dimanche 20 août 2017

sondage à la fin de Mai - comment les Français voient Macron : le bénéfice du doute


L’Obs. – BVA – fin Mai 2017


Comment les Français voient Macron : le bénéfice du douteEmmanuel Macron, à l'Elysée, pendant une rencontre avec un représentant syndical le 23 mai (Denis ALLARD-POOL/SIPA)

Quels sont les ressorts de la popularité d'Emmanuel Macron ? L'institut BVA a recueilli les paroles de Français, Adrien Abecassis, l'ex-"monsieur opinion" de François Hollande, les décortique.

Adrien Abecassis et Adélaïde ZulfikarpasicAdrien Abecassis et Adélaïde Zulfikarpasic Publié le 31 mai 2017 à 17h01

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Une analyse d'Adrien Abecassis, expert associé à la Fondation Jean Jaurès, diplomate et ancien conseiller opinion de François Hollande à l'Elysée. Avec Adélaïde Zulfikarpasic, directrice de BVA opinion.

"Le sursis bienveillant". C'est ainsi que l'on pourrait résumer le regard des Français envers leur nouveau Président. 62% des Français ont une bonne opinion de lui, selon l'Observatoire de la politique nationale BVA-Orange-La Tribune (terrain les 22 et 23 mai). C'est un niveau équivalent à ses prédécesseurs : immédiatement après son arrivée, François Mitterrand était crédité de 61% de bonnes opinions, Jacques Chirac 62%, Nicolas Sarkozy 63%, François Hollande 61%.
Mais cette apparente stabilité ne doit pas cacher les ressorts inédits de cette élection, relevés par les paroles spontanés des Français lorsqu'ils s'expriment sur les raison de leur opinion et que BVA a recueillies.

Une autorité qui rassure

Il a "une vision claire, une autorité", "il est dynamique, prend des initiatives", entend-on souvent. C'est bien cette image, de détermination, de promesse d'action, qui constitue le principal atout d'Emmanuel Macron pour les Français interrogés. Il est "précis, déterminé", dit un autre. En un sens, il rassure. "Il sait ce qu'il veut" et c'est bien, ça change.
On trouve ainsi énormément de propos positifs autour de l'autorité, comme si le rétablissement de la verticalité de la fonction était bel et bien l'une des attentes premières des Français :
"Il établit des règles, veut les appliquer et veillera à ce qu'elles soient respectées."
"Pour l'instant, il mène sa barque comme je le conçois. De façon énergique et radicale."
"Changement, efficacité", résume un répondant pour expliquer son appréciation positive. De fait, pour beaucoup, les deux sont liés : il fallait du changement pour retrouver une efficacité.
Et puis "il incarne la jeunesse". La référence revient en boucle, toujours positive : on y voit "le changement de l'ordre politique établi depuis trop longtemps". Car être "jeune" pour l'opinion, c'est d'abord ne pas être pris dans les filets des jeux d'intérêts et renvois d'ascenseurs :
"Un coup de balai sur les mammouths de la politique qui se partagent le gâteau !"
Cette jeunesse aurait pu être vue comme de l'inexpérience, soulever des doutes… Mais non, ce n'est pas ainsi qu'elle résonne. Pourquoi ? Car malgré sa "jeunesse", Emmanuel Macron semble avoir "du métier" dans le sens utile du terme : il a montré "une habileté tactique et un sens aigu du timing" note l'un, et cela rassure : il pourrait donc être en mesure de résister au retour de l'ancien système, le maîtriser. Car chacun voit bien que le passage d'une génération politique à une autre ne se fera pas sans heurts ni volonté de revanche. "Grand stratège", lit-on ainsi, et c'est cette fois-ci positif. Ce n'a pas toujours été le cas : souvenons-nous que "l'intelligence" de François Hollande était le plus souvent mise à son discrédit, car comprise comme un art de manipuler ou multiplier les calculs politiciens… là, les Français accordent à Macron le bénéfice d'utiliser cette intelligence pour se protéger de ces jeux-là.
Une sorte de bénéfice du doute, qui peut tenir tant qu'elle n'est pas contredite… Jusque-là, il semble plutôt avoir tenu ses promesses de renouvellement : "Crédible... il dit, il fait, dépoussière la vie politique." "C'est un changement de mentalité, changement d'état d'esprit, renouveau." "Je le sens honnête."
"Je le sens" : il y a dans cette expression toute la signification du sursis :
"Je le sens, j'aimerai bien y croire, mais je ne suis pas sûr, j'attends de voir."
C'est peu dire que le premier écart risque de s'avérer destructeur, pour Emmanuel Macron bien plus que pour ses prédécesseurs. Les gens ont projeté des choses en lui, sans en être certain. Il ne tient donc que par la preuve, non par la conviction ou la certitude : que le doute tombe, du mauvais côté, et il sera déception, bien difficile à relever.

