vendredi 7 octobre 2022

lanceur d'alerte s'il en est - Alexeï Navalny mettant en évidence la corruption du régime de Poutine et principalement de son chef



Alexeï Navalny

Alexeï Navalny en 2011.

Fonction

Dirigeant de parti politique
Russie du futur (en)

depuis 2013

Biographie

Naissance

4 juin 1976

(46 ans)
Boutyne (en)

Nom dans la langue maternelle

Алексей Анатольевич Навальный

Nom de naissance

Alexeï Anatolievitch Navalny

Nationalité

Russe (depuis 1991)

Domicile

Moscou

Formation

Yale World Fellows Program (en)
Université russe de l'Amitié des Peuples
Université des finances du gouvernement russe (1999-2001)
Université Yale (2010)

Activités

Homme politique, avocat, militant

Fratrie

Oleg Navalny (d)

Conjoint

Ioulia Navalnaïa (en) (depuis 2000)

Enfants

Daria Navalnaïa (d)
Zakhar Navalny (d)

Autres informations

A travaillé pour

Aeroflot (2012-2013), Fondation anti-corruption


Propriétaire de

RosIama (d)

Religion

Église orthodoxe

Parti politique

Russie du futur (en) (depuis 2018)

Membre de

Yale World Fellows Program (en)
Conseil de coordination de l'opposition russe (en) (2012)

Taille

1,89 m

Partenaire

Rouslan Chaveddinov (en)

Condamné pour

Détournement de fonds (2013), fraude (2014)

Lieu de détention

Colonie de redressement n°2 de l'oblast de Vladimir (en) (depuis 2021)

Site web

(ru) navalny.com

Distinctions


Liste détaillée


0:21

Enregistrement vocal

Œuvres principales

Un palais pour Poutine : L'Histoire du plus gros pot-de-vin

Signature

modifier - modifier le code - modifier Wikidata

Alexeï Anatolievitch Navalny (en russe : Алексей Анатольевич Навальный, /ɐlʲɪkˈsʲej ɐnɐˈtolʲjɪvʲɪtɕ nɐˈvalʲnɨj/), né le 4 juin 1976 dans l'oblast de Moscou, est un avocat et militant politique russe.

Fondateur de la Fondation anti-corruption (FBK), il est connu pour son opposition au président Vladimir Poutine.

En août 2020, après avoir perdu connaissance, il est transféré dans une unité de soins intensifs en Allemagne, où des tests détectent des traces d'inhibiteurs de la cholinestérase (substances pouvant faire partie du groupe d'agents neurotoxiques « Novitchok »). Il revient ensuite en Russie, où il est condamné à deux ans et demi de prison en février 2021, et placé en détention dans un camp de travail. Les pays occidentaux dénoncent son emprisonnement. En janvier 2022, Navalny est inscrit sur la liste des personnes terroristes par l'organisme fédéral russe de contrôle des transactions financières. En mars 2022, il est à nouveau condamné à 9 années d'internement en régime sévère.

​Situation personnelle

​Origines et famille

Ses parents dirigeaient une manufacture de vannerie dans la banlieue ouest de Moscou1. Son père, Anatoli Navalny, est né dans le village de Zalissya dans le raïon de Tchernobyl de la RSS d'Ukraine. Après avoir été diplômé de l'École militaire de Kiev, il est envoyé dans la banlieue moscovite. Sa mère, Lioudmila, est née dans les environs de Zelenograd et étudie à l'université d'État de gestion de Moscou après quoi elle travaille en tant qu'économiste2. Alexeï Navalny a un frère cadet, Oleg, né en 19833. Sa cousine, Marina Navalna (uk), est une femme politique ukrainienne.

​Enfance

Alexeï Navalny grandit dans le village militaire de Kalininets en banlieue moscovite, où son père est stationné, mais passe aussi une importante partie de ses vacances dans le village natal de son père en Ukraine jusqu'au moment de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl qui oblige sa famille à abandonner le village, la centrale nucléaire de Tchernobyl se trouvant à 600 m4.

​Études et mariage

En 1998, il est diplômé en droit de l'université russe de l'Amitié des Peuples et en 2001 de l'université des finances du gouvernement russe5.

En 2009, il étudie à l'université Yale grâce au « Yale World Fellow »6, après avoir été recommandé par le joueur d'échecs Garry Kasparov, par la rédactrice en chef du New Times Evguenia Albats (en) ou encore l'économiste Sergueï Gouriev7.

Alexeï Navalny est marié à Ioulia Navalnaïa et le couple a deux enfants5.

Il habite à Marino, dans le district administratif sud-est de Moscou8.

​Activité politique

​Blog Navalny

En 2009, il est conseiller du gouverneur de l'oblast de Kirov9.

Il est connu pour être l’auteur du blog Navalny sur LiveJournal et du site Rospil, où il dénonce des faits de corruption en Russie. En octobre 2010, il accuse l’entreprise d’énergie Transneft de détournement de fonds à hauteur de 2,9 milliards d’euros lors de la construction d’un oléoduc en Sibérie10. Il est surnommé par le magazine Time « l’Erin Brockovich russe »11 et est désigné personnalité de l’année 2009 par le quotidien économique russe Vedomosti12.

​Législatives russes de 2011

Alexeï Navalny s’oppose au pouvoir en place en Russie et à Vladimir Poutine en particulier, qualifiant en février 2011 son parti, Russie unie, de « parti des voleurs et des escrocs »10. Lors de la contestation des élections législatives russes de 2011, à laquelle il participe activement, il est emprisonné le 5 décembre13. À sa sortie de prison le 20 décembre, il appelle les Russes à s’unir contre Poutine, afin que celui-ci ne gagne pas l’élection présidentielle de 2012, à laquelle il se dit prêt à participer14. En 2011, la BBC décrit Navalny comme étant « probablement le seul réel opposant politique à avoir émergé en Russie ces cinq dernières années »15. Fin décembre 2011, il participe à l’organisation d’une manifestation qui rassemble 120 000 personnes selon l’opposition16.

