. . .
pouvez-vous admettre que l’élection présidentielle soit un simulacre, que le président sortant se conduise comme s’il s’agissait à peine d’une date obligée pour une reconduction sans examen ni débat, sans quitus pour cinq ans principalement vécus en spectacles ? ou en contraintes hors de son fait ? et être ainsi autorisé à rester désinvolte.
Pouvons-nous admettre qu’Emmanuel Macron soit reconduit du seul fait de l’image de son adversaire au second tour et par abstention ?
Pouvons-nous admettre que le président candidat n’ait pas prévu – par égard pour ses pairs européens et pour nous, ses concitoyens et ses égaux – un report de notre exercice semestriel de la présidence de l’Union, au 1er Juillet prochain, l’élection présidentielle acquise, et pour véritablement rendre compte de l’exercice de son mandat ? C’était juridiquement possible et c’eût été politiquement estimé.
Quelle stérilité que ses propositions pour l’Europe depuis cinq ans ! des retouches aux fonctionnements des institutions, selon son discours à la Sorbonne et l’ouverture de boîtes à idées, une conférence pour l’avenir de l’Europe à la manière vécue chez nous du « grand débat national » pour exorciser la grande peur d’un homme pris au dépourvu par la révolte des « gilets jaunes » ! et dont il ne sera pas fait plus cas que de la conférence citoyenne pour le climat, aux résolutions promises au referendum pour aboutir à un pâle projet de loi et à la mise en cause juridictionnelle de notre Etat pour manquements aux promesses de son chef…
Alors que l’évidence – maintenant sanglante – commande aux Européens que la présidence de leur Union soit élue au suffrage universel direct d’eux tous, qu’elle soit donc légitime et notre voix unique, prestigieuse dans un monde en manque de l’impartialité et de la force du Vieux Monde… alors que l’évidence, qu’avait bien ressentie nos aînés des années cinquante, fondant les communautés européennes et oeuvrant pour un réarmement moral, est que nous devons nous mettre en défense. Evidence que, pour un esprit de défense et un minimum de préparation à l’invasion ou à la terreur atomique, et tout autant pour la cohésion sociale – chez nous et chez nos partenaires européens suivant l’exemple que nous leur donnerions – il nous faut un service national durable (peut-être deux ans), obligatoire, universel, garçons et filles avec une première période de préparation militaire et une seconde de concours au développement dans les zones déprimées du Vieux Monde mais aussi chez nos amis d’Afrique subsaharienne dont il nous faut reconquérir coeur et estime. Evidence enfin qu’il nous faut rallier une Grande-Bretagne, à notre défense commune. Nous n’aurions jamais du la laisser « partir ». Ses peuples simplement ont dit par referendum le jugement de tous les Européens sur les fonctionnements et les impuissances actuels de l’Union. La rallier pour que se combinent, si nécessaire, nos forces nucléaires, mises à la disposition du président ou de la présidente de l’Union.
Ce sont ces novations qui sont nécessaires et que n’a jamais énoncées le président en exercice semestriel de l’Union, inventant des logos spéciaux pour les communiqués de la « présidence française » et faisant banqueter à Versailles lui et ses pairs européens, ce qui ne l’avait pas pour autant mis en valeur quand à peine élu il y avait invité le premier russe et le premier chinois – tandis qu’à présent souffrent et meurent les Ukrainiens, que la Pologne accueille plus d’un million et demi de réfugiés et qu’après avoir assuré que « la France prendra sa part », le candidat, en qualité de président de notre République, en visite pour les médias quelques-uns. Pas plus de 16.00 encore chez nous.
Ce que je lui avais par lettre et courriel à l’Elysée, suggéré – une rotation hebdomadaire – des chefs d’Etat ou de gouvernement européennes résidant tour à tour à la présidence krainienne, aux côtés du président Zelensky. C’est ce que viennent de faire les premiers ministres de Pologne, de Tchéquie et de Slovénie. Tandis qu’Emmanuel Macron, sans prise jamais sur l’esprit et la raison de Vladimir Poutine, assure qu’ « il ne faut pas entrer en guerre avec la Russie ».
