mercredi 9 novembre 2016

l’élection de Donald Trump va être un séisme pour le monde - Le Monde.fr



Le candidat républicain a fondé sa campagne sur la promesse de « rendre sa grandeur à l’Amérique ». Quelles conséquences pour le reste du monde ?

LE MONDE | 09.11.2016 à 07h51 • Mis à jour le 09.11.2016 à 15h43 | Par Sylvie Kauffmann

Si le vote pour le Brexit, le 23 juin, a été un séisme pour l’Union européenne, l’élection de Donald Trump à la tête des Etats-Unis, première puissance militaire, est un séisme pour le monde.

Le candidat républicain a fondé sa campagne sur la promesse de « rendre sa grandeur à l’Amérique ». Cette grandeur, cependant, ne s’entend pas par la projection de la puissance américaine à l’extérieur, mais plutôt sur une priorité donnée au retour du bien-être et de la prospérité des Américains chez eux. Le pays « est en ruines », dit M. Trump, il faut commencer par le reconstruire. Pour le reste du monde, cela donne un signal de repli et d’isolationnisme.
On sait, en réalité, assez peu de chose sur le programme concret de Donald Trump en politique étrangère car ses conseillers dans ce domaine sont peu connus ; l’establishment washingtonien et le petit monde des think tanks spécialisés dans les relations internationales, qui conseillent habituellement les candidats en politique étrangère, se sont tenus à distance de lui et de ses vues peu orthodoxes. Mais M. Trump a régulièrement émis quelques idées maîtresses qui donnent un canevas de ce que pourrait être sa diplomatie.
Vis-à-vis de l’Europe, Donald Trump, qui a soutenu le vote en faveur du Brexit en critiquant l’Union européenne, considère qu’il appartient aux Européens de se prendre en charge et surtout de financer leur défense, plutôt que de s’abriter sous le parapluie américain. Ainsi l’OTAN ne peut fonctionner, et les Etats-Unis venir au secours d’un allié dans l’éventualité d’une attaque, que si les Etats européens augmentent leurs budgets de défense.

Placer « les intérêts américains en premier »

Donald Trump est critique de l’interventionnisme américain à l’étranger et du cycle d’opérations militaires lancé par l’administration George W. Bush. Il est, dans ce sens, anti-néo-conservateur. Le président Obama lui-même avait promis de « ramener les troupes à la maison », mais la réalité du Moyen-Orient l’a contraint à maintenir ou à lancer un certain nombre d’opérations. M. Trump se veut plus radical, tout en souhaitant augmenter la taille de l’armée américaine : pour la coalition internationale (dont la France) actuellement engagée aux côtés des États-Unis, en particulier sur le théâtre irakien et syrien, c’est une nouvelle donne. Violemment hostile aux « djihadistes », qu’il accuse Hillary Clinton d’avoir engendrés, il a promis de les « mettre KO » – mais n’a pas précisé comment.
« Nous nous entendrons avec tous les pays qui veulent s’entendre avec nous » : dans son discours de victoire, mercredi matin, le président-élu Trump a voulu se montrer conciliant, tout en précisant qu’il placerait « les intérêts américains en premier ». Un grand point d’interrogation concerne les relations avec la Russie, qui se sont gravement détériorées depuis un an. Donald Trump a, à plusieurs reprises, chanté les louanges de Vladimir Poutine, qu’il considère comme « un meilleur leader que Barack Obama », et les services de renseignement américains ont accusé la Russie d’être derrière le piratage des comptes e-mail qui ont embarrassé le camp de Hillary Clinton pendant la campagne. Mais les deux hommes ne se connaissent pas personnellement, et le président russe s’est abstenu de souhaiter publiquement la victoire du candidat républicain. Comme Vladimir Poutine, Donald Trump est sensible aux rapports de force. Sa fascination pour l’homme à poigne de Moscou ira-t-elle jusqu’à accepter certaines de ses visées sur le voisinage de la Russie (Ukraine, Géorgie) et le Moyen-Orient, voire l’idée d’un deuxième Yalta auquel aspirerait M. Poutine ? Le candidat républicain est resté très évasif sur ces questions. Mais on peut parier qu’il s’entourera de vieux routiers de la guerre froide, qui vont retrouver quelques éléments familiers dans le paysage actuel et ne seront pas disposés à brader les intérêts américains en Europe.
Donald Trump veut dénoncer l’accord de Paris sur le réchauffement climatique : le fera-t-il ? Un autre axe de sa campagne a porté sur le rejet de la mondialisation et des accords de commerce international, accusés d’avoir détruit l’emploi aux États-Unis. L’une des grandes bénéficiaires de cette mondialisation, la Chine, est donc dans son viseur. Il veut instaurer des barrières tarifaires sur les produits chinois, il rejette l’accord de libre-échange avec l’Asie TPP (Partenariat Transpacifique) et a proposé de renégocier l’accord de libre-échange avec le Canada et le Mexique conclu par Bill Clinton. Il ne s’est pas prononcé sur les tensions en mer de Chine méridionale. Sur ces très gros dossiers, cruciaux pour les Etats-Unis, il va avoir affaire à un autre homme fort, le président Xi Jinping.
Autre conséquence d’une victoire Trump : elle confortera les mouvements et leaders populistes du monde entier, de l’Europe à l’Asie. Cela aura forcément un impact sur les relations internationales.
Enfin, les institutions américaines accordent plus de latitude au président en politique étrangère qu’en politique intérieure, où les « checks and balances » servent de garde-fous. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour le reste du monde. Mais on peut aussi imaginer que la réalité et le pragmatisme amèneront le président Trump à tempérer certaines de ses vues, comme cela a été le cas pour Ronald Reagan, et que les élites républicaines de politique étrangère, après leurs réticences initiales, le rejoindront une fois au pouvoir. La période de transition, au cours de laquelle il va former sa future équipe d’ici au 20 janvier, va fournir à cet égard des indications anxieusement attendues dans le monde entier.