En 2011, Navalny établit la Fondation anti-corruption17.

En mai 2012, il participe à une manifestation qui dégénère en heurts avec la police. Il est arrêté avec le dirigeant du Front de gauche Sergueï Oudaltsov et condamné à quinze jours de détention administrative pour désobéissance aux forces de l'ordre18.

De juin 2012 à février 2013, il siège au conseil d'administration d'Aeroflot sur la proposition d'Alexandre Lebedev (qui détient 15 % des actions)19.

​Candidature à la mairie de Moscou

En juillet 2013, sa condamnation à cinq ans de camp avec sursis pour détournement de fonds d'une société forestière est dénoncée comme un procès politique par les États-Unis et l'Union européenne.

Candidat aux élections municipales à Moscou, il axe sa campagne sur la dénonciation des migrants, qu'il décrit comme des délinquants20.

Le 8 septembre 2013, il est battu par le maire de Moscou sortant, Sergueï Sobianine (nommé par Vladimir Poutine par décret en 2010) par 52 % des voix contre 30 % mais conteste les résultats. Le taux de participation est de 30 %. Navalny affirme avoir récolté 35,6 % des voix, contre 46 % à son adversaire et réclame un second tour. Les ONG indépendantes qui ont surveillé le scrutin n'ont pas observé de « graves violations ». Selon le journaliste Pierre Avril, ce scrutin a permis à Navalny de s'affirmer comme l'un des principaux opposants à Vladimir Poutine[réf. nécessaire]. Dès lors, poursuivre les procédures judiciaires intentées contre lui reviendrait à en faire un martyr pour l'opposition21. Une manifestation de soutien de 9 000 personnes a lieu le lendemain. L'opposition à Poutine sort toutefois requinquée de ces élections municipales, notamment par la victoire d’Evgueni Roïzman à Iekaterinbourg, quatrième ville du pays et d'une candidate qui avait notamment le soutien du parti Iabloko à Petrozavodsk22.

​Placement en résidence surveillée

En février 2014, il est placé en résidence surveillée pour une durée de 2 mois par un tribunal de Moscou pour avoir quitté la capitale ce qui est en infraction avec un jugement rendu précédemment23. L'assignation à résidence est prolongée de six mois en avril 201424.

En avril 2014, il est reconnu coupable de diffamation à l'encontre d'un député qu'il aurait qualifié de toxicomane. Il est condamné à une amende de 300 000 roubles (6 000 euros au cours moyen de 50 roubles pour 1 euro à l'époque)25.

Il est libéré début mars 2015, mais se voit refuser de participer aux obsèques de son ami Boris Nemtsov, opposant à Vladimir Poutine assassiné le 27 février 2015 à proximité du Kremlin. Il déclare par la suite : « Je n'ai pas peur et mes associés non plus. Nous ne céderons sur rien »26.

​Tentative de candidature à l’élection présidentielle russe de 2018

En décembre 2016, Alexeï Navalny annonce sa candidature à l'élection présidentielle russe de 201827.

Navalny est arrêté le 26 mars 2017 lors de manifestations anti-corruption à Moscou28. Le 27 mars 2017, il est condamné à 15 jours de détention et à une amende de 20 000 roubles (325 euros) par le tribunal du district Tverskoï de Moscou29.

Un sondage du Centre analytique Levada effectué en mai 2017 en vue de l'élection présidentielle de 2018 montre que 63 % des Russes voteraient pour Vladimir Poutine et 2 % pour Alexeï Navalny30.

Le 23 juin 2017, la commission électorale centrale annonce, qu'en raison de sa condamnation à cinq ans de prison avec sursis dans l'affaire Kirovles, Navalny est inéligible pour la prochaine élection présidentielle. Cette décision est aussitôt contestée par l'équipe de campagne de Navalny31,32, mais elle est confirmée le 25 décembre 2017 par la commission électorale centrale, après le dépôt de la candidature de l'opposant.

En juin 2017, il organise à Moscou une manifestation contre la corruption, mais en change le lieu à la dernière minute pour la faire à proximité du Kremlin. Il est arrêté comme d'autres manifestants et est condamné à 30 jours de prison pour avoir violé les règles encadrant l'organisation de manifestations. Navalny est libéré au bout de 25 jours de détention33,32.

Le 29 septembre 2017, il est à nouveau arrêté par la police à la sortie de son domicile34. Le 2 octobre, le tribunal de Moscou le condamne à 20 jours de détention pour « appels à la participation à un événement public non autorisé »35. Il sort de prison le 22 octobre36.

Exclu de l'élection présidentielle, Navalny en conteste la légitimité, considérant que les candidats n'ont aucune intention de battre Vladimir Poutine, et appelle à son boycott. Son mouvement organise des manifestations dans le pays et Navalny est arrêté avec d'autres membres de son mouvement lors de la manifestation moscovite le 28 janvier 2018, au motif que celle-ci n'est pas autorisée par la ville. Il est relâché peu après37,38.

Alexeï Navalny souhaite que la Russie rejoigne l'Union européenne et se rapproche de l'OTAN. Parmi ses priorités s'il arrive au pouvoir, Navalny cite la réforme de l'institution judiciaire et le changement constitutionnel d'un régime présidentiel à un régime parlementaire. Toutefois, il refuse de décrire ses convictions idéologiques, déclarant chercher à unir les Russes dans une coalition contre le régime de Poutine38.

