samedi 10 juin 2017

le jounal Le Monde et son indépendance


Ce que change le nouvel accord entre les personnels du « Monde » et les actionnaires du groupe

Le Pôle d’indépendance du groupe a approuvé, le 12 janvier, un projet d’accord préservant l’intégralité des droits dont disposent depuis 2010 les salariés.
LE MONDE | 27.01.2017 à 15h00 • Mis à jour le 27.01.2017 à 17h23 | Par La Société des rédacteurs du « Monde »
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Un accord sur une recomposition du capital vient d’être trouvé entre les actionnaires majoritaires (Xavier Niel, Mathieu Pigasse et Pierre Bergé) et le Pôle d’indépendance du groupe Le Monde – société à responsabilité limitée, active depuis six ans –, qui rassemble les sociétés de journalistes, de personnels, de lecteurs et fondateurs du groupe. Le projet a été approuvé, le 12 janvier 2017, par le Pôle d’indépendance et doit être formellement signé dans les semaines à venir. Explications.

Ce que prévoyait le pacte conclu lors du rachat du « Monde » en 2010

Pour comprendre la situation actuelle, il est nécessaire de revenir sur ce qui avait été conclu lors de l’achat du journal, en 2010.
Le journal était jusqu’alors majoritairement détenu par ses salariés (rédacteurs, cadres, employés) et par des actionnaires historiques (Association Hubert-Beuve-Méry, Société des lecteurs). En difficulté financière, il a été racheté en 2010 par Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse, associés dans Le Monde libre (LML) avec le groupe espagnol Prisa, propriétaire notamment du quotidien El Pais.
Les actionnaires historiques regroupés dans le Pôle d’indépendance
Les actionnaires historiques (les sociétés des rédacteurs, des employés, des lecteurs, etc.) se sont alors regroupés au sein du Pôle d’indépendance, qui détient actuellement un tiers des sièges au conseil de surveillance. Il ne possède que 19 % du capital mais dispose de la minorité de blocage (33,34 %) en droits de vote grâce aux droits transférés par Pierre Bergé, dans le cadre d’une structure spéciale, une société en « commandite ». La minorité de blocage permet principalement d’empêcher une modification des statuts et une augmentation de capital.
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Le groupe Le Monde aujourd’hui.
Le pacte conclu en 2010 entre les actionnaires (majoritaires et minoritaires, dont le Pôle d’indépendance) prévoit toute une série de droits, comme l’approbation du directeur du journal par un vote de la Société des rédacteurs du Monde (SRM) – ce fut ainsi le cas lors de la désignation du directeur actuel, Jérôme Fenoglio, en juin 2015.

Un pacte fragile et limité dans le temps

Ce pacte comportait toutefois plusieurs limites.
1.      Il prévoyait un plafond de 110 millions d’euros que pouvaient apporter les actionnaires majoritaires ; au-delà, ces derniers pouvaient convertir leur apport en capital proprement dit, diluant de fait la part du Pôle d’indépendance, qui perdait donc mécaniquement sa minorité de blocage.
2.      Ce pacte n’était garanti que jusqu’en 2025. Au-delà, il pouvait être renouvelé deux fois pour des périodes de cinq ans, uniquement si les actionnaires majoritaires et le Pôle d’indépendance le souhaitaient. Autrement dit, en 2035 au plus tard, l’ensemble des droits aurait été remis en cause.
3.      Par ailleurs, la forme d’un pacte entre actionnaires majoritaires et minoritaires était assez fragile ; en cas de changement d’actionnaires majoritaires, tous les droits étaient remis à plat.
Courant 2016, le plafond de 110 millions d’euros que devaient apporter les actionnaires a été dépassé. De ce fait, le pacte avec les actionnaires majoritaires est devenu friable : ils pouvaient unilatéralement décider de convertir cet argent en capital, diluant au sein du capital la part du Pôle d’indépendance, qui perdrait sa minorité de blocage.
Par ailleurs, dans le cadre d’un emprunt sollicité par le groupe Le Monde, une bonne partie des apports en compte courant des actionnaires majoritaires devrait être convertie en capital, ce qui diluera davantage la part du Pôle d’indépendance.

Que prévoit le nouvel accord ?

