vendredi 4 septembre 2015

courriels aux membres du Parlement


Chers élus de la nation,

la France est au supplice.

Le stade léthal est assez proche pour que cela ne s’entende ni ne se voit guère. Sauf à l’étranger stupéfait de notre disparition en tant que peuple admirablement doté par la nature, ayant su malgré la défaite de 1940 retrouver son rayonnement de toujours et augmenter ses avances technologiques comme nul autre en une Europe. Stupéfait de ne plus nous voir et nous entendre en tant que tels. Stupéfait que les Français consentent à leur domestication et à leur abaissement, à être si mal dirigés, si mal représentés depuis des années maintenant.

Notre patrimoine politique est dévoyé, notre patrimoine industriel et agricole bradé, notre visage défiguré, grimé. Processus d’au moins quinze ans, mais s’accélérant de semaine en semaine.

Politique.

Une élection présidentielle préparée dès la mi-mandat et censée opposer deux candidatures dont ne veulent pas les Français, à 72% pour le battu de 2012 et à 77% pour l’élu de cette année-là. Une élection qui se déciderait au premier et non au deuxième tour, puisqu’affronter Marie Le Pen, c’est censément l’emporter. A moins que les Français, sans racisme, sans antisémitisme, sans négationnisme, sans simplisme apprécient par avance un exercice du pouvoir plus partagé et plus contrôlé, Marine Le Pen à l’Elysée sans majorité au Parlement puisqu’elle n’aurait ni le temps ni les moyens constitutionnels de changer le mode scrutin de l’Assemblée nationale, malgré son élection. Le gouvernement se formerait en consensus des partis dits de gouvernement, ceux-là même qui se ressemblent tellement depuis dix ans en politique économique et sociale, et nous ont constamment fait reculer : syndrome, la réforme des retraites sauvant notre « modèle » pour vingt ans ans tous les cinq ans…
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Une vie publique figée, chaque fois pour cinq ans  Le recel des prérogatives présidentielles et la discipline interne de vos partis à peine de n’être pas réinvestis oblige, vous oblige à voter « malgré tout » la confiance ou la censure.

Une démocratie rendue émolliente. 1997, une dissolution manquée, le président reste en place. 2005, un referendum négatif, le président reste en place. 2014, la refonte de la carte des régions sur un coin de table à trois-quatre un lundi soir sans consultations locales, sans referenda locaux pour les rattachements, réunions ou sécessions des départements selon les régions, sans consultations sur les compétences et avec un désengagement de l’Etat, souvent sans préavis, faisant tout peser sur les communes, désormais incapables de maintenir leurs concours à la vie associative, pourtant creuset décisif du civisme et de la solidarité.

Face à la crise aux multiples causes et natures, assourdis de propagandes répétitives sur le choc de compétivité, sur le pacte de responsabilité, assommés par des lois-catalogues et fourre-tout qui vous sont imposées comme aux Français. Des réformes dont ceux-ci ne veulent pas et l’absence ou le déni des réformes qu’ils veulent et qui sont de bon sens. Alors que l’expérience française de la planification quinquennale ou quadriennale de la Libération à 1998 (suppression du commissariat au plan au profit d’une nouvelle institution sans aucune parenté : le conseil d’analyse économique à Matignon) est exactement à la mesure et du système quinquennal actuel et de la nécessité d’un dialogue entre partenaires sociaux vraiment efficace en économie et en finances.

La démocratie de façade et l’oubli des outils qui nous sont propres.

