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EDF : une scission en vue, mais laquelle ?
Par Dominique Pialot | 01/08/2018, 5:17 | 1147 motsSuite à une conférence téléphonique avec des analystes financiers, le cours de Bourse de EDF s'appréciait ce 31 juillet à 15h de 3,34%, à 12,82 euros. Mais ce bon accueil des marchés est-il seulement dû à une production hydroélectrique et (dans une moindre mesure) nucléaire meilleures que prévu, ou également à l'évocation d'une évolution de la gouvernance ?
Véritable serpent de mer, l'hypothèse d'une scission entre les différentes activités d'un groupe endetté de 33 milliards d'euros et faisant face à de gigantesques investissements (grand carénage, Hinkley Point, plan solaire...), a été évoquée à de nombreuses reprises au cours des derniers mois. Mais c'est la première fois qu'elle suscite chez le principal intéressé un peu plus que l'affirmation de n'avoir pas été « sollicité » par le gouvernement pour revoir l'organisation de ses activités.
"C'est le privilège de l'actionnaire majoritaire d'EDF, l'État français, de regarder si la structure actuelle des actifs est optimisée afin de répondre aux attentes que l'État pourrait avoir au regard des missions d'EDF (...)", a en effet déclaré Jean-Bernard Lévy ce 31 juillet lors de cette conférence téléphonique. "Quand l'Etat regardera ces objectifs, peut-être parmi d'autres incluant bien sûr la création de valeur, (il) aura peut-être à un moment donné des réflexions sur une restructuration potentielle."Ce qui n'empêche pas le PDG de réaffirmer n'avoir pas été mandaté pour étudier « quelque scénario spécifique que ce soit ».
Restructurer, mais comment ?
Au-delà de la décision de restructuration, contre laquelle les syndicats de l'électricien, qui y voient un démantèlement, sont vent debout, le choix d'un scénario spécifique n'apparaît en effet pas encore clairement.Nicolas Hulot a évoqué le sujet à plusieurs reprises depuis sa nomination à la tête du Ministère de la transition écologique et solidaire. Notamment lors d'un entretien accordé au quotidien britannique le Financial Times en novembre dernier, quelques jours après avoir publiquement reconnu que l'objectif de 50% de nucléaire dans le mix électrique français, pourtant inscrit dans la loi de transition énergétique, ne serait pas atteint à l'horizon 2025.
"L'architecture d'EDF est-elle la bonne pour répondre aux défis du XXIe siècle ? "s'était-il alors interrogé, faisant notamment référence à la nécessité d'accélérer dans les énergies renouvelables.Le ministre est de nouveau revenu à la charge dans une interview au Figaro début mars, à quelques jours de l'ouverture du débat public sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) en cours de révision. Il avait alors qualifié la scission de "questionnement légitime que l'entreprise doit avoir, pour prendre acte de sa diversification", allant "dans le sens de l'histoire."
Le 21 juin dernier, le cours de l'action avait bondi suite à l'évocation par le magazine Challenges d'un schéma élaboré par l'Agence des participations de l'État (APE) qui serait techniquement "prêt à la rentrée". Martin Vial, directeur de l'Agence et représentant de l'État au Conseil d'administration du groupe, avait dénoncé "des rumeurs venant des banquiers " et assuré qu'une scission des activités n'était pas à l'ordre du jour.
Il est vrai qu'en novembre, la banque suisse UBS avait élaboré un scénario fictionnel opérant une séparation entre, d'une part, le réseau, les services clients et les énergies renouvelables, et de l'autre, les actifs nucléaires et thermiques ainsi que les activités britanniques et italiennes.