Après négociation entre les représentants du Pôle d’indépendance et les actionnaires majoritaires, le projet d’accord prévoit la création d’une « action d’indépendance » dans laquelle tous les droits seront maintenus pour une durée illimitée, et cela quelle que soit la part au capital du Pôle d’indépendance. Cette action d’indépendance ne pourra pas être modifiée sans accord du pôle.
Autrement dit, même si la part du Pôle d’indépendance se trouve réduite, il conservera ses droits à l’identique. Cela inclut notamment :
·         l’approbation par 60 % de la SRM du directeur du journal ;
·         la capacité d’empêcher la modification des statuts de l’entreprise si elle modifie son objet social ;
·         en cas d’arrivée d’un nouvel actionnaire en dessous de la minorité de blocage (moins de 33,34 %) : signature publique de la charte d’éthique et de déontologie, qui sera rendue plus contraignante, et avis public du comité d’éthique et de déontologie ;
·         capacité de bloquer l’arrivée d’un nouvel actionnaire au-dessus de la minorité de blocage (ou si un actionnaire minoritaire passe la barre de la minorité de blocage).
·         élargissement à l’ensemble du groupe du Comité d’éthique et de déontologie, qui assure le respect des principes fondateurs du Monde : indépendance éditoriale et qualité de l’information.
Vos réactions (8) Réagir
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lucifer 28/01/2017 - 16h42
Pourquoi le plafond des 110 millions a-t-il dépassé? Pour compenser les pertes? Si c'est le cas, LE Monde est techniquement en faillite. Dès lors, survivra-t-il à 2035? On ne peut qu'en douter. Ensuite, les rédacteurs feraient bien de se libérer de leur idéologie pro-OTAN et gnan-gnan, en somme de se consacrer à faire du journalisme (rapporter des faits sans les biaiser), et de renoncer à être les propagandistes (le lecteur peut se faire une opinion par lui-même en fonction des ses a priori).
 
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Albert Le Radener 27/01/2017 - 19h07
Pas facile à comprendre!
 
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Du don et de la reconnaissance 27/01/2017 - 21h49
C'est pas difficile : qu'est ce qui compte pour un investisseur ? la réussite de son projet, de sa vision des choses. Qu'est ce qui compte pour un journaliste ? Donner une information et, secondairement, donner à cette information une perspective en fonction d'un filtre. Dans le présent schéma le trio des actionnaires libère le pouvoir rédactionnel. En contrepartie il engrange une reconnaissance très, très forte... qui va lier pieds et poings la ligne éditoriale du journal.
 
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Si ce n'est pour faire fortune, ce n'est pas pour faire mauvaise fortune... 27/01/2017 - 22h54
On ne fait pas fortune en investissant dans la presse. Par contre on se donne, par ce biais, les moyens - ceux du 4ème pouvoir - d'influencer politiques comme électeurs... Un journal de référence est donc un instrument de pouvoir, un pouvoir qui s'abrite derrière une charte déontologique, comme beaucoup d'entreprises. La presse ainsi, d'un faible mouvement de levier, peut faire dévier une boule de billard....
 
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RICHARD NOWAK 28/01/2017 - 23h16
La seule chose à retenir est que le journaliste mange tous les jours. Il a deux moyens pour continuer à en vivre : sa rémunération et sa plume. Ici il s'agit d'un compromis entre ces deux limites.
 
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THOYOIS 27/01/2017 - 19h05
C'est très joli sur le papier: indépendance éditoriale et qualité de l’information. Ces sans compter avec l'auto-censure et la visible et persistante manque d'objectivité. Est ce que le SRM est conscient du ressenti des lecteurs à propos, justement, de l’indépendance éditoriale et la qualité et objectivité de l'information?
 
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RICHARD NOWAK 29/01/2017 - 11h19
Si le fondement informatif est un préalable nécessaire, le journalisme c'est proposer une opinion si possible étayée ou argumentée à partir de ce qu'il est conservé de cette information. L'information ne l'oublions pas s'enrichit, se complète, mais aussi perd de la densité quand certains de ses aspects seuls sont privilégiés. C'est là que se situe le problème réel. C'est là que se situe la déontologie qui oblige à révéler ses sources. Sauf dans les régimes autoritaires où il faut les protéger.
 
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RICHARD NOWAK 27/01/2017 - 18h53
Des journalistes indépendants est ce que cela signifie données de qualité pour aider le lecteur à se forger une opinion étayée? En ce qui me concerne, depuis 2003, j'ai, à travers les données éparses et limitées de mon journal préféré, réussi à me forger une opinion sur pratiquement tous les sujets concernant la Vie de la Cité et à la mettre par écrit. Notamment en approfondissant. Merci au pôle d'Indépendance. Nous verrons si l'avenir sera au moins aussi fructueux de ce point de vue..
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« Le Monde » : une indépendance préservée