En mai 2018, quelques jours avant l'investiture de Vladimir Poutine pour un quatrième mandat présidentiel, Alexeï Navalny appelle les Russes à manifester dans les principales villes du pays. Lors de la manifestation à Moscou qui rassemble 1500 personnes, Alexeï Navalny est arrêté. Amnesty International réagit à cette arrestation et reproche notamment une utilisation « disproportionnée » de la force par la police39. Le tribunal du district Tverskoï de Moscou le condamne à trente jours de détention pour l'organisation d'une manifestation non autorisée contre Vladimir Poutine le 5 mai40.

La presse nationale ne relate pas les actions de Navalny et de ses partisans sauf pour les critiquer, et ne donne pas à Navalny l'occasion de s'exprimer. Son nom même est rarement prononcé dans les médias nationaux. En 2018, lors de la Coupe du monde de football, Leonid Sloutsky, ancien entraîneur de l'équipe nationale et commentateur d'un match en direct sur la chaîne publique Pierviy Kanal, mentionne le nom d'Alexeï Navalny. Cette mention inattendue de Alexeï Navalny sur une télévision publique crée un mème parmi les internautes russes. Deux jours plus tard, Leonid Sloutsky annonce qu'il quitte son poste de commentateur41,42,43.

Le 27 août 2018, Navalny est de nouveau condamné à 30 jours de détention pour l'organisation de manifestations en janvier pour le boycott de l'élection présidentielle de mars. Il ne peut ainsi prendre part aux manifestations du 9 septembre 2018 dans les principales villes du pays. Ces manifestations visent à critiquer l'augmentation de l'âge de départ à la retraite, une réforme gouvernementale annoncée en juin et qui est impopulaire en Russie44. La peine de Navalny prend fin le 24 septembre, mais il est à nouveau arrêté au moment de franchir les portes de la prison pour être jugé pour son appel à manifester le 9 septembre, une manifestation non autorisée ; il est condamné à 20 jours de détention45,46.

Ces nombreux séjours en prison sont considérés comme une stratégie délibérée des autorités russes pour isoler Navalny et l'empêcher de s'exprimer publiquement46.

​Arrestation et emprisonnement en 2019

Le 9 octobre 2019, son ONG est classée « agent de l'étranger » par le ministère de la Justice47.

En avril 2019, la Cour européenne des droits de l'homme condamne la Russie pour l'assignation à résidence de Navalny en 2014. Cette assignation est jugée injustifiée et « visait à restreindre ses activités publiques [de Navalny] » et à « étouffer le pluralisme politique »48.

Le 12 juin 2019, il est arrêté, en même temps qu'une centaine de manifestants participant à une marche de soutien au journaliste d'investigation Ivan Golounov, arrêté quelques jours auparavant, relâché et assigné à résidence, et finalement innocenté le 11 juin, après une forte mobilisation de la société civile49. Le 1er juillet, Navalny est condamné à 10 jours de prison et incarcéré pour sa participation à la marche non autorisée en soutien à Golounov50.

Toujours en juillet 2019, Alexeï Navalny et d'autres membres de l'opposition appellent à des manifestations contre l'exclusion par la commission électorale de certains candidats notamment l'avocate Lioubov Sobol à l'élection municipale à Moscou se déroulant en septembre51. Le 24 juillet, il est condamné à 30 jours de prison pour son appel à des manifestations non autorisées et incarcéré52. Le 28 juillet, il est hospitalisé pour un œdème de Quincke. Son médecin personnel Anastasia Vassilieva se dit « catégoriquement opposée » au fait de remettre Alexeï Navalny dans la même cellule, car cela lui fait encourir le risque d’une « intoxication et une sensibilisation répétées, qui peuvent réellement conduire à une maladie grave »53. Il sort de prison le 23 août54.

​Réforme constitutionnelle de 2020

En juillet 2020, Alexeï Navalny fait campagne contre le référendum constitutionnel russe, le qualifiant ouvertement de « coup d'état » et de « violation de la constitution », estimant que les modifications constitutionnelles portées par ce référendum permettraient à Vladimir Poutine de devenir « président à vie ». Les réformes sont approuvées à 77,9 % des voix le 1er juillet. Après l'annonce des résultats, Navalny qualifie le référendum de « farce », estimant qu'il ne reflétait pas l'opinion du public. Ces réformes permettront à Vladimir Poutine d'effectuer deux autres mandats après l'élection présidentielle de 2024, rendant possible son maintien au pouvoir jusqu'en 203655.

​Empoisonnement en 2020

​Hospitalisation, diagnostic et suspicions

Le 20 août 2020, il est hospitalisé d'urgence dans une unité de soins intensifs de l’hôpital d’Omsk en Sibérie après une aggravation de son état de santé l'ayant plongé dans le coma pendant un vol reliant Tomsk à Moscou. L'avion est dérouté à Omsk et se pose en urgence56. Son entourage suspecte fortement un empoisonnement après l'absorption d'un thé à l'aéroport57,58.

Selon les médecins russes de l’hôpital d’Omsk : « lors de son admission à l'hôpital, Alexeï Navalny a fait l'objet de tests sur un large éventail de stupéfiants, substances synthétiques, psychodésiques et médicinales, y compris les inhibiteurs de la cholinestérase. Les résultats ont été négatifs », a déclaré pour sa part aux agences russes Alexandre Sabaïev, toxicologue en chef de l'hôpital des urgences no 1 d'Omsk, où était hospitalisé Alexeï Navalny avant son transfert en Allemagne, excluant ainsi l'hypothèse de l'empoisonnement.

Le 22 août 2020, n'ayant toujours pas repris connaissance, il arrive à Berlin à bord d'un avion médicalisé affrété par l’ONG allemande Cinema for Peace (en) pour subir des soins à l'hôpital de la Charité59,60.