Précédents allemands en demi-teinte
Une hypothèse de travail inspirée des retours d'expérience des deux géants allemands RWE et E.on, qui s'étaient précisément livrés à l'exercice quelques mois auparavant. Mais, dans un premier temps couronnée par de la création de valeurs, l'opération a ensuite dû être détricotée en raison des difficultés éprouvées par les structures ainsi créées, de trop faible taille pour réussir sur le marché. Suite à un échange d'actifs de près de 20 milliards d'euros, les outils de production de toutes natures sont in fine récupérés par RWE, E.ON conservant les infrastructures de transport et de distribution.Certes, les arguments en faveur de la scission ne manquent pas. Défendue en son temps par l'ancien directeur financier Thomas Piquemal, qui a quitté le groupe en mars 2016 en désaccord au sujet de l'investissement, à ses yeux démesuré, que représente le projet Hinkley Point, cette piste pourrait notamment permettre de réguler la production nucléaire en fixant les prix en fonction des coûts et investissements. À l'inverse, une cotation des énergies renouvelables permettrait de lever plus facilement de l'argent frais pour en financer le développement. EDF est aujourd'hui l'un des premiers émetteurs d'obligations, notamment de green bonds précisément dédiés à ces énergies vertes. Mais certains investisseurs "responsables" rechignent à investir dans un groupe dans lequel le nucléaire demeure aussi prépondérant.
Concernant la régulation de la production nucléaire, certains experts observent qu'il n'y aurait aucune raison de séparer l'énergie nucléaire régulée et les énergies renouvelables, qui le sont tout autant puisqu'elles bénéficient de tarifs de rachat garantis sur une longue durée.
Déjà l'idée d'un ministre nommé Macron
Le sujet de la gouvernance avait déjà été évoqué il y a 18 mois par le ministre de l'Économie de l'époque, un certain Emmanuel Macron, qui dénonçait alors un "statut d'objet coté du nucléaire" non satisfaisant et esquissait une solution consistant à "rompre le lien entre les activités dans le domaine du nucléaire en France et le reste du groupe. "Pour autant, rien ne dit que le ministre de la Transition écologique et le président partagent un même point de vue sur le sujet. Selon la forme qu'elle prendra, cette restructuration reflètera en effet le rôle du nucléaire dans la politique énergétique française. Ainsi, loger les activités nucléaires dans une structure de défaisance - comme celle créée en son temps pour le Crédit Lyonnais - destinée à gérer la fin de vie du parc existant reviendrait à sonner le glas du nucléaire en tant qu'« énergie d'avenir ». Une décision qui ne correspond probablement pas plus à la perception d'Emmanuel Macron qu'à celle de son ministre de l'Économie Bruno Le Maire, qui louait encore récemment les mérites du nouveau nucléaire.
La PPE, qui devrait donner un premier aperçu de l'évolution du mix énergétique d'ici à 2028, vient de voir sa première mouture, initialement prévue en juillet, repoussée à septembre.
Quoi qu'il en soit, on voit mal le gouvernement s'attaquer à ce - délicat - dossier avant d'avoir réglé celui de la SNCF...
@PIALOT1
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Commentaires
Webes a écrit le 02/08/2018 à 9:37
:
En gros, ils cherchent un moyen pour
mutualiser la dette d EDF au budget de l état sans que Bruxelles n
y est son mot a dire.
r2d2 a écrit le 02/08/2018 à 7:25 :
la restructuration est déjà toute
trouvée... tout le nucléaire dans une structure qui va faire
faillite et dont les autres parties ne seront pas responsables.
vu les engagements financiers avec l´epr en France, UK....
edf ne peut pas se permettre d´etre responsable de ces milliards en case de poursuite pour malfacon... et comme rien dans le nucléaire est assuré... cela serait la responsabilité d´edf de faire les réparatations à ses frais...
on fait une structure comme pour la Sncm. et quand cela devient ingérable, on ferme... sans aucune indemnité aux clients...
vu les engagements financiers avec l´epr en France, UK....
edf ne peut pas se permettre d´etre responsable de ces milliards en case de poursuite pour malfacon... et comme rien dans le nucléaire est assuré... cela serait la responsabilité d´edf de faire les réparatations à ses frais...
on fait une structure comme pour la Sncm. et quand cela devient ingérable, on ferme... sans aucune indemnité aux clients...
entourloupe a écrit le 01/08/2018 à
18:54 :
qui ne dit mot consent ! le début de
la fin hélas au mois d aout . ! !. comme sur les rails une réaction
est perceptible en septembre
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