité des normes internationales imposant l'austérité et l'orthodoxie budgétaire aux pays qui en ont été victimes (consensus de Washington des années 1990). Mais rien qui soit de nature à entraver sa formidable progression.
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- > Des solutions chocs pour résorber les dettes des Etats européens
- Les banques centrales doivent changer leur politique monétaire
Cet édredon monétaire a eu le mérite d'anesthésier temporairement les effets de la gigantesque dette mondiale sur les budgets des Etats. Il a aussi levé toute inhibition - si jamais il en existait encore - sur la poursuite de la course aux emprunts. Que se passera-t-il lorsque les taux d'intérêt finiront par remonter ? Et de quelles cartouches disposeront encore les autorités pour juguler une éventuelle nouvelle crise alors que toutes les armes semblent avoir été employées ? C'est la sourde inquiétude du moment, et ce livre a le mérite de poser de façon limpide les termes du débat.
« Les Dettes publiques à la dérive ». Un ouvrage collectif du Cercle Turgot. Editions Eyrolles, 235 pages, 18 euros.
Daniel Fortin
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Des solutions chocs pour résorber les dettes des Etats européens
Isabelle Couet - ISABELLE
COUET | Le 11/10/17 à 10H45
France Stratégie préconise trois outils hétérodoxes pour résorber les dettes. Et ce pour dépolluer le débat sur la gouvernance de la zone euro.
Certaines pistes sont explosives. Dans une note dévoilée ce mercredi, France Stratégie n'hésite pas à préconiser que des Etats européens endettés se décrètent co-propriétaires de tous les terrains privés résidentiels. Une idée décapante qui répond à la problématique suivante : comment assurer la résorption des dettes publiques en zone euro ?Réforme de la gouvernance de la zone euro
A l'heure où la réforme de la gouvernance de la zone euro est discutée au plus haut niveau, le think tank rattaché à Matignon s'est interrogé sur les façons de réduire la dette excessive des Etats membres, en cas de chocs. « Le poids des dettes publiques peut diminuer grâce aux efforts d'ajustements budgétaires prévus dans les traités, mais cela va prendre entre 10 et 20 ans, pointe Fabrice Lenglart, commissaire général adjoint de France Stratégie. Or tant que certaines dettes demeurent élevées, les débats sur la future gouvernance risquent d'être parasités ".Les pays dont les finances sont saines resteront opposés à toute mutualisation des risques et pencheront naturellement pour un modèle de gouvernance reposant sur le couperet des marchés. Autrement dit, le compromis entre le Nord et le Sud de la zone euro (dont la France) sera impossible.
Pour le rendre possible, France Stratégie avance trois solutions, sorte de « boîte à outils " dans laquelle piocher. La première implique le Mécanisme européen de stabilité (MES), et part donc du principe d'une mutualisation du risque souverain.
Intérêts indexés sur la croissance
Les auteurs suggèrent de s'inspirer des obligations indexées sur le PIB, en en gardant les avantages (amortir les effets d'un retournement de cycle sur l'emprunteur), mais sans les inconvénients (prime de risque, illiquidité). Le MES pourrait « prendre en charge l'assurance sur le risque conjoncturel ", explique Fabrice Lenglart.Il entrerait dans un contrat de swap d'intérêt avec un Etat très endetté, par lequel il recevrait un intérêt indexé sur la croissance du pays et paierait le coupon à taux fixe dû par l'émetteur à ses créanciers. Si l'Etat ne remplit plus ses engagements, le contrat serait dénoué.
Deuxième piste : en cas de non-solidarité, un Etat pourrait rééquilibrer comptablement son bilan grâce à un transfert d'actifs des agents privés. Une sorte d'impôt exceptionnel sur le capital. « L'Etat décrète qu'il devient co-propriétaire de tous les terrains construits résidentiels, à hauteur d'une fraction fixée de leur valeur et que ce nouveau droit de propriété est incessible ", proposent les auteurs.
«Solution douloureuse "
Un propriétaire pourrait demander à ne pas payer et l'Etat récupérerait alors la somme due à la vente ou lors de la transmission du bien. « C'est une solution douloureuse mais qui ne préempte pas la croissance future », selon Fabrice Lenglart. « L'idée est d'envoyer un signal au marché sur la solvabilité de l'Etat ». Un exemple : cette mesure, avec une fraction d'un quart de la valeur des terrains résidentiels, permettrait de « re-solvabiliser " immédiatement la dette italienne à hauteur de 40 points de PIB.