Selon les médecins de l'hôpital de la Charité, des traces d'inhibiteurs de la cholinestérase ont été détectées par les tests effectués sur le patient61,62. À la suite de ce constat, la chancelière allemande, Angela Merkel, et le haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, appellent Moscou à enquêter « dans les moindres détails » et « en toute transparence » sur l'empoisonnement présumé de l'opposant et à traduire les responsables de cet acte en justice63,64. Leurs déclarations sont mal reçues par le président de la Douma russe, Viatcheslav Volodine, qui annonce saisir le Comité de la Douma pour la sécurité afin de savoir si Navalny n'a pas été victime d'une « provocation de l'Allemagne et d'autres pays de l'Union européenne » qui auraient tenté de « nuire à la santé d'un citoyen russe pour créer des tensions en Russie »65. Moscou regrette par ailleurs que Berlin n'ait toujours pas répondu à la demande d'aide judiciaire adressée le 27 août aux autorités allemandes par le parquet national de Russie afin de pouvoir lancer une enquête sur l'affaire Alexeï Navalny66.

Alexeï Navalny est maintenu dans un coma artificiel, le 24 août, son état est considéré comme « grave, mais sa vie n'est pas immédiatement menacée »67,68. Le 28 août, son état s'améliore selon l’hôpital berlinois, « néanmoins, les médecins se gardent toujours de tout pronostic [sur les conséquences] de ce grave empoisonnement »69.

Le 2 septembre, le gouvernement allemand déclare détenir la « preuve sans équivoque » de l'utilisation d'un agent neurotoxique de type Novitchok contre l'opposant russe70,71, affirmation confirmée le 14 septembre par deux laboratoires de référence de l’OIAC français et suédois72. À l’inverse, les autorités russes affirment que leurs analyses n’ont décelé la présence d'aucune substance toxique72.

Le 15 septembre 2020, une semaine seulement après la sortie du coma artificiel, Alexeï Navalny s'exprime publiquement pour une première fois depuis son compte Instagram. Il écrit « Je ne sais encore presque rien faire, mais hier [lundi] j’ai pu respirer par moi-même toute une journée. Ça m’a beaucoup plu, c’est un procédé étonnant et sous-estimé par beaucoup. Je le recommande. Vous me manquez. ». Interrogée quant à un éventuel retour en Russie après son rétablissement, sa porte-parole répond qu’« il n’avait jamais été question d’autre chose. Je comprends pourquoi on se pose la question, mais je trouve néanmoins étrange qu’on puisse penser » qu’il choisisse l’exil73,74.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, déclare pour sa part que tout le monde serait heureux si Navalny se rétablissait et qu'il était libre de rentrer en Russie depuis l'Allemagne. Mais il a également déclaré que Moscou ne comprenait pas pourquoi, si les laboratoires français et suédois avaient pu tester ses échantillons médicaux, la Russie n'avait pas le même accès75.

​Convalescence et enquête

Le 22 septembre 2020, Navalny sort de l'hôpital. Les médecins considèrent qu’un rétablissement complet est possible76.

Le 25 septembre, le ministère des Affaires étrangères russe a suggéré qu'on faisait face à « une nouvelle mise en scène ayant pour thème l'utilisation imaginaire de l'arme chimique, cette fois non pas en Syrie ou en Grande-Bretagne, mais chez nous, en Russie »77,78. Le 12 novembre, la chancellerie russe prétendra avoir « toutes les raisons » de croire que la « pénétration d'agents de guerre chimique » dans le corps de Navalny a pu avoir lieu « en Allemagne ou dans l'avion » le transportant à l'hôpital de la Charité79, mais elle ne précise pas quelles sont exactement ces raisons80. Le site d'investigation russe The Insider relève d'ailleurs que « le Kremlin s'est embrouillé dans ses versions sur l'empoisonnement de Navalny ». En énumérant certaines de ces versions dans un article du 25 septembre, le site titre ironiquement : « Il n'y a pas eu de poison ! Il y en a eu mais pas le Novitchok ! C'était le Novitchok mais pas le nôtre ! C'était le nôtre mais il l'a bu lui-même ! »81.

Le 1er octobre, la Mission permanente de la Fédération de Russie auprès de l'OIAC soumet à l’organisation une proposition d'envoyer des experts en Russie pour travailler à l’élucidation du cas Navalny avec les spécialistes russes en la matière82. Le même jour Alexeï Navalny dénonce l'inaction de la justice russe qui rechigne à ouvrir une enquête et fait part de sa conviction que Vladimir Poutine est l'instigateur de son empoisonnement dans un entretien avec des journalistes de l'hebdomadaire Der Spiegel83.

Le 6 octobre, l'OIAC confirme qu'une substance de type Novitchok a été retrouvée dans l'organisme de Navalny84.

Le 14 décembre, le site d'investigation Bellingcat publie un rapport d'enquête sur l’empoisonnement d'Alexeï Navalny, réalisé en collaboration avec des journalistes de CNN, Der Spiegel et The Insider. Le rapport indique que Navalny a été suivi depuis 2017 et lors de son voyage jusqu'à Tomsk, par des agents du FSB spécialisés dans les produits chimiques85,86,87,88. Dans le cadre de cette enquête, le média Bellingcat révèle le 21 décembre 2020 qu'Alexeï Navalny ayant piégé Konstantin Kudryavtsev, un agent du FSB, est parvenu à lui faire avouer à son insu qu'une tentative d'assassinat avait eu lieu contre lui89,90,91. Les détails cliniques de l'empoisonnement, exigés par Moscou, sont publiés dans The Lancet fin 202092,93.

​Convocation dans le cadre de l'affaire Yves Rocher

Article connexe : Yves_Rocher_(entreprise)#Controverse.

