«Gilets jaunes»: Macron affirme l’inverse de ce que disent ses services de renseignement
8 mars 2019 Par
Matthieu
Suc
C'est l’histoire d’un président qui raconte le contraire de ce que lui résument ses services de renseignement. La scène ne se déroule pas sur le continent nord-américain mais en plein cœur de la vieille Europe, elle ne se situe pas à l’intérieur du Bureau ovale mais dans un salon de l’Élysée.
La scène remonte à la fin de matinée du jeudi 31 janvier. Ce jour-là, Emmanuel Macron reçoit cinq journalistes pour une « discussion informelle » autour d’un café. Le président de la République est décontracté, en col roulé noir sous un costume gris (comme on peut le voir sur une photo publiée sur le site du Point).
Décontracté et souriant, mais aussi mordant dès lors qu’il s’agit de dénoncer les violences commises lors des manifestations des « gilets jaunes ». À l’entendre, elles seraient l’œuvre « de 40 à 50 000 militants ultras qui veulent la destruction des institutions ». « Face aux violences orchestrées par les extrêmes », rapporte Paris-Match, le chef de l’État « met en garde contre la ‘‘fachosphère’’ et la ‘‘gauchosphère’’ qui ont surinvesti les réseaux sociaux ».
Des propos très surprenants car, à la même période, des notes des services de renseignement remontent à l’Élysée et, selon plusieurs sources, elles disent strictement le contraire. Le week-end précédant la discussion informelle élyséenne, l’acte XI des gilets jaunes a conforté les services dans leurs analyses des précédentes semaines : l’ultradroite se désengage « à Paris comme en province », tant et si bien que la DGSI aurait, selon nos informations, conclu une de ses notes par un lapidaire : « La scène d’ultradroite est aujourd’hui quasi inexistante au sein des cortèges. »
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L’effarement d’un haut cadre du renseignement quand il découvre les propos d’Emmanuel Macron
Peut-être parce que le gros des troupes serait fourni par l’ultragauche ? Eh bien, non. « L’ultragauche s’est impliquée de manière limitée dans un mouvement perçu comme populiste et réactionnaire », écrit-on à la DGSI. « Dès le départ, l’ultragauche était divisée sur la question des gilets jaunes, confirme un analyste d’un autre service de renseignement. On les a vus dans les cortèges mais pas beaucoup. Ils étaient là surtout pour faire des images. » Et, après les débordements des 1er et 8 décembre, la mobilisation des militants serait restée, selon la DGSI, « toujours en berne ».Depuis le début de l’année, la manifestation la plus ostentatoire de la participation des ultras, de droite comme de gauche, réside dans les affrontements, en marge des cortèges entre… les deux mouvances. Comme, lorsque, le 26 janvier, des Zouaves de Paris (ex-GUD) se sont battus à coups de barres de fer avec des militants du Nouveau parti anticapitaliste aux abords de la gare de Lyon.
Des sources dans différents services de renseignement donnent un même chiffre de 300 militants « au grand maximum » d’ultras de droite et de gauche réunis au plus fort du mouvement, début décembre. Désormais, ils ne seraient plus que quelques dizaines. Bref, le compte n’y est toujours pas par rapport aux chiffres avancés par le président de la République.
Interviewé dans Le Parisien trois semaines après la sortie présidentielle, Nicolas Lerner, le patron de la DGSI, reconnaissait qu’« à aucun moment les groupes ultras n’ont réussi à prendre le leadership sur ce mouvement ». Mediapart a demandé, jeudi matin, à l’Élysée sur quels documents, sur quelles bases factuelles Emmanuel Macron s’appuyait pour décrire un mouvement gangrené et piloté par les deux extrêmes. Le service de presse du chef de l'État ne nous a pas répondu.
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