Lire aussi :
>Faillite des Etats : G20 et FMI visent l'énorme stock de dette
>Le G20 étudie des outils pour réduire le risque de défaut
>L'Europe pourrait titriser la dette des Etats
Dernier levier proposé : l'intervention de la Banque centrale européenne. Celle-ci pourrait acheter les obligations des Etats et les transformer en dette perpétuelle à zéro coupon. Cette opération a l'avantage de ne pas consommer de capital et donc d'éviter une recapitalisation par les Etats.
Sous certaines conditions, elle pourrait ne pas être assimilable à du financement monétaire stricto sensu, même si elle risque de susciter une levée de boucliers outre-Rhin. Dans ce cas, les banques nationales peuvent être aux manettes. Les auteurs précisent aussi que la BCE pourrait reconvertir la dette perpétuelle si les Etats en question ne respectent pas leurs obligations.
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L'Europe pourrait titriser la dette des Etats
¤ Les Européens réfléchissent à la création d'European Safe Bonds. ¤ La fin du soutien de la BCE va rendre la zone euro plus vulnérable.
« C'est seulement quand la mer se retire que l'on voit ceux qui nageaient nus. " La maxime de Warren Buffett revient à l'esprit des investisseurs à mesure qu'approche la fin du soutien de la Banque centrale européenne (BCE) au marché des emprunts d'Etat. « En comprimant les primes de risque des Etats, le programme d'achat de la BCE s'est en quelque sorte substitué à un outil de mutualisation des dettes de la zone euro, résume Nick Kounis, chez ABN AMRO. Sa disparition va donc laisser un vide inquiétant. La zone euro va se retrouver de nouveau vulnérable. »Le temps d'une vraie mutualisation des dettes, avec la création d'obligations communes et d'une agence de la dette européenne, serait-il venu ? Le patron de la Bundesbank vient de rappeler la position allemande mercredi. Jens Weidmann s'oppose à à toute idée d'« eurobonds ». Mais il est aussi un peu méfiant à l'égard des « European Safe Bonds ", un concept qui circule depuis des mois au sein des instances européennes et qui a été formalisé par des universitaires. De quoi s'agit-il ? Les European Safe Bonds consistent en une opération de titrisation des emprunts d'Etat. On fabrique un titre synthétique adossé à des obligations d'Etat achetées sur le marché secondaire. L'idée de départ est de répondre au phénomène de raréfaction des actifs financiers sûrs (notés AAA), très recherchés par les investisseurs. Il s'agit de produire de nouveaux titres sans risque.
Beaucoup de questions
Le projet des universitaires - qui envisagent ainsi de doubler l'offre de titres notés AAA libellés en euros - repose sur la mécanique suivante : un véhicule public ou privé achète un portefeuille composé de différents titres souverains de la zone euro, selon une pondération prédéfinie. Pour financer cet achat, l'entité émet deux types de titres : des obligations sûres (senior) achetées par des fonds souverains, banques centrales étrangères, etc. Et des obligations plus risquées (junior), pour les fonds spéculatifs.Lorsqu'un Etat fait défaut, ce sont les détenteurs des titres junior qui subissent les pertes, sauf si celles-ci sont telles qu'il faut remonter aux détenteurs de titres senior. « Un scénario très peu probable ", jugent les auteurs du projet, étant donné le calibrage préconisé. Selon eux, la tranche junior doit peser 30 % et la tranche senior 70 % de la valeur faciale sous-jacente.
Le rapport, dont l'examen par le Conseil européen du risque systémique est repoussé à décembre, soulève encore beaucoup de questions. Notamment concernant les contraintes réglementaires appliquées aux produits titrisés par rapport aux obligations d'Etat. Faudrait-il apporter une garantie publique pour y remédier et attirer les investisseurs ? La Buba refuse en tout cas d'impliquer une entité européenne, par crainte de mutualiser les risques. Elle est cependant ouverte au projet, pourvu qu'il soit entièrement porté par les marchés. De son côté, la Banque de France insiste sur l'un des avantages de ce dispositif. En septembre, François Villeroy de Galhau a ainsi déclaré que les European Safe Bonds pourraient « réduire le lien excessif entre dette souveraine et secteur bancaire domestique ". Mais même à Bercy, certains s'interrogent sur le bien-fondé de créer un instrument complexe et finalement moins liquide que la dette d'Etat...
I. Co.
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Comment la BCE est devenue l'un des plus gros acheteurs de dette au monde
G.
Be et I. Co 07/09/2016
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