Un premier test : l'affaire Ferrand

C'est dans ce contexte que se comprend la résonance de la polémique autour de Richard Ferrand : elle pourrait devenir aux yeux de ces Français, si elle prend de l'ampleur, le premier "test" de sa tolérance au retour des dérives que l'on ne voulait plus voir, et de sa détermination à agir pour y mettre fin.
"Je ne crois pas qu'il mentira volontairement, il semble déterminé dans ses actions. Il faut lui donner une chance de réussir, les autres ont tellement été lamentables. Lui, je crois qu'il est honnête."
La bienveillance des Français n'est donc, à ce stade encore, "qu'une chance" : un sursis, exactement, une "mise à l'épreuve" qui pourrait être révoquée s'il semble ne pas se conformer au contrat.
Face aux nouvelles révélations, comment se défend Richard Ferrand ?
En attendant, son attitude vis-à-vis des médias est plutôt bien jugée. Il faut dire que ceux-ci ont écorné leur image durant la campagne. S'en tenir à distance paraît donc plutôt sain :
"Il a trouvé jusqu'à présent la position juste d'un président, à la fois ferme sur sa base, et respectueux des règles et des institutions, mais sachant instaurer une certaine distance vis à vis des médias. A suivre…"

Un président tout en faussetés ?

On trouve bien entendu, à côté de ces "éloges présumés" si l'on peut les qualifier ainsi, des personnes déjà sceptiques, voire hostiles
Quelques critiques idéologiques d'abord, des deux côtés : "banquier", "mépris de classe" à gauche ; "ses prises de position sur la colonisation, pas de culture française" à droite. Mais ces jugements proviennent de personnes assez politisées. Le gros des critiques n'est pas là, il est le fait de Français qui n'y "croient pas".
"Il ne fera pas ce qu'il a dit…"
Ces critiques sont les miroirs des jugements positifs. Ils partent du même sentiment, un doute. Mais simplement, eux ne parviennent pas à laisser le "bénéfice du doute".
Ils se rabattent donc, immédiatement, sur une in-crédulité, décortiquent, décryptent, pointent la fausseté du geste, ou pourquoi il ne "peut pas" fonctionner.
"C'est un gouvernement de parade, il fait du neuf avec du vieux."
Ces propos viennent plus souvent de personnes qui se disent "dégoûtées des politiques". Ou tellement désabusées que, même en faisant crédit à Emmanuel Macron de sa réelle volonté, pensent que le système n'est pas curable :
"Je ne crois pas qu'il fasse mieux que ses prédécesseurs, même s'il a le crédit de plus d'honnêteté, et de ne pas être un pro de la politique. Mais les enjeux en question le dépassent, ce n'est qu'un homme malgré sa détermination que je crois réelle et non-feinte."
Mais la plus grande partie des Français reste sur une position d'attente : "j'attends d'en savoir plus sur le programme". "Il n'a encore rien fait". "J'attends de le voir à l'œuvre !"
Attente qui concerne notamment "l'action" qu'il a promise : faire bouger les choses, rénover de fond en comble, sans ciller. Même si l'on voit déjà que, concernant la réforme du droit du travail, le terrain est miné et demandera beaucoup d'adresse :
"Il veut aller trop vite et par ordonnances sur les questions relatives au travail."
"Il veut faire du mal aux travailleurs français."
Tiendra-t-il cette attente de refondation ? "Je lui laisse le bénéfice du doute en attendant qu'il fasse ses preuves". Toujours les preuves, comme seul juge de paix…

Qui est Macron ? Une identité "en contre"