En raison de sa convalescence en Allemagne, Navalny ne peut satisfaire aux exigences de sa libération conditionnelle qui exige qu'il se rende à Moscou. Plus précisément, alors que sa période de probation se termine le 30 novembre, une convocation lui est adressée le 28 exigeant sa présence le lendemain matin à 9 h. Ce manquement entraîne la levée de celle-ci. Il pourrait donc effectuer, lors de son retour à Moscou, les 3 ans et demi de prison reçus lors de son procès en 2014. Pour The Economist, cette convocation est de toute évidence un prétexte pour l'empêcher de rentrer librement en Russie94,95.

​Retour en Russie et nouvelle arrestation

Wikimedia | © OpenStreetMap

Tracé approximatif du parcours du vol DP936 emprunté par Alexeï Navalny, le 17 janvier 2021, montrant son déroutement.

Dans une vidéo postée sur son compte Instagram le 13 janvier 2021, Navalny annonce avoir acheté des billets d'avion pour un retour en Russie96,97. Le 17 janvier, il embarque ainsi à bord d'un avion de la compagnie Pobedanote 1 pour un décollage depuis l'aéroport de Berlin-Brandebourg. L’atterrissage de l'avion étant initialement prévu à l'aéroport de Vnoukovo, il est finalement dérouté vers l'aéroport de Cheremetievo, autre aéroport de Moscou situé plus au nord. Le pilote et le personnel aérien ont justifié cette manœuvre par un « problème technique » en précisant qu'« un avion est sorti de piste »98,99. À son arrivée au poste de douane, il est interpellé par les agents du service fédéral des pénitenciers (en)100,101.

​Enquête et documentaire sur le palais de Poutine

Article détaillé : Un palais pour Poutine. L'histoire du plus gros pot-de-vin.

Dans une vidéo publiée sur YouTube le 19 janvier 2021102, résultat d'une enquête menée par sa Fondation contre la corruption (FBK), Alexeï Navalny dénonce le faste et les financements du « palais de Poutine », une immense demeure dotée de nombreux équipements (héliport, patinoire, casino, piscine, spa, aquadiscothèque, etc.). L'opposant prête notamment au président Poutine un goût « pathologique » pour le luxe et détaille des montages financiers dont le but serait de « créer comme un tampon autour du palais » par rapport à son véritable propriétaire. Trois jours après sa publication, la vidéo de près de deux heures avait été visionnée plus de 53 millions de fois103. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, réagit en affirmant ne pas l'avoir vue mais indique en même temps que rien de ce qu'elle dit n'est vrai104,103.

Le 30 janvier 2021, le milliardaire russe Arkadi Rotenberg déclare être le propriétaire du domaine105.

​Procès et condamnation

Le 2 février 2021, Navalny est condamné à trois ans et demi de prison par un tribunal de Moscou, après avoir été reconnu coupable d'avoir violé son contrôle judiciaire alors qu'il était en Allemagne depuis le mois d'août 2020, à la suite de son empoisonnement106. L'avocate de Navalny annonce qu'il ferait appel107. En cas d'entrée en vigueur de la condamnation, Navalny purgera une peine effective de deux ans et huit mois : son temps déjà passé sous résidence surveillée en 2014 étant décompté du temps total, à ce temps sont ensuite décomptées les deux semaines passées en centre de détention depuis son arrestation le 17 janvier108.

Les soutiens de l'opposant appellent à manifester, et des chefs d’État occidentaux dont Joe Biden, ou encore le président français Emmanuel Macron, jugent « inacceptable » la condamnation de Navalny et exigent sa libération « immédiate »109. Au Congrès américain, une large majorité d'élus, tant républicains que démocrates, appelle au renforcement des sanctions contre la Russie110.

Le 23 janvier, près de 100 000 personnes manifestent en Russie contre son arrestation, mais leur nombre diminue nettement dès le week-end suivant, en partie à cause de la répression. Ces manifestations provoquent des remous au sein de l'opposition russe. Les dirigeants du parti libéral Iabloko, Grigori Iavlinski et Nikolaï Rybakov, refusent tout soutien à Navalny, voyant en lui un « nationaliste xénophobe et autoritaire » ; cette position est dénoncée par l'ancien maire de Iekaterinbourg Evgueni Roïzman, qui décide de rompre avec son parti111. Le secrétaire général du Parti communiste (KPRF, premier parti d'opposition du pays), Guennadi Ziouganov, qualifie Alexeï Navalny « d’agent de l’étranger », tandis que des députés communistes rejoignent les manifestations112. Ces dernières restent cependant globalement peu populaires auprès de la population russe d’après les enquêtes d'opinion nationales : selon l’ONG russe Centre analytique Levada, le mouvement de contestation recueille ainsi 22 % d’opinions favorables, tandis que la popularité d'Alexeï Navalny stagnerait autour de 20 % depuis l'été 2020, soit trois fois moins que celle de Poutine112.

Le 17 février, en raison de « l’ampleur du risque pour la vie » de Navalny, la Cour européenne des droits de l'homme exige sa libération immédiate113,114.

Le 20 février, Navalny est condamné en appel à deux ans et demi de prison, et incarcéré dans une colonie pénitentiaire située à Pokrov, dans l'oblast de Vladimir115,116. Le 31 mars, il annonce qu'il est en grève de la faim117, pour protester contre l’absence d’accès à des soins et la « torture » qu’il subit par privation de sommeil118. Trois semaines plus tard, ses médecins l'exhortent à l'interrompre « immédiatement, […] afin de préserver sa vie et sa santé »119. Il s'exécute en disant avoir obtenu gain de cause pour être soigné par des médecins civils120.