C’est lui qui a diagnostiqué l’organisation du traité de l’Atlantique nord en état de « mort cérébrale ». Quelle proposition pour ce qui se forme dans beaucoup d’esprits et dans l’opinion publique de bien des pays ? Élargir l’Alliance atlantique de 1949 – qu’il eût fallu sans doute dissoudre en même temps que se dissolvait le pacte de Varsovie en 1991, évidente mesure de confiance envers le nouveau pouvoir russe qui n’était pas encore celui de Poutine – élargir l’alliance euro-américaine à tous les pays démocratiques qui veulent y participer où qu’ils soient sur la mappemonde. Car ce que défie Xi Jiping, à Hong-Kong, putativement à Taïwan, cruellement au Sin Kiang, et même au Tibet éouffé par l’immigration chinoise, c’est bien la démocratie. Certes, ce sera difficile à organiser, mais nous aurons pris le chemin du bon sens en Europe par le service national partout, et par l’élection démocratique de notre président ou de notre présidente : à cet égard, la personnalité qui s’impose par le sérieux de ses successifs exercices dans le gouvernement allemand puis à la Commission européenne, par son don des langues, par la richesse de ses ascendances familiales, c’est Ursula von der Leyen.
Et il y a nous, il y a vous composant notre Assemblée nationale. Vous avez du accepter, à peine élus en 2017, que la législation du travail – qu’Emmanuel Macron voulait absolument signer à la place de Madame El Komry, à peine de démission, laquelle fut effective – soit en forme d’ordonnance, théâtralement signée à l’Elysée. Vous avez entendu la garde des Sceaux de l’époque, la professeure de droit Belloubet vous dénier la prérogative évidente du contrôle parlementaire par l’institution d’une commission d’enquête sur les agissements et fonctions de Benalla, au motif que vous transgresseriez la séparation des pouvoirs ! Benalla, surpris en relation d’intérêt avec un « oligarque » russe, placé en garde à vue mais libéré, très discrètement dans les vingt-quatre heures, il n’y a pas longtemps.
Ce qui mine et écarte notre République des Français et de sa fonction populaire, de son esprit originel, de sa pratique par le général de Gaulle, c’est l’institution du quinquennat, aux fins personnelles de deux de nos présidents. D’abord voulue par Georges Pompidou croyant pouvoir s’attribuer la réforme et se faire réélire pour un mandat correspondant mieux à son état de santé si aggravé, en 1974. Elle fut manquée, et il mourut précocement. Jacques Chirac l’accepta, amoindri par une cohabitation avec une majorité contraire à celle de sa propre élection, se persuadant et prétendant nous persuader que cela ne changerait rien. En réalité, cela changea tout mais l’avantageait : compte tenu de l’âge qu’il atteindrait à la fin de son mandat en 2002, il jugea son énième candidature plus présentable et moins exigeante, si ce n’était que pour cinq ans. Valéry Giscard d’Estaing et Michel Rocard y ajoutèrent un report du renouvellement de votre Assemblée, constitutionnellement prévue pour se tenir un peu avant l’élection présidentielle à venir, pour qu’il n’intervienne qu’après. Vous l’avez peut-être vécu, siégeant déjà. Le résultat, nous le vivons tous. La vie nationale est figée pour cinq ans. Et le moment décisif qu’est l’élection que nous vivons en ce moment, est devenu le seul de notre vie démocratique. Celle-ci désormais si pauvre.
Pour que l’acte national qu’est la dévolution du mandat présidentiel soit complet et source de légitimité, au lieu qu’il soit devenu la possibilité (que s’est arrogée le président actuellement sortant) de tout accaparer, il faut que
- l’élection-même soit irréprochable et libre. Contre l’abstention, légaliser le vote blanc. La campagne médiatique doit être vraiment égalitaire. Un nombre égal d’heures accordé à chaque candidat et celui-ci en disposant comme il le juge meilleur. Finis ces conseils de révision où ce sont les journalistes qui dominent et font faire des QCM à des personnalités politiques. Les éventuels dépassements par un candidat, fut-il le sortant, sont un supplément équivalent attribué à tous les autres. Les médias confirmeraient ou feraient naître des personnalités. Nous ne votons pas pour un programme présidentiel, mais pour une personne ayant étoffe, carrure, caractère, indépendance d’esprit. Courage.
