dimanche 5 juin 2016

les personnes et le temps - observations adressées à l'Elysée

Cher ami, Monsieur le Secétaire général,

je me permets de continuer à réfléchir avec vous selon ce que m'inspirent les réunions de café-politique, ainsi ce matin à Saint-Gildas de Rhuys, toujours en Morbihan et avec Hervé Pellois, loyal, tranquille et structurant.




la communication suppose la communion, pas tant celle que l'intervenant qui veut la provoquer chez autrui et en forme d'adhésion à son propos, mais celle de l'intervenant avec celui auquel il s'adresse, même si celui est des millions. Cette personne-là " à qui le discours s'adresse " doit se sentir personnellement concernée par le dire de celui qui s'adresse à elle, quelle que soit la forme - télévision, discours à la nation ou simple rencontre individuelle. Le téléspectateur, considéré comme citoyen, le participant à une réunion prend de son temps, il donne pour aller écouter un politique ou quelque exposant que ce soit sur quoi que ce soit, pour rester devant le téléviseur et sur le bon programme. Intéresser cette personne aux deux sens du terme : qu'elle soit concernée, se sente concernée et pour cela se sente même appelé à compléter. Pas tant à approuver qu'à enrichir.  Et que ce soit intéressant, c'est-à-dire assez universel et assez immédiat.

A contrario, toute communication pour redorer le blason de celui qui parle ou pour promettre ce qu'il ne tient pas encore, suscite - au moins intérieurement - la discussion chez celui qui l'écoute, et pis encore pour l'orateur ou l'intervenant, un sentiment de supériorité chez celui qu'il ne parvient pas à intéresser. Parce que son sort à lui, le politique, le président de la République, parce que c'est trop évidemment le sujet, n'intéresse que très secondairement et en fonction seulement de l'intérêt général. 

La communication pour se faire valoir, pour se défendre, pour se rattraper appelle chez l'auditeur le sentiment d'être juge et le met en situation de rejeter celui qui prétendait convaincre et rallier.

C'est bien ce qu'il s'est passé ces années-ci et particulièrement ces mois-ci. Le pouvoir, au lieu d'animer la nation, s'est mis entre les mains de tout un chacun, et tentant d'être formellement meilleur ou de trouver des mises en scène de plus en plus humiliantes pour lui-même mais conseillées par des marchands, il s'est encore rapetissé au point de ne plus exister médiatiquement. Il n'y a plus qu'un bruit de fond.

Au préalable, la communion, et non comme fin et aboutissement souhaités.



le temps trop court : c'est une perception qui se fait, forte et fondée. Chez les citoyens encore davantage que chez les politiques, parce qu'aucune mesure, aucune orientation ne vaut sans la durée et la certitude de la durée.


Le peu de temps entre chaque élection générale qui couple président de la République et Assemblée nationale. Revenir au septennat. Le commentaire est ensuite : un seul mandat sans être admis à redoubler... sans pouvoir se représenter aussitôt. Ce commentaire n'aurait pas d'argument à l'expérience si, opéré par le retour au septennat, le découplage présidentielles/législatives comme naguère, renforcé d'ailleurs par le retour à la dissolution quand la majorité tourne ou est douteuse, met en cause le mandat présidentiel bien plus souvent que n'a lieu l'élection. Erreur majeure que celle de 1973, consacrée en 2000 : Georges Pompidou pour demander moins en se faisant réélire dès 1974 (Roger Frey nommé ad hoc au Conseil constitutionnel) malgré sa mauvaise santé, Jacques Chirac pour se faire réélire malgré l'âge venant et peut-être un état de santé qu'il savait, mais pas les autres.

La cavalcade s'est accentuée depuis la "trouvaille" des primaires dont l'effet pratique est de multiplier rivalités et courants dans l'opposition, convaincue que l'alternance jouera en sa faveur, et de placer en posture très solitaire le président en place refusant d'être considéré comme un candidat semblable aux autres.

Enfin - je le répète depuis dix ans - comment, avec les échéances, les contraintes, et les diverses  négociations internationales induisant toutes des périodicités, n'a-t-on pas réinstitué la planification qui faisait notre rythme et notre "ardente obligation" depuis 1945. Celle-ci tout naturellement encadrerait non seulement les projections et engagements économiques, mais donnerait force et effet au dialogue social, en le recevant comme partie intégrante de notre programmation nationale. Les commissions du Plan en permanence et sans bras de force feraient le climat et les rencontres. Sans doute enfin : l'inventivité collective, donc consensuelle. Parlement et gouvernement n'auraient plus qu'à consacrer par la loi, ce qu'auraient convenu les "forces vives" du pays, ensemble.  


Comment ? peut-on gouverner, et même sereinement penser, si l'on est prisonnier des communicants, de la pendule et de la fin de partie ? Une issue constamment interrogée à l'avance par sondages. 

Or, nous vivons cela. Cela et le huis-clos.

Pensées chaleureuses en cet après-midi, sans agenda, je l'espère pour vous.

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