Amnesty International déclare fin février ne plus reconnaître Alexeï Navalny comme un « prisonnier d'opinion » en raison de ses « propos haineux ». Le militant avait notamment comparé en 2007 les Tchétchènes à des cafards et suggérait de les molester dans une vidéo qu'il n'a depuis jamais désavouée ou retirée de sa chaîne YouTube. L'ONG considère aussi que les appels à retirer Navalny de la liste des prisonniers d'opinion en raison de ses propos fait partie d'une « campagne orchestrée » pour nuire à Navalny. Amnesty International continue toutefois de militer pour sa libération, jugeant qu'il n'est incarcéré que pour son activisme anti-Poutine. Toutefois, en mai 2021, l'ONG change sa position et considère de nouveau Navalny comme un prisonnier d'opinion. Amnesty International présente aussi ses excuses à Navalny et annonce modifier sa procédure pour désigner quelqu'un comme prisonnier d'opinion121,122.

Le 20 octobre 2021, le Parlement européen décerne à Navalny le prix Sakharov de défense des droits humains et de la liberté de pensée123.

​Depuis la prison

Il fait partie des personnalités russes qui se déclarent opposées à l'invasion militaire russe en Ukraine de 2022, appelant les citoyens russes et biélorusses à manifester quotidiennement contre cette guerre124.

Le 22 mars 2022, entendu en visioconférence, il est à nouveau condamné à neuf années d'internement en « régime sévère » pour « escroquerie » et à une amende de 1,2 million de roubles pour « outrage au tribunal » et « fraude aux dons »125 tandis qu'il purge depuis un an une peine de trois années et demi pour « fraude ». Il dénonce des dossiers montés contre lui par le Kremlin126,127. Ses avocats, Olga Mikhaïlova et Vadim Kobzev, sont arrêtés à l'issue du procès mais sont rapidement relaxés128,127.

Il appelle à voter pour Emmanuel Macron lors de l'élection présidentielle française de 2022, mettant en avant les accointances de Marine Le Pen avec le pouvoir russe129.

En juin 2022, Navalny est transféré de la colonie pénitentiaire IK-2 de Pokrov, dans l'oblast de Vladimir, vers une autre colonie pénitentiaire indéterminée mais de classe « haute sécurité »130.

​Projets

Le 30 mai 2011, Navalny lance le portail « RosIama » (РосЯма, soit littéralement RusNid-de-poule) pour permettre le signalement de chaussées détériorées et réclamer une réaction des autorités131. En septembre 2011, il crée la Fondation anti-corruption.

En janvier 2012, il inspire le projet « RosVybory » (РосВыборы, soit littéralement RusÉlections) afin d'encourager la participation d'observateurs indépendants aux élections132. Environ 12 000 participeront dans les bureaux de vote. Parallèlement, il lance l'« outil bienveillant de vérité » (Добрая машина правды) destiné à diffuser des informations sur la corruption institutionnelle vers un public ne s'informant pas sur internet133. Le 8 novembre 2012, il met en ligne le service « RosJKKh » (РосЖКХ, soit littéralement RusServicesCommunaux) permettant d'adresser des plaintes aux autorités locales concernant des dysfonctionnements des services communaux. Au cours de la première semaine, près de 96 000 plaintes sont envoyées.

En avril 2013, Navalny propose une législation interdisant aux fonctionnaires et aux employés de sociétés publiques d'acquérir des voitures de fonction d'une valeur de plus d'un million et demi de roubles134. La proposition reçoit le soutien de plus de 100 000 individus et doit ainsi être évaluée par un groupe d'experts du gouvernement qui la rejettent finalement.

Le 8 novembre 2018, il lance le projet « vote intelligent » (Умное голосование) dont le but est de faire élire le candidat n'appartenant pas à Russie unie avec les meilleures chances. En s'attaquant au monopole de Russie unie dans les parlements régionaux, il contribue à faire entrer des députés critiques du pouvoir à la Douma de Moscou. Le « vote intelligent » doit également changer le paysage électoral lors des élections régionales de septembre 2020.

​Controverses

​Accusations d'influence américaine

En octobre 2011, sa correspondance électronique est rendue publique par un hacker dans le but de montrer que « Navalny est un ultranationaliste corrompu financé par les autorités américaines ». L'authenticité des mails n'est toutefois pas intégralement confirmée par Navalny135.

D'après ces mails, en 2006, le mouvement politique DA!, à la création duquel Navalny a participé, aurait obtenu un financement de la fondation américaine National Endowment for Democracy135.

En 2010, Alexeï Navalny part étudier à l'université Yale dans le cadre du programme « Yale World Fellows », qui vise à développer un réseau de leaders connectés à Yale et engagés pour rendre « [le monde] meilleur »136.

En août 2013, le parquet russe annonce que lors des vérifications des comptes de campagne pour l'élection du maire de Moscou, Alexeï Navalny a obtenu des financements étrangers émanant de plus de 300 personnes physiques et entités juridiques étrangères issues de 46 pays, dont les États-Unis, la Finlande, la Grande-Bretagne, la Suisse et le Canada137,138.

En octobre 2011, la Novaïa Gazeta accuse le parti au pouvoir, Russie unie, d'avoir budgété 10 millions de roubles pour une campagne visant à discréditer Alekseï Navalny en filmant un sosie dans des situations compromettantes135.

Le même mois, un millier de pages de courriels privés de Navalny sont interceptées et publiées sur un blog russe anonyme. Selon The Moscow Times, les courriels contiennent des échanges entre le blogueur et des personnes politiques libérales et d'extrême droite telles qu’Aleksandr Belov, dirigeant antisémite et suprémaciste du Mouvement contre l'immigration illégale (DPNI), et avec des chiffres de l'ambassade des États-Unis en Russie139.