- instituer un quorum de participation pour ce scrutin comme pour tous les autres dans la sphère publique : aux candidats d’attirer les citoyens.
Nous ne serons plus en démocratie tant que ne seront pas rétablis le septennat, la non-coïncidence des mandats présidentiel et législatif. Tant que le referendum ne sera pas une modalité fréquente de décision par tous. Que la possibilité du referendum d’initiative populaire ou citoyenne soit vraiment ouverte. Que la Constitution qui a énuméré en 1958 les matières faisant le domaine de la loi et donc de la votation parlementaire, énumère aussi les matières, par nature législative, mais ne pouvant être adoptées que par referendum.
Enfin, nous ne pouvons plus – vous, les élus de la Nation, et nous les Français de tous temps – accepter que des décisions capitales soient prises dans l’ambiance d’une campagne présidentielle et par un seul : le président sortant, improvisant ou se contredisant. Ainsi le retour au nucléaire, dont la sortie a été le thème des trois précédents scrutins. Ainsi, immédiatement, l’ouverture d’un débat sur l’autonomie de la Corse. Décisions prises sans prodromes, sans consultation du Parlement.
La Corse, il est certain que les Français ont droit à la différence, mais la cause du désordre actuel tient à deux fautes. La première, la présomption de culpabilité pour Yvan Colonna, énoncée de New-York, par le Président du moment, Nicolas Sarkozy : inadmissible. Le fond de l’affaire n’est toujours pas élucidé : le préfet Erignac ne voulait pas être nommé en Corse, son assassinat a été personnel, et non pas perpétré sur le représentant de l’État. Selon moi, Yvan Colonna, homme d’honneur, s’est contraint au silence. La seconde est que, depuis le début, une satisfaction très légitime devait être donnée à nos compatriotes corses : l’incarcération des leurs, chez eux.
Le prochain quinquennat ne peut pas être un nouveau sur-place et donc maintenir la France en retard de beaucoup de réflexions et d’approfondissements. Rien que le rétablissement de la planification (dite : « souple à la française ») nous ferait retrouver le cadre de vraies négociations et projections sociales et économiques. Le quinquennat et le fixisme qu’il a produit dans notre vie politique national devait logiquement engendrer le plan pluri-annuel, établi entre partenaires économiques, sociaux, et culturel, débattu par vous pour devenir « l’ardente obligation » qui nous a si bien réussi pendant des décennies. Il n’en a rien été. François Bayrou, commissaire général, mais sans troupes, sans compétences, sans le Parlement, sans partenaires. De même que le régime des retraites eut son ministre ou tout comme, mais qui se révéla en conflit d’intérêts sur un sujet concernant la plupart d’entre nous.
J’aurai voulu exposer tout cela – qui est le bon sens – moi-même, en étant reconnu candidat par le Conseil constitutionnel. La quête des parrainages, hors parti, est plus que difficile, mais je ne la regrette pas. C’est à vous de porter maintenant tout cela. Des ajustements de la loi électorale, en urgence, sont encore possibles. Il est évident que l’allongement de la durée du mandat présidentiel ne peut être proposé par le futur élu. J’en avais écrit au président de la République : ne pas se représenter mais – en personnalité jeune, d’expérience pourtant et désintéressée dans l’immédiat – proposer pour notre démocratie nationale et pour l’Europe, les changements indispensables.
Sur votre demande, je vous adresserai l’ensemble de ce que j’ai – en vain – suggéré à Emmanuel Macron, aux soins de son secrétaire général, Alexis Kohler, depuis leur avènement, il y a bientôt cinq ans. Désormais, c’est à vous, Mesdames et Messieurs, nos chers députés, et aussi aux sénateurs, que je m’adresserai.
Confiant et civiquement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire