mercredi 2 mars 2022

message après sa déclaration d'abandon - faute de parrainages

 

Le 02/03/2022 à 21:15, Christiane Taubira a écrit : Restons fidèles à nos causes

Bonjour à toutes et à tous, 


Je m’adresse à vous aujourd’hui après avoir annoncé ce matin la fin de ma campagne.


Malgré votre forte mobilisation, votre ténacité et votre enthousiasme,  malgré la mobilisation d’élus qui ont fait le choix courageux d’obéir à leur conscience plutôt qu’à  leur parti, malgré les promesses de nombreux autres, il est aujourd’hui évident que nous n’arriverons pas à réunir les cinq cent parrainages nécessaires pour aller au bout de cette aventure collective. 


Cet empêchement, c’est avant tout  la marque de crispations  politiques fortes, de forces  politiques qui ont saisi cette collecte de parrainages pour exprimer leurs dernières forces  et empêcher une candidature qui manifestement les bousculent, pour ce qu’elle signifie : un ancrage dans une initiative citoyenne et un processus démocratique inédit. Une partie de la gauche a fait le choix du blocage, la majorité présidentielle celui de parrainer les candidats d’extrême droite, ces choix ont un sens politique et je les regrette. 


Ma candidature se trouve donc empêchée aujourd’hui par un dispositif administratif qui vit, du moins je l’espère, ces dernières heures. 


La réalité aujourd’hui c’est d’un côté, des discours de haine et de fragmentation et de l’autre, une gauche qui n’est pas audible et qui risque d’être en incapacité d’agir pour les citoyennes et les citoyens dans le besoin. Ce n’est pas pensable, ce n’est pas envisageable. 


Au cours de ces derniers mois de campagne, j’ai pu constater le délitement de notre démocratie. La jeunesse qui s’est fortement impliquée dans cette campagne en a pris la mesure. La fracture entre les institutions et les citoyennes et citoyens est immense, la désinformation circulent et l’information fiable est rare, le Parlement ne fonctionne pas, nous ne sommes plus dans un régime de séparation des pouvoirs et cela pose la question de l’expression de la volonté du peuple. De leur côté, les partis n’en finissent pas d’agoniser,  délaissés par  les militants, par leur électorat, incapables de dépassement. J’espère que ces constats ne survivront pas aux échéances électorales de ce printemps.


Pour toutes ces raisons, nous allons désormais mettre toutes nos forces dans la revitalisation de la démocratie française. Faire en sorte qu’elle puisse reposer sur des forces politiques où les citoyennes et les citoyens émergent massivement. L’empêchement auquel nous sommes confronté aujourd’hui est enseignement politique, il nous réarme, nous revigore et intensifie notre volonté d’agir pour une démocratie crédible et transformée.


La gauche détient, par ses idéaux, les réponses pour répondre aux défis qui sont les nôtres. Nous avons fait ce qui pouvait être fait et le mieux possible en m’impliquant en responsabilité. J’ai tendu la main, je n’y ai mis aucun préalable, aucune condition, je n’ai formulé aucune attaque, même pas en riposte, mais ma main n’a pas été prise et la gauche continue à s’embourber. Je conteste néanmoins que l’union soit impossible. Nous allons continuer à nous battre pour.


Cette campagne a été une belle bataille, nous sommes liés par des beaux objectifs : le refus que le peuple continue d’être évincé, le refus d’assister à une monarchie présidentielle, le refus que des oligarchies continuent à s’enrichir quand d’autres vivent la crise de plein fouet, que le refus que nos institutions – qui montrent leur obsolescences – ne soient pas renouvelées, le refus de vivre dans une démocratie archaïque.


Nous allons continuer à mettre nos forces dans les batailles urgentes et les causes qui font ce que nous sommes : les femmes, les jeunes, les personnes âgées, le pouvoir d’achat, la justice sociale, la transition écologique et solidaire, les habitants des quartiers populaires qui sont si facilement stigmatisés. 
Nous allons le faire pour toutes celles et ceux que j’ai eu la chance de croiser pendant cette campagne, partout en France. Nous n’allons pas, une fois celle-ci terminée, les abandonner.


Nous avons fait cette campagne en portant une idée de la France, son identité, son Histoire. Ce sont les Françaises et les Français attachés à leurs territoires ruraux, à leur langue, à leur culture régionale ; ce sont ces ouvriers qui sont venus d’Italie, de Pologne, du Portugal, avec leur courage ; ce sont ces espagnols qui se sont battus contre le franquisme ;  les rapatriés d’Algérie, ces Marocains, ces Tunisiens qui sont venus construire en France ; ce sont les réfugiés du Cambodge, du Laos ;  ce sont les tirailleurs et les travailleurs d’Afrique ; les réfugiés des dictatures chilienne et argentine, les rescapés du génocide arménien de 1915 ; ce sont toutes ces personnes, leurs enfants et leur petits-enfants qui sont venus enrichir la culture française. Nous leur disons merci.


La guerre déclarée en Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine est une nouvelle épreuve de vérité pour notre pays. Le peuple ukrainien est confronté à une tragédie, nous devons lui apporter notre soutien total. Nous serons en conflit direct avec ceux qui pensent que la France doit se replier et être indifférente au sort de ceux qui souffrent. Nous affirmerons notre volonté d’accueillir aussi bien les réfugiés d’Ukraine que ceux de Syrie, d’Irak ou d’Afghanistan. 

 
Nous ferons connaître la forme que prendront nos combats. Pour ma part, j’exprimerai  publiquement mon vote du 1er tour.  Sur le terrain, pour les législatives, se développent déjà des dynamiques de maisons communes. Nous allons y mobiliser nos forces. J’espère que les derniers jours de campagne serviront à la gauche pour se ressaisir, ne pas rater ce rendez-vous et sa mission ou sinon, elle devra prendre ses responsabilités et expliquer aux personnes qui ont besoin des politiques de justice sociale et de solidarité, pourquoi elle les a abandonnés. 


Je m’adresse particulièrement à vous ce soir, vous qui avez voulu suivre cette campagne, aider, participer, donner, vous mobiliser. Je vous en remercie, et je m’engage à ne pas abandonner nos combats. 


Restons fidèles à nos causes. 
 

Ce qui compte, c’est plus que jamais, vous.
 

A très bientôt,


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