Notre patrimoine bradé. Pas de semaine sans une annonce navrante, au point qu’il n’y a probablement plus rien à vendre de ce que nous avions su construire depuis cent ans, souvent plus, quel que soit notre régime politique, quel que soit l’origine du capital, familial, public ou sur emprunt national. Dès 1987, l’imagerie médicale Thomson, puis les manipulations du capital d’EADS, c’est-à-dire d’Airbus dont nous avions su en 1968-1969 persuader les Allemands que l’implication gouvernementale était sine qua non. A répétition depuis 2012 :  Florange et toute sidérurgie en France –  l’automobile progressivement en Chine et au Japon en centre de décision et en fabrication – Alstom, Lafarge, Areva (via les contrats nucléaires d’EDF version Proglio avec la Chine), Arianespace alors que les absorptions-disparitions de Péchiney et d’Alcatel auraient dû nous instruire sur ces fusions et participations. L’emploi peut toujours renaître, mais un savoir-faire séculaire disparaît que nous ne pourrons reconstituer – si nous le voulions – que par mercenariat. Notre jeunesse dotée et diplomée le comprend bien : il n’y a plus d’avenir français pour ce qui étaient nos premiers rangs depuis les années 1920. Avoir laissé tomber le Crédit Lyonnais en difficulté aux Etats-Unis ou admis l’absorption d’Elf, bras séculier de l’Etat sur des marchés où nous sommes seuls à ne pas jouer national, nous a privés d’envergure mondiale. Structurellement excédentaire et de beaucoup, des premiers rangs mondiaux pour bien des céréales ou des productions de qualité, notre balance agro-alimentaire est tombée subitement déficitaire : porcs et volailles viennent majoritairement de l’étranger comme l’ensemble du textile ou des équipements électroniques ou multimédias. L’Allemagne est excédentaire en étant le diffuseur d’exporations chinoises : vg. les ampoules électriques de consommation obligée selon de nouvelles normes européennes.

Nous n’avons plus de stratégie industrielle ni au plan gouvernemental ni en concertation avec nos banques et nos groupes principaux. Les pouvoirs publics ne savent plus négocier, ne sont pas informés cf Florange et Alstom, ne savent pas nommer : le fossoyeur d’Aulnay à la tête d’Areva… et nos élites pour les directions d’entreprise se cooptent ou exploitent leur recel, cf. François Pérol, avec la tolérance des dernières procédures dont dispose encore l’Etat.

Clubs de foot. financés par l’étranger, aéroports de province financés de même, lignes intérieures attribuées à l’étranger au détriment de notre compagnie nationale. Vous en savez bien plus que moi par vos remarquables commissions d’enquête et vos investigations personnelles.

Le visage de la France – resté intact malgré nos guerres coloniales, grâce à de grandes autorités littéraires et morales (Mauriac, Camus, Sartre…Teilhard de Chardin, Abbé Pierre, Père Joseph pour ATD Quart Monde) et à l’éclat des options faites en notre nom par le général de Gaulle – est méconnaissable. Il est déjà pour certains attristés : grimaçant, mensonger. Discours et faits déshonorants, tel celui de Grenoble en Juillet 2010, tels ceux perpétrés depuis… quel que soit le ministre de l’Intérieur et le président de la République, des faits méprisant les droits de l’homme au point que la commissaire européenne compétente et le pape lui-même ont mis le holà ! à la suite de deux de nos évêques chargés de la pastorale des migrants. Chroniquement, Calais et ces jours-ci Vintimille ou de plus en plus les statistiques comparées entre Etats membres de l’Union européenne pour l’accueil des demandeurs d’asile, et affreux : nos interprètes afghans comme les harkis d’Algérie.

L’intelligence nationale dédaignée par la direction politique. Le gouvernement d’union réclamé d’évidence au soir du second tour de l’élection de 2002 contre Jean-Marie Le Pen ou du dimanche 11 Janvier dernier : pas même venu à l’esprit de celui qui peut le faire. Le moratoire des dettes souveraines, ainsi qu’en temps de guerre, évident pour tout particulier surendette et dépendant d’un banquier outrecuidant, n’est toujours pas en débat entre les principaux Etats pourtant ciblés par la spéculation comme à tondre et corvéables à merci.

Et surtout aucun tropisme européen, une gestion intergouvernementale stérile parallèlement à un fédéralisme déréglementant selon les sujets ou méconnaissant la nécessité d’indépendance et de libre examen européens. L’Europe sans initiative politique française est la proie du reste du monde, ce dont s’apercevra même l’Allemagne. 

Nous ne pouvons continuer sur cette voie, nous ne pouvons plus nous laisser marquer pour l’Histoire, pour les jeunes générations, pour celles et ceux qui nous regardent encore, de loin ou de près, par ces corruptions avérées au plus haut niveau de notre République, par la trahison d’idéaux séculaires et de combats populaires parfois héroïques. Nous allons mourir et nous n’avons plus la certitude qu’il y ait encore des voies démocratiques pour que notre honneur et nos intérêts, notre âme et nos corps soient finalement saufs.