 Sylvie Kauffmann - Journaliste au Monde

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Vos réactions (66) Réagir
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A maman 09/11/2016 - 18h52
Je me souviens du froid de novembre 1963 dans mon coeur d'enfant revenant de l'école .
 
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PIERRE -MARIE MURAZ 09/11/2016 - 18h22
Si séisme il y a , c'est celui des médias manipulanteurs qui disaient, qui chantaient la victoire de H Clinton et qui finissaient pas croire à leur brouillage ... ils analysent ce qui se passe dans la tête des gens avec des sondes terramoresques ... les investisseurs de millions de dollar Hilarien n'aura pas leur retour sur investissement ...
 
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PIERRE -MARIE MURAZ 09/11/2016 - 19h26
correction : terranovesques ...
 
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Halala les retraités! 10/11/2016 - 08h09
correction : taubiresques ...
 
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Pierrot Le Fou 09/11/2016 - 17h58
La victoire de Trump correspond à une lame de fond politique et culturelle qui submerge l'ensemble du monde occidental. C'est un mouvement de révolte contre les élites faillies, fanatisées par une idéologie qui sacrifie les peuples. Sa victoire était prévisible. Il a toujours dit que les médias étaient corrompus et que les sondages menteurs. Il disait vrai. C'est une victoire historique d'un contre tous. Les E-U 🇺🇸 est le seul pays au monde où une aventure comme celle-là reste possible.
 
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Jean-François Herdhuin 09/11/2016 - 16h39
"Le populisme porte en lui la guerre comme la nuée l'orage"
 
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asselborn eric 09/11/2016 - 16h30
"L’élection de Donald Trump va être un séisme pour le monde" ou pour Le Monde, notre bon journal qui n'a pas écrit une ligne réellement informative sur ce qui se passe aux US ? Dès février, il y a avait un frémissement perceptible en Arizona. L'obsession Sanders fait un peu penser à la sagesse africaine du doigt et de la lune.
 
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Pierrot Le Fou 09/11/2016 - 18h09
Le NYT s'est couvert de ridicule plus que le Monde. Tout comme l'ensemble des grands médias américains. Sur 80 médias US les plus importants, 77 se sont déclarés pour Clinton et ont fait campagne pour elle. La foi en la victoire d'Hillary, car il s'agissait de foi, était basée sur la négation systématique des fait et l'incapacité idéologique de voir que Trump incarnait un vrai mouvement populaire. Car ce qu'il disait était ce que les gens voulaient entendre et qu'ils entendaient enfin.

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