Or donner des preuves demande de la clarté : il est difficile de juger quelque chose d'indéterminé ou d'incertain. Or sur ce point, un bât peut blesser :
"On ne sait pas qui il est."
"On ne sait pas où il est."
Persiste ainsi, dans l'image d'Emmanuel Macron, une forme d'indétermination fondamentale. Ni de droite, ni de gauche, du renouveau donc, s'affranchissant d'un certain nombre de repères, faisant fi des règles du jeu politique… Tout cela était voulu, appelé, tant le système paraissait sclérosé et devoir être dépassé. Mais ça ne suffit pas à fonder une identité propre, c'est-à-dire autrement "qu'en contre".
Cette identité, les gens l'attendent pour juger. Les premiers actes significatifs (formation du gouvernement…) ont plutôt confirmé ce que l'opinion attendait de son nouveau président. Reste maintenant les premier discours importants ou choix de politiques publiques qui porteront du sens.
Et il faudra trancher. Tenter de rester un signifiant "flottant", non fixé quelque part, n'est pas une solution : cela serait vu comme une esquive, une fuite, et au final une forme d'insincérité. On en trouve déjà des traces : "L'abus de "mais en même temps", qui prouve qu'il cherche constamment à ménager et la chèvre et le chou…".
Attention, enfin, à l'enfermement qui guette : "Je n'aime pas son programme politique qui se tourne trop à droite et oublie les non-énarques". "Trop fier de lui". Une trop grande fierté, une forme "d'arrogance" que certains croient percevoir : autant de déclinaisons d'un reproche de s'être "coupé du pays", qui serait une autre façon de se faire rattraper par le système. Se laisser ré-enfermer dans une bulle, certes neuve et différente, mais une bulle quand même.
Un bulle qui ferait délaisser par ce nouveau président une partie des Français, ceux qui sont trop loin, trop différents de lui. Ou une génération entière, dépassée par un monde, celui des start-upers, qui va plus vite qu'eux :
"Je suis un senior : la cible désignée pour les impôts futurs et les mesures qu'il ne va pas manquer de prendre. S'il le pouvait, il nous ferait piquer, comme des vieux chiens."
Mais quand même, surtout, une forme d'espoir même si l'on attend la confirmation :
"Pour le moment il tient la route. Il faut qu'on arrive à avancer, et j'espère qu'on a tiré le bon numéro."
Le sursis. Bienveillant, avec un poil d'inquiétude. Et l'espérance.

Adrien Abecassis, avec Adélaïde Zulfikarpasic

17 commentaires

Alain FranckAlain Franck a posté le 1 juin 2017 à 13h07
Tigre bleu
Où il y croit et la c est inquiétant je suis ok avec vous : mystique sainte Thérèse d Avila doit se retourner dans sa tombe !! Rapport au peuple ... anti démocratique , Jupitérien ...référence à Dieu , ou c est de la démagogie c est certes beaucoup moins grave mais quand même dangereux pour le rôle de la politique et de nos institutions
Je répondsJ'alerte pascal paupascal pau a posté le 1 juin 2017 à 07h59
Walt and see !
Je répondsJ'alerte Tigre BleuTigre Bleu a posté le 1 juin 2017 à 06h50
Quel bénéfice du doute? Tout est clair chez Macron: c'est écrit, dit et annoncé sur tous les tons! On sait parfaitement à quoi s'attendre et ça va être violent (moins qu'avec Fillon mais quand même sans précédent). Qu'est-ce qui manque au cerveau des Français pour qu'ils ne sachent ni lire ni entendre ce qu'écrit et dit le monsieur? Ils détestent l'UE ou veulent la réformer en profondeur et votent pour celui qui en est le pire représentant! Ils haïssent Sarkollande et votent pour leur successeur le plus évident! Ils veulent de la protection sociale et votent pour celui va la réduire drastiquement! Au secours!
Je répondsJ'alerte Charles SabatierCharles Sabatier a posté le 1 juin 2017 à 02h21
Et, comme disait le DUC D'ELBŒUF, c'est avec du vieux que l'on fait du NEUF !
Je répondsJ'alerte synthol menthesynthol menthe a posté le 31 mai 2017 à 23h14
d apres le canard les prudhommes sont presque morts davance...merci rachida et macron...on retourne au 18eme siecle
Je répondsJ'alerte Georges SaumonGeorges Saumon a posté le 31 mai 2017 à 20h28
Avec Trumpette, Fifi les beaux costumes ou Robespierre le petit, il n'y aurait aucun doute!
WARF
Je répondsJ'alerte alain gerlagealain gerlage a posté le 31 mai 2017 à 19h10
ils vont pas douter longtemps, mais il est trop tard pour mettre sa main à son pantalon, lorsque l'on à fait dans sa culotte. cinq vieilles années se préparent activement avec votre aide. l'état d'urgence est prolongé, pour mieux vous matraquer et vous gazer si vous osez manifester, vous avez perdu votre liberté et vous allez perdre tous vos droits sociaux, grâce aux lois qui sont déjà dans les tuyaux. le vénézuela vous paraîtra un paradis.


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