Les battus de 2012 ou les sauveurs d’une cuvée déjà bue en 1995-1997 n’analysent rien de nous, ne proposent rien d’ensemble et de cohérent. Les élus de 2012 ont disparu. Un gouvernement sans étiquette serait acceptable s’il nous faisait au moins fonctionner. La SNCF projetant de ne plus relier Rennes à Quimper ou Clermont-Ferrand à Montpellier que par autocars, est notre parabole. Sciences-Po. et Polytechnique ramant pour ressembler aux environs de Boston nous prêchent a contrario notre erreur. Nous régressons, nous disparaissons.

Il faut que ces pompes funèbres cessent d’enfumer ses quelques acteurs et que les Français qui savent se convoquer eux-mêmes, soient craints de celles et ceux qui imposent leur façon d’entreprendre ou de recéler, qui prétendent gouverner et abusent de la désaffection totale de tout discours public. Discours ou textes des lois que vous êtes contraints d’écouter ou de voter par oui ou non, selon la couleur dont vous savez bien qu’elle ne vous décrit plus vraiment.

Je ne suis qu’un septuagénaire isolé mais analysant notre pays et ses dirigeants depuis une cinquantaine d’années, l’ayant parfois publié. Par ma profession, la diplomatie commerciale, par l’âge de notre fille (dix ans et demi), par la familiarité des principaux ministres et collaborateurs du général de Gaulle puis de François Mitterrand, des moments avec ce dernier comme avec le pape Jean Paul II, je crois avoir rencontré autant notre époque que son double possible aujourd’hui.

Par prochain courriel, je vous communiquerai ce que j’ai tenté de faire valoir à l’Elysée pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, puis depuis son investiture socialiste à François Hollande, via ses deux secrétaires généraux successifs.  Autant dans l’intérêt personnel de leur destinataire du moment que dans celui du pays et de notre bien commun, ces suggestions puis suppliques vous rencontrent, quel que soit votre parti nominal : j’en suis sûr. A leur date, je vous en avais communiquées quelques-unes.

Si je m’adresse désormais à vous, ce n’est pas pour vous encombrer mais parce que les solutions ultimes vous appartiennent, chacun, et en corps. Vous représentez le pays, pas seulement une de ses composantes géographiques. Vous le connaissez.

Je compte aussi vous demander à terme de considérer un projet dont la réalisation me paraît nécessaire, en tout cas utile quelles que soient les consultations à venir.

Chaleureusement et en confiance.

jeudi 18 juin 2015


Chers élus de la nation,

je continue cette réflexion – à l’anniversaire de la République, qui coincidait en 1870 avec l’échec d’une forme institutionnelle pourtant très moderne pour l’époque et à laquelle la Cinquième du nom ressemble beaucoup, et plus encore avec une situation apparemment désespérée en relations internationales et en cohésion du pays, de ses élites, de son peuple : il y aurait bientôt l’amputation de notre territoire, lequel constitue notre premier patrimoine commun, et la Commune, affreuse mais si explicable.

Comme à cette époque, il s’agit pour nous de trouver le meilleur régime politique et social – qui prime et encadre notre vie économique et intellectuelle aujourd’hui caractérisée par le mépris du salariat et du service public, l’adoration de l’argent et de la rentabilité (du profit et de son accaparement), l’individualisme, la dislocation de toutes les solidarités, à commencer par celle du couple. La réforme intellectuelle et morale selon Renan, la philosophie très réaliste du suffrage universel selon Victor de Broglie, pour la France nouvelle selon Prévost-Paradol. L’époque avait suscité journaux et écoles, vénérables, et malgré des institutions monistes et d’intenses conflits structurels tels que la relation entre l’Eglise et l’Etat ou entre la justice et l’armée, de grandes autorités politiques et morales avaient surgi. Un culte pour le pays, le voyage de deux enfants à travers la France, une géographie répandue comme l’enseignement de notre histoire, de notre identité et une assimilation mutuelle qui poroduisit notre capacité à tenir le choc de 1914 et l’occupation destructrice d’une partie considérable de notre territoire en superficie et en ressources.

Aujourd’hui, l’Etat a disparu sauf le fisc et le maintien de l’ordre contre les manifestants : les scandalisés, les mis à la rue ou à la pauvreté. La politique semblait depuis longtemps une classe à part, mais depuis peu elle est devenue un gouvernement à l’encontre de nous et subordonné à des emprises ou à lui-même, en sorte qu’il n’a plus de légitimité. Nous ne tenons donc plus aucun choc. Et personne n’émerge du flot des mauvaises nouvelles, des pratiques sans résultats.

J’ai eu l’honneur d’une intimité communiante avec deux personnalités qui ont démontré – à longueur de vie : l’Abbé Pierre, par une fulgurance au Quai d’Orsay – qu’on peut changer les choses en galvanisant les esprits, en n’étant que soi-même, sans vulgarité ni démagogie, sans slogans ni simplismes. Vous-mêmes dans les circonscriptions dont les citoyens et les habitants vous portent au siège qui est le vôtre pour cette législature et depuis plusieurs autres déjà – sans doute – vous avez l’expérience de la décision collégiale, des débats en mairie, en assemblée locale, l’expérience des consultations organisées ou selon vos rencontres ou les appels qui vous sont faits. Les initiatives, les votes ne sont pas ceux d’une contrainte. Vous savez ce que produisent l’imagination ou la relation de confiance personnelle. Vous êtes entourés de dévouements précis et le plus souvent désintéressés. Les Français, vos électeurs le savent, tandis qu’au niveau national l’élection est celle de l’espérance et la durée du mandat celle où se découvrent quelques personnalités de plus en plus dominées  par l’obsession de rester en place. D’y être renouvelées. Nous devenons médiocres et simplistes parce que nos dirigeants en politique, en entreprise, en intelligence de notre temps ne veulent pas que nous nous mêlions d’exercer avec eux le pouvoir, de trouver avec eux les bonnes solutions, de choisir avec eux ce qui doit rester notre structure. Notre âme se perd – découragement, fatalisme, cynisme – parce que le système est rigide et qu’il ne promeut que des esprits se croyant de droit divin.

Le président de la République n’est pas contrôlé. Les ministres sont – à quelques exceptions près que vous connaissez bien – plus accaparés par une parole publique d’ailleurs floue et approximative, que par l’étude de fond des questions à résoudre.

Ce n’est ni la France, ni la République. C’est un déclin sans précédent en temps de paix.

Vous composez une institution décisive pour notre avenir et vous pouvez décider de celui-ci en déclarant votre indépendance de jugement et de vote, en refusant – pour le salut public – l’argument peu démocratique qui gouverne (vous le vivez) les partis et les assemblées plus que jamais et alors que tous les dangers sont là, tous les écroûlements en cours : l’argument de faire corps pour ne pas perdre la prochaine élection, quelle qu’elle soit. Le rassemblement, l’union… alors qu’il nous faut discernement et énergie. Le point de départ et celui de l’arrivée ne sont pas, en contrainte de conscience, le soutien impopulaire de soi-disant réformes-catalogues défaisant le peu de cohésion qu’il nous reste. Ils sont la démocratie et l’appui de tout gouvernement sur un peuple d’expérience et de maturité. Nos gouvernants depuis au moins vingt ans font de la pédagogie – prétendent-ils – imposant ainsi une soi-disant supériorité de savoir et de compétence que n’auraient pas les Français, en corps et individuellement. Cette supériorité a montré qu’elle n’opérait aucun heureux résultat dans un pays de plus en plus malmené et ne se reconnaissant plus ni en son art de vivre et de produire, ni en son aptitude à la grandeur et à l’enthousiasme.

Il nous faut sortir de cette spirale, casser la répétition d’exercices de plus en plus vains et le moule fabriquant des dirigeants qui n’encourent aucune sanction quand ils échouent. Or, ils échouent et la prochaine élection présidentielle sera le « copier-coller » des précédentes. Cette élection doit être servante du bien commun par les réflexes et les comportements qu’elle peut engendrer parmi nous. L’élue ou l’élu sera secondaire.

Votre lecture et votre réaction m’honoreront et me seront précieux.

Dans l’attente de vous lire, d’échanger avec vous, de vous rencontrer éventuellement, je vous assure de ma confiance intuitive en votre liberté de jugement par expérience.

vendredi 4 septembre 2015

Pièces jointes

- un rappel biographique
- quelques citations de deux de nos grands contemporains pour ce que doit être, en forme et en fond, la politique quand le pays doit faire face

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