Communiqué du Pôle d’indépendance du groupe Le Monde sur le projet d’accord avec les actionnaires majoritaires regroupés au sein du Monde libre (LML).
LE MONDE | 27.01.2017 à 12h16 • Mis à jour le 27.01.2017 à 12h32
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Le Pôle d’indépendance, qui regroupe les sociétés de journalistes, de personnels, de lecteurs et fondateurs du groupe Le Monde (1), a approuvé, le 12 janvier 2017, par 10 voix pour et trois abstentions, le projet d’accord avec les actionnaires majoritaires regroupés au sein du Monde libre (LML). Cet accord préserve l’intégralité des droits dont disposaient depuis 2010 le Pôle d’indépendance et ses composantes par le biais d’un pacte d’actionnaire et d’une minorité de blocage. Plusieurs droits nouveaux sont également acquis. Ces droits, explicités ci-dessous, sont attachés à une « action d’indépendance ». Prenant juridiquement la forme d’une « action de préférence », l’action d’indépendance est à la fois inaliénable, puisqu’elle ne peut être retirée au Pôle d’indépendance contre sa volonté, statutaire, et d’une durée illimitée, là où le pacte signé en 2010 entre le Pôle d’indépendance et LML n’était garanti que jusqu’en 2025.
Cette transformation entraîne une déconnexion entre les droits politiques du Pôle d’indépendance et sa part dans le capital du groupe Le Monde. Les évolutions capitalistiques futures n’auront donc plus d’impact sur les droits qui garantissent notre indépendance.
Parmi les droits communs aux différentes composantes du Pôle d’indépendance figurent celui de nommer un tiers des membres du conseil de surveillance de la Société éditrice du Monde ; le renforcement de la Charte d’éthique et de déontologie signée en 2010 avec les actionnaires majoritaires ; le Comité d’éthique et de déontologie du Monde est élargi à l’ensemble du groupe ; le Pôle d’indépendance aura la capacité d’empêcher une modification des statuts si celle-ci avait un impact sur ses droits ; il dispose d’un droit de première offre en cas de changement de contrôle de LML avec un délai de six mois pour constituer l’offre ; il possède la capacité d’empêcher une augmentation de capital supérieure à 33,34 % ; tout nouvel actionnaire devra signer la charte d’éthique et de déontologie renforcée et faire l’objet d’un avis du Comité d’éthique et de déontologie.
Parmi les droits spécifiques aux différentes sociétés du groupe, le directeur du Monde doit faire l’objet d’une approbation par 60 % de la Société des rédacteurs du Monde, avec une confirmation tous les six ans. La société des personnels des Publications de la Vie catholique nommera un membre aux conseils de surveillance ou d’administration de Télérama, de Malesherbes Publication (La Vie). Il en va de même pour la société des personnels de Courrier international. Ces trois sociétés de personnels détiendront un droit de veto sur la cession de leur titre, sauf intérêt manifeste du groupe Le Monde. Les rédactions de Télérama, de La Vie et de Courrier international devront être consultées avant nomination de leur directeur de la rédaction.
Le Pôle d’indépendance se félicite d’être parvenu avec les actionnaires majoritaires, Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse, à un accord qui sanctuarise et pérennise les garanties d’indépendance de l’ensemble des titres du groupe Le Monde.
(1) Société des rédacteurs du Monde, Société des personnels des Publications de la Vie catholique, Société des lecteurs du Monde, Société des cadres du Monde, Société des employés du Monde, Société des personnels du Monde, Société des personnels de Courrier International, Association des actionnaires minoritaires du Monde.
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Pedro136 29/01/2017 - 17h23
Indépendance n'est pas synonyme d'impartialité, bien au contraire. Les journalistes du Monde ont "sanctuarisé" leur droit à la partialité. Ont-ils également des devoirs, une responsabilité en contrepartie de leurs droits? On se pose parfois la question...
 
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B D B 27/01/2017 - 21h38
Indépendant Le Monde ? Quand on voit le tri fait des commentaires sur F Fillon et comment est attisé le Pénélope Gate…Pourquoi écrire honnêteté entre guillemets M. Lemarié ? Vous n'y croyiez donc pas…Quelle curée !…..La même chose a été faire contre N. Sarkosy. Aucune objectivité. Non, LeMonde, que je lis depuis mes études supérieures (1981 et FM) n'est ni indépendant, ni juste. Ses journalistes sont partisans. Il reste un bon quotidien mais l'honnêteté….Oui, là aussi, ouvrons les guillemets.
 
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En marche, j'équilibre équitablement 27/01/2017 - 23h14
Le Monde défait Fillon, en effet. Mais c'est fait de façon équilibrée : après avoir défait la politique de Hollande, il défait Fillon. A part que l'un c'est pour des histoires d'argent, et que l'autre c'est histoire de coiffeur et de bluette. Les deux pêchers n'étant pas égaux - l'argent est mal vu par ceux qui sont saignés, tandis que les amourettes c'est diablement humain - il fallu dépêcher deux journalistes et tout un livre pour...etc, etc...éjecter Hollande. Du temps, Macron regarde...
 

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