​Proximité avec l'extrême droite

Sa participation à l'organisation Narod (dont il est cofondateur) déclenche une controverse, celle-ci alliant des positions d'extrême gauche et d'extrême droite140,141. Le mouvement Narod est critiqué pour ses positions xénophobes, comme lorsque, dans une vidéo de l'organisation, Navalny lui-même comparait les islamistes du Caucase, à la peau sombre, à des cafards, affirmant que si les cafards peuvent être tués à la pelle, pour les humains on conseillait d'utiliser des armes à feu142,143,144. Dans une autre vidéo, Navalny semble soutenir l'idée d'un nettoyage ethnique non violent par la déportation. Habillé en dentiste, alors que défilent des clips vidéo de travailleurs immigrés145,146, il dit à l'écran : « Personne ne doit être battu. Tout ce qui nous dérange doit être soigneusement mais implacablement enlevé par la déportation... Une dent sans racine est considérée morte. Un nationaliste est quelqu'un qui ne veut pas que la racine 'russe' soit supprimée du mot 'Russie'. Nous avons le droit d'être russe en Russie et nous protégerons ce droit [...] Pensez à l'avenir, devenez un nationaliste147,148,149,150 ». En juillet 2008, Narod rejoint deux partis nationalistes et xénophobes, Grande Russie (Velikaja Rossija) et le Mouvement contre l'immigration illégale (DPNI)32,151,152, interdit en 2011 par la justice pour « extrémisme »140, afin de former le Mouvement national russe (Russkoje nacional'noe dviženie), dont Navalny est coprésident153.

À partir de 2006, Alexeï Navalny participe à la Marche russe, un défilé annuel réunissant des groupes nationalistes russes154,155,156, dont de nombreux néonazis157 ; il est l'un des co-organisateurs de la marche 2011158,159,155. Au cours de la marche russe de novembre 2008, il est également témoin de l'arrestation de Dimitri Demouchkine, chef de l'organisation néonazie Union slave, et déclare être prêt à le défendre devant le tribunal160.

En 2013, dans le quartier de Moscou Biriouliovo Zapadnoïe, à la suite d'un meurtre commis par un Azerbaïdjanais, des raids punitifs de néonazis russes ont lieu contre des magasins appartenant à des personnes d'ethnie caucasienne161. Sur son blog, Alexeï Navalny défend les assaillants, arguant du fait qu'ils ont affronté des « hordes d'immigrants légaux et illégaux » et que « s'il n'y a pas de moyen équitable de résoudre les conflits et les problèmes, les gens penseront par eux-mêmes, avec des mesures primitives et désespoir »162,163. En juillet de la même année, dans la ville de Pougatchev, au cours d'une bagarre, un homme est tué d'un coup de couteau par un Tchétchène. Après les funérailles du défunt, plusieurs personnes se rassemblent et organisent une manifestation demandant que tous les Tchétchènes soient expulsés de la ville. La manifestation conduit à des affrontements et plusieurs blessés seront signalés164. Navalny, ainsi que plusieurs membres nationalistes connus du Conseil de coordination, votent pour une déclaration légitimant la protestation de la population locale contre des personnes d'autres régions « contraires aux traditions et normes morales locales »165,166.

En août 2013, lors de la campagne électorale pour l'élection à la mairie de Moscou, Navalny présente son programme s'articulant surtout autour de la lutte contre la corruption et l'immigration167. Il a notamment déclaré : « J'ai regardé les statistiques. Savez-vous que près de 50 % des crimes et délits sont commis par des étrangers168 ? » Ces statistiques ne reflètent cependant pas la réalité, car c'est environ 2 % des crimes et délits enregistrés en Russie qui sont imputables aux étrangers et apatrides, selon les rapports annuels officiels du ministère de l'Intérieur russe169,170.

En novembre 2013, Alexeï Navalny publie sur son blog et diffusé par la radio Écho de Moscou : « Jamais je ne soutiendrai la position selon laquelle en Russie le nationalisme est une chose terrible qu’il faut interdire. En France, en ce moment, le Front national connaît une période de poussée frénétique de sa popularité. Vous parlez d’une horreur, Alain Delon soutient Marine Le Pen ! Et des processus analogues ont cours dans toute l’Europe. Et alors, allons-nous boycotter les croissants français ? Ou bien dire carrément que les Français ont le droit de faire ça, et pas les Russes171 ? »

En mars 2014, Alexeï Navalny déclare que « le problème de l'immigration illégale en Russie était cent fois plus important que l'Ukraine » et ajoute qu'il ne rendrait pas la Crimée à l'Ukraine s'il en avait le pouvoir172. Il critique toutefois cette intervention, estimant que Vladimir Poutine instrumentalise le conflit pour conforter son régime sur le plan intérieur173.

Certaines de ses vidéos où il professe des positions contre l'immigration en Russie et son nationalisme font polémique174,175,176,177.

​Deuxième guerre d'Ossétie du Sud

Au début de la guerre russo-géorgienne de 2008, Navalny se prononce contre l'envoi de troupes russes en Ossétie du Sud, mais déclare que la Russie doit faire pression sur la Géorgie pour qu'elle mette fin à la guerre. Parmi ses mesures proposées figurent l'armement et le financement de la faction séparatiste ou encore l’expulsion des citoyens géorgiens de la fédération de Russie178,179,180,181,182, qualifiant ceux-ci de « rongeurs »183,184.

​Poursuites judiciaires

Navalny a été arrêté, accusé et condamné à plusieurs reprises en Russie. Les États-Unis, l'Union européenne ainsi que le Conseil de l'Europe considèrent qu'il est victime de procès politiques185,186,187.

​Condamnations pour détournement de fonds par la justice de Russie

En 2008, pour faire face aux défaillances de la poste russe et alors que la vente par correspondance de leurs produits correspond à 4 millions de colis livrés annuellement, la filiale russe du groupe Yves Rocher, Yves Rocher Vostok fait appel à Glavpodpiska, une société de logistique détenue par les frères Oleg et Alexeï Navalny188. Le 10 décembre 2012, Bruno Leproux, directeur général d’Yves Rocher Vostok demande au comité d’enquête russe d’établir si Glavpodpiska a fait de la surfacturation189. Le 30 décembre 2014, Alexeï Navalny est condamné dans cette affaire à trois ans et demi de prison avec sursis par le tribunal de Moscou pour avoir détourné selon l’accusation, près de 26 millions de roubles (400 000 euros) appartenant à Yves Rocher Vostok190. Son frère Oleg est, lui, condamné à trois ans et demi191,192. Oleg Navalny purge sa peine dans une colonie pénitentiaire de l'oblast d'Orel et est libéré en juin 2018193.

Le 31 juillet 2012, Navalny est inculpé par la Commission fédérale d'enquête de vol à grande échelle à cause des lourdes pertes financières de Kirovles, une société publique d'exploitation forestière194. Il est accusé du détournement de seize millions de roubles (377 000 euros) au détriment de cette exploitation forestière, à l'époque où il était conseiller du gouverneur de l'oblast de Kirov, Nikita Bielykh. Le 18 juillet 2013, il est reconnu coupable de détournement de fonds et condamné à cinq ans de camp195,196,197.

En appel, la peine est réduite à du sursis27.

En février 2016, la Cour européenne des droits de l'homme condamne la Russie à verser 79 000 euros à Navalny et à son associé Piotr Ofitserov, car le procès n'a pas été équitable27.

En novembre 2016, la Cour suprême de la fédération de Russie annule le premier jugement et ordonne qu'un nouveau procès ait lieu. Celui-ci se déroule en janvier et février 2017 et Navalny est de nouveau condamné à cinq ans de prison avec sursis pour détournement de fonds et à 500 000 roubles d'amende27,198.

En octobre 2017, la Cour européenne des droits de l'homme estime que « les services [qu'a fournis la société des frères Navalny] correspondaient à ceux qui étaient dans les contrats », que « les juridictions nationales n'ont pas indiqué de méthode qui aurait permis d'identifier un motif d'enrichissement personnel répréhensible », que « les décisions rendues par les juridictions internes ont été arbitraires et manifestement déraisonnables », et que « l'équité de la procédure pénale (...) a été compromise ». En conséquence, elle condamne la Russie à verser 10 000 euros à chacun des frères Navalny199,193.

En juin 2018, Oleg et Alexeï Navalny déposent une plainte en France contre Yves Rocher pour « dénonciation calomnieuse » considérant que la plainte déposée contre eux par Yves Rocher Vostok en 2012 était en fait une attaque du gouvernement russe à leur encontre avec le soutien d'Yves Rocher Vostok. Ils sont représentés par l'avocat William Bourdon et sont entendus par un juge d'instruction du tribunal de Vannes le 30 avril 2019188.

​Accusations et enquêtes conduites par le parquet de Russie et autres griefs envers Navalny

En août 2013, Vladimir Jirinovski, président du Parti libéral-démocrate, demande au ministère de l'Intérieur l'ouverture d'une enquête sur le financement de la campagne électorale de Navalny sur la base d'adresses IP (signalant le lieu de la transaction et non la nationalité du donneur)200. Navalny nie ces accusations, affirmant que les magistrats du parquet étaient des « benêts »201. L'accusation resta sans suite.

En décembre 2020, le Comité d'enquête de la Fédération de Russie ouvre une enquête pour « escroquerie » à l'encontre de Navalny. Il lui est reproché d'avoir utilisé une partie des dons de particuliers faits principalement à la Fondation anti-corruption pour ses besoins personnels. Le montant de l'escroquerie supposée est estimé à 356 millions de roubles, soit environ 4 millions d'euros202,203. Selon Navalny, l'ouverture de cette enquête, survenue la veille de la fin de sa période de libération conditionnelle, n'a que pour objet de le dissuader de rentrer en Russie95.

En août 2021, le Comité d'enquête de la Fédération de Russie inculpe Navalny pour avoir « incité les citoyens à commettre des actes illicites ». Il est reproché à la Fondation anti-corruption d'avoir appelé publiquement à manifester en janvier 2021 alors que ces manifestations étaient interdites. Ce délit est passible de trois ans de prison204.

En octobre 2021, Navalny est considéré comme un « terroriste » et un « extrémiste » par le service fédéral des pénitenciers (en)205. En janvier 2022, Rosfinmonitoring (en), l'organisme fédéral russe chargé de surveiller les transactions financières en Russie, rajoute Navalny et une dizaine de membres de la FBK dont Leonid Volkov, Ivan Jdanov et Lioubov Sobol à la liste des personnalités « terroristes et extrémistes »206,207.

​Condamnation pour escroquerie

Le 22 mars 2022, Navalny est à nouveau condamné à neuf années d'internement en « régime sévère » pour « escroquerie » et « outrage à magistrat ». Il est accusé du détournement de près de 3 millions de roubles de dons versés aux organisations proche de lui. Il est aussi condamné à une amende de 1,2 million de roubles. Cette peine comprend aussi l'application de sa précédente condamnation à une peine par sursis de 3 ans et demi dans l'affaire Yves Rocher208,127,209.

Navalny dénonce des dossiers montés contre lui par le Kremlin126.

Le 24 mai 2022, la peine est confirmée en appel. Cette confirmation est critiquée par le secrétaire d'État des États-Unis Antony Blinken208.

​Distinctions

​Notes et références

​Notes

  1. Le nom de la compagnie signifie « victoire » en russe.

​Références

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  • Benoît Vitkine, « La justice russe ouvre une enquête pour « escroquerie » contre Alexeï Navalny », Le Monde,‎ 29 décembre 2020 (lire en ligne [archive])

  1. Benoît Vitkine, « Affaire Navalny : l’opposant envoyé en prison pour neuf ans » [archive], Le Monde, 22 mars 2022

​Voir aussi

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​Articles connexes

​Liens externes

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